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V
1
■I
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HISTOIRE
DE
S A L A D I N.
tome second;
« * #-* \. .. *
HISTOIRE
D E
SALA DINs
SULTHAN D'EGYPTE
ET DE SYRIE:
AVEC
Une Introduflîon , une Hiftoîre Abrégée de h
êge
ilac
phi
Par M. M A R I N.
DynaiHe des Ayoubites fondée par Saladin , des
Votes Critiques , Hiftoriques , Géographiques , &
quelques Pièces JufHficatives.
Quîs ncfcit primant effi Hiftoria legem , ne quli
falji dicere audeat ; deindè ne quid veri non
audeat? Cic. de Orat. 1. IL
TOME SECOND.
A PAR IS,
Ckez Tilliard, Libraire , Quai des Auguftins,
à l'Image Saint Benoît.
M. DCC LVIIL
AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE.
*
>
::■. j
\
rjtxxxxvyïiooçKxy^
SOMMAIRE
DU LIVRE SEPTIEME.
Raymond £omie de Tripoli &
Zujïgnan Roi de Jérufalem
Je réconcilient & marchent con-
tre les Sarrasins avec toutes
les forces du Royaume. Le
premier dorme un confeil fa-
lutaire qui ejl rejette. Célèbre
bataille d'Hittin ou de Tibé*
riade qui décida du fort de la
Palatine. Mçrt de Raynaud
de Châtillonr Obfervation fur
le crime de trahi/on & d'apof
tafe 9 dont on vccufe le Comte
de Tripoli.' Sa mort. Saladinfe
rend maître de Ptolémaïs & de
plujieurs autres Places. Conrad'
de Montferrat arrive de Conf*
Tmcll. "A
tantinoptë y& fauve là ville de
Tyr dont Û f* fait dormer h
Souveraineté. Saladirt jtrend,
Afcalon & marche contre Je-
rufalem. >
• - ' ' r s.
Ne B. On conleiHe au Letteur de
ne lire les notes de chaque Livre f
qu'après avois lu le li^reea entier
HiSTOlKM
DE
SALAplN
Sulthan d'Egypte & de Syrie.
Éilfi i yn
Hég. 5S1;
J.C. ««7.
;livre septième. ,
*■* *• s~ " '- "' " — - ' ■ • ' ' ' ' - l IJJg
À Y MONO & Lufenan
entrèrent dans Jéruulem
aux acclamations de tout le
Peuple. On tint un Confeil
géairgi fiir îef parti qu'on avoir à
prendre dans ces trrftes conjonéhrres.
LWniôn qui prévint , fut * aflem- Cont/Cuill#
bler une armée auffi nombreuie qu on chron ten»
le pourtoit, dans la Galilée, par où il Sana«» **
paroiffoit que te* ennemis ▼puloient
Aij
sjhr^ - ***' **
N
V
HISTOIRE
DE
SALADIN.
TOME SECOND;
♦ S"
A ~ *~L, JL~ W
HISTOIRE
D E
SALA DINs
SULTHAN D'EGYPTE
ET DE SYRIE:
4 V E C
JJne Introduction , une Hiftoire Abrégée de 1»
Dynaftie des Ayoubites fondée par Saladin , des
Notes Critiques , Hiftoriques , Géographiques , ÔC
quelques Pièces Justificatives.
Par M. M A R I N.
Quîs nefcit primant effi Hiftorût legem , tu quid
faljî dictrt audeat s deindi ne quid veri non
audcat? Cic de Orat. 1. II.
TOME SECOND.
A PAR IS,
Ciez TmiARD, Libraire , Quai des Aaguftîns,
à l'Image Saint Benoît.
M. DCC. LVIIL
L
AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE.
10 . Hl STO *M f
g » (4) cette multitude d'hommes & é$
j. cfus^ » chevaux dans un ter rein fec & ad-
n de * ou vous n'aurez pas moins à voç $
m défendre contre la fbif % que concrf
t>vos ennemis. Repofez- vous fur lotr
agueil 8c la témérité des Mufulmans»
i» Eny vrés de leurs fucccs , ils ne man»
0 queront pas de venir vous chercher ^
# & alors ils auront à craindre les mer
innés dangeis auxquels vous. vous ex-
m poferiez en marchant à eux* Ils.*rri*
lèveront exténués par la difette d'eaif
» & par la fatigue. Nous les attaquer
j> rons fans leur donner le tems de (ç
iffepo&r^pc nous difliperons facile-^
M ment des Soldats à demi-vain eus. 0$
h pourront-ils fe réfugier dans leur dé-
» faite? Nos payfans les écraferontg
■ m coups de pierres du haut des mont^-
»gnes; les Peuples de la Galilée a r-
*' , . » rêteront les fuyards , & ces malheu-
»> reux trouveront fur le bord du Joue-
Hdain , de nouveaux ennemis & de
n nouveaux périls; au lieu que*'ilf
* remportent la viétoire, ce qu'à Dieu
h ttç plaife , notre retraite eft aflurée.
n Nous pourrons fauver les débris d£
j ' ■ ..il iff
(#) Dans les premiers jours de JuiUeu > <
ht Sàlàbïh. Liv.VII. «
l» notre armée dans les villes & les for-
*tereflè$ dont nous fouîmes environ-
Plus le Comte paroiflbit généreux*
moins on le croyoit fincére. On ne
put oppofer dçs raifons à Ton avis, on
y répondit par des injures. LesChré*
tiens ^>ar un aveuglement qu'on pour*
roit peut-être comparer à celui des
Troyens touchant les prédirions de
Caflàndre > s obftinoicnt à regarder
Raymond comme un traître , & à re*
jetter Tes confeils. Le grand Maître
des Templiers fut celui qui garda le
moins demodérationdansxesdifcours*
Il reprocha publiquement au Comte
d'être d'intelligence avec les Sarrazins»
&de rechercher plus par fès a vis per-
nicieux la honte & la perte des Francs,
que leur fureté. Raymond à qui il ne
reftoit pas même dans cette accufarioa
tnjufte , le pouvoir de fe venger fans
fe rendre coupable du crime qu on lui
imputoit , prenant le Ciel à témoin de
(on innocence, n'avoit que la confo-*
lation d'un honnête homme calomnié,
le témoignage de fa propre confcien-
ce. Il prédit aux Chrétiens tous les
malheurs dont ils alloiept être la câu*
t% : .Histoi'k*
fe , & fe retira dans fa tenté plein d'il*»
■Hrs \\**l dignation, & réfolu de prouver à ce*
ingrats par fa conduite >la témérité de
leurs foupçons.
Cependant les Barons les plus Ceri»
fés & les moins prévenus .dirent qu'il
falloir difcuter les raifons du Comte
Tans lui prêter des motifs criminels.
Après l'examen , ils convinrent de la
folidité de Tes réflexions, & ramenè-
rent l'affemblée à l'avis qu'on venoit
WL de profcrire. Le Roi incapable de
prendre une réfolution par lui-même *
fut entraîné comme les autres , & on
arrêta qu'on fe tiendrait à Séphoarû
Mais le maître des Templiers qui
croyoit voir (on humiliation dans le
triomphe de Raymond,vint la nuit au*
près de Lu(ïgnan,& employa toute fort
adrefle pour le faire changer une fé-
conde fois. Il luiperfuada que les con-
feils du Comte etoient d'autant plus
dangereux, qu'ils paroiflbient falutaL
res ; qu'on devoit fe défier d'un traî-
' rre , furtout lorfqu'il feignoit le plus
. de zélé pour le bien de la patrie: que
Raymond tramoit fecretement quel-
ques mauvais defleins ; que le feul
moyen d'en prévenir les fuites, étoit
»e Sàlàdim. Liv. VII. i)
die faire précifément le contraire de
ce qu'il propofoi t. Le Roi céda de nou- }*£ f J{* ;
▼eau par foiblefle , 8c dès la pointe du ' *
jour il fit marcher l'armée. On eut
beau lui faire des repréfentations , il
voulut être obéi , & malheureufement
H le fut pour la première fois. On mit
à lavant - garde, le Comte qui ne
youlant point abandonner la caufe
commune , alloit chercher dans les pé^
rils la gloire & fa juftification. Le'
Roi étoitâu centre avec la vraie Croix,
& les. Templiers formoient l'arriére-
garde. ' <
. Saladin averti de ce mouvement,
biffe la fortereiTe de Ttbériade blo-
quée, .revient au camp ,- détache dif-
fërens corps de troupes légères pour
arrêter les Francs dans les défilés , où
les inquiéter dans la route, & va lui-
même à leur rencontre avec le gros
de l'armée. Les Chrétiens ne furent cont. Guffl.
pas longtems ians s'appercevoir &• Ce ^°n. tnr«
repentir de leur faute. A peine eurent- Boha-eddi».
ils quitté Séphouri , qu'ils fe virent har- Schéik ****•
celés de tous cotés-, il leur fallut dit'**
I)uter tous les paflàges. Les vivres &
'eau leur manquèrent à la fois. Les
Spldats obligés continuellement de fé
1.4 HlSTOlK/*
' défendre * fe traînoient avec peine ,
zfe *|5 * repofoient àchaquepas.Le Corn*
- ** *" ce qui avoir prévu ces malheurs veur
les réparer. Il fait dire au Roi que le
ffeul moyen d'éviter une ruine totale,
étfMt de gagner le Jourdain ou Tibé-
riade avant que les ennemis enflent
eccupé le chemin , qu'il falloit les pré*
venir par une marche forcée , & que
£ on (elaiiloitfur prendre dans ces dé-
troits difficiles , otr ne pourrait plus en
fyttu. Lufignkndclibéreibr: cet avis
Îjuil croit iufpoft , fe détermine à le
uivre , &prefle les Soldats. Maisplu-
fjeurs partis de Sarrazins tombent fur
t^rriére-garde. Les Templiers , les
ifcfpitaliers & les Turoopies .s'y dé-
fendent avec courage , & demandent
<Ju fecours. Lé Roi pour les protéger ,
ordonne fur cette nouvelle aux trou-
pes de faire halte & de d refier le camp.
.,. ... On étoit pendant ce tems.là accablé
de traits- & de flèches. La nuit qui fur-
t vint , fut aux Chrétiens d'un foible fe-
cours y ils la paflerent fous les armes t
& (ans prendre aucune nourriture.
: Le Vendredi quatre Juillet r vingt-
trois de Rabi-el-aker, le Comte par-
tit le premier avant l'aurore , dans le
de SAÉA:DfK. L iv. VII. ff ^^^m
àeSem de Rapprocher du 'fleuve. Le ^^^^;
Roi le furvic ârf moment après fc, mais J.c. u«£
dès qt^bn pardt'daiis îaf plaine^ ort
rthééhtra rarm*^ ;ft^îrfabte;éfe Sa*
ftfcfih ; rangée^ât tJtd?e d£bateifre; té
SbkHarî (fe wrtdtihSt^àn^cêÀébçâ^
ftoni avtemiéHà&ifeté ég^le àTïmpn*-
dèhcedcsChcétîèris. Ifvbulfïtèri qùèl-
^èer forte Vaflbrer dé* 'fit proVe , W
âfattrccPurt Vèu\ ikmpl^iMantè^ti
F* anès. • D'alkfrd'iî; YtSr Rvtcmnéi ; &> iwa.
hS eri^fotttïa de totlteis parts ' > - afin £j£». ""*
éjtr-aucutr tf éjAapât. Enfuïteil les hii> Boha-«L
éèlacoritihuillemehr fanserjgager une?
à&ftèn générale. Ce* dètits^cdmbats en
fc&'âflToifefiïMït ,: prédàrblérie Ifcur tfé-;
fiîWeiittère;Il'pehfo«;qtie plus Jlftfîf-
fiSeroît là bataille ,- m&in? Wl&ôfttrf
é# état de !£ fôutemr. Il-etopfoya'fiir-
mutfavec'fîiecès fes Àrichets' nàWles
àrrirer de l'arc. Ceux-ci comme les
ancien? Scythes rombolent avec im-
ruofitç tantôt for les ailes , tantôt fur
front de l*armée des Chrétiens peu
accoutumés à ce genre de guerre , &,
tt retiraient avec la jnêmç yîteffev
dès qitf ilsavoienéfcancé leurS^fléçhes.' »
Hs portoient de loin là mort & le dé»--
fefpoir dans tous les rangs , fans erain*'
dre les traits des ennemis.
Lufignan pour remédier un peu 4
H6g. 5*j. ce malheur , met fon Infanterie au
• g- 117. ^ltrc f enla couvrant par la Cavale*
rie» qui éçartoit les Archers des Sarra-
zins. On s avance dans cet ordre pour
joindre le Comte Raymond qui ça-
gnoit toujours du terrein , & qui plus
expofé dans fou avant-garde, fe bat*
toit le labre à la main , & fit dans cette
journée des prodiges de valeur , de l'a-*
. . veu même des -^uteurg ^abes. Vin*
g -v ,\ Émrerie pétant reflerrée pour préfen^
. '; ter moins de furface , .lç trouva par
ce mouvement auptxs de la montagne
d'Hittin. (4) Un Farjtaflîn montrant.
cette montagne à fes. camarades corn-
x me un lieu ae fureté» s'écrie en y cou*
idintifauvons-nQHi, fauvons nous, ré*
pètent tous les autres, & grimpent au
ibii. tommet. Le Roi les prie inutilement
% ■■ i • ■ 1 ■ ■ ■ • ■■• »^
. (à) Hittin ou Hattro montagne , *infi noaW
mée du Village d'Hittm. Çlle eft a un mille
Sf. à l'Occident tde Tibériade. C'eft peut-
être le Thoron. . Auprès d'Hittin il y a un
autre village appelle hajar où lesMufuimàns
révèrent le tombeau de Schoaib , c'eft-à-dire;
de Jethro beau-pere <# Moue. Il mettent
Jethro au nombre des Prophètes, & difent
<p*îl fut envoyé aux Madianites.
de
pb Saiadin, Lïv.VII. t7
de revenir. Comment , lui difent-
ils, voulez-vous que nous puiffions j4Hé£rcx$*'
combattre ? nous mourons de faim ,
de foif & de chaleur. Les Evo-
ques crurent les ramener à l'obéif-
fance par les motifs de la Religion.
On répondit à leurs exhortations en
demandant de l'eau & des vivres. Lu-
Cgnan fort embar rafle dans cette xon-
jon&ure , eft obligé de s'arrêter pour
ne pas perdre la meilleure partie de
fes troupes. Il forme une efpéce de
camp , placeau milieu dans un endroit
élevé la vraie Croix , & i! invite tous
les Soldats de Jefus-Chrift àfe ranger
autour de ce faint étendard prêt à
tomber entre les mains des Infidelles.
L?ardeur des Chrétiens fe réveille à la
vue de la croix. Ils accourent en fou-
le , mais (ans ordre , tout fe mêle , Of-
ficiers, Soldats, Cavaliers & Fantaf-
fîns qui defcendent de la montagne;
I/arriére-garde arrive , & ajoute en-
core au détordre commun. Mais le
Comte qui alloit toujours en avant ,
ignorant ce qui fe pafloit derrière lui t
fit fëparé par cet accident imprévu
du corps de l'armée. Saladin profité
de la confufion qui régnoit parmi les
Tome II. B
18 Hinouï
Francs > & les attaque de toutes parts.
j^,***; Ces malheureux épuifent ce qui leur
* refte de forces pour fe défendre. Ils
tombent autant de laffitude que de
leurs bleflures. La nuit retarda leur
ruine de quelques heures , fans leur
donner aucune efpéranoe de falut.
Enfin , il parut ce jour fi funefte à la
Chrétienté. Lé Comte fut étonné dès
le matin de ne plus voir les Chrétiens,
& de ne découvrir autour de lui que
dès Infideltes placés à différentes diC*
tances. Us comprit que tout étoit per-
du. Il ne lui reftoit pour reflburce , que
de fe foumettre ou de vendre chère-
ment fa vie j mais il prit une réfblu*
tk>n bien plus hardie , celle de fé
. fauver avec (on avant-garde à travers
l'armée ennemie- Après avoir infpiré
aux Officiers & aux Soldats l'eipric
dont il étoit animé , il s'élance à leur
t&e contre les Sarrazins. Ceux-ci s'ou-
vrent pour le faifîr en fe reflerrant.
En effet, cette petite troupe fut tout-
à-coup enveloppée. Raymond fans
s'épouvanter du nombte , poufle fon
dieval à toute bride , écarte avec fa
tance tout ce qui s'oppofe à fon paffa-
ge , renverfe les Mufulma ns furpris de
DE Sàlàdin. Liv. VIL If
tant de témérité , fe fait jour , & prend *\ *
la route de Tyr , long~tems pourfirivi jj^jj^
par les Mameluks. Ses gens furent
prefque tous ou tués ou fai ts prifon-
niers. Il s'échappa heureufement avec
BaléanouBéliiànd'Ibélim, Raynaud
Prince de Sydon , le fils du Prince
d'Antioche& quelques autres Officiers
qui avoient partagé Tes périls Se fa
gloire y ayant couru, tous enferable à
cheval dans des chemins impraticables
au milieu de montagnes & de précipi-
ces affreux. .
Saladin avoittenu les Chrétiens en
allarme pendant toute la nuit pour les
empêcher de prendre du repos. Ils
différa le lendemain de les attaquer
jufqu a ce que le Soleil dardât fur eux
fes rayons brûlans. Ils poovoient à ibîj«
peine fe foutenir & porter leurs ar-
mes , tant ilsétoient affoiblis par le?
travaux & par les veilles.Pour augmern
ter encore leur mifére & leur impur f-
fance,' le Sulthan fit mettre le feu à.
des broulTailles épaifles qui cou-*
vroient cette campagne deffèchée. La
flamme pénétra }ulques dans le camp ,
fous les pieds des hommes & des che-
vaux. Dans le tems que les malheureux;
Bij
>o Histoire.
^^~ Chrétiens épuifès par les farigues>raott*
J. c. 1187. rant de foif , étouffés par Ta fumée»
brûlés par le feu & par l'ardeur du fo-
. lèil , levoient les mains au Ciel , &
gémiffoient de rant de maux , Saladin
tomba fur eux avec fureur , ordonnant
à fes foldats de jetter tous enfemble
& par intervalle des cris horribles»
Les Francs qui n'attendoient que la
mort, la reçurent prefque fans fe dé-
fendre. Les Templiers Se les Hofpi-
taliers trouvèrent dans leur défefpoûy
des forces que la nature leur refufoit.
Ils firent des efforts de bravoure qui
ne fervirent qu'à rendre leur deftin
Î>lus cruel , car ils furent tous égorgés
ans pitié après la bataillé. Tout le
refte demandoit à genoux la mort ou
l'efclavage. Les Infidelles gravirent
fur le Mont Hittin , furprirent ceux
qui s'y étoient fauves , & les précipi-
tèrent du baut des rochers. Jamais on
ne vk une déroute fi complette & fi
affreufe. Il y périt du côté des Francs
trente mille hommes de troupes ré-
glées > & les Ma ho me tan s perdirent
très-peu de monde. L'épouvante des
Chrétiens étoit , telle qu'un feul Sar-
razinen faifoit fuir des bandes ewé*
BE Saladin. LlV.VIÏ. IX
*es. On vit un fpldat Turc qui en
amenoit trente attachés à une corde, j^'jtj',
Kuffin Evêque de Ptolémaïs armé
d'une cuirafle , fut tué en ponant la
Croix ; Ton frère Evêque de Lidda
releva cet étendard réfoeâable & prit
la fuite > mais il fut bientôt arrêté,
Téki-eddin Omar neveu de Saladin,
eut l'honneur de faire le Roi prifoiu
nier & de prendre la?Croix. Il dit en
la prcfentant à fon oncle : n il parort •
» par la défolation des francs , que ce
» bois n'eft pas le moindre fruit de vo*
» tre viâoire.* Cependant Saladin fit
ceflèr le carnage.
Tandis qu on pourfui voit les fuyards
& qu'on mafTacroit par une barbare
politique, les Chevaliers des deux or-
dres ennemis implacables des Maho*
métans , Saladin fit drefler à la hâté
upe tente au milieu du Champ de ba»
taille, & amener auprès de lui les
principaux prifonniers. Ces pnToo»
niers étoient Gui de Lufignan , Géo£» ,
froi de Lufignan fon frère nouvelle*
ment arrivé en Paleftine > le Prince
Raynaud tie Châtillon , le jeune Hon-
froi du Thoron , le vieux Marquis
Guillaume de Monferrat > le fils du
*t ' . Hl STOIEI
Comte de Tlbériade , les deux grand*
Hég. îj3. Maîtres, plufieurs Evêques & quek-
y. c. 1187. rtfc t 2 1 l
/ ques autres Barons. Le Sulthan reçut
lé Roi avec bonté , le confola de fa
difgrace, le fit affeoir à fa droite , 3c
s'entretint avec' lai par le moyen* d'un
Cont.Guiil. interprète. S étant apperçu que ce
ckroLdT«r* Prince ctoit fort altéré , il ordonna
$an&*. qu'pn apportât une boiflfon rafraîchie
Xcqmvtt. dans de la neige. Après avpirbû. Lu».
***£• Hyétof. fignan préfenta la coupe à Raynaïut
Abouîi." arrêtez , lui dit Saladin , fe ne. veux
*c. point que ce perfide boive en ma pré.
ience,car je ne puis lui faire grace.C*-
toit une loi de l'Hofpkalite inviolar
biement obferséc p^c les Arabes ,
d'accorder tonte fureté. à ceux des prà-
fonniers auquel* ils avaient donne à
manger ou à boire. » Enfin , ajouta le
Sulthan en sadrefiant àChâtillon , » le
•> Ciel vengeur des attentats , ta mis
s» enma puiftance. Souviens-toi de tes
» infractions aux traités, des cruautés
»» exercées envers les Mufulmans mê^
, »> me en tems de paix , de tes brigan*
»dages , de tes blafphêmes contre le
*> Prophète, de ton entreprife facri-
» lége contre les deux Villes Saintes
»dela Mecque £c .de Médine. Il eft
S* SA1AD1H. tïT. VII. %f
»tems de punir tant de crimes , & '
» d'accomplir mon ferment. Je lai j^VJ*
»juré, tu mourras de ma main. Ce-»
» pendant il te reftë encore une ref*
» four ce pour éviter la mort , c'eft
>» d'embra(Ter ma Religion que tu vou-
» lois détruire. « Le Prince de KrakT
indigné qu'on le crût capable de cette
lâcheté , ofa braver Je Sulchan par des
paroles fiéres 6c outrageantes. Salàdin
emporté par la colère, feieverle£ifit;
le traîne au milieu de l'Aifemblée « ôc
Tétend par terre d'un coup de fabre.
Sa tête (anglante roula jufques au pied
du Roi qui pâlit de frayeur , crai±
gnant le même fort pour lui-même*
#Raffiirez-vous, lut dit le Sulchan*,
ôla perfidie ne retombe que fur fou
h auteur. Je me venge d'un traitre ,
»mais je fais refpefter les droits de
» l'humanité envers ceux qui ne l'ont
» point violée, ce En effet il traita ce
Prince & les autres prifônniers aveti
des égards & une poiitefle qu'on nô
connoifToic pas alors > même dans le*
Cours les plus policées de l'Europe*
Cette bataille mémorable qui dé-
cida du fort de la Paleftine , fe donna
le famedi cinq Juillet, Yingt-q uatre de
*4 HfsTOlkB
Rabi-el Akher. Elle fut appellée patf
J.C.1U7! les Chrétiens, bataille de Tibériade
& par les Arabes , bataille d'Hittin ou
d'Hattin , parce quelle fe donna à un
mille de Tibériade & dans le voifi-
nage du village d'Hittin,
Le Lefteur eft fans douce impatient
de {avoir ce que devint après la ba-
taille de Tibériade , le Comte de Tri-
poli rendu célèbre par la haine des
Francs & par l'injurcice de la plupart
des Hiftoriens,
Il s'étoit fauve à Tyr avec ceux quf
l'avoient fuivi , mais ayant appris que
Saladin maître de la Galilée , mar-
choit vers les Côtes de la Phénicie , il
5 embarqua pour aller défendre fa
principauté. Arrivé à Tripoli , il fut
attaqué d'une maladie mortelle caufée
par la douleur de voir la terre Sainte
Îrête à tomber entre les mains des
nfidelles , Se par le défefpoir d'être
foupçonné de trahi fon par ces mêmes
Chrétiens pour lefquels il s etoit facrk
fié. Son caradére violent & farouche
fe changea en une mélancolie fombre
6 noire. Ses chagrins trop réels,
allumèrent Ton fang & altérèrent fa
raifon. Il mourut dans un accès de
frénéfie
ht Saiaêin. Liv. VII. 15
fténéfie , malheureux de perdre la
▼ie & fes Etats , plus malhèureuk en- H£g. v|*-
eore d'avoir perdu dans l'opinion des J* c' ll u
hommes, l'honneur bien plus précieux
que la vie & des Etats.
Il defcèndoit en droite ligne de ce
fameux Raymond de Touloufe » à ht
valeur duquel les' premiers Croifés
durent principalement leurs conquê-
tes » & il étoit le plus proche héritier .
du trône» au défaut des deux Cœurs S y*
bille & Ifabelle , filles du Roi Âmau>
■■ *■ 1 1 1 - 1 1 1 ii , i»
(a) Raymond I. Comte de Touloufe laiflk'
fit Comté de Tripoli à Bertrand fon fils. Ce-
lui-ci eut pour Succëfleur Ponce de Touloufe
fon fils qui époufa Cécile, Veuve de.Tan^
créde & fille de Philippe Roi de Francè,& de
Bertrade de Montfort, laquelle avoit éû de:
Foulques d'Anjou fon premier mari, le jeune
Comté Foulques qui fut Roi de Jérufalem;
Ponce eut de Cécile Raymond II , neveu-dit
Roi Foulques dont il devint en même teins
le beau-frère en époufant Hodièiuie , Odiart
ou Aldéarde , fceur cadette de la Reine Mé-
liiànte , filles Tune & l'autre clu Roi Bau-
douin IL & cette dernière femme du Roi
Foulques, Raymond IL eut pour Succéfleur
fon fils Raymond IUde Touloufe, Comtéda
Tripoli dont il s'a&t ici. Raymond HL avoit
%8 His?6ïHfc
Hé % Je ne f§étends pas diffimuler ici Ici
j. ^iiV7V défauts & lesvicçs de Raymond > ni
juftifier les démarches injuftes & cri-
minelles dans lesquelles il fut entraîné
par l'ambition 8c la colère , pa/Eont
fuficftes dont les grands hommes ne
font que trop ftifcepribles» Mais je fê-
tai flatté de détruire le reproche d*a-
poftafie fait à fa mémoire , &c per-
pétué par la malignité ou l'ignorance
do phi$ grand nombre des Ecrivains
anciens , fidellemenr copiés pat les
Hiitoriens modernes , (a) qui faute dé
Cf l€KH)£) ftOttS Ottt tFftfnflHS CKH15 lCUffS
wvrages , tam de menfonges & fi peu
de vérités.
On a dk (V) que torfque Lufigna*
fut couronné > Raymond fe liguai fe-
frewroent *vec Saladin , qu'ils juré^
cent cette alliance en buvant du fang
btniiara $ que le Salthan lui promît le
fcu Jli IJUlll 'I"
donc pourtrifey'eul Raymond I. H étofr pat
ftm père çoufin.iifii de germait! , & par fa
«îere coufin germain du Roi Amaury père <Je
ta Reine Syttlje. U laifla Ces Etats, au fils dv
Comte d'Antioche.
(a) Généralement tous ceux qui ont écrit
•les Croifades.
(bj Voyez la plupart desHiftoriem,
(?)
ferle
deSàiàdî*. Liv.VII. *7
Itoyaume de Jérufaiem pour prix de
k perfidie; que le Comte embraflk jj^f ,î2£
dès-lors la Religion Mabometane , fc
ic circoncire , & cacha fi bien fes mei
faefr, <pie perfatné* ne tes devina ;
pas même la C&mtçSt fa femme ; que
peo de jours après dans le combat
donné encre les Chevalier* des 4««
Ordres & Afittat^, Raymond coin*
battît mafqué Contre le grand Maître
de Moulins & le tcia de & propre
maiô ; {4} qu il Te réconcilia en appa- .
renée avec Lufignan 3 pour le tromper
plus fixement 5 qu'il conièîlla au Sul-
than d'attaquer Tîbéiîade, 8c en me.
thé teins aux Chrétiens d'aller défen-
dre cette yille ; qu'il conduifit ces der-
nie« 4aas des défilés impraticables,
que chacune dé Tes démarches étok
une trahifon -, qu'un moment avant la
bataille , les Sarrazins s'ouvrirent peut
le Uiffer pallet} que retiré enfinte à
Ttifoli , il fomroa paladin de tenir fa
parole, & que trompé dans fes efpé-»
tances , H en mourut de chagrin. Plu*
fieurs aflùrent qrfîl fut frappé d'une
malade bpnteute en punition de fon
(tf)Alberic des Troisfont. Liv. ÏILdfe. u-.i
Ci)
i8 HiJTomr;
H, g apoftafie , & d'autres : qu'il mourut
*• cf 1**7! ^ans ^e& douleurs violentes, caufées
' pat l'opération qtfon lui ;av(rit faite;
(a) Enfin on ajoute qu'on découvrit
fur Ton cadavre lès marques récente*
delà circoncifion,&c. (è)
Ces Ecrivains dont les ouvrages (ont
remplis de fables abfurdes , eux qui
voyoient tant de chofes roçrveilleufes ,
(a) Dolore ex pruifis genïtalibu*. Hérolct»
Cont. Guill.
(b) Res dijpmulari v*n pâiuit , nsm eorpôtê
defundi rntdato , qui* nupir circumcifionh
ftigma fufiepetat * dpp*ruit. Nangis ad an»
1188& aHbi. Dans le fpeculumHiftorialedfi
rinc. on lit : Et divènitus extinâm , inve-
nUur , apptrHitqùeftïgm* drcumcijîintsquo'4
récente r fufeepèrat > &*- Voici un fait mini*
culeux dont qn ne fe feroit pas douté , & que»
ces Auteurs graves ajoutent pour rendre
apparemment leur témoignage plus digne
de foi. Ah ipfi *ut€m *nno Qçminï 1187,.
yuo Crux Domini capta efi , infantes qui
Jofte* n*ti funt , non nifi 10 **>*( a a ***nt**
abent , cutn antek 30 "vel 33 'hdèere folenè»
C*eft-à-dire , les enfkns qui naquirent de-
»uis cete année 1 187 , àkquelle la Croix da
>eignèur fut prife 7 n'eurent plus que ao ou
a 2 dents. Ils en avoient auparavant 30. ou 33»
Cela n*apas duré long-tems, & les choies
en font heureufement revenues à leur pre*
iverétav • '
1
HE $J#LÀDIN, LiV.VII. If
n'ont pas vu que la plupart Je ces ac-
cufations portent par leur ridicule , un ,H*fr f *'•
caraûéredekufleté. J-c «.i7.
Dans la fuppolïtion de cette intel-
ligence fecrete , étoit-il de l'intérêt du
Comte de mettre tout Ion pays en cen-
dres ? Nauroiùon pas commencé la
guerre d'un autre côté ? Pourquoi' le
Vainqueur porta-t'il le fer & la flamme
dans les/ campagnes , dans les villes ,
dans les bourgs de fon Àllié,fans épar-
gner la Capitale qu'il détruifït prêt-
qu'entièrement > Les cruautés exercées
danscette'malheureufe Province avant
& après la bataille deTibériadè,étoienc-
elles également concertées } Entroir-il
dans le plan . de Raymond & dé Sala-
din , de rendre inhabitable uae Prin-
cipauté qui appartenait au premier ?
S'il eft de la prudence de ménager les
villes conquîtes, lorfquon-efpére les
conferver , par quelle politique un
Prince confentiroit-il à la mine totale
de Tes propres Etats ? Comment la
Comtefle de Tibériade ignora-t-elle
les liaifons de fon mari , & fut-elle ex-
pofée aux outrages des Sarrazins? Les
Officiers qui fervoienr dans l'avant*-
garde , le Prince de Sidon , le fils du
C nj
|o . His x o ut .
Pimœd'AfttioclK f le jeûne Hogoês
né* f*j- (te Txbéâàde qni fe fouvétent tous pas
j. c. ti«7- ja f^jte avec je Comte ^étoient-ika»
taot <te trahie** dtypftati? Aucun
4'era cependant ne fe mira cfacz tëi
IafideUe»>a|ucotr4'euai n'accafa Ravi
moffd* (*) La tirconoifioaà hqudld
ii (e fournir» rie lui cauf* donc auenne
indifpofirioû ïOn »t s'en appesçuft
qu'après fa mort y & l'Hiftoire qui
/occupe de lai • depuis ce prétendu
traite , «dit p*$ qu'il tôt uninfb«
malade, & le reptéfeme au contraire
comme occopé, pendant cet intervalle»
des exercices les plus violen&Uneopé-
tation fi délicate, ne l'empêcha donc
point de monter à cheval , de faire de*
marches forcées , de combattre , db
courir à toute bride ? Les douteuse fe
sévefllérem préctfémem lorfque le re-
pos lui permit d'y être fenfible»
D'ailleurs les témoignages de tous
ces Hifloriens pourraient a la rigueur
fe réduire' au témoignage d'un (èul ,
dont les autres oncfouvent répété mê-
me les expreiïïons. Ils paroiiTent fi
(a] L'accofttion ne fe ferma &ne fefoutint
que parmi les créatures de Lttfigtiaik
de Sàlàuin. LiV.VIL ft
peu inftririts , qu'ils ae s accordent ni g
far le tems , ni Lur h genre de la mot t j, c. i W7\
éa Comte. Les uni le font mourir
d'abord après la bataille de Tîbériatfe»
les autres «près la prife de Jénifalén*
Outre ce que nous avoiisdit plus haut»
les uns racontent efteorte qu'il fut
étouffé dans ion Ht par les Citoyens
qu'il vonfofc forcer à fe rendre * les '
antre» qu'il fut aflaffiné par les Emtft
faire* mêmes de Saladin, (m) Ce H'oft
pa* là la fente cftntradtâdo» qu'on
jmiffe leur reprocher « Dans le tern*
qu'ils aceufent Raymond > ilsavooent
que d'autres le juftifienr ; tantôt ib le
louent > tantôt ik te blâment. lis
conviennent des avis fàhitaires qu'à
donna avant la bataille dfe Tibéria*
de ^ & m'ont giridé eux - mêmes
dans le récit que j ai fait de cette ac*
jion. Q>) Le grand Maître des Tem-
pliers, un des plus ^ran<3s ennemis
i » i li • nli n ii ii >y
(à) Voye* entr'autres un certain Hérold ,
Îi'oa appelle te Couttuiuattur de GtrilL d*
yr , Auteur moderne cp)e~ nos Hiftorierâ
ont fbm, fit qui a ajouté a»* attàtimes ef*
reurs , dés ensuis nouvelles»
(b) Voyei Chren. Terrât Sanô*. Radulpha
Coggeshal & an autre , 6c le véritable Coa*
C iiij
51 Histoire
du Comte , ne parle pas de cette fta-
jî*c VÎ87. ^on » en écrivant au Pape les détails
de cette fatale journée. » A peine, dtt-
»>il , Raymond , le Prince deSidon &
» d'autres fe fauvérent du malheur
» commun ; «4 (4) mais ce qui doit di£
fiper tous les doutes , c'eft l'autorité
des Auteurs Arabes. Ils difent avec
quelle intrépidité il combattit : ils di-
fent qu'il fe fit jour l'épée à la main ,
& fut long-tems pourfuivi. Ils difent
qu'on ne ravagea Tes Etats , que pour
le punir de fon infidélité. Ils le repré-
fentent comme traître à l'alliance qu'il
avoir précédemment contraétée avec
eux , & comme un de leurs plus grands
& de leurs plus cruels ennemis. Ils fe
félicitent de fa mort : » alors, s'écrient-
» ils , liflamifme n'eut plus à redouter
tinuateur de Guill. de Tyr. Ces deux Au-
teurs fe trouvent dans la colle&ion des an-
ciens manufcrîts faite par Dom Martene.
ia) Cum infcâpulis fejjimis nos induxiffent.
(Turci, ) iù nos turiter expugnaverunt ut
S*n8â Crue* ff? Kogi noftro capto , & omni
nofir* multigaine interféra vix Cornes Tri-
folitanus éf Dominus Raynsldus Sydonius ,
de mifetabili Mo campo évader $ potuèrint ,
fcc Annales de Godéfroi ad ann« 1 187.
*i Saladim. Liv. VIL j$
feles artifices, la fraude & la malice de
»cet homme, h (a) j?c?iî$£
Je fuis fi fouvent forcé par les de-
voirs que m'impofe la qualité d'Hi£
torien de dire du mal des Francs > &
<Pen dire beaucoup, qu'on me pardon-
nera fans peine de m'être arrêté un
moment, pour rétablir en partie la
mémoire d'un de leurs Chefs , injufte
8c coupable à la vérité , mais plus mal*
heureux encore par les efforts & les
progrès de la calomnie , qu il ne fut
criminel.
Saladin ne perdit pas le fruit de fa
vi&oire. Après avoir laifle repofèr fes
troupes pendant vingt-quatre heures
fur le champ de bataille , il s'avança
vers Tibériade, & fomma la Corntefle
de rendre la Citadelle. Cette Princeffè *
(a) Voyez entr'autres Aboul-fédha & Boha-
eddin. Ce dernier dit : At Cornes Trifolittnus
dfdentijjimus idem %ferùciflimufque interfuos f
cladis iniiciM fro/piciens tjute in Religionis fut»
hommes effet ingruitur*&ç. • . . bominisfrau-
dem ac matitiam no» amplihs mttuendam
habuit Ijlamifmus. Cap. 35- On pourroit
ajouter encore beaucoup d'autres chofes pour
juftifier le Comte du crime d'apoitaûe, mais
en voilà aifez»
34 Hîstoijli
obék & obtint la peraiiffioft de fe fc-
*cf i*s% "rerc'ans te Etats Je ïbnraaurhle SuU
* than la fît même efcorter par un corps
de Cavalerie , crainte qtf elle ne fée
infultée dans la route par des partis
Arabes qui couroient kt campagne.
Il détruifît prefque toute la ville , 8c
ne conferva que la Citadelle ot\ il mit
garnifon. Enfuite il alla camper à S6-
phouri , rendez- vous ordinaire des ar-
mées Chrétiennes. Le lendemain il
marcha vers Ptolémaïs. Cette ville qui
foutint peu après un fiége de trois ans,
& réfifta aux forcés réunies de toute
l'Europe , fe rendît (ans coup férir.
Les Habitans épouvantés à l'approche
du Sulthan , vinrent implore* à ge^-
noux fa clémence. Il leur laifla îechoix
de refter dans Ptolémaïs ou cfetj fo&» .
tir, leur promettant route fureté dans
l'un ou l'autre cas. Il mit des fen-
tinelles aux portes & dans les places
publiques, pour empêcher le détordre.
Les Citoyens emportoient lews effets
les plus précieux , & cédoient leurs
maifonsaux Sarrazins , qui n'ofoient
les piller fans la permiflion de leur
Général* On eut dit que cétoient deux
peuples amis qui changeaient de de*
»e Saladin. Ltv.VII. $5
trieute. Sàladin donnai à fon fils Af-
dfaal le gouvernement de cette ville jf^Ji
importante , convertît les Eglifes en
Mofquées, établit desCadhis & des
Imams. Les Arabes remarquent qu'ar
près avoir diftribué tour le butin au*
Soldats , il fit préféra an Doéfceuc lia
de feras les biensqui avoient appartenu
aux Chevaliers \ c*étott le même qu*il
avoit autrefois racheté foixante mille
écus d'oc.
Saladin ne demeura pas dans la
ville. Il fit drefler fa terne dans le voi*
finage, & envoya Tes Emirs & la tête
de différens détachemens pour fou-
mettre tous les environs. Ceux-ci ft
répandirent de tous cotés. Ils trouvè-
rent la plupart des Places défertes , les
antresonvroient leurs portes aux Vain-
queurs Se capituloiem ^celles qui re-
nflèrent , payèrent cette hardielîe par
leur ruine totale. Ces Généraux ibid.
qui avoient moins d'humanité que
leur Maître , portoient devant eux le
fer & la flamme, détnrifoient les vil-
les , bruloient les campagnes* malïa-
croient les hommes , & fai (oient la
guerre avec toutes les fureurs attachées
a ce fléau. Ils prirent en peu de jours
tafiS» Caefarée* (4) Orfouf , (*) Séphqurlf
hi'illj. (<) NaMrccl* , (d) Taar , (*) Naïm »(/}
(a)Cê.[*rt9 dePalefUne, K*ifarét ancien»
fcement la Tour de Straton fiir la mer dé
Syrie , à trois journées de Tibériade, à trente-
trois milles de Ramla, à trente-fix de Ptolé-
maïs. Hérode lai donna ce nom en lHonneut*
cfAugufte. Elle étoit autrefois une des villes
principales de Syrie. Elle eft aujourd'hui dé-
fruité. Pojei attffi Reland , p. J70.
( h ) Arfofy Affrphy Orfouf, Arfuf, ou Affût
furie rivage , à dix- fept. milles de Ramla , à
fuc de )*ppé9 à dix-huit de Caefarée, elle eft
détruite. Quelques-uns ont crû que c etoit
Antipatride, d'autres Afcher.
(f)Nous en avons parlé dans le liv.précédent*
(</) Nazareth f Bourg dans^la Galilée, fitué
fur le penchant d'une montagne, à treize mil-
les de Tibériade. Jefùs y fut élevé. C'eft de
là qu'eft venu le nom de Nazaréen , donné
au Sauveur & aux Chrétiens. On y montre
encore le banc où il s'afleyoit & le lieu oh
l'Ange Gabriel apparut à Marie, & Antonin
le Martyr, ( Antoninm Martyr , ) dit que les
femmes y font très-belles , & que c'eft- là une
{àveur que la Sainte Vierge leur a accordée*
(e) Tour, el-Tour , lignine proprement une.
montagne. Les Arabes difent que Tour eftun
village 6k une montagne qui domine Napou-
lous^Sc'que les Samaritains visitent fouvent
par dévotion, parce qu'ils prétendent que,
ç'eft-là qu'Abrahieut ordre d'immoler fon fils.
(f)N*im, Afràtygrand bourg auprès d'En*
de Sàlàbin. Liv.VII. ty
Dotaim > (4 ) Endor , ( b ) Ja- '
pjha, (t) Legium , (*/) Genim , (e) Hég. Au
Sébafte,(/) Bethfan , (g) Narjoulous' * c* lli*
( h y Jéricho , (■#' )Phouîa , ( £) MaaL %
do* & au vpifinage du Thabor. Les uns le
placent au midi , les autres au Nord de cette
montagne.
{a) Ville voifine de Samarie. Voyez, fut jD#.
tùm , Dethan; Rel.f. 741.
(£) £» i*r au Midi & à quatre milles du
Thabor , non loin de Scythopolis & de Naiûu
(cyjaph* dans la Galilée autre que Joppé.
(a) Ligium non loin de Caefarée.
. (e) Genim auprès d'Efdrelon»
. (/) Sebafte , S*m*rie , nous en avons parl£
dans le livre précédent, f . 440.
{g) Béthfan 9 Scythâpolis. Vide fuprà ^
/.Vif +30.,
(h)N*M*sJl0spûlhyide fuprà,L.VI./> . 40*;
- ( * } ' J&itha , ItfrfV/?p , ville célèbre dans
l'Ecriture. Elle étoft dans une plaine très-
.fertile , fourtout en palmiers. Elle produifoit
auffi beaucoup de rofes.Elle étoit éloignée de
ibbtanteiiades duJourdain&decent cinquante
de Jérufalem. Reland en parle fort au long ,
f. 119, & ailleurs. Les Arabes difent qu'elle
fut bâtie par fept Rois, & rappellent la ville
des Géants. Vtytz,Arih* d'Herfalot.
(k) Phoul*, PbMul*, ville de Paleftine dan*
la Syrie, Schultens croit que c'eft Phafaë»
lis , Fafelis félon les Hiftoriens des Crona*
des 3 bâtie par Jïérode & appeilée m& dp
|8 Ht sToi'a'i *
„, t tha,(4),Haipïia,(*) Tcbnîn, (e)
£* w*£ Scandcrona , (d ) ou Scandélio , &
routes les autres Places voifînes.
Saladm apprenant les fuccès heu*
veux oc rapides de* les cniîrs 9 le nue
iuHfnême en mouvement , pour aller
iaffiégerenpérfonneSidon. (f) Cette
■»■ ■ ■■ ■ ■■■ '■ ' »■ ■ ■ '"i ■ ■ '
nom de fon frère , elle eft dans la vallée de
Jéricho, & produit aufli beaucoup de pair
»ûers, Pïd. Retsnd, p?s$ , &c.
•■ (tf) Matitb* , Msglfiha , vHIe (kuée aux
environs du Jourdain»
(b)H*ifb*h, Wf*> Beih-HifbM, H*f*y
ville fituée au pied dn mont-Carmel , entre
Oefarie ôtftoléniaïs. On Fa confondue avec
ffippos non loin de Tibéfiade* Voyez, fut"
tout ceU Schultens et R*l*nd> f. fr$. £»
Mi.
(c) Têhniri , fortereffe trés-bienfdrtîfiée au-
deffus de Ptolemais fur le chemin de Sidon.
Elle eft placée for des montagnes entre Pa-
néas & âarepta ou Sarphenda.
[d\ Scandgron* , c*eft plutôt Scsndelbfop*
tereflê ou'op dit avoir été bâtie par Alexan-
dre, & aom on voit encore des veffiges en-
tre Tyr & Ptolfrnaïs. Aboul-ftdha dit que
ce n'étoit plus qu'un paflage entre des mon-
tagnes, & Boha-eddSn , femble auffi infinuer
que ce lieu n'étoît pas fortifié,
'(e) Sidon , TxÀdon félon les Hébreux, Sn>
do felon les Arabes, borne h Paleftiaed*
DI SAlJLeiM. LiV. VII. $*
ville fi c&toe dans lHKtoira facrée
Se propJiaoe , étokbien déchue de Ton /$ Jf£
ancienne fpiendeur* Elle avoir cepen-
dant quelques fortifications allez bon-
nés pour ce tems^là,^ nn port qui la
rendok riche en favorifant fon com-
merce. Malgré ces avantages , les Ha*
bkans n'ofér eht foutenjr un fiége , 8c
fi» rendirent à dîfcrétkm. Le Sultiian
leur accorda félon fa coutume de*
conditions fort douces. Il laiffa gai>
tfifon dans la Place , & continua fa
toute.
Btroçt (s) fîtuée plus an Nord fur
le même rivage, fr qui avoir déjà ré*
fifté auSulAan , voulut avoir la gloire
de l'arrêter une leconde fois. Elle Ct
laifla battre pendant quelques jours ,
mate voyant une partie de les tnu rail-
les détruites , & les ennemis fur ta
tôtéduNori Aboul-ffidha ditquecen'étoit
S s qu^ne petite ville avec une fortereffo
eavoit des jardins & des avenues d'arhres
& unterrein fertile. On a cru qu'il y en a eu
deux , eme grande & une petite. Ftytz. fut
cette vUltles nvt$s de Schultens , les voytgeim
fr Rtisnd , f. ioio.
(*)Nous ayons décrit cette ville dans te li-
tre précédent , p. 41e.
4* Histoire
' brèche, elle demanda une capitulation
;fî$ïîi£ honorable & 1 obtint. Dgiobail (f)
% étoit à peu dç diftance de Bérout , çn
montant vers Tripoli. Le Sulthan fe
difpofok à l'attaquer , mais le Seigneur
de cette Place , (h) lequel étoit pri-
fonnicr à Damas, eut la prudence de
prévenir le fiége. Il voulut vendre au
inoins ce qu'il ne pouvoit retenir , &
. racheter fa liberté au prix d'une ville
prête à lui échaper. Il promit à Sala*
dinde lui faire ouvrir les portes de
Dgiobail , fi ce Prince confentoit de
le renvoyer de captivité. La propor-
tion fut acceptée. Le Sulthan fe ren-
dit maître encore de quelques Places
voifines, & fit ravager les environs de
Tripoli.
Tandis que cet incendie embrafoit
le Nord de la.Paleftine , le midi n'é-
. toit pas moins défolé. Saladin avoir
jnftruit de fes conquêtes fon frère Adel
qui étoit alors en Egypte , & lui avoir
«f » ' ■ . "*-
(a) Gibtily Hobeil, Scholeil , Dgiobeil*, pe-
tite ville fur le rivage de la mer , à huit para-
fanges de Berout. Elle eft connue fous le
nom àtGibeleU
(k) Us'appelloit Eu^es ou Odon, &c.
ordonné
ni Sàlàdih. L iv. VII. 41
ordonné de faire dans lé même rems
une irruption fur les terres des Francs, jfj?', \l*7\
Celui-ci alla d abord affiéger le Châ-
teau de Magdal (4) qui capitula. Il fît
efcorter par quatre cens liottimes la
farnifon qui avoir demandé d'être coa-
uite en fureté dans un lieu appelle le
Afonaftére de Samuel, à deux milles
de Jérufalem* Quelques Soldats de
cette ville, & une troupe de Tem-
pliers tombèrent fur ces quatre cens
. hommes , en tuèrent la plupart ,& mi-
rent lexefte en fuite. Âdel tira de cet
outrage prétendu , une vengeance
cruelle. Il courut le pays , le fer Se la
fiamme~à.la.maîn ,& icduiût en cen-
dres les bourgs & les campagnes jufl
ques aux portes de Jérufalem. Les
Habi tans épouvantés , voyoient du
haut de leurs murailles les terribles ef-
fets de la colère de ce Prince. Il des-
cendit enfuite vers JafFa ou Joppé , (b)
'{ayMfigdâl, Magdal , fortereffe voifine
de Bethléem. C'étoit ce Mirabel dont parlent
les Hiftoriens , les Arabes difent Mégedel-
babtl y Mefgedaleb , Mâgedeî , frc. *
{b)Joppé,Japha9 ]afa anciennement Jsphtf
Elle n'efi plus qu'un grand Bourg , elle étqit
alors bien fortifiée , riche , peuplée & fort
Tome IL D
4* HIstocei
ta nrit y fournit dfentres Places , & Vint
r Mufalmane > traînant après lui un
grand nombre de prifeftniere.
• Mais la coaqnête que SaJadia am*
feittoimoit le plut, et cm celle de Tyr,
{a) autrefois fi. célèbre par fa pa£»
lance , fort commerce , les richefles »
tes colonies ,.& qtri mérite à peine de
nos jduUs le nom de ville v rôtit yét»k
dans le «Mrabie& Fagitatiôn* JBlte r «^
voit pour Chef» que le Prince daSidoU
& le Châtelain. chilien; bcrnimes foih
Mes, timides & incapables dune réfo*
Ibîa# , hltiongétféreufe. Salade» dépêcha vers
commerçante. Cëtëieditos* feri^br* qiraboi*.
doient la plupart des vaifecux «fui afrfroieftt
à la Paleftme* Qn y montre un rpcher., JUr
lequel an prétend qu'Andromède nttatfaché*.
Cette ville étoit à l'Occident & à fix mille»
de Ramla. Voyez, de plus grands icUkciff§-
prtn$ dans Rel p $$4, &e.
foy 7yt y Tj&HTtm S'pur , vitte principale tte
Phénicie , trop connue pour nous arrêter.
y$yiz.fivê*s v$f$le7uReL p. 104* , &c. Elfe
fat prife par le» Francs Tan de l'Hérare cinq
cens dix- huit. Le Sulthan des Mameluk»
d'Egypte l'ayant prife dans la fuite la fit dé-
molir , & elle ne s'eft plus relevée depuisce
tems.
de Salabih. Lit. VIL 4}
eux un Officier pour les fommer de
fe rendre. Ils répondirent qu'ils obéi- Méç» s Jj-
roienc torique ce Prince approcherbk h c* 1 1 7'
avec fes troupes* Il leur envoya &
bannière avec ordre de la plante* fur
les murailles. Ils re^rcfentérent qu'ils
auroiem tout à craindre de la fureur du
Peuple par une femblaWc démarche»
nais que lorfque lo Suithan paroîtrok
aux portes de la viile , ris pdurroiertt
perfnader aux Babkans intimidés par
le danger, de céder à la néccffité» En
cqnféquence}. l'armée Musulmane rftc
tourna dans la Paleftine en parcourant
les côtes , Se fournit fur la route Sai^
&nà ou Sarepta , (*) & d'ancre Fo»+
reredes moins conhdcrables,
Saladin ne doutant pas du fuccès de
fon entreprifefur l'affurance do Prince
de Sidô» te du Châtelain de Tyt , s'a*
vançoit à grandes journées. Cette note*
velle fe répand* bientôt dans tous lés
quartiers de la ville ; hommes & fem*-
m liti « m IHilÉ m m ii ■■■■■ — ■ « i m mm, >
(a)S*reft* » Sarephta, S*rf*nd,$eûte villç
entre Tyr & Sidon , à vingt milles de la pre-
mière & à dix de la féconde. On y montroit
la maifbn ck Ta chambre où EKë avoit cou-
«hé* Le vin de fou terrou» a été célébré par
les Poètes. Voyez. Rel. p. 98 5. é« io<#,
Dij
44 HlSTOI* E
mes , tous fbrten t des maïfons , & rern*
j!g? trtj. pl*Aent les rues* Voilà les ennemis, fe
difoit-on les uns aux autres, tés voilà.
La frayeur faifit tous les efprits. On
s'aflèmble en tumulte , on parle de fe
rendre. On délibère , on régie les ar-
ticles de la capitulation. Dans le mê-
me tems paroit dans l'eloignemenr un
vaifleau. L efpérance renaît > on pouffe
des cris de joye , on coure fur le riva-
ge* le vaiflêau cingle à pleines voiles
▼ers le port , il arrive , ildébarque un
Prince Chrétien accompagné de plu-
fleurs Chevaliers intrépides. Les Ha-*
birans reçoivent leur. Libérateur au
bruit des acclamations redoublées , &
paiïènt du plus grand abbattement,aux
tranfports de la joye la plus vive.
Cétoit Conrad de Montferrat qui
leur apportoit un (ecours auquel ils ne
s'attendoient pas. Il s'étoit fignalè
dans les guerres d'Italie en faveur du.
Pape , contre Frédéric, fon parent ,
(a) & entr'autres actions d'éclat , il
avoit vaincu & fait prifonnier l'Ar-
chevêque de Mayence , qui comman-
(a) Son père avoit époufé la feeur de l'Exn-
pereur Conrad. ,
DE SàLÀDIN; LtV.VII. 4f
doit l'armée Impériale cohtrê le Pape-
Conrad n'aùroit pas crû dans ce fié- j.c^iîifc
cle , mériter le titre de grand hom*
me , s'il n'avait joint à tous fes exr *
ploies, quelqu'entreprife contre les In-
ndelles. Il fe croifa & fe mit en mer
avec plufieurs Chevaliers ; mais au lieu
d'aborder dans la Syrie, il fut pouffé
par la tempête fur les côtes de Cond
tantinople. Ifaac Lange étoit alors at-
taqué par une croupe de féditieux.Con*
rad aidé de fes Chevaliers , diflipa les
mutins. Il rendit dans d'autres occar
fions de grands fervices à l'Empereur»
combattit & tua de fa propre main le
, traître Uranas , appelle auflï Branas
ou Livernas. Ifaac récompenfa gêné-,
reufement fon Défenfeur > & pour le
retenir à Conftantinople , il lui don-
na fa foeur ( Theodora ) en mariage ,
le titre de Caefar, le droit de porter
des brodequins couleur de pourpre , & x
l'efpérance au trône. Conrad peu tou-
ché de tous ces honneurs , entraîné
par fon inconftance naturelle , & par
là deftinéequi l'appel loit ailleurs, ré*
folut daller chercher de nouvelles
avautures. Il fit équiper un gros vaif-
feau fous 1 e prétexte de faire une in-
44 HlSTOIHE •
mes , tous forten t des maifons , Se rem*
*g? 1ÎÎ7. P^flent 1** rues> Voilà les ennemis, fe
difoit-on les uns aux autres, tés voilà.
La frayeur faifit tous les efprits. On
s'aflèmble en tumulte , on parle de fe
rendre. On délibère , on régie les ar-
ticles de la capitulation. Dans le mê-
me tems paroit dans l'eloignement un
vaiflèau. L efpérance renaît , on pouffe
des cris de joye , on court fur le riva-
ge, le vaiflèau cingle à pleines voiles
▼ers le port , il açnve , ildébarque un
Prince Chrétien accompagné de plu-
fieurs Chevaliers intrépides. Les Ha-*
feitans reçoivent leur. Libérateur au
bruit des acclamations redoublées , &
paflent du plus grand abbatteraent,axix
rranfports de la joye la plus vive.
C'éroit Conrad de Montferrac <jui
leur apponoit un iecours auquel ils ne
s'attendoient pas. Il s'écoir fignal^
ctans les guerres d'Italie en fave
Pape , courre Frédéric /on
(a) & entr'autres aftion?
avoit vaincu &: fait *
chevêque de Mav^
(a) Son per
pereur Cor
DE Sàlàbin. Lft. Vil. 4)
eux un Officier pour les fommer de
fè rendre. Ils répondirent qu'ils obéi- î1*?^;
soient Idrfque ce Prince approcherbit * t# ' l 7'
avec les troupes» Il leur envoya &
bannière avec ordre de la plante* fur
les murailles. Us ïeprefentérent qu'ils
auroicm tout à craindre de la fureur du
Peuple par une femblaWc démarche»
nais que lorsque lo Suèthan paroîtroit
aux portes de ta ville 9 ris pourroierrr
{>erioader aux Hâbttans intimidés par
e danger \ de céder à la néceffité» En
conféquence;, l'armée Musulmane r'fic
tourna dans la Paleftine en parcourant
les côtes , Se fournit fur la route: Sai?*
fend ou Sarepta , (*) & d'ancre Fo»+
rerelfes moins conhdcrables.
Saladîn ne doutant pas du fuccès de
ion encreprifefur l'affurance du Prince
de Sidow te du Châtelain de Tyr , s'a-
vançoit à grandes journées. Cette noû*
velle fe répand' bientôt dans tous lés
quartiers de la ville \ hommes & fem«-
J - - - • --■■...-.- -v
(a)$*reft* % Sarephta, Strftnd, petite ville
entre Tyr & Sdon , à vingt milles de la pre-
mière & à dix de la féconde. On y montroit
la maifon & Ta chambre oîi Elfe avoit cou-
uhé» Le vin de fort terroir a été célébré par
les Poètes. Voyez. Rel. f.9*S>& ™9ï'
Dij
4* tfisrôîKt
carfion Air les terres des ennemis cfe
*&*\lj. l'Empire , embarqua fes Chevaliers Se
quelques Grecs gagftés par fes bien-
1 ' ' faits , ou fédults pat fes promeffes , fit
, voite vers ht Paleftitte , Se ft*eut pas
honte d'âktâdbrtnerpàr ané trahifon,
l'Empereurfon beatKfcere, Se la Prin-
ceffe fa femme.
II îgnotoit les'changemens arrivé*
dans fa! Terre Saîiwe , Se prit la route
de Prolémaïs qu'il1 drôyôiï être encore
"fou* la ddmirtatfcm <ki Francs. Arrivé
à la hadtetft de cette ville , il fat étonné
de ne pdirit entendre le bruit des cîo*
ches qu on fonnoit ordinairement (fis
qult paroiffoit quelque navire ittortré
par des Chrétiens-, Se de n'appercevoi*
aucun de$figrtaux qu'on feifoit dam ce*
occafîons. Ses craintes redoublèrent
lorfqu il vit venir à lui une petite bar-
bue avec pavillon ennemi. H calia
àromptentènt les vofte^tnouilla dan*
fa rade,€t cacher iesChevaliers5orcfon-
liant au fefte de Téquipage de garder
lefilençe, tandis qu'il répondroit k
l'Officier envoyé à (on bord. H dit a
celui-ci qu'il apportoit des marchand!-
fes , qu'il favoït bien que Sàladin ne
gênoit point le commerce des Nations
m SAtÀtKiw.tlït! VII. $f
à* l'Europe avec leiMuflfcnans. Qa*rt '
éroit venu fur cette a&itance, mais ™£ $£
qu'avant que d'entre* dans le port , il
iouhaitoit obtenir une .fureté parti-
culière du Gouverneur pour fes effet* ,
fon vaiffeàu & fes gens» D&m»le teros
que l'Ofticier retoutnoit dans la ville
|youf pendre de nouveaux ordres, un
rem favorable vins à? foufflet y Con-
rad leva l'ancte , prie le large>& cin*
gla vers Ty* » pourfaivi lon&term pat
deux galères qui ne purent' l atteindre.
Il d&condit à Tyry comme nôu*
lavons' dit , dams le moment qtfoi*
uontmoit des Députés pour la capitu-
lation. Tout reprit ators une nouvelle .
face* Cependant Conifed autpeli; ort *
déféra le coitamandenieiit , ne voulut
point s'en charger , fi on ne lui doti±
noît en même teros la fouveraineté
de la nlle» Le* Citoyens n'attendant
aucun feéôursde leur Roi prifonhier*
crurent avoir le droit et fe chorfitv
pour maître , te guerrier qui) les dc~ '
fendok , & lui prêtèrent ferment d'o*
béifiTance & de fidélité. Le Prince de
Sidoa 7& le Châtelain qui les avaient
Î>re(fës de fe rendre, cherchèrent leur
ureté par. .la fuite. Ils entrèrent là
1
4X. > . HiiT.oïKi
nuit dans urffcbateau , & 'fe retircreofe
ifcfifg^ Tripoli. Conrad connu dans l'HiC,
*toire d'Orient , fous le nom du Mar-
quis de Tyr , fit creufer à la hâte les
fo (Tés, rétablit quelques fortifications ,
plaça tout le monde à fon pbfte , & (e
tint prêt à bien recevoir l'ennemi*
Saladin ne tarda pas à paroître. Il
comptoit toujours que les Habitans
viendraient lui demander quartier» Il
les trouva fur les murailles , armés;,
pleins d'ardeur & de confiance, tore*
foius de jepoufTer fes, efforts. Il apprit
la caufede^ce changement >8c déieC-
péra de prendre Tyr à force ouverte,
€ont.Giiîii. I1 Y avoit à Damas parmi les pri-
chren.Tcrr* fonniers Guillaume III. Marquis de
sana*. **Montferr*t1.fiirnominé le Vieux, (4)
Ce Prince avoit renoncé au bonheur
de réeher fur des Peuples heureux ,
dont il étoit adoré, pour la gloire de
combattre les Infidelles. Il quitta le
Sceptre pour le bourdon , laiflk-fes
•Etats à l'un de fes fils & fe croifa. Tel
-étoit le fanatifme de ce fiécle, qu'on
jie croyoit pas pouvoir acquérir de la
(«} Il tenoit un rang confidérable parmi les
Princes de fontems.
réputation
b* Sàiàdik. tiv\VII. &
téputatïon dans ce monde , Se le falut
dans l'autre? ailleurs que dans la Pa- jf^'i 't/I
leftine. Le vieux Marquis de Mont-
fetrat entreprit ie voyage d'Outremer
dans un âge où le commun des hom-
mes cherene le repos. 11 fuivit les au-
tres Barons à la bataille de Tibériade >
fut pris comme eux , & ianguiflbit
dans la fervitude toujours plus dure
Ïèur un ^vieillard. Il avoir eu quatre
1s tous, célèbres; (a) Conrad étoir de
ce nombre. Saladin pour gagner ce
dernier , en flarant fon ambition & (a
fendreflè filiale, lui offrir un riche Do-
maine dans laSyrre,'& rélargiffement
.dé Guillaume , pour ip§jx dé la foumif-
(fon ide.Tyr. Conrad répondit fière-
ment qu*il méprifoit les préfens des
Jafidçll-es , & qu'il ne donnerait pas
une feule pierre de Tyr , pour la ran-
içon*<hin vieillard qui ne pou voit être
d'aucun fecotirs à la caufe commune.
Il ajouta que fi on expofoit fon père
„» ni ■ ■), i .■ i i ■■
{a} Ses qoatte fils furent Boniface oui fut
Roi de TheHalie. Guillauipe dit longue Epée,
quiépoufa Sybille & qui eût ité Roi de Jé-
iiifalem, s'il eût vécu. Régnier oui mourut
auffi dans la Paieftine , & Conrad appelle le
Marquis de Tyr,
Tome II. E
^ Histoire
aux coups , il tireroit fur lui , podf
Hcg, ^8). lui procurer le martyre prêtera-
f. c il *7* ble a la liberté. Le Snlthaa comprit
qu'il ne gagnerait rien fur un ca- * j
raâére aufli farouche, & réfolutde
„ remettre à d'autres circonftances le j
fiége d'une Place alors trop bien dé-
fendue par Conrad & par les garni*
ions qui s'y étoienr réfugiées de tor>
tes pans. Il attendit (on frère AdeJ
aux environs de cette ville ,& par-
tit avec lui pour aller invertie Afo
Ion, une des principales barrières de
laPaleftine,
Il trouva (ur fon pafiage & fournit
à fa domination Lidda {*) Se Ramla,
■Qf) Les Mufirimans ont fur la première
de ces deux villes une opinion bien
extraordinaire. Ils difent que c'eft à
mu llaMaMM ■' "■■■ ^mimm^mm m , , , , pm
(a) Lidda, Dieftelis» Voyez for cetçe
ville, Rel.f. I77 & ailleurs.
(b) Ramla 9 elle étoit dans une plaine &fur
lin terrein fablonrieux,à huit lieues de Jérufa-
tem & à quatre de Jaffe. Lyddafituée ài'O-*
rient, en étoit éloignée de trois parazanges.
Il y avok auprès l le Château & FEglifc de
Saint Georges, dont il eft beaucoup parlé I
dans les Hifioriens des Croifades. Vojex, d ex-
cellentes notes fur cette ville dans ReL p. 9 f 9
& ailleurs»
*b Saiaottu; Eir.Vir. jt
l'une des portes dé Lidda , que le
l>rt>r*étejefus(4) fils de Marie y{b) ^\%\
(a) ljf* ten, MirUm , Jefts fils de Marie. Il
•n eft fouvent parlé dans rAl-koran & tou-
jours avec beaucoup de refpeâ. Les Muful-
mam «fifent^qu tt naquit à Bethléem de Ma-
lie, mais fans père , qu'il ne refta que trois
heures dans le berceau , qu'il n'eft pas mort ;
mais qu'il eft monté aux Geux 6k que foxi
trône eft dan* le quatrième Gel , c'eft-à-
<fiie , dans FEmpirée , que c'eft le véritable
Méfie , k verhe de Dieu , fa parole, qu'il
tiendra à. la fin du monde combattre l'An*
^Chriû,&c*K(î»ji?* U deuxième <$» le troi-
fme cb#f. de PAi-lyr** & f autres. Vyez,
HUkt. Orient* éHklt liîa ben Miriam, &
(b) Miriam 9 Marie dont il eft fait une
jaenfeon Honorable dans l'Al-koran. Les Ma-
àométans croient qu'elle fut délivrée du péché
«rigûieLall ne vient point d'enfant au monde,
«difent-Us 9 que W Diable ne touche & ne
• manie juiqu'à ce qu'il le faflè crier. Il n'y a
• eu que Marie & fea fils Jefus, qui ayent été
»préfervés de cet attouchement. « Mahomet
prétend , Ch. 3. Kotan , quç Marie avoit été
donnée en garde à Zacharie,que celui-ci ren-
ferma dans une des chambres du Temple ,
dont la porte était fi élevée qu'il falloit y
monter avec une échelle & dont il portoit
toujours la clef fur lui , mais que toutes les
fois qu'il alloit la roir 9 il trouvoit auprès d'elle
Eij
4* . Hisrocai
\ol prit y feomit dfaucres Plates , & Vfat
fH^Yi8% * ** rencontre de la grande armée
Mufttlmane > trônant après lui un
grand nombre de prifbmiiere.
• Mais la cowqnête que Sakdio am*
bhwmùk le plur«érim celte de Tyr,
{a) autrefois fi célèbre pat fa pui^-
iàticc , fort oonkmeree , tes i icheffi» ,
fes colonies ,.& qui mérite à peine de
hos jouUs le nom de vittf -y tout y étoit
dam le tembiefe F«gpeariôn*JElteri*>»
voit pour Chefs qoe IcPntwe deSàdort
fit le Chàrelafo.dulietr, btmimes>r^
fartes, timides & incapables d'une réfo*-
hition gértéreufe. Saiadro dépêcha vers
commerçante. CététedftistferiJbrF «ju'aboiv
doient la plupart des vaiffcûix<|iii âfriTOieot
à la Païenne. On y montre im rpeher .* fur
lôquel on prétend qu'Andromède fat attachée;
Cette ville étoit à POcddent & à flx mille»
de Ramla. Voyex, de plus grands eclakciffe-
pttns dans Rel f S £4, &e.
Tttj ~iyt y rfûHYfytit «j'ww | ville prmeîpale 'de
Phénitie f trop connue pour nous arrêter.
VrftiftvêHS voulez* Rel. p. 1046 , &c. Elle
&t prife par- le» Francs Tan de l'Heure cinq
cens dix-huit. Le Sulthan des Mameluks
d'Egypte l'ayant prife dans la fuite la fit dé*
xiohr , & eHe ne s'eft plus relevée depuis<e
tems.
Ibid.
Die Sàlàhm. Lit. Vil. 4}
eux un Officier pour les fommer de
fe rendre. Ils répondirent qu'ils obéi- *%» * *>•
roient tarfque ce Prince approcherok h c* ' * 7*
avec fes croupes» Il leur envoya fa
bannière avec ordre de la plante* fur
les murailles. Ils re^rcfentérenc Qu'ils
auToiem tout à craindre de la fureuf du
Peuple par une ferablablc démarche»
mais que lorfquc le Suithan paroîtrok
auxportes de la ville , Hs ptmrroierrt
persuader aux Babitans intimidés par
le danger, de céder à la .néceffité* En
canféqnence/, l'armée Mufulmane rflL
tourna dans la Paleftine en parcourant
les côtes , & foamit fur la route Sai*
fond 00 Sarepra , (4) & d'ancres Fos+
rereffcs moins confidcrables.
Saladîn ne délirant pas du fuccès de
ion enereprifefur l'afiurance do Prince
de Sidow & du Châtelain de Tyr , $• a-
vançof t à grandes journées. Cette noft*
velle fe répand' bientôt dans tous lés
quartiers de la ville \ hommes 8c fem<-
m iniini m >mi< ■ ■ ■ ■ ■ ■ ■«■■■ .. ■, m>
(a)S*refts , Sarephta, S*rft»d,peûte vill*
entre Tyr & Sidon , à vingt milles de la pre-
mière & à dix de la féconde. On y montroit
la maifbn & fa chambre où Elië avoit cou-
vhè* Le vin de Ton terroî* a été célébré par
ks Poètes. Voyez. Rel. f.9*i& ™9ï.
Dij
44 HlSTOIHfc '
mes , tous fortent des maïfons , & rem*
"cî t[\j\ pliflent les rues» Voilà les ennemis, fe
difoit-on les uns aux autres , tés voilà.
La frayeur faifit tous les efprits. On
s'aflèmble en tumulte , on parle de fe
rendre. On délibère , on régie les ar-
ticles de la capitulation. Dans le mê-
me tems paroit dans l'eloignement un
vaiflèau. L efpérance renaît , on pouffe
des cris de joye , on court fur le riva*
ge 3 le vaiflèau cingle à pleines voiles
▼ers le port , il arrive , il débarque un
Prince Chrétien accompagné de plu-
fieurs Chevaliers intrépides. Les Ha-r
birans reçoivent leur. Libérateur au
bruit des acclamations redoublées , &
patient du plus grand abbattement,aux
tranfports de la joye la plus vive.
Cétoit Conrad de Montferrat qui
leur apportoit un fecours auquel Hs ne
s attendoient pas. Il s'étoit fignalè
dans les guerres d'Italie en faveur dtj
Pape , contre Frédéric fon parent »
(a) & entr'autres aétions d éclat , il
avoit vaincu & fait prifonnier l'Ar-
chevêque de Mayence , qui comman-
(a) Son père avoit époufé la foeur de l'Em-
pereur Conrad.
DE SAfcÀBX.Nt LlV.VII. 4f
doit 1 armée Impériale cohtrê le Pape-
Conrad n'aoroic pas crû dans ce lié- j.^ iîi>l
cle , mériter le ticre de grand hom*
me , s'il n'avoic joint à tous fes ex- *
ploits, quelqu'entreprife contre les In-
hdelles. Il le croifa & fe mit en met
avec plufieurs Chevaliers \ mais au lieu
d aborder dans la Syrie, il fut pouflTé
par la tempête fur les côtes de Conf.
tantinople. Ifaac Lange étoit alors ar-
taqué par une troupe de fédirieux.Con*
rad aidé de fes Chevaliers , diflipa les
mutins. Il rendit dans d'autres occar
fions de grands fervices à l'Empereur,
combattit & tua de fa propre main le
/ traître Uranas , appelle auffi Branas
ou Livernas; Ifaac récompenfa gêné-,
reufement fon Défenfeur , & pour le
retenir à Conftantinople > il lui don-
na fa foeur ( Theodora ) en mariage ,
le titre de Qefar, le droit de porter
des brodequins couleur de pourpre , &
l'efpérance au trône. Conrad peu tou-
ché de tous ces honneurs , entraîné
{>ar fon inconftance naturelle , & par
à deftinéequi l'appelloit ailleurs , ré-
folùt daller chercher de nouvelles
avautures. Il fit équiper un gros vaif-
feau fous 1 e prétexte de faire une in-
5<f Histoire
than furpris de tant d'intrépidité 9 (h
*c?il¥' *cs Prèi»iéres démarches* Il offrit dp*
* Xl Conditions. On renvoya (es Députés
fans vouloir les entendre , & l'attaque
recommença avec la même acdeujr.de
part & d'autre. Cependant rieifc nan
vançoit; pour ne pas décourager Tes
troupes , qu'une trop longue rcitftance
lebutoir, il fit une nouvelle tentative;
Il chargea le Roi de Jétufalem , qui
étoic alors dans l'armée > de parler au»
Affiégés, pour les engager à fe fou*
mettre. Lufignan leur repréfenta-que
s'ils pouvoieat encore tenir ldng-tems^
ils dévorent continuer à fe défendre »■
mais que dans l'extrémité où ils étojent
réduits , ils rifquoient de tout perdre
par uneopiniârreté inutile.*, & même
tunefte à la caufe commune. Que le
bien de la Chrétienté exigeoic qu'ils»
profitaient de la bonne volonté dis
Vainqueur , pour en obtenir des conr
ditions avantageufes ; que parmi ce?
conditions , ils pourraient demander:
fon élargiflement & celui de pkiiîeurs.
Barons qui gémiffbient dans ta fèrvi-
tude ; qu'enfin il falloit céder à la né*
«ceffité, & fauver au moins , en per-
dant Afcalon > tant de braves Citoyens»
ni Saiadix. Liv. VII. ij
prêts à tombée dans l'efclavage. Frap-
pés de ces repréfentations , les priiw ***£ ***•
çipaux de Ut ville tinrent dans la tenta '
de Sakdin •* ,# lui timttnt à peu près
ce difeoars fftpptfrtl.par Coggeshal.
; :«Dieu feuî matftedesévénemens*
» vous a doanéla vidoire for les mal-
h heureux Chrétiens. Votre valeur,
» votre pttiflance , te nombre de vos
» troupes nous font, connus \ mai» ils
n n'effrayent point des hommes qui
» ne cherchent qu'à mourir, N'cfpé-
t>*efc pas , Seigneur , prendre facile^
h ment Âfcaion à force ouverte. Au-
tant qu'il y a de Citoyens, autant
» vous aurez d'ejanemis. particuliers à
» combattre. Aucun de nous n auralachron TertM
» lâcheté de furvivre à la Epine de la£anâ«,8c^
avilie. Vous n'y entrerez qu'après Ta-
»voir réduite en cendres, & avoir
«tué tous les Habitans. Que nous im-
h porte une vie périflable ? nous vou-
* Ions un bien plus folide , & c'eft la
» mort qui doit nous le procurer. Tel*
m font nos fentimeos , telle étoit notre
m réfolurion ; mais nous avons malheu»
*»reufement parmi nous, un grand
» nombre de femmes & d'encans,
aniont le fort nous épouvante» Nom
f$ HisfoiAtf*
» craignons que le Soldat moins En*-*
***£• *J'* nmaiiTy moins généreux que vous*
* ntfabuft de Jeu* foiUeflc poar te»
* corrompre , & même pour les faire
« renoncer à ta Reîlgatrti de Jefus-
«i Chriib Pour éviter ce malheur , nous
n contentons <fc flous rendre * & voici
«i à qudîes conditions. Vous nous ac*
^corderez quatorze jeecs , ptaur met^
*>tre onfre -à nos affaires Après ce
t> terme , vous nous ferez cendnirer
*avec ne* effet* en ftctr 4e foreté;
*Vous aurez foin décMt femtHes*
n qui veulent refter dans la vilte , & te*
* protégerez do*itre tout outrage 8c
* toare vioteûde. Vowdannetez la fiw
»betté£m^eRo^
* cipaa* jjrifomtierfr ànotre choix,
Saladirf touché de cet héroifiroe rater
parmi te» Chrétiens de cetci»5,coi*-
fentk aux etmdïtîons ptepofées. Seu-
lement if fut flîpirié que W Roi & le*
prifonnie» ne ferotemt délivrés que
dans le mois de Mai de l'année fui-
tante , & que te nombre de ces pri~
fonnier* fererft refttaïnt à dix. Les dé-
lais étant expirés, te Samedi quatre
Septembre , Se te dernier de Dgiou-
iftidi^d-aii^r^ieloules Arabes^ jour
f)l $ALÂtriH, Liv. Vif. 5^
auquel il y eut une éclipfe de Soleil»
(m) ce que les Francs ne manquèrent £^jj£
pas de regarder comme un miracle 5
les Habitafrs ruidérent la Place y 8c cm
remirent les ciefs au Sulthan. Le fié**
ge a voit 4vxé quatorze jours. Cette
Tille importante était fora la dominai
rk>n des Chrétiens depuis 1 an de
l'Hégire rinqeens quarante-huit, (fy
11 y avoir hit tes confins dé la Pa^
fcftine , à l'entrée du défert qui (épate
la Syrie <ïe l'Egypte, une ville très**
ancienne * renommée dans l'Ecriture
iàinte. Cétoit Gaza T (r) une des fa^
[a) Cette éclipfe arriva- fur les- neuf heures
ira îtiatûv.
(&3£1 t *rt>ît-tfoflrci»e«w^c5n} an* lunaires '}
«pie les Chrétiens iapcfledoientlEtte avok été
prîk 1» vkigt-fept de EWouroiidi-e^Akher.
(c) G*x* .les AraBes ^étit 6*?^*, & les*
Hébreux A**** Elle étoît dans ut£terreir*
fabloflneux qui: ne produit prefque point?
4e palmiers , mais beaucoup de vignes. Le-
village-qur lui feront <de^povt , étmt appeOfc
M*j*m* par lès Grecs, & Cmjf «art par les*
Latins. Les ha&ftans dé^Gaza étoiént autres
fois fort attachés au culte des Idoles ; elle a*
produit plufieurs perfonnages célibres^rommr
Schafti , Omar , ben Chatab , Procopi Sozi*
ne^ Alpiea» Ifidofe^6u^Oaorar^33r #
t
rrapie* des Philiftins , éloigrtée cfrf
j!ç? \ll). vingt ftades de I* mer, & bâtie fut
une élévation. Elle avoie été affiégée
par Alexandre & par Ptolomée ,- rui~»
née par ces Conquérants , rétablie par
Cabinius , rendue à Hérode par Ao*
gufte , poiTédée fùcceffivement par les
juifs „ par tes Romains , par les Grecs *
par les Arabes , par les Francs , & for-»*
tifiée par ces derniers. Les Templier*
maîtres de tout le canton , l^étoient
auflï de Gaza. Saladin leur fit dire d$
le rendre dans le tems qu'il affiegeoit
Afcalon , il* répondirent qu'ils fttbi-
jroient le même fort que cette ville ,
comptant qu'elle xéfifteroit à fes ef-
forts. Le Sulthan les ayant fommés de
tenir leur parole , les Chrétiens délo-
gèrent de Gaza & des forterefles voi-
unes qui reçurent toutes garnifon
Mahométatte»
Vers te mime tems, il reçuf de
nouvelles recrues que lui amena fou
fils Aziz-othman, Gouverneur d'E-
?ypte. Il ordonna auffi à Loulou >
^hef des Gardes de fa Chambre, &
s
*u deu* villas de ce n*v^Vid. ReLf. 787 é>
ne Sàlà©i*î. Lxv. VII. €t
Cm grand Amiral , d'équiper une flotte Hfcg/fsj"
tiombreufe,& d aller croifer fur le pa- h c/i 1 17.
rage de Tyr , pour intercepter les vàif-
feauz qui arjriveroienr d'Occident, &
empêcher cette ville de recevoir au*
cun fecours étranger ; enfin il fe prêt-
para au fiége de Jérufalem.
Les Auteurs Arabes qui s'arrêtent
aux petits détails , & négligent fouvent
les faits les plus intéreflans, difènt quç
tandis qu'il étoir devant Afcalon, un
Efclave de Damas , prifonnier à Jéru-
falem , lui envoya au nom de tette vil*
le y fix vers dont voici à peu près le fens.
»0 Sulthan qui renverfes les écen-
»» dards de la Croix, je cadreffe ma
»» voix plaintive de l'abîme de. mon
»? humiliation ; arme- toi , viens déti*
# virer le faint Temple^(^) Quoi! toutes schèik-zeaù
(a) Lorfau'Omar fe rendit maître de Jéru-
falem Tan feize de l'Hégire, fix cens trente^
iept de Jefus-Chrift, il fit élever dans le lien
où <4toît autrefois, félon l!opinion commune ,
JeTempie de Salomon,une grande Mofijuée,,
& enferma dans fon enceinte la pierre qu'on
croit être celle que Jacob mit fous fa tête,
lorfqu'il eut & vifion miraculeuiè de l'Échelle.
Valid fils d'AMaMfclek, fit rebâtir cette
Mofquée Se la rendit plus magnifique. Les
4% Hï$T0iitt
t>les mofquées font pures t&tu me
Hég. i*i. » biffes la^trir, malgré ma nobleffe*
i c. *jg7. f> 4^ fe fyjgç & ^^ l'impureté? ce
Les mêmes Hifbciens. ajoutent que
Saladin ayant vu dans la foire cet El*
clave >&c iui ayant trouvé de la capa-
cité, le fit Imam de la principale Mot
quée.
Enfin tes tems étoient arrivés où
Jéru&lem , dont la conquête avok
coûté tant de fang à FEuBopTe épuifee *
devoit tomber encore £oes. la domi~
c«t. Guîii. nation des Infidelles. Batéari d'IbeUm
«hjw^Teri» commandoit alors dans cette ville. II
' c* avoit obtenu la permifEon d'aller à
Jéiufalem , pour en faire fortir fa fem-
me 6c fes enfans , & pente négletqneW
ques affaires cbmeftsques, mais avea
promette de n y demeurer qu'un feul
jour 9 Se de ne rien entreprendre con-
tre les intérêts du Sulcb&o, Arrivé
à Jérufajem , il fe fit prier d'y res-
ter > d'en prendre le comn^ndement 9
•Mu&lmans y vont encore en pèlerinage» Us
Fappçflent le Sftint Temple, k maiion de
Dieu, Beh-*l-Mêc*dd€st le dôme de U
pierrede Jacob , &c. P*}*z/»r U fùrr* d*
J*cob &fiêr cm$ Mffifuéê d'HtrhUt , srt. de
Jtr»f*lem <J» **»**>& GttUL diTyfJ. *♦
J. C. ix*7a
i>* Salàjmk. Lit. VIL tfj
4k confentit qu'on le déliât de fon fer. '
mène que le Patriarche déclara nui \H^^1
au nom du Clergé , comme fi la Reli-
gion permettait dans aucun cas de
violer les loi x les plus facrées de r hon-
neur. Ce Bâton parjure ofa deman-
der peu de tems après à SaUdin , une
iauve-garde pour fa femirie & pour Tes
£nfans»quil envoyoit à Tripoli, grâce
dont il étok û peu digne ,flc qui lui fut
cependant accordée. Le Sulthan en*
gagea même la Reine Sybille d'aller
oindre fon mari à Napoolaus , aftn
qu'elle ne fût pas témoin des horreurs
infçparables é'im fiege.
. Avant que de l'entreprendre ce fié»
ge , SaJadin tenta les voyes de la né*
goriatton ; il fit venir les principaux
Habitant , & leur dit : qu il croyoit
avec eux: que Jérufalem étoit la mai-
fon de Dieu , (a) qu'il les prioit de ne
(a)Yoyez la note précédente. Les Muiul-
tnans ont toujours eu une tres^-grandé vérié-
ritâon ponrléru&lem : Mahomet ordonnait
4 fes di&ples 4e fe tourner vers Jérufidemen
iaifânt leur prière* Le pèlerinage de la Meo
aae ayant été interrompu par 1 invafion des
<Jarmathes , on y fuppléa par celui de Jéru-
falem. Les Mahometans donnent à cette
yillç les noms de Sainteté, de ville Sainte v
#4 H ISTOf ÏK fi
pas le forcer d'en profaner la fainteté
i.'&î&'P» le&ng quilferoit obligé de ré-
pandre;qu'il les avoir mandés pour leur
offrir des conditions plus: avantageafes
•que celles qu'il avoir accordées à tou-
tes les autres Places yqtfil leur donno-
roit trente mille bezans pour le prix
de leur foumiflîon , & autant de terres
qu'ils voudroient en cultiver; qu'il
leur permettrait de demeurer dafts la
ville, ôc fils fe d&erminoienc d en
Sortir , il les feroitxondiiiceà fes fr^is,
& avec tous leurs biens dans les lieux
qu'ils auraient choifis pour retraite.
»Nous ne pouvons vous céder , lui
^répondirent les députés;, une ville oà
>► noire Dieu eft mort ,. nous pouvons
^encore moins vous la vendre. Vous
» vous repentirez, letir dit SaAadio 5 de
h votre obftination: Vous implorerez
»> bientôt ma clémence; mais;ii ne
»> fera plus tems. Je nrécouterai:défi51:-
w mais aucune proportion , car je jute
n de n'entrer dans Jérufalem ^qu*à
inforce ouverte , & d'en paflfer tous les
illuftre, bénie, de maifon de Dieu , qp ville
des Prophètes , c*4s btU */ M$k*ddej , c*ds
Mj>b*re\% cod$ Scherif, &c.
habitans
*e Sàiadin. Liv.VII. 6$
' n habitans.au fil de J'épée s ainfi, que
» vous ayes traité voys même les Mu- £ég ,$;
» fulmans , lor/que vous vous êtes ren-
n dus maîtres de cette ville. «« Après
avoir prononcé ces paroles menaçan-
tes, il donna des ordres pour la mar-
che. Tout fut bientôt prêt & l'on,
partir,
Son armée1- divifée en .plusieurs
corps , prît des rouçes féparées , fou-
rnit en chemin les différentes forte-
reffès des etiyirons , & parut enfin de-
vant Jérufafem le Jeudi vingt Septem-
bre, onze cens quatre vingt^fept de
Jefos-Chrift, 6c félon les Mahomé-
rans, le feize de la Lune de Redgeb»
cinq cep^f quatre-vingt-trois de ud&-
gire*
Fin in Livre ftpttéme.
Tmtfl
SOMMAIRE
DU LIVRE HUITIEME.
T)dcrîptïon 9 S tige & prife der x-
Jérufalem. Générante de Sa-
ladin. Il afflige la ville de
Tyr, eu f&jkm */ 4fàm^
/llevelefié^^vrerm^ttjieur^
Places Jurle r rince d^Antio*
fhe i lui accorde taie trêve > &
fait de nouvelles conquêtes.
Etats des Francs dans le temat
de la troijzim* Croifadt*
HISTOIRE
DE
SALADIN
Sulthan d'Egypte & d* Syrie*
LIVRE HUITIEME.
-j_
ÎE R U S A L E M (*) fi célèbre par ^g. f i,.
les merreittes de la loi Judaïque . * Ct **7t
par \t* Myftéres de la Religion
Chrétienne & par la fuperftition de 1»
(a) Jérnfaiem , fittrée dans un pays d*
montagnes , nommée suffi ]$bu$ , Stlyme 9
Hiérofilima , par les Hébreux Jeruf-Chalaif»
©u Jeruf-Cbalem 9 & par les Arabes HUoty
EUU , par corruption d'JElia. Nous laiflbn^
aux Sayans lç foin da rechercher PorigrafrÔ*
fif,
68 Histoire
~ — — Se&e Mahornétane (4) avoîc plufîeurt?
h c' iiï Ji foischangé de makre & dé domina-
tion. Plusieurs foi* elle avoir été dé-
truite & rétablie j mais la. révolution ^
la plus terrible qu elle fouffrit, révolu-
tion annoncée p^r Ve$Frophéres,arrivà
fousTiws^ui la mina de -fond en côm-~
ble. Elle refta long - terc» enfevelie
fous Tes débris. Enfin délias Hadrien ,
le reftaurateur des_Temples & dey-
villes, la fit re&âtn: & ltji donna W
nom d'ŒliaCapîtolina." ft sW falloir
bien q\\e la nouvelle Jcrufalera eût
cette ville, & de trous apprendre' fi 'eue 'S eft ■»
appellée Salem , fi des d^iut norns Jqbus 5c
Salem •, on a formé célui;deJértifafem^-,fi
Melchifédech l'a habitée du tems d'Abraham^
fi elle étoit dans la Tribu de Juda ou de Ben-
jamin , oaen partie dans l'une. & dans l'autre r
enfla quelle étoit Ton ancienne étendue,' &
quelles ont été {es révolutions. Fôyezfirr Je»
tnfiUem t BJltnâ , d'Hirfolêi & '■ lis tfrj*-
&""• :.
(a) Voyez les deux dernières notes du livre
précédent ; nous aurons occaûon de parler
encore dans la fuite des autre* fuperftïtions-
dès Mahornétaits , touchant Jérufalem & du
voyage deMahomet au Ciel. Tous les Orient
taux difeiu que. Jérufalem eu le milieu de 1*
«rre».
ftt Saiadin. Lit.VHI. tf?
Vétcndue & la magnificence de l'an- .
cienne. Toute la montagne de Sion ±ê\\&<
autrefois habitée refta déferre t mais -
op ^enferma infenfibleroenr dans la
nouvelle enceipte lç mont Calvaire y
<*} qui étoit auparavant hors des mu-
rai lk s. Les Infidelles chafférent les:
Chrétiens cfe h Cité Sainte & en fu-
rent cfaaffés àkur (eus par Héraclius f
mefcpçttd^f&ns après ^ fous le réçne
te <$t ppioereur^ îc fous le Khahfat
d'Omar , les Mahométans fe rendis
sent maîtres de la Judée & de la Capi-
tale de cette Province. Ils élevèrent;
fat le lieu qi l'on voyoit autrefois le
£upeux Temple de Salopum > une;
fuperbe Mofquée *jui iubfifte encoce
(<x) Tous les Orientaux Chrétiens , Juifs 8c;
Mahométans , dîfent que la tête d'Adam eft*
enterrée fur le Calvaire ,;& que la Croix deA
Jefus-Chrift nrtpkméepr^dietnent dans le . ^
lien oti cû cette yg»; tes Hébreux appeiloienr ~
le Calvakq Golg^th*, & lés. Crabes Cra-
nion ou- Acranion* Ils ont t&é ce mot du.
Grec. Gofeotha . Crànion, Calvaire , figni-
fient la mène cnofë , 8i viennent de l'opi-
nion donrnous parlons 9 touchant le Crâne'
d'Adam.. Il y à dans la BMot~du Roi un
mannfr rit Arabe qui contient une longue con*
jrer&tion entre ce Crâne & Jefuj-ChrUL
f9 -ttïSfOtSÊ
de nos Jours , & pour faquelle ces pefci
VS' wJ^pfes oM me fr grande réitération. (*tt
' Les €iroS£* 1* cftangére»r en* Eçlife
& y adorèrent le Meffîe* Jéitefaïeiw
firop connue, pàtâ êtte décrite atfed
plus cfc détaif, étoît fltavfe terns dons
notisparîoas, ptas ïongue que large, <fc
renfermai t aa Sutf-Oaeft l^montkgiiè
cTAcra „ &F€hf en* cellëde Rftoriàh <o#
étoit le temple ^ m Nord' la <*fifti#
de Béfétfca v & ad Nerd^Oueft celte
du Calvaire. J :/ ir *
Les Wèorieî» difënt <fiiff àfroitf
alors dans faPlace fehtaàte mille hcftn«r
mes en <é*at de porter tes armes r fans
eon^^Ttt vieHfards,fesfeimmesJ& fest»
enfans ,iiombreprobat>!emeht exagère^
maïs qiuls rendent vraiïemblaBie , en?
ôbfervant que lesHabiuns des cam-*
pagnes & ceux des villes conqui fes%
«*t.<s*um. éroteaK accourus à Jémfalcm. Baléar».
Boha.edd. A: mal obéi , împii* tfabord aux Cm
A^ui-f* moyens une ardent qttffe taflentitfcfere*
schéik-zem, tôt après. If créa ptufieurs Cfievalïers?
** parmi fes Bourgeois , croyant leur don*
Ber plus de bravoure par cette eéré-
., i i m.,' i ■ I*
{a) Voyez ce que1 nous avons dit plus haotf
ftionie , Se fit faire de la mofcnôye avec *85~
forgent qui couvrôirlà Chapc^dh' £*&£&
Sépulcre on dé Ia> Réfurre&ion , mo^ *
Àument de la piété d'Hélène & de la
magnificence des premicrs-Empéreurtf
Chrétiens;
Les Sarradns furent étonné* du*
grand nombre de troupes qu'il* trou**
vêtent for festrturaîBes en approcher
de la vilfe. 13* Àefférent Fàttaque dot
côté Ocddfcmal le teieurf fortiffé,& dé*
fendu fartamp&r dèo* grottes tours oue
ckadellfcSjappelîées fune Hippicosfau-
rre Pfiphimtm €*ftti'pifivt<hqiïon croit?
Itre k toar 4e David , dont il eftToû*
vent partie éfens Tes BetivîalnsdeïCrdi^
fades. Les AtTiégésfi*ehtdâ«s les corn-
mencemens tmevtgckrrebfe réfiftànce;
PhiGetsrs fois Ils «cftctére&r . f ennemi?
& brûlèrent fes machines. Il eft à re-
marquer me dàm'ces foftfes, la plu-
Gît d'entreui avëient des pêlës avec
quelles ifc -Ç èfctfem de la potiffiérd
aux yeux dfes Sac rafins pouf les avet*-
gler > & les combattre avec ptos d'a-
vantage. Saladin ayant feir pendant
huit jours <fe» efforts intrrifes> & voyant
fes Solda» rebutés de leur peu de fitc-
ces , prit le parti de changer Fordre es
Hé g II mont* à cheval * & alla luî-raém»
}♦ %i\*ï. vifii£ ïes lieux. II découvrit que la
partie Orientale étoit la plasfoibïe*
& réfohit d'y portée l'attaque. Il fit
tout préparer dans le filencc de ïa nuic
pour n être pas troublé dans Tes def-
ieins, & partit à la pointe du joair^
Comme le pays étoit coupé de mon-
tâgtres& de couines , il fallut faire un
long détour > - Se s'éloigner de la ville»
Ceux qui gardèrent Je» murailles 9
trompés par cç mouvement t croyept
êtredélivrés,.& annoncent cette agréa?
ble nouvelle au refta des Habitans*
Alors Xj hommes ,. femmes; , enfaos-,
yieHteds y tous- fortune des maifons 9
remplirent les rues , &.fe livrent aux
accès d'une joy£ immodérée. Mais
tandis qu'ils courent en foule aux
Eglifes , pour remercier Dieu de leur
bonheur y les Sarrazins paroiflem de
l'autre côté fur le monc Ôlivet. Les
cris de la défolatiou fuccédent aux
tranfports d'allégrefle ron pleure, oa
£e lamente, oh rafle de la plus grande
confiance au déief poir le plus affreux»
Saladin ne perdit pas un moment?
de temsj il étoit arrivé vers le crépuf-
cuie dufoir pSc fit élever avant la fin
du
r
bs Sa LAD in. L iv. VIII. 7$
du jour , plusieurs machines , Se envi-
ronna fon camp de paliffades d'oli-, j^*,^
tiers. Dans l'oofcumé de la nuit , il
commanda aux pionniers d'aller com-
mencer leurs ouvrages contre les
avant-murs , appelles murs de barbai-
canes. Le lendemain au lever de 1 au-
rore , il fit armer dix mille cavaliers
& dix mille fantaflins. Les premiers
eurent ordre d*aller fe'pofter aux por-
tes de faint Etienne & de Jofapbat *
qui afcotiriflôient de ce côté , pour em-
pêcher les Affiégés de faire de$ forries.
Les Ceconds furent chargés de marcher
avec les mineurs >pour lés foutenir Se
favorifer leurs travaux. Ces faurafflns
avoiettt outfe leurs boucliers ordinai-
•tes , un antre grârtd bouclier nommé
iargue ou targe (a) qui les couvroh
entièrement , & dont ils formoient une
efpécéde paliffàde contre lès traits des
ennemis ;• derfiéire- laquelle lesAiV
chers lançaient leurs tiéché*. (Cette
troupe s avança dafis cet *>rdre Jufqties
aux barbâcanes^eS mineurs Se le* pion-
— - ' ' >■ ■ « 1 1 » i ■■ .
(a) Tarcir , Targrr 9 ( operiment* quibui *â
\Hnros MccedeMes :, ni Udertniur ,' protegt-
' hmniur. ) -• • «. ' ....•• * *
Tome IL Q
74 r Histoisli
nicrs fautèrent dans le foffé , Se fapé-
Hég. f85. rent ie$ murailles.
• *c* " 7* Dans le même rems, les machines
agifloienf fans relâche , contre la tour
dite angulaire» Ceux qui la gardoient
coururent dans la ville avertir les Ha-
bitons du danger commun , & les ex-.
horiçr à faite leur devoir. Les Affié-
gés parurent un moment (tir le% rem-
parts , & furent bientôt écartés par les
flèches & les. traits dont on les acca-
bla. En vain voulurent-ils interrom-
pre les travailleurs en jettant fui* eux
des pierres & do plomb fondu. Les
Sarrazins fe . fervirent ftetout avec
beaucoup de fuccès & d'adreiTe de ce
feu grégeois inventé p^r uncertaia
Gallinicu* d,Helt<>poljs (,oa,d<e BagJ*»
bek) fous le regnp de Conftaptin Pc-
§onat. L'effet de ce feu terrible itoit
?acqMérir de nouvelles forces» dans
J'^aiu Qn ne l'éteigftpft. qiniyec du
vinaigre, du iaWé,; dc!rurinç>& mô-
c me avec de l'huile. Qn le. >t0»oit or-
_ di nai terrant enfermé dans d^phioJes
de verre ou dans des pots de terre. Dès
que ces vafes jettes parles machines ,
[ étoient brffés » M matière s'çnflam-
* môit & br uloit tout , jufques aux pieç-
h C. Tltj.
t>B SALAftî». Itf/VlIIi 75
res , difent les Hiftorien* <fti tems , qui
mêlent toujours le merveilleux avec iHrg'J.tl#
ta vérité. (4) Cependant les mineur*
avancèrent retiennent leurs eaVrages,
qu'ils minèrent en deux jctatfs^qulftzë
toifes de murailles , les étalonnèrent «
avec du bois, y mirent le feu ^ tout
s'écroula dans tes fofiès avec fracas.
Le trouble & la cenfufion augtoen'
toienrdans la viHeavecie péril. Dan*
cette agkittïeirg^riferateV les plus jeû-
ner parmi 1« Aiîïégés, montent à
cheval dam Fefpéradce de repoufle*
fesaemi par une a&ion de vigueur;
On, Icttf ôtfrtela porte 4e" Jofaphat,
à* en fottettr«fc tombent avec fttrènt
(«ries (Cavaliers «que le Srfrliafn avoit
placés eft cet endroit', précaution fa-
ge qui rendit ces efforts inutiles. Les
Sarrawns reçurent cette troupe , la
lance en arrêt , & après arôît efluyé
& première âf&u*, 9s là pôurfuM*
rent 8c la firent rentrer en défordre.
r Alors oh tifentènfit plus dans Jé-
ta&lein; que des cris & des gémifle-
(a s H faut détruire tous les fondemens de
Tttiftoire1;' i l'on croft avfec quelques Chy-
irâes,; quitte eftuitefable'<; ; :»-
Gij
j6 . "Hl tfTOf *B :
mens, La frayeur > le danger pref-
tfçg. fis. ^ant » ' *d*e ^e *a mort » **ren* ^ -A
J. c \i%7\ coup de ce Peuple pervers , on Peuple
' pénitent. Il recourut d^ le malheur 4
Dieu au il oftenfait fans remords da« s
♦ la profpéritc. On fe frapoitlapoktihe
*veç des pîçrre? , en criant miféricor^
de , on £e déchiroit Iç corps à grands
coups de difciplifie. On fe profternoic
dans les Eglifes ; les Religieux ,J es
ReHgjeufes iprtis de leurs Mpnaftérôf
alloienc en proçeffion autour deq mu-
railles , £ieds puds , portant des croix *
& chantant des Pfeaumes. Les femmes
fêlant des pratiques fuperilirieufos à
ces ades 4e dévotion firent mettra
d^ns le? Plaças publiques > & ppiacîpai*
lement devant le faint Sépulcre , tdç
grandes cuves pleines d'eau froide > y
plongèrent leurs filles }ufque$ au ml »
& leur coupèrent les cheveux, croyant
npoaifçr par c^ste *&ion, Ifcrfoiéfeofe
Tandis que les Chrétjiwisfet}gu6lent
de leurs plaintes inutiles 9 kuf Pieu ir-
rité contre eux & fourd à leur voix.,.
Saladin poulîoit le fiége avec la plus
]»^i4e vigueur. Déj^ ynç partie de lu >
tour angulaire à^f xcrâ tnfcê gaç l'ef-
»Ê S Al a» in. «Lïf. Vtïl. jf
ici des machines, & la ville ouverte
de toutes parts. Parmi ce grand nom- jfc?'iîï>
bre d'Habifans, Jéru&lem trouvoic à
peine quelques défendeurs. On fe'li*-
vroir à la douleur, on cou roi taux EgH*
les, au lieu de courir aux armes. Le dé-
couragement était1 tel, qu'on ofïroft
cent bezans à ceux qui vouloient paflèr
une feule nuit fur la brèche, & per*
forme ne fe préfentoit. Cependant on
rougit tnbn de tant de lâcheté. On
tint un confefl général , & l'on dit qu'il
falloit forrir tousenfemble5faire un dei>
nier effbrtpour déKvrer la Cité fainte ,
ou mourir au moins avec gloire en dé-
fendant la Religion. Tous les Citoyens
applaudirent à cet avis , & prièrent Ba-
léan de fe mettre à leur tête.Mais le Pa-
triarche qui avoit dans la ville autant
d'autorité que Balcan , & moins de
. courage , loua leur réfolution , & ne
l'approuva pas. Il repréfenra que les
ennemis croient trop bien retranchés
•pour être forcés dans letir camp , Se
trop nombreux pour être vaincus.
Qu'on animeroit inutilement leur ra-
ge, & qu'on les exciteroit à la ven-
geance. Que cetteentrewrife plus hir-
die que prudence» expoieroit la vie &
G uj
yf Hiferorai
la Religion des femmes 8c des enfiink
ïc! ni3! *¥** reftotent dans la Place ; enfin que
* " 1% dans l'extrémité ot\ Ton fe trou voir*
au n'avoir .de reflburce que dans une
foumiffioii promte , & qu'il valoir
.mieux implorer la clémence iefes en-
nçrais > qu'irriter, leur colère. À cette
proportion , toute latfèm&lée fondit
en larmes. L'idée d'abandonner ces.
lieux refpeétables où te Sauveur avoir
Terfé tout fort fang pour le falur dvt
monde y fjtifok frémir ces Chrétiens
devenus zélés par le malheur» Néan^
moins on fut obKgé de fui vre l'avis du
Patriarche, 8c Baléan lui-même fut
dépuré vers Satadin, avec Régnier de*
Napoulous& le Patrice Thomas.
. » Je fey ois bien ., feur dit le Sulrhariv
*que vous viendriez me demander la
npaix. Il falîoit l'accepter lorfqué je
»> vous loffrois moi-même. Votce con-
h fiance vous a perdus.lt n'eft plus tem&
» de parier de capitulation. Je nen^
w trerai daas Jérufalem qu'à force oa-
» verte. Ma Religion m'ordonne de
w purifier par le fang des Chrétiens*
»» cette ville fainte que vous avez fouiL
» lée en y entrant , par le carnage de
» tant de Mufuiœans, Eafin j'en ji&tt
ton SaiAdin. Liv. Vin. j$
n le ferment , & je ire pois devenir par-
ti jure. •« Les Francs furenrdans la plus Ht*.- *« j.
grande déflation fin apprenant cette ,,c* ll87*
nouvelle. Cependant ils renvoyèrent
encore pi nfïears fois Balcan, pour tâ-
cher de fléchir ie Vainqueur.
Balcan propofa cent mille bezans
au nom des Citoyens. Cette offre
ayant été rejettée , i 1 pria Saladm cfim-
pofer lui- même telles conditions qui!
vôadroir. Le Snlthan fe tournant vers
la place , 8e montrant (es étendards
qui flortoiem for les murailles , repré-
fenta au Député qu'on n'accOTdoit pas
des conditions pour une vitte pnfe.
En effet , la conférence Te tenoit dans
un lieu élevé , cPoù Ton découvrait
toutes les opérations du fiege. On don-
noit dans ce tems-là un aflaur gêne-
rai , & tes Sarrazins montés fur les
remparts, y a voient déjà planté leurs
bannières , mais ils furent peu après
repouffés. »'Ne croyez pas, dît Baléatt
»que Jérufalem manque de défen-
ï» leurs. Il y a un très grand nombre
frd'Habirans qui ne combattent point ,
» croyant obtenir une- capitulation*
»Dès qu'ils -auront perdu toute efpé-
»rance» forcés de défendre leur vie,
G iiij
Ço HlSTOl&B
» ils deviendront des Soldats ihtrépu
3.Hc?ix8\* M(*es# En^n > SeîgMUi 9 taiiïcz-vou*.
Tbid n toucher par les prières de tant de
scheik-zem, s» malheureux qui vous crient amman ,
Ah^uiPh. $> par don, mifericorde»« Saladin re-
Î gardant ton ferment comme un lien
acre que les hommes ne pouvoient
dénouer , fut inexorable , & répondit
qu'il ne lui étoit plus permis d'écou*
fer la voix de la pitié.
» Et bien , répliqua Baléan , puif-
» qu'il faut mourir » apprenez quelle
i>eft notre dernière réiolution. Nous
» allons la réduire en cendre , cette
«ville, avant que de vous la céder.,
»>Nous brûlerons nos maifons , nos
v meubles* nos effets, nos richeffes*
«nous dilToudrons même for & iar-
» gent. Votre fuperbe Mofquée (*). fe-
v ra détruite jufquesaux fondement,
» & la pierre de Jacob , (b) objet de
» votre culte , fera bdfée & mife ei*
wpoufliére. Nous ferons périr dans les
w tour mens les plus cruels^tous les pri-
iifonniers Mahométans, qui font au
» nombre de cinq mille. Enfin dans
(ab) Voyez les notes précédentes fur 1*
Mofquée & fur cette pierre^.
ht Sà*àdin. LiV. VlII. it
itFaccès de notre défefpoir , nous jet-
*> terons dans les fiammes,nos femmes ***? Jjj-
*>& nos enfans après les avoilégoc- J* *M
»gés. Nous nous présenterons cnfuitcf
*>a vous l'^pée à la main > & fi Diei»
99r nous réfute la vi&oire , il nous accor-
dera du moins une morr glorieufe y
9» & le pardon de tant de fureurs dont
9tvous aurez été la caufe. u Revenez
demain , lui dit le Sulthan effrayé de
ce tableau d'horreurs , » je confufrerat
j»les Dofteursde ma loi fur le ferment
«qui me lie; je vous accorde une trê-
» ve dans l'intervalle.
Les Imams & les Cad h is , fculs Ju-
ges dans les points de doûrinè & dt
inorale , décidèrent , félon les fubtili-
tés d'Àriftore , traduit en Arabe fous
AUmamoum , & dont les Mahométans
avoient adopté la Philofophie , que la
foi du ferment ne feroir point violée,
fi les Chrétiens fe rendoienc à difcré- v
lion , qu'il feroit permis enfuite au Sul-
than de pardonner à fes efclaves , &
de leur faire acheter la vie , & même
la liberté à prix d'argent , diftinâion$
heureufes lorfquelles ne confeillen*
que des a&es d'humanité. En confé-
rence Saladia dit le Jeudemaia à
8* HTstotiti
Baléan, qu'il r ecevoit la foumiffîôirxfc*
*%* ***• Habitans , que dans l'iefbace de qua-
J.C 1187* • *.ik • ^ ! _
rame jours, ife payeroient pour leur
rançon , les hommes dix bëzans ou
écusd'or ; les femmes cinq , les enfan*
deux , & que tous ceux qui ne rempli-
roîenr pas cette condition , demeure*
roient en fervitude.
Ces articles furent lignés fe Ven*
iccii vingt-fept de ïa Lftne de Red-
?eb cinq <fcns quaitre-vingt trois de
Hégire. Les Mahomérans ne mat*-
Sucrent pas de le fouvenir dé la prés*
iûiorn faite autrefois à Saladin qu'il
prendroit Jférufalcm dans €e mois r
(^r) & de regarder comme un augure
favorable & une preuve certaine de
laprcre&ion du Ciel, ]a circonftance
de ki fête qtfrls célébraient le même
jour , celle du voyage miraculeux que
Mahomet fit dans une nuit de ta Mec-
que à Jérufalem , & de Jérufafem ai*
Paradis , où il vie tant de choies mer-
▼cilleufes ; voyage appelle par fes Sec-
tateurs Mérage ou Âlcenfion. ty) Le»
(a) Nous enr avons parlé plus haut L. f #.
pMf. $67.
(fl Mérage % ce mot figpifie. Afcenfio*»
lie Sàljldïn. Lit. VIII. $$
Chrétteos obfer vérenc auffi que la Cité
fainte conquife par les Croifes du tems /i^,1jU*
du Pape Urbain IL fut repf ife par le»
Infidelles , fous le Pontificat d'Urbain:
ÏU. (a) BU avait été poOcdée par le»
Francs pendant quatre-vingt-huit ans ,
& gouvernée par neuf Rois tous Fraa*
montée. Les Mahométans difent que la nui*
du 27 au 28 Redgeb , & l'a dbuzrlme année
de la mifîîon de Mahomet rIe Prophète trans-
porté rmraculeufernem dat» le Temple de
Jérufalem , après avoir fait fa. prière , appeiv
futenfortaat w animal e^traordinaicenonv
mé al-Borak & çuttenoit de l'âne & du mu*
let; qu'il monta fur cet animal & fut enlevé*
priqu'au plus haut des Cievx , 011 il vit un*
infinité de chofes merveillèufês décrites dans
jun livre , nuîa.peur *iere Ket*1>~*UMér*g9 „
JLivre ou Traité de V hkw&otu fis donnent
auflïà ce rqirade fuppoft , tenetn de #?-Al&
è*tb9 Réfiirreâion, & il&encéléb«nt tous
les ans la mémoire par de grandes réjouiflan-
ces. Cette Fête s'appelle- L*iUt»*l-AîéM£$ ^
la nuit de l'Aicenfion.
{a) Corameon remarque que l'Empire qo*
svoit commencé à Rome-par Àueufte , finit:
par on autre Augufte ou Auguftule, que
Confondit fonda l'Empire de Conftantino-
pie qui fut détruit fous un? Conftantm , que:
te premier Roi des Wifigots , ainfiquelcdej^
nie/ ft fin un Àlans h &&»
$4 * .&*•* TOltt.
çois d'origine. (4) Cet événement rti£.
iHc •»îîi" morable arriva lou$ le régne de Na&
* 7' fer-eddin , Khalife de Bagdad , d'I&ad
l'Ange Empereur dOtiefode Frédéric
Barberoufle Empereur d'Occident, de
Philippe Augufte Rcfi de France y&
de Henri IL Roî d'Angleterre , le pre^
mier ou le fécond Ottobre de Tannée
onze cens quatre-vingc-fept , époque
à jamais funefte à la chrétienté.
Les Habitons qui avaient pleuré
pour avoir une capitulation , pleure*
xerit après f avoir dbtenue ; ilsjie pou-
rvoient fc confôler de la perte des lieu±
&infe Cétoit un fpedacle bien arteri-
driflant de les voir s'efftbraffèr les uns
les autres . fe demander pardon de lew
Êaine, de leur divi/ïon, lever les mains
au Ciel en gémiffanr , bai fer avec rek
peék les murailles des Eglifes qu'ils ne
dévoient plus revoir, fe tenir profter-
nés dans le faint Sépulcre le vifage
collé contre terre , & arrofer de leuss
:r ' 1 1 m 1 11 1 ! »
[a] Les Crotfcs avaient pris Jérufalem le t j
Juillet j 099. Les neuf Rois de Jérufalem font
.Codefroi de Bouillon; Baudouin L Bau-
douin II. du Bourg, Foulques , Baudouin III.
• .Alméric ou Amaury, Baudouin IV. le Lé«
preux , Baudouin V. &. Gui de Lu%*a,
as Saiabih. Liy.VIII. 85
larmes les lieux où leur Sauveur étoit
mort. Mais les pauvres qui pe pou* Hé6- ***•
voient payer leur rançon, 8c derneu- h C' n 1%
roient efclaves félon h convention ?
étaient tout autrement affligés. 11$
pouffaient de$ hurlement horribles ,
sarrachoient les cheveux dp défefV
poir ,: & déchiraient Jeurs vétemens/
Cependant Huilant fat^l approchoit
où Fan devoir fortir àt ;Ja yflte ; le teri*
me de Quarante joué* pliait expirer. *
Saladin ne fut Jamais fi grahd qtitf
dans cette occafion, parce quel* vé-
ritable grandeur confifte plus à Faire
du bien à l'huma^Hté par des aéhomr
genéreufês, qu'à la détruire pair derf
expiâtes meurtriers ,!& par dés con-
quêtes, lidiftribua. dans tèus les qaar -
tiers de la ville, des côjps At garde, de*
Officiers, & dans chaque rue, 4és (bn-
ttaelles pour réprimer les violfenceé
des Soldats;, & lés Smpêéhet tfmfiil-
tér au» Chcértewi Itpërrriif aux Grecs
& aux Syriens de demeurer dans Jéra*
faleni , & leur céda TEglîfê du fèint
Sépulcre. Il voulik qu'on laiflàt tous ifc**.
% les malades dans les Hôpitaux , ordon-
na qu'otites traitât à les ptopres dé-
pens 9 ôc consentit que les frères Ho£
S<$ Histqub
' pitaliers cpntinuaffem d en avoir foin
hè\\f7. i^V1'* ^ur parfais guçrifon.
* * Dans le même rems on recevoir la-
rançon de cçw qi*i pouyoienc payera
Les paujrtff$étpiej>t faic^ ç<vta. Le
Sulthan en délivra nlille à ia prière
«jfefbn itère Séiff-eddi^Adel >& mille
autres à la foliicitarion de Balcam
m Vous avez faif 9 lçur dit-il y vttaeau*
»j.rnônel'iia& l'autre jilîeil jufte que
m je fafle la inienfig. Publiez dahs hr
» jrille flue r<ws4cfr ptfuyiË* peuvear «n
v farcir , & quCr jer leur donne Ja li-
m berté.« Les Hiftoijiens nousaprjren-
uppt^jue le nombre ei*ctok twrs-don*
(ùiér^bie, Eijfift lei j^ur* arriva^ trii #
falJoi^yuidjer la place. rOtiiierfnatou-.
tçs ,les #$çtçs > excepté <>$ltedH David v
pat lacju^lkle^Habimns devaient dé-
filer. j&la4i\i . affis fur fon , trône , les
fit tpus paffer devant lui * moins pour
jouir de fa viftojre de ;kr£vet* ipg. in*
fortunés, que pour fouiàger ltarnini*
(eue.- • • ; ! ; - rv ,*"" "•: .
. Héraclius parut le premier fuivi de
tout le Clergé féculier & régulier. H .
avoit enlevé les lames d or & d'argent ,
les yafe* {acres ,. & le tréfor du faim
Scpulçcç j JJès Sarrazim vpulaieacjc*
se Salàdih. Liv. VIJL 87
tenir ces richeffes, parce que félon le
traité » elles app&rténoienr au Vain*" H*g <8j.
queur-, mais le Suithau appaifa cette Jt c-"8*
concertation , en accordant le coût an
Patriarche. Baléan venoit après avec
les autres Barons , les Chevaliers & les
principaux Citoyens* Saladin les reçût
avec bonté 6c leur, donna à tous des
marques de fa magnificence. (*) On vit
arriver enfiiire un grand nombre de
femmes^défolées , elles tendoient les
mains vers le Sulthan comme des-fup»
pliantes , lui montroienr ,pour émou*
voir facompaflion, les petits enfan»
dont elles étoient chargées^ verfoient
un torrent de larmes.SaUdin Jeu rayai*? Ibji.
demandé le Ctftt dfe leur affli&ion : b
m Nous avons tout perdu, lui&rent-elr
*» les, nos maifons, nos biens^ notre pa4»
m trie y nous allons errer. Guis iecours
* & fans efpérance » dans un pays qui
#nous eft devenu étranger. Mais , Sei-
»*gneur , vous pouvez adoucir nos
(a) Quelles Hiftoriens prétendent quejja
Reine etoit a Jéru&lem , qu'elle forât avec
deux jeunes Princeffes fes nlles , que Saladin
alla au-devant d'elle , la confola oc eut dout
elle beaucoup d'égards. Us fe trompent. Cette
Princeflè étoh allé joindre le Roi fon mari.
»maux , fi tous êtes fenfible à la pl-
Hég. ^83 i»tié.. Rçndejt-nous nos maris , nos pc~
•j.ç. ii*7. ^rôs^ nos enfaiis que vous tenez pri-r
»fonnters. Ils nous ferviront de guk
4» des dans notre route » ils foutien-
»dront notre foiblefle» & nous ai*-
lieront à (apporter jnos malheurs» «*
Le Sulthan touché de leur état déplo-
rable, fit chercher parmi les Captift
faits dans les batailles précédentes t
ceux qu'elles reclamoienc,& Jes leur
rendit. Il fit plut encore* Il combla
ces (Femmes de préfens proportionnés
"à leurs qualités & à leurs bef oins. Cel-
les dorit les parens avoient péri dans là
guerre , trouvèrent dans fa générofïté
des motifs de confolation. Il leur lit
ttes dons beaucoup plus eonfidérablea.
-Per fonne ne ih préfenta devant lui,fan«
recevoir de l'argent ou des provifïons*
il rendit à ces malheureux Habitat*
•au-delà des *fommes qu'il en avoir r*»
*irées. EnBn l'Europe étonnée admira
-dans un-Mafidman, des vertus mcea-
nue»s auxChrétiens de ce fiécle#
Les Francs furent conduits avec urte
bonne efeorte jufques fur les terres de
. .JBoëmond, fils du Prince d'Antiochie
& devenu Conttê-ide Tripoli paGifci
mort
be Sàlàimn. Liv. VIÏI. 89
Mort de Raymond. Ils s'attendoient
•l'y trouver des hommes charitables, K*- |JJ*
ils y trouvèrent des monftres. On leur * l 7*
ferma les portes de la viIle,on leschafla
du territoirc,on les pourfuivic les armes
a la main , on leur enleva tout ce que
les Sarrazins leur avoient donné. On
poulfa la barbarie jufqu'à les dépouil-
ler de leurs habits; on ne refpe&a ni
le (exe ni l'âge ; pn Uifla ûuds dans les
campagnes, les hommes , les femmes
& les filles. Une femme (e voyant ar*
xacher le peu de vivres dont elle nour-
rjflbit (on enfant quelle tenoit dans
fes bras , le jetta furieufe dans la mer ,
en accablant demalédi&ions le Comte
Boémond & fes Sujets. .
C'étaient des Chrétiens qui traif
toient ainfi d'autres Chrétiens. Mais
ceux qui s'étoient retirés auprès d'A-
lexandrie * pour paffer de là dans leur
ancienne patrie, éprouvèrent, un fors
bien diffèrent. Les Mahométara leur
fournirent ejes tentes , leur dreftérenjt
une efpéce de camp hors ta ville , &
leur firent tous les jours d'abondantes
aumônes. Quelque teins après il arriva
dans le port des barques Génoifes ,
Pifannes , & Vénitiennes frétées par
Tum. IL H
90 H'iGTtux r
de» Marchands d'Italie, qui par Veut
*çïtl*7. commerce, Éaifoient rentrer en E«~
rope une très-petite partie des richef^
fes que les Croîfés avoienr -portées et*
B»id. Syrie, tes moins pauvres parmi le*
Francs louèrent ces b&ctmens , & fç-
difpoférent à partie V abandonnant
fans (crapule leurs, compagnons che^
les Infidélité Les Patrons" vinrent fs*
toh l'u&ge deraa»dfcr leur gouvernait
à l'Ënik quf commandeit dans 1*
Place. Cetoi d leur répréftma qu'ils
n'avoient encore embarqué que le
!>Ius petit nombre des Chrétiens On
ui répondit que rous les autres étoîent
de» miféraMes qui nfevotenr m- âr^enr
pour payer le dtoit dfe partage , ni
proviuons pour fei route ,. 9t qù on ne
les transporterait pas gratuitement.
Cet Emir qui par un ample motif
d'humanité,avoir nou?rf pendant plu*
fieras mois ces étrangers: ennemis i rré*
tondlia&tesde fa religion & de foi*
maître T far étonné* dfe ce dîïeours*
Apre* avoir reproché vivement à ces
Italiens leur avarice & leur dureté ^ iï
promit de donner lui- même les vivresr
& Tes provHbns néceffàires , 8c les fir
-j^er de «e p'cHnt malcraiter cette
t> E S À L À D I H. 1 1 V. VIII. pt
troupe dans le trajet & de ne la dé-
barquer que dans les Ports de France î1*!" ,]ll*
1», ... i é r J#t», 11*7.
ou d Italie , les menaçant de fa ven-
geance , s'ils violoient leur ferment.
Ce fut à ces conditions qu'il leur per-
mit de lever l'ancre.
Tous ces faits paroitroient peu
croyables T s!ils T netoient atteftés
avec encore plus de détail , par le récit
unanime des Hilloriens Contempo-
rains. Qu'on ne fe récrie donc plus*'
fi eh comparant la conduite des Francs
&des Infidelles , on demande laque lie
des deux .Nations meritoit le titre de
barbare.
Cependant Saladîn fit Ton' entrée
triomphante dans Jérufalem avec d'au-
tant plu 5 de pompe,qu*il avoit toujours
regardé la prife de cette ville, comme
le but principal de (es conquêtes. If
reçut à cette occafion des Ambafla-
dteurs de tous les Princes de l'Orient >,
qui le félicitèrent fur fa viétoire ; mais
ce qui ne le flatta pas moins, ce fut
de voir arriver à fa Cour les plus fa-
rgeux Do&eursde la loi Mufulmane^
les Sa vans, les Orateurs & les Poètes»
#jui célébrèrent tous àFenvï ce grand
événement dans des ouvrages dont
Hij;
fl HlITOUE
■■ ■ ' . quelques-uns font venus jufqu'à ncfàA
h%. f^.Saladïn le plus libéral de cous les hom-
J. v **** mes, récompenfa généreufement leur
zélé & leurs talens. Lorfqu'îl n*avoit
plus rien à donner r il vendait jufqu'à
liés meubles , & cfoyoit que le coeur
des Peuples écoit le feul tréfor digne
clés Rois.
II pirifia toutes les Mofquces, 8c Et
laver avec de l'eau rofe qu'on ail*
chercher à Damas» celle de la pierre
de Jacob. 11 y plaça une Chaire ma-»
gnifique à laquelle te Sutthan Nour-
eddin avoir travaillé lui-même; , & que
ce Prince avok defHnée pou* le Tem-
ple de Jérufalem. On fondit toutes le»
Cloches, on renverfa toutes les Croix,
6c peu s'en fallut qu'if n'y eût du fàng
répandu, torfqu'onabbâtit une Croix
dorée que les Latins avaient mife fur
le dôme de la grande Mofqaée cfian-r
Îfée par eu* en Egtife Patrîarchale. Les
oldacs tramèrent par mépris dans de
la boue x te trophée de la Religion. Les
Grecs ft tes Syriens qui ne s'étoient
point défendus pendant le fiége , prf-
rent les armes pour venger 1 nonneSr
de la Croix ; mais Safadin étant ac-
couru fur la Place x diflïpa ce tumulte*,
ttE $XhA*ï*. Ltt.VW.'rf
et pour prévenir defemblablesdéfor-
dres, il fit oeu de jours après, des régie- "*? J[ j£
mens fi iages , que les M^homètam
& les Chrétiens vécurent dans la foire
en bonne intelligence. Il fonda félon
fa coutume , des école» publiques &
& des Collèges où l'on dévoie eafei*
gner latioétrine de Schafféi , à laquelle
\\ étoit attaché. Il vouloir que fes fu*
jets neuflent qu'une feule opinion
.comme un feul maître*
Après avoir pourvu à la fuYeté ic à la
police de fa nouvelle conquête , Sala*
din partit avec (a Cavalerie , ordon-
nant au refte 4e fon armée de venir le
joindre à Prolémaïs. Là il fe ptépara
au fiége de Tyr , perfuadé qu'il s'en
rendroit maître plus difficilement , s'il
dontioit le teins à l'Europe allarmée
de la prife de Jérufalem, Renvoyer
du fecours dans la Paleftine, Dès que
fes troupes furent arrivées , il décam-
pa , fui vit les Cotes , & fe montra de»,
vant cette ville célèbre y le jour de la
' Touffaint dans le mois de Ramadharw
(*) Conrad le feul bomme parmi les
(a) Neuvième mois de l'aimée Mufolmn*
«gnfacré au jeûae*
f* Hrsrorif *
*"*SS5Ï* Francs digne de commander , avoir
' Hçg. 583. prévu l'orage ,.& fcît de bonne heure
'" ^ * ' *7' les difpofi rions néeeflaires [tour en pré~
venir l'effet. U avoit ajouré Je nou-
velles forrifieacions aux anciennes r
amaffé des vivres y des munitions <te
guerre, d relie des machines & accou*-
fumé les Citoyens & les Soldats au*
veilles , aux fatigues & for-tout à une
cfifciplihe éxa&e* Tyr éroit fîtué dans-
une prefqu'Ifle, & ne tenoic au Con-
finent que par une Tangue de terre.
C etoir fur te tersein-érroit fermé pat
«ne triple eneeime de murailles flan-
tjuées de grofles Tours , qu'il falloit
combattre. Peu de troupes fiiffifoienr
pour le défendre , parée que peu dfe
troupes pouvoient Pattaquer.
Saladin connut toutes tes difficulté*
de l'entreprife & mir fa gloire à le»
iwd. furmomer. Il fit -équiper 'quatorze
grofrvairfeaux ou gaïéafles, pour bar*
rre la vilte par mer', tandis qu?ri là.
^reflétait par xttrè-. Mais avant _que#
*Touv*ir le i'ége , il envoya un Héraw
au Gouverneur, pour lui fignifier que
s*i^ ne fe rendbtt pas*;, on afloit rraiî»
' tktx là tête. a fon' p'ere le vieux Mar-
quis de Montferrat. Conrad aufll pete
0& Saiadiw. tifrVIITr9f
d&ranlé des menaces du Sulthan qu'il.
£avoit été autrefois de fes promettes * j!?o utr^
répondit avec la même fermeté. ïh
fa voit bien que ce Prince qui aima tou-
jours à épargner ie fàngmême des cou*
fables , nfauroit pas ta cruauté de faire'
mourir fans fufec un prifonnier de'
guerre innocent die tous crimes., IF
prit cette déclaration pour ce qu'elle
étoir, pour un artifice , &fut inflexî--
*le.
Saladifpcommençà dont à faire agit
les machines , éc à donner des aflam$.
H partagea fonr armée en trais corps ,
qui fe (uccédoîent les uns aux autres
dans lateaquev afin dé fatiguer farts
f elâche fes affiégés & de lafler leur af-
deur. Le* Chrétiens qui aboient mon-
tré une G grande foibleffe dans les ba- -
Tailles 8c tesfîeges ptécédèhs, fedéfen-
dirent en braves gens , tant l'exempte
du Chef éftpuiflant fiir te Peuple- tes
femmes îahçoiem ettes-mêmes des fié*
ches & foutenoient técourage des fol»
rfats par leurs difcours & en leur por-
tant ctes vivres fur les murailles. Celui
àes Francs qui fe diftingua le plus , fut
un Gentil -borhme Efpaghol connu
dans fHflloire, fou£ Ife non! de ChfcV
9$^ Histoire.
valier aux armes vertes. Il repoulTdfr
j^j^feul des bandes d'ennemis , fe battit
en combat (ingulier avec plufieu* s Sar-
razins , les terraflà tous , & le Sult&aff
qui voulut être témoin de fa bravoure» .
lie put s'empêcher dé l'admirer & d*àp-
{)laudir à fes faits d'armes* Cependant
e fiége durôït depuis dieux mois. Sa~
lad in fit venir de nouvelles troupes.
Les Mahométans enorgueillis par
leurs victoires , s'îndignoienlt de tanit
fie réfiftance, & redoubloient leurs ef-
forts. Les habitans faifoient des fortie*
fréquentes. L'avantage demeuroit tan-
tôt aux Chrétiens 9 tantôt aux Infidelr
les. Ces petits combats les affai-
bli (Tbient les uns les autres. Les
aflîégés qui voyoient tous les jours
arriver du renfort aux Mufulmans^
& qui n'en recevoient point > com-
mencèrent à fe rallentir. Conrad
- aapperçut.de ce découragement , &
' pour en prévenir les faites , il em-
ploya une rufe qui lui réuffit.
Il y avoit àTyr un jeune Sarrazin *
qui pour fe fouftraire au châtiment
qu'il avoit mérité, en offenfânt fou
père un des principaux Officiers Ma.
tiométans ,. s'étoit fauve farmi les
Francs ,
di Sàladin. Liv. VIII. 97
Francs, &avoit embraflfé leur Reli-
gion. Conrad le chargea décrire une '£*£„%}'
Lettre dans laquelle ce nouveau Chré* - .
tien , après avoir demandé pardon de
fadéfertion à Saladin , comme à fon
maître , lui donnoit pour l'obtenir &
pour preuve de fon retour fincére à l'I£
lamifme , un avis important. Il lui
mandoit que les affiégés réduits à l'ex-
trémité dévoient s'enfuir la nuit fur
des batteaux „que le lendemain la ville
ferait déferte ., que les Mufulmans
pourroient l'attaquer fans rien crain-
dre, fur-tout du coté du port où l'on
furprendroit en déibrdre ceux qui n'au-
roienc pas eu le tems de s embarquer.
Cette Lettre jettée dans le camp en-
nemi au bout d'une flèche , produire
tout l'effet que le Marquis en attendoit.
Le Sulthan trompé par les affurances
de fon ancien fujet , crut trop facile-
ment un avis que la Dnidence dtvoit
lui rendre fufpeâ. Il fit pafler fes meil-
leurs Soldats fur la flotte , & leur pres-
crivit de defcendre le lendemain dans
la ville , d'écarter tout ce qui s'oppofe-
roit à eux, & d'aller ouvrir les portes
ap refte de l'armée, qui donneroit
dans le même, tçiqs un aflaut généraL
tmtff. 1
9S Hist«u«
' De fon côté Çowead fitrentrér dans la
Hég. î«j. place ceux qui dêfendéîent les avatat-
* C* " mors, lespofta derrîéweks mar*1Ues,
çn leur recorffm&ndant dé carder tm
profond fiteftoe. Enfuit* il ôtIIbium,
âtux Citoyens de Jerfér des cris pendant
toute la nuit , *t faite beaucoup â«
mouvement fur te Port où il mît les
'troftpes en «ittbafcstde, fdtttf&nHéi
maptàui foi* *w» des barques bien
fermées & prêtes ?à voguer. *fn mo*
ment avant l'adroïe , on baiflà k
chaîne qui fermoit Péntcée du Port ,
le Peuple fe cacha dans les maifons j
4e bruit c*ffà «t tout fiit tranquille ,
«omule fi taviUe eût été1 abandonnée
<!e fes habitans.
Cependant les vàiflèa«* du Sulthan
s'approcherit, & ne trouvant aucun
•obftacle , ils s'avancent avec confian*
«e. Dès qVil «h fotentré cinq desplus
môs, Conrad fait tendre la chaîne ,
•Se tombe&rtesSalrraitihs , qui dêbar.
•qûOienten'corifiifièh.Dànsùn inftant
ht rher eft teinte du feng de ces malhfeo-'
ceux qui furent tous égorgés. Les
Chrétiens montent far les navires en-
nemis & for 4es barques qu'ils ont
équipées, donnent <bt chaffe au refte
be Sasabim. Lit. VIII. 99
4e la flotte * & lui livrent un terrible
combat. Les Infidelles après s'être bat- h%. <s,^
uts en gens défefpér es , fe font échouer J- c- < »*7*
pour fe fauver à la nage . SalacKaté-.
moin de ce défaftre , fe jette dans Teaui
l!épée à la main à la oete de (es Mam
meluJcs pour foutenir fes troupes ^
mais il croit trop éloigttéjpour leur don-»
11er du fecours. On ne vit venir fur le
rivage a .que .des cadavres noyés où des
foldats expirahs de leurs blerflires. Le*
Mahométans pouffaient de part &
d'autre de grands cris de défolatton*
^etM:s vairteaux furent coulés à fond
eu brûlés ou pris, & il n'en échappa
que deux.
Tandis que cette a<Stiba'fe patfbit
furla^ntr, daubes Samzhrë mon*-
rent à>T*flaut félon Vordce qu'ils en
«voient reçu ; ils franchisent les
jnurs de Batbacançs , 6c ne rencot*-
jtranr aucun ennemi , ils courent aux
.murailles de la ville , les minent ; les
•Étpeut (ans <fe tenir fur leur gardé.
♦Alors on ouvre toat à coup les portes ,
n& on attaque cette troupe imprudente*
Des fokbtrs focpris font prefque tou-
jours vaincus, Xes -Mahome ta ns loin
de fe défendre , fuyent en défordre ,
ni
ioo Histoire
Hég. j-gj, ils fe trouvent enfermés entre deux
,j.c.ii«7. murailles , il fallut appliquer des
échelles à lavant-mur. La promtitude
avec* laquelle ils tâchent d'éviter la
mort, les y précipite plus fûrement
encore^ ils tombent les uns fur tes au-
tres en voulant monter tous à la fois ,
les échelles fe brifent , & les Chrétiens
n ont que la peine de tuer. Conrad
revenant plein de gloire de (on com-
bat naval , fait ceffer le carnage, Se
vb rendre grâces à Dieu de (a vicr
toire.
Nos Hiftoriens qui débitent tant de
fables , difent que Saladin témoigna
publiquement fa douleur , en fe pro-
menant le lendemain fur un cheval
blanc dont ilavoit fait couper la queue,
comme une marque de fa défaite, (a)
La vérité eft qu'ayant perdu dans cette
journée fa flotte & Tes meilleures trou-
jpes , & voyant la faifon fort avancée }
il abandonna une entreprife fune/le »
.fcrûla les machines qu'il ne pouvoit
€ emporter, congédia fon arrrtéepour
«la laifler repofer pendant rhyyer & ne '
garda auprès de lui que fes Mameluks , i
-■' ' , ■ ■! i
(*) Roger de Hovedea & aliï*
»i Sàlàidin. Liy.VIH. i«
avec lefquels il fe rendit à Ptolémaïs.
Mais il étoit trop impatient de répa- £*?• t\*£
ter fa perte pour demeurer oifif dans
cette ville. D'abord il vint attaque*
fur le Mont Amila' (a) voifin de Tyr,
le Château d'Hounein ou d'Honain ;
enfuite étant de retour à Ptolémaïs , il
joignit, à la Cavalerie qui compofoit fa
garde , quelques fantafïins qu'il tira
de différentes garnifons , & s avança,
contre Caucheb. Le froid exceffif , la ma.
pluie , la neige ne purent retarder fa Aboui-w.
marche d un moment. Arrive au pied
de la montagne (b) fur laquelle la for-
'terefle étoit bâtie , il fit prendre ha-
leine à fesfoldats , & monta le même
jour à laflaut. Mais cette Place qu il
croyoit furprendre, étoit remplie de
bonnes troupes & de munitions de
guerre. Le Sulthan jugea qu'il lui feroir
împoffible de s'en rendre maître avec
fi peu de monde , & après avoir tenté
plusieurs fois l'efcalade, il décampai
(a) Le Mont Amila s'étend de l'Orient au
Midi, fur les Côtes de la Paleftine auprès
de Tyr , c'eft une montagne du Liban,
(b) Cettemontagne domine Tibériade & le
Jourdain.
IHj
101 # HlSTOI&l
prit h route de Damas , doè il étoft
i!x?.'iî*s. abfeu* depuis fèize mois.
Il n'y refta cependant que cinq jours
& fe déroba aux tranfports d'un Peu-
ple oui l'adoroit 9 pour fuivre le cours
de (es conquêtes. Depuis ïong-tems
ceux d'Antioche avoient rompu par
plufieurs a&es d'hoftilité, la trêve
Faite avec les Mahométans. Il entrait
.dans la politique des Chtétiens de Sy-
rie -, de faire la paix ou la guerre fçfoi*
les circonftances beureufesou malheu*
reufes , & dans leur Religion de fe
croire autorifés à violer les Trairé$#
conclus avec les Infidelles. Saladia
pour fe venger à la fois & du Corme
Boemond 6c du relie des Francs, réfo-
lut de ne point quitter les armes , qui!
n'eût chaffé loin de fon Empire, cette
Nation peu fcrupuleufe, & d'ouvrir
la Campagne par les terres du Prince
d'Antioche. Il dépêcha des Courriers
dans toutes les-Provinces , pour rao-
péller fes troupes , & alla les attendre
dans une plaine entre Hémeffe & Tri.
poli. Emad-eddinZenghi , Prince de
Sindgiar, lui amena celles de Méîbpo-
tamie. Alors le Sulthan fe fit accom-
' pagner par fa Cavalerie légère » &
»e Sàlàpim. Lïv.VIIL ioj
tandis que Coti armée k formoit dans
ce rendîez-vous , il alla faire des cour- ***?• 'J*
les julques aux portes de Tripoli , pour
reconnoftre lui-même l'état de cette
Place.
Guillaume Roi de Sicile ; fut le pre-
mier inftruit des inalheuçs de la Pales-
tine, & le premier qui fournit du re-
cours. Il envoya des vivres, des mu-
nitions, trois cens Cavaliers, cinq
cens Fantaiïtas & plus de loixante
•galères commandées par le Général
Margarit , cet homme célèbre , qui
mérita d'être nommé le Roi de la mer
& le nouyeau Neptune. Cette flotte c<mt. Guii,
abordoit àTyr , lorfque Satadin sap-
prochoit de Tripoli. Conrad à qui elle
étoit alors inutile , embarqua encore
quelques Soldats , & la fit partir pour
cette dernière ville. Dès que ces trou-
pes de renfort eurent mis pied à terre,
ce Gentil- homme Efpagnol, qui ayant
pris pour armes un Champ de Sinople,
étoit appelle le Chevalier aux armes
verres , tes conduifir contre les Sar-
razins. Sa force, fan intrépidité, Cas
exploits le firent diftiogue* parmi tous
les autres. II repou/Ta les Mahomé-
tans t & rentra vi&orjeux dans la Pla«
I iiij
N
104 " Histoire
ce, Saladin qui favoit honorer la va-
hcï'gil*. *eur m^me dans ^es ennemis , flatté de
' voir un homme fi extraordinaire , lui
envoya un fauf-conduit , & le pria de
fe rendre auprès de lui. Ce Chrétien
fut étonné de recevoir des éloges &
des préfens , de celui qu'il venoit de
combattre. Le Sulthan pour récom-
penfer fa bravoure , luf donna de l'ar-
gent , des chevaux , des étoffes rares
& précieufes , & voulut même l'atta-
cher à Ton fervice en lui prorrietjranï
fa fortune la plus brillante & les plus
grands honneurs. Mais ce brave Che-
valier remercia Saladin , refufa Tes
offres , accepta Tes dons & alla s'armer
de nouveau contre un Prince qu'il étoit
forcé d'aimer.
Le Sulthan nefpérant pas prendre
Tripoli , trop bien défendue par ce
fecours étranger , ne tenta pas de l'af-
iMf fiéeer. Il fit quelques dégâts dans le
Boha-cd, voifinage, rejoignit fa grande armée
vers Antrafe , Antarados ou Tortofe
(a) en fuivant les Cotes. C'étoit une
la) Antrafiis , Anatarfus , Antaredus ou
Antaradon. C'eft Tortofe ou Orthofia, au
Nord de Tripoli ; visrà-vi* , & à deux mâles
de Sa'iadin. Lit. VIII. 105
petite vflle fituée fur le bord de la mer '
dans un terrein fertile & agréable. -HéB- ïjj*
Elle avoit un porc commode pour 1$ "
Commerce^ & deux grofles Tours
placées à peu de diftance Tune de l'au-
tre» fur une colline qui dominoit cous,
les environs. Saladin furprit par une
marche forcée , les habicans qui le
croyoienc encore loin. "Le même jour
de ion arrivée & avant même qu'on
eut dre(Té le camp , il s'approche des
murailles,& pour profiter de la confu-
fion qui régnoic dans la Place , il re-
commande aux Soldacs de le fuivre &
court le premier à 1 aflaut. Dans le
moment on applique les échelles , on ' P
efcalade, on tue» on pourfuk la gar-
nifon qui va fe cacher dans les Tours ,
on encre dans la ville, & on la livre
au pillage. Ceux qui travàilloientdans
le Camp , voyant revenir leurs cama^
rades chargés de dépouilles , abandon-
nent leurs ouvrages, pour avoir part
au butin. Le Sulchan , fatigué, altéré ,
preffé par la faim , retourne dans le
de diftance, il y avoit rifle d'Arados , antre*
fois célèbre , & dont la ville eft ruinée, aiafi
que cette d'Amarados*
Camp avec Tes Emirs, 6c ofdomyf
l.Gm ww! qu'on lui ferve à manger. On lui ce*
pondir que rous les domeftiques 8ç
même les Officiers de tu i fine, étoteoi
dans la ville occupés à la piller. //
fimt tfpirer , dit-il en fouriant , tpiilt
nom apporter ont It dîner iii cnfàmit.
Après /être repofé & avoir pr»
quelques alimens , il attaque Utttdç»
Tours , s'en rend maître , & h$K fe
Îjarnifon prifonniére.Celle qui reftolfc
a plus haute des deux & lapins forte»
étoit bâtie de pierres de taijte , envi*
ronnée d'un large fo(Té plein d'eau ,
munie de machines de guerre qui lac*,
çoient fur les aflïégeans des pierres
4'une groflèur énorme,& défendue par
le Gouverneur , lès principaux OftV
ci ers , les meilleurs Soldats & les Che-
valiers des deux ordres qui s'y étoienr
enfermés. Saladin l'invertir y la bat
pendant plufîeurs jours fans beaucoup
de fuccès, & pour ne pas s'àrretec
davantage , il l'abandonne ; mais au-
paravant il comble le Port & détruit
la ville. Lorfque les. grottes murailles
furent abbatues , on mit le feu de tou-
tes parts; la flamme pénétra dau&toqr
les quartiers avec une rapidité furpro*
de Saiadih. L iv. VIII. 107
naine, & tout fut embrafé dans uiî
inftanr. Les Chrétiens témoins de ce £§*'., igjî
trifte fpe&acle du haut de leur Tour ,
verfbient des larmes de pouflbient de*
cris , tandis que les Mululmans chan-
toient au milieu de cet affreux incen-
die , des cantiques d'aHéerefle.
I/Hiftorien floha- eddin ù(\ attaché
auparavant au Roi de Moulloiil , nous
apprend que e'eft pendant le fïége <f A r*-
tarados qu'il commença d'entrer au
fervice du Sulthan , Se que déformais
il ne rapportera que ce qu'il a vu lui-*
même ; auflï depuis cette époque écrit-
il avec plus de chaleur , de détait Se
d'intérêt.
Depuis Tortofe jufqu'à Laodicéef
vous trouvez en parcourant les côtes f
Marakia village fortifié , Balanas , que
les Chrétiens appelaient Valence ou
Villeines , petite ville fur le bord de la
mer , Merkab , (t>) (fixent* Hofpitalir-
rj^»)citadelle , une des plus fortes de
(a) Boha-eddirt , la gloire de la. foi ou dç
la Religion.
[b) Merktb , Margafh , Belvoit , Spécula
Hefpittlhrum. C'eft une Citadelle très-fort*
à une parazange de Balanas»
ioS Histoire
la Syrie , que les Chevaliers Hofpita-
j. cf xi88.* liers à qui elle appartenoit, avoient
conftruite fur une roche élevée,& Dgé-
baïl , (a) ville aflez grande : toutes ces
Places fe rendirent /ans coup férir >
s excepté Merkab qui ne fut point at-
taquée. Mais Laodicée (b) o fa fermer
lesportes au Vainqueur.
Cétoit une ville agréable , peuplée
& riche par Cou commerce. Elle a voit
un port fur & commode > & deux bon-
nes fortereffes bâties fur une petite
montagne. Saladin fomma les Habi-
tans de le recevoir , & leur promit des
conditions avantageufes. Ces impru-
dcns pour conferver leurs richeffes , les
perdirent avec leur liberté, car les
Mufiilmans prirent la ville daflàut,&
la livrèrent au pillage. Ils y firent un
(a ) G*UU , Gibelet, Gii*U , Scbibl*
Dgebsil. Elle eft plus grande que Balaneas.
(b) Laodicée. Il y a eu plufieurs villes de
ce nom Celle dont il s'agît , eft entre Tri-
poli & Antioche. C'eft ftamatha des Hé-
breux. Elle s'appelle aujourd'hui Licha ou
Ladikia. Elle eft encore célèbre par ion com-
merce de Tabac Le nom de Laodicée lui
vient de Laodicé , femme du Roi Antiochus
tu mère de Séleucus.
de Sàlàdin. Liv.VIIL 109
batin immenfe. Mais les fortereflès '
tenoienc encore. On conftruifit à la j?c*'x5Jlî
hâte des machines qu'on dirigea con-
tre Tune des deux. En peu de jours on
fit une brèche de foixante coudées de
haut , & de quatre de large. Les Chré-
tiens & les Sarrazins y courent en
foule , les premiers pour défendre , les
féconds pour attaquer. Après avoir
épuifé leurs flèches & leurs traits , ils
fe lançoient les uns contre les autres ,
les pierres qu'ils ramaflbient dans les
débris des murailles. Enfin les A flic-
gés demandent à capituler. Il leur fut
permfc de fortir avec leur argent , &
des vivres pour la route , & ordonné
de laifler leurs provifions , leurs ar-
mes , leurs machines Se les beftiaux.
Le Sultlpn leur donna cependant une
partie de leurs effets & des chevaux
pour les transporter.
Il y a voit à l'Orient de Laodicée en
tirant vers le midi , dans la diftance
d'une journée de chemin , une <5ita»
délie bâtie fur la pointe d'un rocher,
& Singulièrement conftruite. Un foffê
profond de foixante coudées , & pra-
tiqué dans le roc , la rendoit inaccef-
fible. On ne pouvoit en approcher
II© H I STO I R F
que par un feul endroit. Elle avoir
• x^'ii*» ' tro*s enceintes de murailles , la pte-
* ' miére renfermok les Fauxbourgs, la
féconde la Citadelle, & la troifiéme
une tourvafte & fort élevée, au fonv
met 4e laquelle* flottoit (ans cefle l'é-
tendard des Chrétiens. On découvrait
ç!e-là tout le pays. JLes peuples des
campagnes voifines y étoient accou-
rus , croyant y tiouver leur foreté ;
mais Saladin fans êtreefiayé de la fi-
tuation avantageufedeœtte place ap-
pellée Seh-jotm ou Silnouiin, (a)
vint laflïéger avec toute fon armée»
On eut de la peine à fabriquer des
machines aiïez hautes ,pour .atteindre
au premier mur. On en fit une en-
tr'atitres avec un pont-levis qu'on le-
vait & baiffbit à volonté. On ta con-
duific avec effort fur le bord du fof-
fé , & on abattit fur les murailles le
pont-levis fur lequeldesSarrazins mon-
tent pour entrer dans la ville. Plufieurs
fonj précipités dans le Fofle par les AC-
liégés qui défendent l'approdhe de
la place. Oa fe bat pendant quelques
(*) Seroit-ce Belford donrparlent nos Hif-
.toriens?
de Saladim. L IV. VIII. *n
hëbres-fems -ce ïfeù élevé, fcftfcft te '
Mahbmétens gagnait du terrain, Se Hég. fl*.
fe facèèàMt lés 'tms au* autres , ils fe *' c" * li8#
renflent hwiîrrfcs 8es feuxboMgs. «Les
Chrétiens époiivàtftés ,:ftiyent*tfan$ la
feco'nde enceinte. On ne feur Bonne N
aucun tëtiklhfe^n ëfc&aAt lu fécond
itttff y& tyrteùh çb^fcr opfaiâtté, on
féh eitfpafcé; Portés ^rts wtfr derrtier
fëtFafnchëmëiit ;: Fés iVffiégés'topmiieiic
aux -mêmes ^ondïtîons-cjti oft dvdit'àtt*
cordées aux Habiransde^Jénifatem. ~
Le Sulthart laïfla tme Etonne garnir
fon dâftsSeh-joun , & vint camper fut
fÔrofice , fleuve le plus célèbre de la
Syrter M déotckavaiflF^^s. .parcis ,
poui. fonmetrre des 'Places, voifines ,
entr'aattê* *laid -, {a)<?h*jh* (th Pîà-»
«nos ,' '. '(r) ' Sfchemahôtf nîff y *$)* Sâr-
» ■ ' .-I «:>
;{d)'Xtaid,Âlàiddn ■, Elabduih, &c.
" :^fhkih,"fhigia , village fortifié ëntrç?
fiaéias & Zabdanium , de la Jurifdiftiôn
d%ftfc>citfc.
(c) ftàtanôs, Blatanos, Place forte du pays
«fe Lâôâicée, à l'Occident de laPréfeÔure
iffiàlép.
(#) Sdifeiftahumn , Scheiïiahounin , Sche-
îfcatiiniiii, Schemahirin, fbrtereffe Près de
DgébaïL '
III HlTTOU!
rayn,(*)&prit lui-même avec fes trois»
!*<!.' j In* P08 ^géres Bakas , (b) Els-jugrum , (e)
'& alla reconnoître la Citadelle de Bur-
zie , (d) dont la force écoic paffée en
proverbe parmi les Chrétiens *& le*
Mahométans,
Lare & la nature fembloienc avoir
travaillé de concert pour la rendre
imprenable. Des collines hautes & fore
étroites fqrmoient un fo (Té naturel , 01%
plutôt des précipices affreux de cinq
— -, , t • , , i,i ■ i 1 L .^
- (a) Sarmania , Sarmyn ; petit» ville de la
JurifdiéHon d'Halep , dans la diftançe d'une
journée & au Sud-Oueft; elle eft riche, fertile
&bien peuplée. '*
y (J)Bakas, ville fortifiée fur* l'Oronte 8£
fur une montagne : entre Apamée & Antio*
che, dans un jp>ay(s fertile ci agréable* \ . ^
. .(<) Els-Jugrum étoitune Citadelle très-i
forte , èc qui dorriinoit la ville précédente
donteile-étoirtrès-voifinei —
(d) Burzia , Berzouja , Berfie. Outre la
description que j'en donne d'après Boha-ed-
din & Aboul-Fedna , ce dernier ajoute que*
la montagne fur laquelle elle eft fituée , s'ap-^
pelleial-Chail , qu'elle cjoniine le Iaç d'Apa-
ipée , dont les. eaux fe joignent 8c fe raflèm-
hlent fous Bourzia , que perfonne n y habite
excepté la garnifon, &que dans les temsde
trouble,, tous les, Peuples s'y retirent pou*
^tre enttreté.' '
cens
»E Sàlàdin. Lit. VIII. nj
cens foixante-dix coudées de profon- Hégire 5*4.
deur. Du milieu de ces collines corn- J-c- "*8*
me d un gouffre , s'élevoit un rocher
efcarpé , au fommet duquel écoic bâ-
tie cette fameufe forterefTe pleine de
munitions & de Soldats. Saladin l'éxa-
mina de fort près , & réfolut de l'at-
taquer malgré l'avis de Tes Emirs , qui
regardoient ce deffein comme témé-
raire. Plus l'entreprife étoir difficile , n>l<L
plus elle lui parut glôrieufe. Il rejoi-
gnit fon armée, & la fit marcher de
ce côté. Après avoir drefle des ma-*
chines , fabriqué des ponts de bois ,
conftruit des échelles, 8c battu inu-
tilement la Citadelle pendant plusieurs
jours , il ordonna que tout fût prêt le
lendemain pour 1 aflaut. Il partagea
fes troupe? en trois corps , qui dévoient
attaquer chacun féparément pendant
un certain intervalle de tems > & fe
fuccéder ain(i l'un à l'autre. Emad-
eddin , Prince de Sindgiar , comman-
doit la première diviuon > le Sulthan
la féconde > & fon fils El-dhaher la
troifiéme.
Là lendemain on donne le fignal.
Le Prince de Sindgiar grimpe fur la
montagne , paffe le fofle fur un pont
Têm II. K
tt4 Histoire
de boïs , s'approche du mur , & tâcfle
j^.'n*» ^e ',e^ca'ac^er » ma*s aPr^s avoir fait
des prodiges de bravoure pendant plu*
fieurs heures , il eft obligé de fe retirer*
Saladin qui vient le relever , anime
fa troupe , s'avance à quelques pas r
mer le fabre à la main , & court à
l'atout en criant Allah akbar ( Dieir
eft grand ) , fes Soldats lui répondent
tous à la fois par le même cri , & cou-
rent après lui. Les Chrétiens lancent
fur eux une grêle de traits. Le Sut-
than fans être effrayé du danger , fe
couvre de fon bouclier % & monte le
premier fur les murailles, comme au-
trefois Alexandre en aflîégeant la ville
des Oxydraques , (*) comme lui il fau*-
te dans la place % mais il eft mieux fe-*
couru par fes Mameluks qui fe pré-
cipitent les uns après les autres pour le
dégager ou pour le foutenir. Les Af-
fiégés frapés d'admiration & d'épou-
vante, fe jettent à genoux & deman-
dent à capituler. Mais on nraccorde^
point une capitulation à ceux dont oiï
eft maître, fis furent tous faits, pri»
fbnniers. Le nombre en étoit très»
M Voyer Quinte-Curce »/ ► $. verf. i+»
»e Saladin. Liv.VIII. tij
considérable , car les Peuples de tous ^
1 — ? -*/. • fV • / • T
— — — — -— 7 —- »- .«w »-wwfs«*k» va«, ««rua
les environs s'étoient réfugiés dans **£• Jj*
cette Citadelle , comme dans un azyfo
affuré. Saladin ne mérita jamais au-
tant de cette gloire qu'on donne à I*
valeur intrépide. Il en acquit une nou-
velle , moins brillante ic plus eftima*»
ble par fa modération & fa générofi-
té. Il empêcha le carnage, défendit
qu'on maltraitât les prifonniers, reçut
avec honneur , & combla de prélens
le Gouverneur , homme d'une gran-
de considération parmi les Francs f Se
le renvoya libre avet dix-fept autres
Chevaliers au Prince d'Antjoche ,dont
ils étoient tous parens ou alliés.
Saladin rendoit à Boëmond Ces pa-
ïens, & lui en le voie toutes fes places
les unes après les autres. Il prit le ponc
de fer, Château bâti fur l'Oronte par
Baudouin III. & aflïégea Derbefàc O)
au Nord d'Antioche. On abbattit avec
le bélier une tour dont les ruines
comblèrent le fofTé. Boh^-eddin étant
[a ) Derbefac petite ville fortifiée au Nord ,
& à dix milles de Pagras dans la Province
Kennaferine» Elle a de belles prairies arro-
ges par le fleuve noir ou le$ eaux noires , que
des Auteurs croient être le Cy dnusv
utf HrsTomi
monté à cette brèche avec les Soldats
jHc' 'Sa 3tf^ commancîoit j vit lui-même avec
' lurprife,une partie des Habitansoccu*
pés à la réparer , quoiqu'accablés de
pierres & de flèches. Ils reflembloient ,
dit-il , à un mur : ils étoient (ans ar-
mes , fans cuiraffe , & prefque nuds r
lorfque l'un d'eux étoit tué , un autre
prenoit fa place & continuoit l'ouvrage
en filence , fans craindre une more
inévitable. On peut remarquer ici ,
que , parmi lés Sarrazins , Nation
réméré, les Savans,les Doâeurs de
Loi , les hommes de Lettres , ne
formoient pas un corps féparé dans la
fociété : ils étoient Soldats comme les
autres , & décri voient les opérations
de la guerre , comme les Xénophous ,
les Polybes, les Céfars. Après une dé-
fenfe honorable, les Affiégés mirent
les armes bas. Oh leur permit de fe
retirer avec leurs habits » mats fans
rien emporter»
Pagras, (a) mieux fortifiée que Der-
(<j) Pagras ou Bagras : elle eft fituée fur
une montagne ; elle eft au Nord , à douze
milles ou à quatre parazanges d'Antjoche ;
& au Midi d'Alexandrette , à peu près à la
be'Saladii?» Liv.VIII. 1*7
befac , fît moins de réfiftance : elle ca-
pitula aux mêmes conditions. Pen- **** ^ §£
dant ce dernier fiége , le Sulthan , pour
n'être pas furpris par des dcrachemens
ennemis , avoit envoyé quelques ca-
valiers fur le chemin d* Antioche : ceux-
ci allèrent fe porter aux portes même
de la ville , & y jettérent l'épouvante.
Il falloit que le Comte Bocmond eût
bien peu de forces ou beaucoup de lâ-
cheté , pour ne fecourir aucune de Ces
Places , & pour ne pas chafler même
cette poignée de Soldats , qiji venoient
le braver dans Ta Capitale. Il prit un
parti mpins courageux & peut-être plus
fage dans les circonftances , celui de
demander la paix. Le Patriarche >
qui é toit auflï maître que lui dans An-
tioche , & qui craignoit pour un Châ-
teau voifin (4) dont il éroit le Sei-
gneur > lui confeilia d'acheter cette
1>aix à prix d'argent. Saladin reçut à
a fois les Ambafladeurs du Prince &
du Prélat > & leur vendit , pour une
même diflance : elle eft environnée de prai-
ries , & a des Jardins & de fort belles eaux*
(a) Nos Hiftoriens appellent ce Château ,
Çur/atur», o\x€urfarium> &c.
IlS tiî%tOIJLÊ
grotfe fomme , une trêve de fiuft
H%. f *4 mois i feulement pou* les Chrétien»
*c'f,88-d'Anrioche, & à condition qu'ils fe
foumettroient à lui , fi , dans cet in-
tervalle , ih rte recevoienr aucun Re-
tours étranger. Il exigea aufli qu'on
délivrât tous le» prifonnie*s Mufufr*
rnans.
Le Sulthan vint enfmte aflïéger une
forterefle appellée par nos Hiftoriens
la Roche- guillaume, (a) croyant f
trouver un certain Jean Gale qu'if
haïtfbit a^craifon, & dont il vouloits
fe venger. Ce Chrétien , après avoir
aiïaflïné la femme de fori Seigneur
fuzerain , & ce Seigneuf lui-même ,
alla chercher l'impunité de fon crime
par un crime nouveau: il embrafla le
Mahométifme. Saladin lui donna de»
(a) La Roehfr-Guyori ou la Roçhe-GuiP
ïàumev Je ne fçais comment les Arabes ap*
pellent cette forterefle : ce n'eft cependant
point Schokaif- Amour*, comme on le croiroit
dabord. On eft fort fouvent embarraffé fur
les noms différens de ces Places.Souvent on en?
confond deux dans une , ou d une feule on en*
fait deux. Les Hiftoriens modernes des Croi-
ftdes font tombés pluûeurs fois dans cette
4Ȏprife.
DE SâI A0IH. LlY.VlîI. \\f
terres & des emplois honorables ; mai» ,
cet apoftat rentra bientôt dans la Reli- ?£ ils£
gion par la perfidie la plus noire. H en- Conu q^
leva un des neveux de fon bienfaiteur y
&■ le livra aux Chevaliers Templiers r
qui lai promirent en récompenfè , de
rendre inutiles les pourfuites au on fe-
roit contre lui. Ce traître, à rappro-
che du Sulthan , fe déroba par la Fuite
au châtiment qu'il méritoit.
Cependant Saladin revint à Dama*
& licentia fon arfnce. fi apprit dan*
cette viïle, que Kraks'étoit enfin ren-
du. Il eut fait des progrès moins rapi-
des y fi tous les Francs fe ftiffent défen-
dus comme les Habitans de cette Pla-
ce. l/Hiftoire décrit avec complai-
fance la fermeté avec laquelle ils fup-
portèrent les malheurs inféparables
d'un fiége d aufli longue durée. Ceft ibûfc
une grande fatisfaétfori pour nous , de mik* ^^
rencontrer dans nos fources , des
traits femblablfcs \ & nous les rappor-
tons avec d'autant plus de plaifîr, qu'ils
font rares. Ces généreux Citoyens
étoientfans Chef r ils réfiftérent cepen-
dant aux efforts de leurs ennemis , qui
ne pouvant les prendre par force les
invefiirent, pour les réduire par fa-
;io Histoire
mine. On les tint ainfi bloqués pen-
jfcfiîwi fan* plus d'une année. Ces" malheu-
reux , après avoir fouffert tout ce que
la difecte a de plus cruel , vendirent
aux Arabes , pour avoir des vivres ,
leurs effets , leurs habits, enfin leurs
femmes & leurs enfans qu'ils ne pou-
voient nourrir. Réduits à la plus gran-
de mifére , exténués par la faim , af-
faiblis par les maladies , ne pouvant
plus fe foutenir , encore moins fe dé-
fendre , ils demandèrent à capituler ,
& obtinrent même , pour une des
conditions , la liberté d'Honfroi du
Thoron devenu leur Seigneur par la
mort de. Raynaud de Châtillon. Le
Sulthan touché de leurs maux, & ad*
mirant leur confiance , voulut, félon
fa coutume , les récompenfer , & par
une générofité dont aucun Prince n'a
donné l'exemple avant lui ni après lui ,
il racheta de (on propre tréfor , les
femmes , les enfans de ces braves
Chrétiens , & leur fit diftribuer à tous
des fommes proportionnées à leurs
pertes & à leurs befoins.
Boh. La prife de Krak étoit d'autant plus
Aboui-p. importante , qu'elle ouvroit la com-
jnumcation de 1 Egypte avec la Syrie ,
pe Sàlàdih. Lit. VIII. m
& de ces deux Royaumes avec la Mec-
que. Les dévots Mufulmans , obligés ,HcJ? sh*
auparavant de faire un grand décour
pour accomplir le pèlerinage prefcrit
par la Loi , célébrèrent cette époque.!
Ceux qui s'étoient difpenfés , jufqu'à;
ce jour ,àcaufe du danger , d aller vi-
fiter les deux villes réputées faintes*.
accoururent enfouie ,& formèrent la
plus nombreufe caravanne qu on eut
vue depuis longtems. Schams-eddin,
Mohammed (4) fut chargé de con-
duire cette troupe de Pèlerins. Sa fierté
lui devint funefte , & troubla la bon-
ne intelligence qui régnoit entre le
Sulthan & le Khalife: car ayant ren-
contré fur la montagne d'Arafat , (6)
la caravanne de l'Irak , (c) comman-
(a) Schams-eddin, Mohammed fils d'Abdel
Malek , dit al-Mokaddem. Cétoit un des
principaux Emirs de Syrie : il avoit été Gou-
verneur de Baal-bek, de Roban , de Da«
tuas, &c.
(b) Arafat ou Aréiât*montagne facrée vo**
fine de la Mecque. C'eft fur cette monta-
gne , difent les Arabes , qu'Adam & Eve fb
rencontrèrent & fe reconnurent, après une
fiparationde 120 années , &c (
(c) L'Irak eft une très-grande Province
ni Histoire
dée par Taftekin , un des Emirs cfe
jfa'lis». ^tafef-^din > ^ voulue prendre le pas
' fur lui & continuer fa marche , enfei-
gnes déployées & tambour battant ,
ce qui étoit une marque de fupério-
rite. Taftekin , pour foutenir le* droits
de fon maître , défendit à cet Emir,
de pafler outre ,& furtout de faire bat*
t*e le tambour ; mais comme on ne lui
ébéiffbit point, il (fe-jfctta FurSchams-
éddin le iàbre à la main , 8c détendît
fur la place. Le Sulthan , tout dévot
ou il étoit , aurott vengé la mort de
fon Général , fi le Khalife ne fe fût
Mté de défavouer la conduite violente
de Taftekin , Se de faire dès exeufes à
Saladin par une Ambaïlade folem-
nelle. ' ,
; Saladin ne demeura pas tranquille
à Damas ,il n'avoit auprès de lui que
* l'Occident , de la Méfopotamie & de l'A-
rabie déferte , au Midi auffi de l'Arabie dé-
ferte , de la mer Perfique, & de la KoriC»
tarie (Kofitan) à l'Orient, de làParthie jufqu'à
Hulwan , au Nord de Hulwan , jufqu'à la
Méfopotamie : elle s'étend le long du Tigre
des deux côtés. Il y aplufieurs Iraks. Voyez
bs notes de Schnlum , c^ •
beSaladih. L iv. VIII. 115
les troupes légères qui compofoient fa _ _.
halca ou fa garde» & quelques mili- Hég. t^.
ces que fon frère Adel lui avoir ame- J# c# II88*
nées d'Egypte. Le refte des Soldars re-
tires dans le fein de leurs familles , ne
fe livraient qu'aux exercices de piété
dans un tems confacré au repos , an
jeûne & à la prière ; car on étoit alors
dans le Ramadhan, (4) neuvième mois *
(4) Ramadhan; ce mot fignifie proprement
en Arabe , une chaleur qui confume ; ce qui
fait croire , qu'autrefois , il tomboit toujours
en Eté , au lieu qu'il parcourt actuellement
toutes les faifons, l'année Mufulmane étant
lunaire. Les Mahométans ont une grande
vénération pour ce mois * i<\ à caufe de la
nuit de la puiflance , Laïlat-AUadr , pen-
dant laquelle ils croient crue l'Al-koran com-
mença à defeendre du Ciel ; c'efl la vingt-
(èptiéme nuit du mois du Ramadhan ; dans
cette nuit, Dieu pardonne , félon eux , tous
les péchés à ceux qui s'en repentent fincére-
ment; &il accorde tout ce qu'on lui deman-
de : 2 *• à caufe du jeûne folemnel , qui con-
fiée à s abftenir tous les jours , depuis le
lever du foleil, jufques à fon coucher, de
j>oire , de manger & d'avoir commerce avec
ejes femmes. Le jeune , mon fils , dit le Caté-
chifine Muiulman, confifte a vaincre fis psfi.
jkns , a 'réprimer, fis appétits fenfuels . ...Si
H4 Histoire
de Tannée Arabique , fi révéré parmi
j.*c?Ht£ 'es Mufulmans. Le Suhhan mit la Re-
' lîgion à combattre les ennemis du Pro*
1>héte. Nous ayons déjà remarqué , que
es Prêtres Mahométans & les Prêtres
Chrétiens appelaient également cette
un homme a commerce avec une femme fem
jeune efi remfu : peur expier cette f mute , il doiê
fabfienir de ce commerce , un autre jour qu'il
lui fera libre , <$» outre cela faire une péni-
tence Le jeune efi rompu en mangeant
do la pierre , de la terre , de la toile ou du*
papier. . ... Quand on a mangé quoique chofie
de comeftible , outre le jeûne qu'il faut tecom*
mencer ; il faut au fi faire une pénitence. Cette
pénitence confifte a faire un repas afoixantm
pauvret , ou a jeûner foixante jours , ou k m
donner la liberté a un efclave. Celui qui ay
rompu fon jeune % pour expier fa faute % cM*
fira de ces trois pénitences , & outre cela joAm
nera un jour , pendant lequel il fera plus do)
prières qua l'ordinaire. ... .Situ as le cœur
pur , & que tu ob férues ces préceptes , cela tê
/uffira, o mon fils.
Pendant le Ramadhan , les Mufulmans fù£
pendent tous aâes dlioftilités , interrom-
pent toutes leurs aflaires , pour ne vaquer |
3 u'aux exercices de piété, & le jeûne eft |
'une obligation fi étroite, que les malades ft I
les voyageurs & les Soldats font obligés de '
jeûner , un autre mois entier,, j
BbSaiadin. L iv. VIIT. ïij
guerre faintc , & qu'ils lui attribuoient
I peu près les mêmes prérogatives, aég. 584.
celles de difpenfer de plufieurs Obfer- * c- ,lS*'
vances légales , de remettre les pé-
chés , & de procurer le martyre. Sa.
ladin partit donc de Damas ,au com-
mencement du Ramadhan avec le peu
de troupes qui lui reftoient , pour aller
attaquer Sephet ou Saphad , ville bien
fortifiée , & voifine du lac de Tibéria-
de. (*) Il eut beaucoup à fouffrir dans
ce pays coupé de montagnes & de
torrens que les pluyes avoient groffis.
Le fiége dura un mois, pendant le-
quel on ne cefla de battre la Place»
Saladin non content 4e s'expofer au
danger comme les jïmples Soldats»
cravailloit encore fivec les Ouvriers >
pour xonftruire les machines néceflai-
[a) Sspbtd » Sapkst , ou Sephet ; c'eft ap-
paremment ce que nos Hiftoriens appellent
Safit. Ceft une ville , ni grande , ni petite;
elle a une bonne fortereffe :. elle eft mr une
montagne environnée de vallées & de colli-
nes. Ses fauxbourgs font difpofés fur trois
montagnes : elle domine au lac de Tibé»
riade : elle a des canaux & des aqueducs ,
des jardins & un terroir fertile,
Liij
n6 Histoui
res , il paffbit des nuits entières à tra-
Hc! i\\s. ccr 'es dimenfions des béliers, des ca-
' tapultes , & il aidoit de fes mains à
couper le bois & à le façonner. Un tel
exemple étoit un puiflant aiguillon
pour le refte des Officiers <jui s'em-
preflent toujours d'imiter leur Géné-
ral. Enfin les Aflîégés , après s'être
bien défendus , prévinrent la ruine de
la Place & fe fournirent.
Le Sulthan parut une féconde foi
devaot Caucheb, cette Place G dif-
ficile à prendre , réfolu de faire les
derniers efforts pour s'en rendre mai*
tré. Ce fiége fut long & meurtrier;
Caucheb ou Cauckheb étoit (ïtué for
des montage , ainfi que Saphad,
dont il étoit voifîfî. La petite armée
de Saladin campa aux pieds des colli-
nes. Pour lui , il grimpa fur les ro-
chers avec les Soldats armés à la lé-
gère: on fit à la hâte un petit retran-
chement avec des pierres Oc de la ter-
re, pour fe garantir 'des traits ennemi*
qui tuoient tout ce qui ofbit s'appro-
cher. Tous les jours on alloit à l'af-
faut y & l'on en revenoit avec perte.
Les Aflîégés f placésiur un lieu élevé «
de Saladin. L iv. VIII. iiy
n'avoient que la peine de rouler des
pierres qui écrafoient par leur chute j^iîw.'
les Mufulmans. Les orages ne furent
pas moins fimeftes à ces derniers. Il
tomba une pluye fi abondante , qu'elle
emporta une partie des provifions,
g£ta le refte > & ramafla tant de boue ,
que les hommes & les chevaux ne
pouvoienjc marcher. Les Sarrazins fe
feroient rebutés de tant d'obftacles ,
s'ils n'euflent été foutenus par la cons-
tance de leur Chef. Saladin partageant
les travaux & les périls , intpira une fi
grande ardeur à fes troupes , que , mal-
gré les orages , la pluie , la fituatioa
avantageufë de la Place , & la bravoure
des Chrétiens, elles appliquèrent enfin
les échelles , & commencèrent à ef-
calader les murailles. Dans cette ex-
trémité , les Aflïégés demandèrent à
capituler ,& obtinrent la permiffion
de fortin
Après avoir laide une bonne garni**
fon dans cette fortereflç , le Sulthan
accompagna jufqu aux confins de la
Syrie (on frère Adel qu'il envoyoit en
Egypte. En revenant il vifîta toutes
les cotes, n'ayant avec lui queies Ma*- m
L iiij
lit Histoire
meluks , & fans, craindre d'être enlevé
'ï!cîu*88! Par ^es Par"s ennemis , qui fortoient
tous les jours de Tyr , & couraient la
campagne pour faire du butin : il for*
tifia toutes les Places maritimes, les
munit de provifions , d'armes & de
Soldats , & alla jouir à Damas de quel*
que repos , en attendant que la fin de
1 hy ver lui permit de continuer les opé-
rations de la guerre.
Âinfi, de tous les Etats que lef
Croifés avoient poflcdés dans la Me-
fopotamie, la Syrie & la Paleftine,
il ne leur reftoit que trois Villes*
Antioche , Tyr & Tripoli , lorfque
la Chrétienté fit un nouvel effort >
pour fecourir la Terre Sainte. Tou-
tes les Puiflances de l'Occident fe
liguèrent à la fois > pour oppri-
mer Saladin , & formèrent une ar-
mée capable de conquérir le mon-
de entier. Mais cette fameufe ex-
pédition fut peu utile aux Francs
& devint fimefte aux Princes qui
l'entreprirent. Toutes leurs forces
réunies en dépeuplant l'Europe ,
& défolant l'Afie , ne fervirent
qu'à retarder 9 de quelques mo*.
*E Sàlàdin. Liv.VIII. iij
ttnens, la çuinc totale des Chrétiens ^SSLSP
4»Orient.
Hég. y7*
;. î7»4J
Ifeiifi
Fil </« Ziwe huitième.
SOMMAIRE
DU LIVRE NEUVIEME.
On prêche en Europe la Croifade.
Etat de la France & de V An-
gleterre. L'Empereur Frédéric
^ Barberouffefe croife : il écrit
à Saladin ? réponfe du Sul-
than. Révolution arrivée à
Conflantinople. Saladin fait
alliance avec Ifaac l'Ange ; il
aj/iége Schokaif-Arnoun. Lu-
jignan forti de captivité y re-
commence la guerre & ajjiége
Ptolêmals : description de cette
Ville. Arrivée de plujîeurs
Croifés. Saladin vient au fe-
cours de Ptolémais. Plufieurs
combats.
HISTOIRE
D E
SALADIN
Sulthan d9 Egypte & de Syrie.
LIVRE NEUVIEME.
LA prife de Jérufalem avoit jette Hég. 5«4.
l'Europe dans la plus grande J'C-IX,,#
confternation. L'Archevêque de
Tyr , que quelques Ecrivains ont nom-
mé Guillaume , & qu'on a confondu
avec L'Hiftorien des Croifades mort
peu auparavant , pafla la mer , pour
apprendre aux Peuples d'Occidenc
les malheurs de la Paleftine. Cette R(!cHot;
trifte nouvelle aigrit les douleurs d'Ur- Match. Pari*
bain III , alors malade à Fefrare , &:£cb; '• *"•
^^^ îji Histoire
^jrjjf^p le précipita dans le tombeau. Gré-
h c Vis»! goire VIII. qui ne lui furvécut que
de peu de jours , laifla la Thiare & fes
projets à Clément III. Ce Pape ré-
nouvella toutes les Indulgences & les
prérogatives accordées aux Croifés
par Urbain II. & par Eugène III , fie
réveilla l'ardeur des Chrétiens en éta-
bliflant des prières publiques , des jeû-
nes , des jours d abltinence. (a)
L'Italie plongée dans la licence &
la débauche , éprouva tout-à-coup une
fermentation générale. Les cerveaux
échauffés par la chaleur du climat , le
furent encore davantage par les vives
exhortations des Prêtres , par le récit
exagéré des cruautés des Sarrazins,
par limage des lieux Saints profanés,
(V) des tourmens des Francs > enfin
(a) Il ordonna qu'on jeûneroit pendant
cinq ans , tous les vendredis , & qu'on ne
prendrait que des alimens de Carême , le
mercredi & le famedi : ce dernier jour n'étoit
pas encore un jour d'abfKnence Outre cela,
le Pape & les Cardinaux promirent dobfer-
Ter la même abfUnence le lundi
(b) Les Arabes difent que Conrad avoît
repréfenté fur une grande Image , la ville
Mainte & principalement te Saint Sépulchri
]
*i Sàiàbih. Liv. IX. uj
toar laflurance de la rémiffion des
péchés & du falut éternel. On foifoit ££Jfâ
qu'un cheval monté par un Mufulman fou*
lok aux pieds & couvrait d'ordures ; mie
cette Image fût envoiée en Occident ; que les
Prêtres la portoîent de ville en ville , pieds
nuds & couverts d'un cilice , & la montraient
au Peuple en gémiflant, &c. Ce paflàge eft
trop remarquable, pour n'être pas rapporté
en entier : Nempè civitmtem ille SsncJam im
thsrt* depinxerat, in eaqùeeffrgiem expreffo-
ta* Ttmpli refurteûionis , quod Religm* *««•
Unt feregrinanone , cujufque m*jeft*tem
vonerantur : in oofacellumefi Sefulchri Mef*
fi* , inque, ex ofinione eorum pofi crucifixion
nom humains fuit. Hôc Sepulchrum radix efi
&frt,cifu* tau/s ipforum pérégrinations , im
quod credunt , ftato quodam acfolomni Fefta
• luccm defcendere quotannis. Hoc fuper SepuU
chro oquum delineaverat , ah équité MufuU
mano inceffum , qui monumentum Méfia f
intormingonte equo , con'cuUabau H*ne pi&n*
ram , tr ans mare , produxit inforis & concU
HaMis , portantibm oam Sacerdotibu$ , nudo
csfite, citicio mdtttis , luUuofamquo vainge*
minantibus. Jam veto pian* & imagine?
eorum corda vol maxime adficiunt ; ee. quippè
funt radix & fundamentum Reîigionis ipfo-
rum , &c Boha-eddin. ch. 80. p. 1 3 5 , 1 3&
& Aboul-Fedha, ch. 30, dit qu'on avoitre*
Îréfenté, fur une autre Image, le Mçi&t
>oetté de verges par Mahomet.
t$4 HïfTom*
des proceflîons \ on s'attroupoit dan*
Hég. s*g les Places ; on s'animoit les uns les
*• & *«• • jujjjes : ia populace fouillée de cri-
mes, fe crut chargée de venger les
intérêts du Ciel : chacun prit la Croix :
on vit encore des Evêques , des Ecclé-
fiaftiques, des Moines, dépofer les
habits Sacerdotaux pour endofler la
cuirafie, des Vierges confacrées à la
retraite par des vœux indiflolubles ,
quitter leur Cloître par le voeu de la
Croifade , & fous prétexte d aller fer*
vir dans les armées les Soldats de
Jefus - Chrift. Cet enthoufiafme fe
communiqua bientôt dans toutes les
autres parties de la Chrétienté.
Les Cardinaux donnèrent l'exem-
ple de la première ferveur & malheu-
reufement auffi du premier refroidiC
fement : ils s'aflemolérent , firent des
réglemens fort fages , pour réformer
leurs moeurs & réprimer leur luxe ; )\u
rérent folemnellement de prêcher eux-
-mêmes la Crpifade , d'aller à pied à
Jérufalem' en demandant l'aumône ,
d'obferver plufieurs auftérités, en,fin
de ne plus vendre les Bénéfices , ni les
grâces du Pontife. Mais ces accès d un
zélé indifcret , furent une étincelle qui
se SaIàdin. Liv. IX. ijf*
sfévanouit auffitôt. Ces Prélats plus 1 Ré g ^
imprudens que parjures, relièrent à j.oiis£
Rome , exercèrent de nouveau la fimo-
nie & vécurent comme auparavant
avec cette pompe & ce fefte fi oppo-
fés à la fainte* modeftie des premiers
Apôtres.
Cependant , après avoir enflammé le
cœur des Italiens , l'Archevêque de
Tyr & le Cardinal Henri , Evêque
d'Albano , honorés l'un & l'autre par
le Pontife du titre de Légat , paflerent
en France,pour y allumer la même ar-
deur. Ce Royaume étoit alors troublé
par la guerre, quelefeune Philippe
Augufte avoir déclaréeau Roi d'Angle-
terre. Henri IL reténoit injuftemerit lé
Comté de Vexin & la Princefle Alix,
On vouloir l'obliger de rendre Alix à
Richard fon fils , à qui elle avoit été
fiancée ,& le Vexin à Philippe, (a)
tes deux Rois étoient en1 armes &
jwréit* d'en venir aux mains , pour vui-
der leur querelle, lorfque les Légats
»■■'»• ■ » ■ «••
(a) Les Villes du Vexin aroient été don-
nées en dot à Marguerite foeur de Philippe ,
mariée avec Henri, fils aîné de Henri II.
Elle étoit morte fans enfans , & le Vexin
çievoit revenir à Philippe *
Ijtf HlSTOlRl
arrivèrent en France. Le refreâ qu'on
jfcJiiM."*70^ a'ors Pour *e Saint Siège ètoit
tel > que ces Princes fufpendirent leurs
hoftilités , & eurent une entrevue en-
tre Trie & Gifors. Là, l'Archevêque.
deTyr fait une peinture fi vive , fi tou-
chante, G pathétique, des malheurs
de la Paleftine , que tous les Afiîftans
fondent en larmes. Les deux Rois
s'embraftènt en pleurant , fe jurent
une amitié fincére , & reçoivent la
Croix des mains des Légats. Richard
Duc de Guyenne & Comte du Poitou ,
le Duc de Bourgogne , Philippe
Comte de Flandres, les Comtes de
Champagne, de Soiflbns, de Blois»
de Dreux, de Perche, de Germon t,
de Bar, de Beaumont, de Nevers,
Jacques Seigneur d'Avefnes, & les
principaux Seigneurs de France, d'An»
gleterre & de Flandres, imitèrent cet
exemple qui fut fuivi par tout le Peu*
pie. On diftinguaies trois Nations pat
des couleurs différentes : on donna une
Croix rouge aux François , une blan*
che aux Anglois & une verte aux Fia*
mands : le lieu de la conférence fut
appelle le champ Sacré : on y planta
une Croix f & on y établit une Eglife*
Le
dï Saiadiv. Liv.IX. i)7
Le nombre des Croifés formoit déjà
une très grande armée : on avoit des _"*«• *•«•
Soldats ; on avoit des Chefs 5 mais on
manquoit d'argent. On en trouva
par le moyen d'une nouvelle impoli-
tion appellée la Saladine , ou la Dix-
me Saladine. Il fut ordonné que tous
ceux qui ne fe croiferoient pas , paye*
roient une fois feulement le dixième
de leurs revenus & de leurs biens meu*
blés. Les Eccléiiaitiques alléguant les
immunités de l'Edite , fe récrièrent
contre cette taxe à laquelle on les avoit
fournis , (4) comme f 1 , pour être Prê-
tre , on ceflbic d'être Citoyen ; & fi
les Miniftres du Dieu de pauvreté , en-
richis par les aumônes des Peuples ,
pouvoient refofer aux befoins de l'E-
tat , une partie des biens|qu ils en ont
reçus. . Le célèbre Pierre de Blois, en-
tfautres , un des plus fçavans hom-
mes de ce teins , écrivit fur cette im-
position , qu'il appelloit une entreprife
criminelle contre la liberté & les pri-
vilèges du Clergé dont , félon lui , on
(4) On n'exemta de cette impofition que les
Chartreux, les Bernardins & les Religieux
de FontevraiiUL
Tome If. M
I)S Histoïhé
n'âvoit droit d'exiger que des priétfes 5
hciilît ma{s il n>y eur de crinwnd dans cette
affaire , gue fa hardieflfe , les murmu-
res de (es fëmblables , & l'emploi
qu'an fit de cet argent*
En effet les fommes qu'on leva car
cette dixme , tant en France qu en
Angleterre , & qui dévoient (ervir à
détruire les Infidelles , furent confom*
niées dans la guerre que les deux Na-
tionsà peine réunies fe firent Tune à
l'autre. Richard fruc de Guienne , &
Comte de Poitou , attaqua fous un lé-
fer prétexte le Comte de Touloufe.
> Richard étdit fils de cette Eléo-
nore de Guienne , que Louis le jeu*
ne eut l'imprudence de répudier à^rès
lavoir accufée d'adultéré ,&' que
Henri II. moins fcrupuleux ne rougit
pas d epoufer , parce qu'elle lui ap-
portait en dot la Gafcogne ,1a Guien-
ne & le Poitou. Le Comte de Touloufe
implora la prote&ion de fon Souve-
rain. Philippe accourut au fecours de
fon va(Tal , Henri au fecours de fon
fils, & tout fut en armes. Le Roi de
France enleva plufieurs Places aux An-
glois, & s'avança pour les combattre
en bataille rangée : mais les Comtes
DE SàLÀDIN. LlV.IX. 1)9
de Flandres & de Champagne , &
d'autres Seigneurs qui vouloient ac- j^cÎVim!
complir le vœu delà Croifade , en- ".
gagèrent les deux Rois dans des pro-
jets de paix.
Philippe , à qui la guerre étoit avan-
tageufe, exigea des conditions capa-
bles de la perpétuer : non-feulement
il demanda qu'on rendit fa fœur Alix
à Richard , que ce Prince rcgardoit
comme fa femme , & que fon perd
craitoit comme fa maîrreffe , félon les
bruits publics-, mais encore qu'en fa-
veur de ce mariage, Richard fût dé-
claré Roi d'Angleterre conjointement
avec Henri. Ce Roi n'eut garde de
confentir à cette proportion. La corn-*
plaifance qu'il avoit eue pour fon fils
Henri , en l'aflbciant au trône , ne lui
avoit été que trop funefte , Se il ne
s'attendoit pas à plus de modération
de la part de fon fécond fils , devenu
ion héritier par la mort 'de l'aîné. Ce
que Philippe avoit* prévu arriva. Ri-*
chârd dont il venoit d'aigrir l'ambi-
tion , indigné de la fermeté de fon
père, fe joignit à Philippe, & cette
guerre de politique devint une guerre
civile.
Mi}
f40 Histoihï
Les hoftilités recommencèrent de
Hég %2s. toutes parts. Il y eut cependant en-
f.c ut}. corç une conf^rence au(Jj inuciie qUe
les précédentes , &. dans laquelle Aï-
chard voulut tuer le Légat du Pape .
3ui menaçoit de mettre le Royaume
e France en interdit , fi on ne fai-
foit la paix. Il reftoit au malheureux
Henri un fécond fils qu'il avoir tou-
jours tendrement aimé , & auquel il
avoit donné l'Irlande. Ce fils , non
moins dénaturé que fon frère, fe jetta
parmi les Rebelles , & augmenta les
horreurs de la guerre civile , fi on
peut appeller de ce nom trop doux ,
une guerre où des enfans combattent
contre leur père » exemple trop fré-
quen^dans l*Hiftoire pour l'opprobre
de l'humanité. Henri pour fui vi, vain-
cu partout , n'ayant aucune reflource ,
après avoir fait une paix honteufe &
néceflaire , mourut de douleur en corn*
blant de malédiâions tes enfans ac-
eufés lourdement de parricide. Il étoh
âgé de foixante & un ans , & en avoit
régné trente-cinq.
• Mais dans le tems que les Rois de
France & cf Angleterre épuifo eut inu-
tilement pour la Chrétienté leurs for-
»e Sàlàbin. Lïv. IX. 141
ces & leurs finances * l'Empereur fe
difpofoic à partir pour la Terre fainte. jf^fjjj*
C'étoit un Prince éprouvé par la bon-
ne & la mauvaife fortune , célèbre par
des viâoirês , par de grandes aâions ,
par un règne long & glorieux , & plus
encore par Tes démêlés avec les Papes.
On voit que je veux parler de Frédéric
I. de Souabe, dit Barberoufle. A Page
de foixanre-quatre ans , il avoit certt
inrctuofité de courage qui femble ne
comenir qu'à la jeunette -, & une prtn.
dence éclairée que la vieillefle ne don-
ne pas toujours» Après la conférence
de Gifors , l'Archevêque de Tyr vint
le folliciter d'employer pour la Reli-
gion les armes qu il avoit portées con-
tre le faint Siège. Frédéric étoit alors
en paix avec les Princes Tes voifins ,
& furtout avec Rome fi long.tems
agitée par fes querelles avec les Souve-
rains Pontifes. Il aflembla une Die t te
générale f & prit la Croix en pré*
fence de toute la Nation germanique ,
dont les Chefs fe croiférent avec lui:
c étoient Frédéric Duc de Souabe fon
fécond fils , Léopold Duc d'Autriche,
Berthold Duc de Moravie , Herinan
Marquis de Baden , les Comtes de
î+i Histoire .
Naflau , de Tharinge , de Miffen , de
*c!ws£ Hollande 5 les Evéques de Befançon ,
de Cambrai* de Munfter , d'Ofnabrug ,
de Miffen , de Paflau, de Wirtzbourg ,
& plusieurs autres Princes & Seigneurs
qui tous voulurent le fuivre dans cette
expédition.
Frédéric avoit accompagné l'Empe-
reur Conrad (on oncle dans la féconde
Croifade. Pour prévenir les défordres
& les malheurs dont il avoit étéfté-
nioin , il fit dans cette occafionies
loix les plus fages : il ne permit pas in-
différemment à tous fes Sujets de fe
croifer , mais feulement à ceux qui
pouvoient emporter au moins trois
marcs d'argent , environ cent cin-
quante francs de notre monnoie : il
ordonna aux riches d amafler le plus
d'argent qu'ils pourroient j cette pré-
caution étoit utile , pour éviter la di-
(ètte qui avoit caufé tant de maux dans
les premières émigrations ; il chafla
ce grand nombre de femmes, qui fous
prétexte de fervir les Soldats & de ga-
gner des Indulgences , portaient dans
Parmée la corruption & la débauche.
Enfin il publia les Edits les plus févé-
res , pour faire obferver dans la route
une éxadfcc difcipline.
de Sàlàdin. Liv. IX. 14)
Les croupes eurent une année en- '
tîére pour le préparer. On leur affi- H*?' Jjj*
gna pour rendez-vous général , les en- '
virons de Ratifbonne. Dans cet in-
tervalle , Frédéric envoya des Am-
baffadeurs à tous les Princes fur les
terres defquels il devoit pafler , pour
les prier de ne point interrompre fà
marche, & de lui fournir les vivres &
les autres fecours dont il avoir befoin.
Ces Princes étoient Bêla Roi de Moi* . - v
grie , Ifaac Empereur de Conftantinô»
pie , Kilidge-Arflan Sulthan d'Ico-
nium. Le premier accorda tout ce
qu'on lui demandoit : les deux autres
promirent de favorifer les Croifës,&
prirent des mefures pour leur nuire.
Mais l'AmbafTade la plus extraordi-
naire fut celle de Henri Comte -de
Pieftzril eut ordre d'aller vers SaJ$-
din , pour le fommer de rendre tout
ce qu il avoir prisjiux Chrétiens & lui
déclarer la guerre fcn. cas-de refus. Fré-
déric croyant avoir fuccédé aux droits
des Empereurs Romains , parce qu il
enjjrenoit le titre , adreflbit lui-même
au Sulchan une Lettre celle qu'auroient
pu l'écrire les premiers Céfars aux
Gouverneurs de la Syrie. On ne fera
144 Histoihï
' point furpris de tant de fierté , puiP-
fH%* 5jî- qu on fçait que le même Empereur
j. c. us*. avoit fe.t déciier à Cologne en 1 1 5 8
par les DoAeurs en Droit, que l'em-
pire du monde entier lai appartenait ,
& que l'opinion contraire étoit une
hcréfie. Vqici à peu près la lubftance
de cette Lettre. Ça)
Frédéric Empereur des Romains
toujours augufte , magnifique triom-
phateur des ennemis de l'Empire à
Sàlah-adin Chef des Sarrasins.
Fuyez Ifrael à l'exemple de Pharaon.
Pmfque vous avez, prophané la Terre
fdme qui mus appartient Jl eftde mire
fillicitude Impériale & de notre devoir ,
de punir une fi criminelle audace , & de
Itous avertir , que fi vous n abandonnez^
tout le pays que vous avez, ufurpê, nous
irons éprouver avec vous le fort des ar-
mes par la vertu de la Croix , & au
(a) Cette Lettre eft rapportée avec des diffé-
rences confidérables par tous les Auteurs qui
en ont fait mention : la copie qu'on lit dans
Bàronius eft la plus ridicule; celle qu'on trouve
dans Matth, Paris eft la plus raifonnable.
nom
»e Saladik. Liv. IX. 145
nom du véritable Jofeph. (a) VHiftoire
ancienne & moderne doit vous avoir ap- j, c?u«£
pris que toutes les provinces de l'Orient
(b) font foumifes à notre domination: ils
ne l ignor oient pas , ces Rois qui ont eni-
vré defang les épies des Romains , & vou$
ffaurcz, blêmit vous-même par expérience
et que peuvent nos aigles viBorieufes , nos
cohortes composes de différentes Nations ,
& combien font redoutables tous les Peu-,
pies de notre Empire, (c) Dans ce jour
falligreffe ,-joHr deftinê au triomphe du
Chrift y nous vous ferons fentir la force de
ce bras que vous croyez, appefantipar lâgem
Saladin fut furpris qu'on ofiit le me-
nacer de fi loin : il reçue félon fà .cou-
tume , l'A mbaiïadeur avec diftinétion a
répondit à l'objet de fa million , & lui
(a) On fait peut-être ici allufion au titre de
ïofeph , que Saladin affeâoit de prendre
dans tous-les aâes.
(b) Il nomme les deux Ethiopies , la Mau-
ritanie , la Perfe , la Syrie, le pays des Par-
thés , la Judée , la Sàmarie , l'Arabie, là
Chaldée , l'Egypte , &c.
ftc) Il fait rénumération de tous les Peuples
d'Allemagne & autres , & leur donne à tous
pne épithéte.' *
Tome IL N
14<f El 8TOIKÊ
' remit la Lettre Clivante (#) pour l'Em-
j.c/iSpereur.
Au très-iilnftre Frédéric , notre fîn-
cére ami , Roi des Allemands.
A* nom de Die* mifiricorMeux , par
Ugract de Dieu qui eftfiul & unique
Dieu (by fiépreme > viRorieme* immua^
ble , dont le régne ri a point dejm» Louan-
ges éternelle* foient rendues À eebri qm A
répand* fa grâce fur la terre. Nom le
prions rm faveur de fis Prophètes , &
principalement de notre Legtjlateur fin
Prophète Mahomet , qttil * envoyé pour
réformer la feule véritable Loi , laquelle
il fera reJpeSer de toutes les Nations.
Nonsfaifons fiavohr aupuijfant Roi
ttïïtre fincére ami le Roi des Allemands ,
qtfil eft arrivé un homme nommé Henri,
fi difimt v&trc Amintffadatr Jequd nous
a remis une Lettre' qtfil dit être de vous.
Nous avons répond* de vive voix ame
(if)Nous «cpo&s un peu abrégé cette Lettre*
(b) Les Mufulmans fe fervent toujours de
cette formule , par oppofition aux Chrétiens
?ui admettent trois Dieux , félon eux. Ces
euples fondent cette opinion fur le Myftére
de la Trinité: ils difent ordinairement, quo
nous donnons des compagnons à Dieu*
DE S À LAD IN. LlV. IX. I47
Mfeours qu'il nous a tenus; & voici la
rèponfe que nousfaifom à ta Lettre, j^cfxï^!
Fous nommez, des Rois , des Princes , Hi(U ^^
des Comtes , des Archevêques , des Mar- & alibi.
quis , des Cheiratiers, & plufieurs Na-
tions qui doivent nous attaquer avec vous.
Apprenez, que cotte Lettre ne pourrait pas
feulement contenir les noms de tous les dif-
férons Peuples quicompofent notre Empire*
Aucune mer, aucun oiftacle ne peuvent
retarder leur marche: As font prêts à fi
rendre fous nos drapeaux. Nous avons
même actuellement avec nous, ces Soldats
avec lefquets nous avons conquis tant de
pays- Si vous ofez, venir avec cette mul-
titude que nous annoncent votre Lettre &
votre Ambajfadeur , loin de vous crain-
dre* nous irons au-devant de vous t &
Dieu parfafitprêmepuiJ}ance,nous accor-
dera ta viBoire. Alors nous pajferons nous-
mêmes la mer , & nous irons détruire vo-
tre Royaume vcar nous/codons que pour
former cette grande armée , vous dépeu-
plerez, vos Etats y & vous n'y laijferez* au-
cun Dêfcnfeur. -Rien n empêchera que
nous ne nous en rendions maîtres , après
vous avoir vaincu dans la Palefiine.par
la vertu du fini & unique Dieu. Deux
fins fa Chrétienté mitre s'eft foulevét
Ni)
148 Histoire
Hé -contre nous : elle efi venue nous attaquer
i.i±us<>!en Egypte* une fois devant Damiette*
une autre fris devant Alexandrie. Fous
n'ignorez, pas où ont abouti ces efforts > &
quelle a été ïiffue de cette double entre-
prifi. Depuis ce tcms , Dieu a bien di-
ininuk votre puijfance & augmenté la no-
tre: il nous a donné toute V Egypte , les
Royaumes de Damas , de Jérufalem,
d'Haï ep , les cotes de la Syrie 9 la Méfi-
potamie & beaucoup d? autres régions.Tous
les Princes Mufulmans font nos vajfaux
au nos tributaires. Tous les Sulthans obéi fi
fent a nos ordres. Si nous mandions mê-
me au Khalife de Bagdad (que Dieu
comble de bénédittions ) de nous amener des
troupes j il defeendroit de fin tronc fu-
blimcypour accourir au fecours de notre
Hautejfe. Il ne refte plus aux Chrétiens
que trois villes, Tyr , Tripoli & Antio-
che , que nejus allons leur enlever. Si vous
voulez, laguerre , & fi Dieu a réfolu vo-
tre ruine dans fis Décrets éternels , ve*
nez, , nous marcherons à votre rencontre.
Si vous voulez, la paix , ordonnez, aux
Gouverneurs de ces trois villes , de nous en
ouvrir les portes.
\ A cette condition nous vous rendrons
VMtre Croix: nous délivrerons tous vos
»i Sàladin. Liv. IX. 149
ICaptifs , nous permettrons qu'un de vos
Prêtres demeure dans le Temple de la Ré- £** l $£
fitrre£Hon; (le S. Sépulcre) nous vous
reftituerons vos Afonafiéres; nous traite-
rons avec bonté vos Religieux ; nousper*
mettrons à vos Pèlerins de vifiter la ville -
fainte ,& nous garderons avec vous une
faix inviolable*
Si la Lettre que le nommé Henri nous
a préfentée eft du Jloi, nous voulons que
celle-ci en foit la réponfe.
Donné l'an de P Hégire cinq cent qua-
tre vingt quatre , par la grâce de Dieu
feul& unique Dieu. Quil fauve fin Pro-
phète Mahomet , & tous [es Defcendansi
quil procure le falut du très illuftre Sul-
thon , vitioritux , défenfiur de la parole
de vérité, ornement de F étendard de la foi ,
réformateur du monde & de la Loi , Roi
des Mufulmans , ferviteur des deux villes
faintes , (a) & de lafaintemaifon de Jé-
rufalem, père des Fainqucurs* Jofiph ,fUs
fAyoub. (b>
En écrivant avec tant de fierté , Sà-
ladin ne laiffbit pas de fe préparer con-
(*) La Mecque & Médine.
(4) Le P. Maimbourg dit, qu'il ne rap-*
N-iij
15b Hxstoihb
tre l'orage qui fe formoit dans tout
"^ *AU l'Occident. Il fit une nouvelle Ligue
11 *' avec le vieux Kilidge-Arflan, On dit
qu'il fcella ce Traire par le mariage
d'une de Tes filles avec un des fils de ce
Sulthan : mais l'alliance la plus avan-
tageufe, & qui prouve combien on re-
doutai t fa puiflance , fut celle qu'il con-
tracta avec Ifaac l'Ange. Ce Prince
monta fur le trône par une de ces ré-
volutions auxquelles l'Orient étoit ac-
coutumé , 6c qui &mbtant être deve-
nues ladeftinée de l'Empire de Con£-
tantinople.
A Manuel Comnéne , dont nous
avons parlé , fuccéda Alexis II. fou
fils âgé de douze ans. Ce régne de
porte point ces deux Lettres , parce qu'elles
font faites à loifir , mais avec peu a art &
fens aucune vraifemblance. Et moi , je le$
rapporte , parce que je les trouve bien dans
le (nie du tenus , parcequ aucua-des Auteuii
qui en ont fait mention , ne les regarde corn*
me fuppofées ; parce que celle de Saladin
]>orte tous les cara&éres de vérité» On y voit
e tos & la formule ordinaires aux Musul-
mans & que les Occidentaux ignoraient ;
on y voit la rraduâioh éxaâe de tous les
titres que les Arabes donnoientà Saladin ,
titres inconnus aux Chrétiens de Syrie eux-
mêmes, &c
de Sàlàd™, Liv.IX. 151
tourte durée (a) fut agité par les intri- '
gués de l'Impératrice mère d'Alexis, j^iî^
par les vexations du Prdtofébafte
amant de la PrinceflTe , par les mur-
mures des Peuples & les (éditions fré-
quences des Grands , enfinpar la cruel-
le ambition d'Andronic Comnéne.
Celui-ci parvint à l'Empire à force
d'attentats , & s'y foutint par Les em-
poifonnemens , les aflkffinats , les par-
ricides & les brigandages les plus af-
freux. Il joignait à ces crimes d'une
politique amoitieufe , ceux d'une cupi-
dité outrée & d'une débauche effré-
née : il prlioit les maifons des particu-
liers, les Temples, les Monaftéres *
violoit les femmes Se les filles , & ne
refpedriit pas, même dans fes défirs
impurs, ces azylés facrés oà des Vier-
ges vouées à Dieu avoient mis leur
vertu à couvert de la dépravation du
fiécfc.Ce «aonôre reçut enfin la pu- cont.cui«.
jmion due à «aw d excès 5 mais fi {k Tyt.* aiii.
vie fut déréglée , (a mort fut hèrrîble,
& pcoovje autant ta barbarie des Grecs
de ce rems, que leur haine contre le
Tyran.
--■•-■ ■ -■ - • ■ -■•■ -^ *
' ' (p) il régnatrois ans.
Niiij,
ir j* , Histoim
Andronic n'avoit pas la force d'être
j"cî"«lî! un ^lérat intrépide. La grainte & le
remords inféparables du crime , dé-
chiroient fon ame fbible ; il croyoit
continuellement qu'on alloit arracher
le fceptre de fes mains indignes de le
porter. Apres avoir épuifé toutes les
reflources de la cruauté , en détruifant
ceux qui pouvoient afpirer à la cou*
ronne , il recourue à la magie, pour
fçavoir lequel de fes Sujets devoit lui
enlever la pourpre, ^e Magicien ré-
pondit , que ce feroit Ifaac. Il y avoit
- a Conftantinople piufieurs perfonnes
de ce nom. Etienne y que d'autres ap-
pellent Langofle ,fit*tomber les loup*
çons fur Ifaac l'Ange , parent de Ma-
nuel Comnéqe , & reçut ordre de le
conduire en prifon.
If^ac , au lieu d obéir , fe jetta fur
le Miniftre, J'étendit par terre & cou*-
rut dans la ville , en criant : foi tue U
Diable. Dans le moment , tonte la
populace s'affçmble en tumulte, au-
5>rès de lui , l'émeute devient généra-
e.les Grands fe joignent au peuple j
& au milieu de cette confufion , on
proclame Empereur celui qu'on alloit
mener à la mort. Andronic veut pren-
*b Sâiabin, Liv.IX. r 5 5
'Are la fuîte: il eftpourfuivi, arrêté ,&
attaché à un poteau dans la Cour de j, ç?\ \fc
fbn propre Palais. Après lui avoir
crevé un œil, arraché les cheveux,
coupé une main , brifé les dents , &
] avoir chargé de coups , on lui dé-
chire Tes habits & on le met tout nud
far un âne, la tête tournée vers la
queue. On le fit pafler ainfi dau£ tou-
tes les rues de Conftantinople : on
jettoic fur lui des pferres , des ordures v
de l'eau bouillante; on î'açcabloit de
xralédiâions & d'outrages : enfin ar-
rivé dans une Place publique , on le
{rendit par les pieds, & on le livra à
a fureur des femmes : celles-ci com-
mencèrent par lui couper les parties
dont on Taccufoit d'avoir fait un
u(age coupable. On. frémit d'appren-
dre qu'elles déchirèrent enfuite fbn
corps à belles dents ; qu'elles mangè-
rent dans leur rage , les chairs de ce
malheureux grince ; qu'elles s'en arra-
choient les morceaux ; qu'elles bri- %
foient les os pour pouvoir les ava-
ler , & croyoient faire une aâion
fainte par de telles horreurs. Quel
Peuple barbare offrit jamais un fpeâa-
çle pareil ?. ;
154 Histoir*
Les commencemens du régne d*I-
j!*c illl'. &ac fawnt marqués par quelques (ac-
cès contre les Siciliens , contre les
Myfiens ou Valaches, &: contre une
troupe de rébelles 5 mais ce Prince
comprit qu'il ne feroit jamais bien af-
fermi fur le trône, fi occupé conti-
nuellement à diflïper des fa&ions dans
- l'intérieur du Royaume , il étoit en-
core obligé de foutenir des guerres
étrangères : il chercha donc à le faire
un appui de ceux même qu'on regar-
doit comme ennemis irréconciliables
du nom Chrétien : il aima mieux avoir
recours à eux , qu'aux Latins qui
depuis long-temsavoient conçu ie defc
fetnde renverfer 'l'Empire d'Orient;
ou plutôt ïl cherchoit à les tromper
les uns & les autres. Quoi qu'il en (oit,
il s'affujettît à payer un tribut au SuU
than d'Iconiuiai , & fit une étroite
alliance avec Saladin.
Pa^lè Traité qu'il conclud avec ce
dernier , il céda aux Mufulmans une
des principales Eglifes , qu'on coiiver-
tit en Moiquée , pour y exercer publia
quement la Religion de Mahomet , Se
promit de faire le plus de mal qu'il
pourroit aux Croifés. Saladin deïott
<6té donna le Saint Sépulchre aux
Prêtres Grecs * & permit à ceux de H*g. s*u
cette Nation , de venir librement vifi- Jè ° ' ,f *
ter la Paleftine. Lorfque ces articles jofe.Edd»
eurent été lignés de part & d'autre ,
le Sulthan envoia une lolemnelle Am-
baffade à Conftantinople , compofée
•d'un de Tes Emirs, d'un Imam , (*)
d'un Muezin , (J?) d'un Cadhi (c) 8c
4c plufieurs Codeurs de la loi : ils
porto Lent avec eux une chaire , un
•exemplaire de l'Al-koran fc d'autres
livres de doârine.
Le jour de leur arrivée fut annoncé
à riflamifme, comme un jour* de
triomphe. Tous les marchands Maho*
métans établis à Conftantinople ou
aux environs , fe rendirent £ur le ri-
vage avec les Officiers de l'Empereur,
Eour recevoir & accompagner les Ara-
affadeurs. Ceux-ci entrèrent avec
pompe dams la ville, & altèrent, fuivis
de cette foule de Mirfulmans , prendre
m i ■ ■ m !■■■■■■ ■ ii ■ ii i»
(*) Imam Prêtre , Pontife. Voyez, i* nou 9
fage 18*. .
(b) Muezin 9 crieur public qui annonce la
prière* Voyez* Ta note , ^ 1 8 $ .
[c] CadM , Juge dès aflaires civiles & des
points de doôrine.
1 5# HistoihK
poftèffion de la Mofquée qu'on leuf
Hég. ç8î. avoit deftinée. Le Muezin annonça la
' ''prières l'Imam monta dans la Chaire,
ylut un chapitre de l'Al-koran , & fit
folemnellement le Khothba (efpéce
de Prône) au nom des Abbaffides. De-
là , on fe rendit au Palais d'Ifaac , qui
combla d'honneurs ces Députés. Go-
défroi , Baron de Wifembach , qui
étoit venu de la part de Frédéric de-
mander un partage libre , fut témoin
de cette cérémonie. Ifaac fit partie
peu après un AmbaflEadeur » pour ligni-
fier au Sulthan qu'on avoit rempli les
conditions du Traité. Les deux Prin-
ces fe firent mutuellement des préfens,
& pour marque dé leur bonne intel-
ligence, ils gardèrent refpe&ivement
dans leurs Cours , les Ambaflàdeurs
qu'ils s'étoient envoies.
,. Cependant Saladin écrivit dans les
Provinces , pour faire revenir fes trou-
pes de leurs quartiers d'hiver , & fe mit
en Campagne avec celles qu'il avoit
auprès de lui. Entre Damas & la mer,
non loin de Panéas & de Sidon , étoit
une Citadelle trèsf-forte établie fur 1$
cime d'un roc. On Tappelloit Scho-
kaif-Arnoun , la Roche-Arnauld ou
F
de Sàlàdin. Lit. IX. 157
Raynaud. Le Prince de Sidon s'y étoit
" enfermé, après avoir perdu Ces autres "{£,$*■
Etats. Le Sulthan ail? fe placer au *" X **
voiûnage de cette Citadelle & atten-
dent de nouveaux renforts, pour en
commencer le fîége : il montoit tous
les jours à cheval , & venoit en recon-
noître la fitoation. Raynaud voyoit
. du haut de fes murailles , les prépara-
tifs qu'on faifoit contre lui. Pour en
fufpendre l'effet, il réfolut de tromper
les Sàrrazins , rufe qui lui réuflît d'a-
bord , & qui lui devint funefte dans la
fuite.
1 Un Jour* (ans que perfonne eut été
f prévenu, on vit paroître devant la tente
du Sulthan , un Chrétien qui deman-
dent à lui parler : c'étoir le Prince de
f Sidon lui-même. Saladin s'avança
pour le recevoir , & avant que de l'en-
tendre , il le fit afleoir à fa table. Pen-
dant le repas , on n agita que des quet .
tion* fur la loi de Mahomet , compa-
rée à celle du Chrift. Raynaud qui
avoit appris la langue Arabe & les tra-
ditions Mufulmanes , parut un pro-
dige à ces Peuples qui regardoient tous
les Prancs comme des ignorans. Cette Boha-cd»
forte d'érudition prévint tous les e£
ï$S HisTdini
ptks-en ùt feveur Se fur-tout Saladin »
•^ f**qui, comme tous les dévots, aimoic
*les difputes Théologiques. Dès que les
Emirs furent fonîs , le Prince de Si-
dbn refté feuî avec le Sukhan , fe jetta
à fes pieds, Fappella fon maître, lui
dit, qu'après les fervices qu'il avoir
rendus aux Chrétiens, il n'en rece-
voit que des dégoûts , qu'il avoit def.
fein d'abandonner certe Nation in-
grate , qu'il Ieprioit de lui céder quel*
que Château aux environs de Damas ,
où il pût finir fes jours avec fa famil-
le , qu'il lui rendroit la Citadelle ,
maïs qirfl fouhaitoic auparavant ferre
revenir de Tyr quelques-uns de fes
parens , fur lefquels on pourroit fe
venger de fa défertion , 6c demanda
un délai de trois mois, afin de leur
donner le tems d'arriver , & pourvue
pas découvrir fes projets par trop de
précipitation* SaJàdin d autant plus *
facHe à tromper, qu'il étoit hir-meme
incapable de rufe & d'artifice , crût :
fes proteftattons fîncéres , lui accorda
tout 6c le combla d'amitiés.
Raynaud venoit fouvent vifïter Sa-
ladhr , avoit avec lui de longues con-
férences & lui renouvelloit fes pro-
i>£ Sala»in. Liv. IX. *jj
meflc* y mais dans le même tems , il
travailtoic fans relâche à fortifier & ***• f j£
Place 5 il y fai£bjt entrer des vivres » % M '
des armes & des Soldats. Les Saosar
zins sapperçurem enfin* de tous ces
raouvemens, et» devinèrent le motif
& avertirent lew maître. Celui-ci fit
observer les Chrétiens de plus près ,
découvrit leuc imentioa > & malgré
Ion reflentimem* il. nofa pas. violes
ksdro&s del'HofpitaUté. Rigide ob»
fervateur de fa parole, il ne voulut
jamais confentir , contre l'avis, de tous
te* Généraux, qu'on arrêtât le Prince
de Sidon, lorfqu'ii ferendoit au Camp;
& diffimula Cau colère juiqaà l'expira-
tion de la trêve. Quelques jouis avant
ce terme, Raypaud étant arrivé k
fon ordinaire , trouva plus d'agttation
dans' l'efptk dit Sukhan , entendit
Quelques murmures parmi les Eimrs ,
le hâf aide fe cetires & fatfu«*is d'être
renvoie libre :jmais, foie qu'il fût aveu-
glé par fon imprudence,loic qu'il crût
les fajpçpi» mal fondes , ouqaecoru
unifiant la bonté & la facilité cfc Sala-
dm, il efipcfâ* le tromper encore, il
vint, après les trois mots, s'exeufer de
ne pouvoir remplir lès pro méfies,, al lé*
léo Histoire
' guant pour prétexte que fa famille n*é-
jï&ilil. t0lz Pas encore arrivée de Tyr , Se
' demanda un nouveau délai de neuf
mois.
LeSnltfaan indigné lui reprocha fa
perfidie , & le fonwiia de tenir fa pa-
, rôle. Raynaud voulant s'évader , fei-
gnit d'aller donner ordre qu'on ouvrit
les portes ; mais on ne permit pas
qui! entrât daésla Place. ; On le ht
efeorter jufques fous les murailles. La
garnifbn rerafe de fe rendre. Un Prê-
tre forti de la Citadelle eut avec lui un
long entretien , après lequel "les Chré-
tiens parurent plus obftinés à fe défen-
dre. On ne douta pas que le Prince de
Sidon rue leur eut cbnfèillé de ne pas
fe foumettre. On lenvoia prifonnier
àPanéas, enfuite à Damas 5 & Ton
commença le fiége de Schokaïf-Ar-
jioun dans toutes les formes. Saladin
étoit d'autant plus irrité d'avoir perdu
inutilement trois mois, que d'autres
foins l 'appelaient ailleurs. Il venoit
Rapprendre que Lufignan , malgré
les fetmens les plus folemnels , avoit
repris les armes & ravageoit la Syrie.
Nous avons dit plus haut que Sala-
din en recevant la foumiffion d'Afca-
lon ,
de SalAdin. Liv. IX. I<fl
Ion, avoit promis de délivrer dans
huit mois,le Roi dejérufalem. Ce ter- jf^'iJ»^
me étant expiré, il lui donna la li- . ...
• , . • .11./-. B»ha-cdii3.
•berce \ mais auparavant , il lui ht jurer 6c alii.
fur l'Evangile , de renoncer au Royau-
me de. la Paleftine , de retourner en
- Europe & fur-tout de ne jamais tirer
l'ëpée contre les Sarrazins. Lufîgnari
alla fe renfermer avec la Reine Sibillô
IHemme, dans le Château d*Anta±
rados : il s'y tint quelque tems en re-
pos ; mais nonteux d'être fugitif dans
îès propres Etats , il chercha pe« après
les moyens de reprendre le fceptre.
auquel il avoit renoncé. Il fe fit dé-
lier de fou ferment par les E^ques
perfuadés qu'on ne devoir point gar-
der la foi aux Infidellea : enfuîte , il
affembla quelques Chrétiens que la
crainte avoit difperfés dans la campa- :
gne , & vint fe préfenter devant Tyr ,
pour en prendre le commandement»
Conrad lui en ferma les portes, pré-
tendant avoir acquis la Souveraineté
de cette ville par le chôixdes Citoyens*
& en la défendant contre les ennemis.
Le Roi outré de colère réfolut d abord
d'employer la force , pour faire ren-^
trer le Marquis de Montferrat daft&
Tmt/Z. O
%6t Histoire
le devoir : il forma une petite atmée
"c. i5il£ àes troupes que Guillaume Roi de Si-
cile avoit envoyées au fecours de la
Terre Sainte, & de quelques Croifés
nouvellement débarqués,; & il envi-
ronna Tyr, dans le deffeia de' laflié-
ger i mais il abandonna bientôt ce pro-
jet téméraire par l'avis des Prélats Se
des Barons qui lui confeillérent de
«céder autems , pour ne pas ruiner en-
tièrement fesefpérances , & de gagner
par la douceur Conrad plutôt que de
l'irriter par la violence. Alors Lufi-
gnan tourna fes armes contre les Sar-
xazins , fit des courfes fur leurs terres
& eut quelques fuccèe.
Entre Tyr & Sidon coule le fleuve
Leiran ou Léonte, qui prend fa fource
dans les montagnes du Liban & fe dé-
Boha-cd. charge dans la mer , au Nord de Tyr.
Sur ce fleuve étoit un Pont gardé par
un corps de Cavalerie Musulmane.
Lufignan attaque cette troupe , la met
en fuite , palfe de l'autre côté & ravage
la, campagne. Dans cette déroute,
un Officier Sarrazin nommé. Ibek-
d- Akrafch , digne d'un meilleur fort,
fe trouve environné par lis Chrétiens.
Ayant, eu Ton cheval tué fous lui , il
di Saiàdik. Liv.IX. itfj
monte fur un rocher & foutient une
efpéce de fiége. Après avoir épuift j^cfViU".
tous fes traits , il met 1 epée à la main
Se fe défend encore, quoique couvert
de tleflures : enfin il tombe accablé
par la multitude. Cependant les Ma-
hométans fe rallient, reviennent à la
charge, & repouflent à leur tour les
Francs qui fe précipitent dans le fleuve*
Saladin , au premier bruit de cette
incurfion, étoit accouru dans la plaine :
il arriva , lorfque le combat étoit fini :
il voulut voir le cadavre d'el-Akrafch,
& honora <Je fes regrets la mort de ce
Brave Mufulman : il pafla le Pont,
£our aller reconnoître de près les for-
ces des ennemis. Une grande mul-
titude de fantaflins emportés par
leur ardeur, le fui vit malgré lui.
Lufignan avoit placé une embufeade
fur le bord du fleuve. Des que le Sul-
than fut éloigné , les Chrétiens fe
jettérent fur cette troupe de fantaC-
fins mal-armés & les mirent en défor-
dre. Saladin vint trop tard au fecours
de fes Soldats , il en trouva deux cens
étendus par terre. Réfolude fe venger
de cette perte , il range le lendemain
ùl petite armée en bataille & s'avance
Oij
n$4 Histoire.
contre les Francs 5 mais ceux-ci Ce re-
Hég, f8ç. tirent fous les murailles de Tyr , où il
j. c. »8*. ^toit impoflible de les forcer. Alors Sa-
ladin. court à Ptolémaïs , pour voir
dans quel état étoit cette Place $ il
donne Ces ordres , pour en augmenter
les fortifications , & revient continuer*
le fiége de Schokaïf-Arnoun.
Cependant Lufignan ne ceflbit de
faire du dégât , & d'infulter les Ma-A
hbmétans jufques fous la fotterefle de
Tebnin , vôifine de Sarfend & de
Schokaïf ; il conduifoit lui-même ces
partis compofés d'un grand nombre
de Fantaffins & d'un corps de cavale-
rie. Saladin pour avoir u revanche *
difpofa tout pour le furprèndre > lorC-;
\quil reparoîtroit. La garnî(or> de
Tebnin eut ordre de fortir ; & de pren-.
dre la fuite , fi elle écoir pourfuivie »
afindeféparer la Cavalerie de Mnfen-
terie : il y avoitde diftance en diftanicè .
& de plusieurs côtés, vingt Cavaliers
armés à la légère , qui dévoient te-?
hir ferme un moment , reculer en-
fuite avec précipitation, & par diffé-
rentes évolutions /rompre encore plus
les Francs , & en attirer le plus grand
nombre dans le lieu de rembufcade.
Dl Sàiàjun. l*v. IX. l£j
Saladin auroit paru avec Tes Mame-
luks en pouffant de grands cris. Alors "^ fjf*
ceux de Tebnin , & les différentes pe- h c'"tl u
ti tes troupes de Cavaliers , donc nous
avons parlé .. auroient fait voltç face , .
& on eût battu de tQutes, parts les
Chrétiens divifés , &; en défordre. Pour
leur ôter l'efpoir d'être fecourus par la
grande armée > les Citoyens de Ptpjc^
xhaïs dévoient le même jour faire une
Tortîe, & aller attaquer le camp^nnç-
jmi: enfin les' méftirçs' «étQiçat jÇbïe^l
prifésVqu^irne pôuvoîtécliapér aucun .
Soldat de ce nombreux détachement;
mais un excès de bravoure fit manque*
lç projjet le plgs ïagemént cônceçté,
.' En effet , Jiés francs ayant ét£ Ter
pàr£s parla retrait^4eJaTg^r^ifçn dé
Tebrim , les vingt Cavaliers qui fe
préfentérént lés premier^, crurent leur
gloire intéreflee à ne point fuir > mal-
gré les, ôrdreçi qu'ils âv$ént rççus : il$ •
réjïftérènt feuls aux;effofts des. enne?
riiîs,& leur donnèrent le tems deTe
rejoindre ; ils fe défendirent pendant
plpfieurs heure* , 8c. eurent l'honneur
dedïfputer.la vi&oire à des troupes
infiniment fupérieures : mais cette va-
leur déplacée rendit inutiles les difpo-»
fitïons duSulthan. Impatient dé ne^
J.c£ iî*£ yolT arriver perfonne, il fortit enfin \
de fon retranchement , & trouva le
combat engagé ; à: la vérité , les Cb ré- .
tiçns furent forcés , mais ils fe reti^i
rérent en bon ordre , &*. fans avoir
perdu beaucoup de monde. /
Dans le tems que le Roi de Jérufa-
iéiri erroit dans un coin de fon Royau- /
me, une foule de Croifès débarquai
^uprès de Tyr, & renforça la petite
"rmée de ce Prince. Avec 'èèl fécours
il voulut s'aflurer au moins un azyle
dans fes propres Etats , & marcha
drbit contre Ptolémaïs , croyant la fur-
ptendr'e. Cette ville rendue célebte
par un fiége deirôft ans qu'elle fou-
tint contre les ibreés réunies de tou-
te llEurbpé, mérite d'arrêté* un mo-
ment notre attention.
Ptolémaïs , (a) connue aufli <fans
ÏHiftoire , fous les différehs noms
3'Acco , d'Acca , d'Ace >d'Acra , d'Ac-
càron , d'Acre ou de S. Jean d'Acre,
(£) avoit effuyé anciennement plu-
(a) Ptolémaïs. Voyez , pour cette ville , les
notes de Schnhens, tTHerbelôt & Réland,
p. 5x4. &.Hift. ]éruf.
(I>) Ptolémaïs eft appellée par les Hébreux
2. Garde des 2kmpaers.
3. Garde darj&tùùmr.
4,. Urur des AFUjfai* .
â. HmrJKattdite .
S. Hmr StNicckhf -.
7. EmrduJPontr.
8. Tbur duPatriartkc
p. IburdesAUman*.
10. Château,.
21. Batriarchatr.
22, . Quartier des J&dàeTW.
t3 Ofiartierder Gênais.
34. Hôpital.
jS. leZmpIe.
16. Irtres ïrecheia"s.
vp. Ibères mineurs.
18. Carmes.
îg.Mounj duZfnjple.
2o.Maùro7t des Tkmpaers.
2i.StLa*are.
jrrecs
Croi-
ûde ;
*SBHEar peuplée. Sa fituation dans une plaine
jîc? ii8j!agrcaWe , un port commode pour la
navigation & le commerce , des fof-
fés larges & profonds , une double en-
ceinte de murailles flanquées de gro£-
fes tours dediftanceen diftance, en
faifoient une des Places les plus consi-
dérables de la Paleftine. Dans fa for-
me prefque triangulaire > elle s'élar-
girtbit du côté Oriental , & Ce rétré-
ciffoit vers l'Occident. Les deux tiers
de la ville du Sud au. Nord étoient bai*
gnés par la mer. Le .port bâti Se revê-
tu de pierres Tan deux cent cinquante
de l'Hégire par Amed Ben Touloun
quirégnoit en Egypte & en Syrie,
étoit gardé, par une grotte tour, ap-
pellée la Tour des mouches, (4) &
terme par une chaîne qu'on levoit &
baiflbit à volonté. Les débris-d'un an-
cien Temple, que les Chrétiens di-
(a) Les uns difent qu'on l'appelloit amfi ,
parce que le rocher fur lequel elle eft Jbàtie,
étoit autrefois toujours rempli de mouches »
à caufe qu'on y lavoit les entrailles des viâi-
xnes immolées : les autres prétendent qu'il y
avoit anciennement fur ce rocher un Temple
dédié à Béelzébut , c'eft-à-dire , au Dieu des
mouches*
foient
t.
ipf'l'WI!^! >iïM'''ijjjhiP W^::\^'lIMW\
ENVIRON S Ï>RE
iliiiiCillf i.l'.. -v4. w
■T;\-lJy.
-:^\
aiiî:v';^^^'^;:^
L.!lil
M^-
^^^^^^i'r':'"' '^'' ■'■V/---<^/*-v'<->'>'^'^ai
u.rf
||p^i^^
t>% Sàiàdin. Liv. IX. 169
foient avoir été élevé en l'honneur de
S. Jean , & les Mahométans en Thon- H%- *•* •
neur du Prophète Saleh , c'eft-à-dire , J* * l ' *'
du Patriarche de ce nom , rendoient
Pcolémaïs refpedtable aux deux Na-
tions. A l'Eft on voyoît une efpéce de
Château nommé la Tour maudite ,
parce que le peuple croyofc , félon une
vieille & ridicule tradition , qu'on y
avoir fabriqué les trente deniers pour
iefquels Judas vendit fon maître*
Cette ville » telle que nous venons
de la décrire , étoit fituée à douze
milles de Tyr, à vingt-quatre de Ti-
fcériade ,'dans une campagne fertile &
fur la côte feptentrionale d'un golphe
que la mer forme en cet endroit. Son
terroir eft borné au midi par le Car-
mel (4) que le féjour de Pythagore &
la retraite du Prophète Elie ont ren-
' (*) Le Carmel eft éloigné de Ptolémaïs
de 1 20 ftades : il eft à la pointe méridionale
du Golphe : 011 y montre encore la caverne
d'Elie. Les Carmes , qui font remonter l'ori-
gine de leur inftitution jufqu'à ce Prophète ,
tirent leur nom du Mont-Carmel. J'y ai vu
quelques-uns de ces Religieux qui y ménen t
une vie fort auftére. Voyez. , four le Carmel ,
des notes ffavtnte* dum Rcl*nd,é>c.
TomU. P
17© HlSTOIHB
du fameux , au nord par le mont Sa. -
Hég. j«f. ron, autrement dit l'Echelle des Ty-
j. c. u **• rjens ^ ^ ^ à l'Orient par les mon-
tagnes de la Galilée. Le fleuve Bélus #
eu félon les Mahométans ,Nahar-«el~
haloii , coule du Sud-Eft au Nortfc-
Oueft , & fe décharge dans la mer
au Sud, & à deux ftades de Ptolé-
maïs. On dit que les eaux de cette
petite rivière qui font d'ailleurs fa-
des & faumaches , ont occafionné la
fabrique du verre, car elles s'arrêtent
dans une efpéce d'étang que Pline
nomme la Pain ccndtvia> large dans
fon contour, d'environ cent coudées,&
de figure parfaitement ronde. Les fa-
bles que le$ vents y portent des mon-
tagnes voifines > après avoir féjourné
quelque tems dans ce marais, acquiè-
rent une vertu qui les rend propres à
devenir du verre , & fe convertirent
en effet en cette matière , lorfqu'ils
ont été mis au feu : mais ce qui pa-
role le plus remarquable, c'eft quon
prétend que les morceaux de ce verre
ainfi préparé étant jettes dans cet étang,
0*) Le Mont Saron ou l'échelle des Tyriens
eu à ico ftades de Ptolémaiïs , &c
de Saladir* Liv. IX. 171
y prennent leur première nature & fe
changent de nouveau en fable corn- j"^Iî|f'
mun.
La plaine de Ptplémaïs égale par-
tout ailleurs , eft coupée auprès de là
ville par deux collines connues, l'une
fous le nom de Turon ou de Tell-el-
moufaliin , c'eft-à-dire , la montagne
des Priants; l'autre fous celui de la
-colline de la Mofquée ( de Mahumé-
ria ) ou de Tell~el-aiadhiar, Sur cette
dernière , on voyoit les débris d'un an-
cien Sépulcre que le vulgaire difoit
être le tombeau de Memnon , fans
<ju on puiffe fçavoir l'origine de cette
opinion.
Tels étoient les lieux qui fervirent
de théâtre à tant de belles a&ions , Se
où i'Iflamifme & la Chrétienté affem-
blés , vinrent décider les armes à là
main , à laquelle des deux Religions
devoir appartenir la ville de Ptolé-
maïs.
Lorfque Lufignan parut devanreette
Place , il navoit en tout que neuf
mille hommes: il ne laiffa pas cepen-
dant de donner un aflaut. Ayant été re-
fouffé avec perte , il fe retrancha vers
Orient , fur la colline de Turon , en
17* Histoire
attendant de nouveaux fecours qui ne
h%. 585. tardèrent pas d'arriver,
' n * Les premiers qui débarquèrent far
les côtes, furent des Croifésde Dan-
nemarch & du pays de Frize , au nom-
eont. Guiiu bre de douze mille. Jacques Seigneur
IFa ?{TC d'Avefne & de Guife , un des plus
Kaa* ae aie. , , . *
j. Brompton. grands hommes de ce tems , amena
^?£eT' c «r une petite armée compofée de Fla-
icc. mands , d Anglois & de François ivor
patiens de remplir leur vœu , tandis
cjue les Rois de France & d'Angleterre
le faifoient une guerre cruelle. D'au^
très François avoient fuivi Robert
4 II. Comte de Dreux ,Thibàud Comte
de Chartres, Ton frère Etienne Comte
de Sancerre , Thibaud Comte de Bar ,
Raoul Comte de Ciermont en Beau-
voifis , & Philippe E vêque de Beauvais,
#ce Prélat guerrier qui eut toutes les
vertus qui font les Héros , (ans en avoir
aucune de (on état; plus excufable
alors df exercer fa bravoure contre les
ïntidelles, que lorfqu il fe mêla dans
fa Patrie des querelles des Rois , Se
qu'il fut pris les armes à la main, (a)
(a) Il fut fait prifonnierpar les Angloisdant
ne bataille* Le JPape Celeftin III. écrivit à
(
fit Sàladin. Ltv.IX* 17J
trard & André deBrienne, Guillau-
me Comte de Chàlons fur Saône »'7Ji^>I{g^
GeoflFroi de Joinvilie 5 Sénéchal de
Champagne, Gui de Dampierre , Ma-
nafles de Garlarrde, AnférJcde Mon-
tréal , Guy de Châtilloii fur Marne ,
& Gaucher III. fon ftere , connu dans
la fuite fous le nom du Comte de S.
Paul, nom qu'il rendit célèbre par
tant de belles a&ions , précédèrent
avec leurs yaflaux , Philippe Augufte
dans la Paleftine *& vinrent défendre
les intérêts de la Religion ,& fbutenir
l'honneur de laNobleffeFrançoife,
Le Landgrave de Thuringe & le
Duc de Gueldres s'embarquèrent avec
plusieurs Allemands , qui ne voulurent
point attendre le départ de Frédéric
Barberouflfe : mais leur prudence ne
fut pas moins utile que leur valeim;
car ayant abordé àTyr, ils perfua-
Richard, pour obtenir la liberté de TE vêque;
il mandoit au Roi : Rendez-moi mon fils. Re-
tânnoijfez-vous l'habit de votre Fils , répon-
dit Richard au Saint Père , en lui envoyant le
cafque , la cuirafîè & les autres armes avec
lefquelles le Prélat avoit combattu? Il étok
frère de Robert Comte de Dreux & couf»
du Roi Philippe.
174 Histoi-ri
dérent à Conrad de Montferrat , de
"c'n8^aire c^er *°n *eflentimentau bien
* public , & de Ce joindre au Roi , pour
la conquête de Ptolémaïs. Toutes ces
troupes jointes aux Templiers , aux
Hofpitaliers , aux Génois , aux Pîfans ,
aux Lombards , aux Vénitiens qui
avoient à leur tête les Archevêques de
Pife 8c de Ravenne , compoférent une
armée d'environ quatre-ving* mille
hom mes.
Saladin apprit avec indifférence*
que Lufïgnan s'approchoit de Ptolé-
maïs , il ne daigna pas troubler la
marche de ce Prince ; il crut que , par
ce mouvement, les Francs vouloient
faire diverfion , & l'éloigner de Scho-r
kaïf-arnoun jpour jetter du fecours
iwa. jans cette piace : il en prefTa le fié—
ïoha-eddin. ge avec vigueur , laïuant a ceux de
Ptolémaïs le foin de fe défendre con-
tre une poignée de Soldats fi fouvént
vaincus : mais il méprîfa trop des en-
nemis animés par le défefpoir*& qui
recevant tous les Jours du renfort , de-
venoient plus difficiles à détruire : il
reconnut enfin fa faute , & pour la ré-
parer, il ordonna des levées dans fes
Etats, inveflic Schokaïf avec peu de
*s Saladin. Liv. IX. 17)
troupes , & partit avec te refte, pour
aller combattre les Chrétiens , qu'il ,/£*#£
auroit pu difliper auparavant par &
feule préfence , & qui étoient alors re-
tranchés clans leur camp , & fortifiés
par l'arrivée des Croifés.
Lorfqu il fut dans la plaine de Pto-
lémaïs , il rangea fon armée en batail-
le» appuyant fa droite fur le fleuve
Bélus , & fa gauche fur la colline de
la mofquée ( Tell-aiadhiat. ) Par cette
difpofition , il tenoït les ennemis blo.
2ucs du côté de la terre $ mais h mer
toit libre, & les flottes de l'Europe
amenoient fucceflïvementdufecoi^rs,
des vivres fie des munitions. Le $ul-
than plaça de toutes parts , des gardes *
avancées , & fit approcher un corps
d'Archers qui tiroient continuellement
fur les Francs. Ceux-ci s'étendirent à
l'Orient , depuis la montagne de Tu-
ron où étoit le quartier du Roi jufqu'à
Ptolémaïs , Se occupèrent tout l'efpace
depuis la Tour maudite , jufqu'au ri-
vage , vers le Nord , c eft-à-dire, la
moitié de la ville. Il y eut d'abord plu-
sieurs efearmouches qui affoiblifïbient
les deux partis. Dans une de ces atta-
ques, les Chrétiens étant fortîs avec
P mj
i7<? Histoire
toute leur cavalerie , gagnèrent infen~
*% tlV\ fixement <to tcrrein ,& profitant de
cet avantage , ils fe répandirenc jus-
qu'à la mer du côté du Nord, où ils
fe logèrent , environnant ainfi toute la-
Place.
Saladin ne leur donna pas le tems
de fe fortifier dans ce nouveau pofte~
H aflembla le foie même fes Emirs >
& leur dit de fe préparer pour un
combat général. Tous applaudirent à
cette réfolution. Le lendemain vers
l'Aurore > Vendredi le premier de
Schaban y huitième mois de l'armée
Arabique , il monta à cheval , & tom-
ba brufquement avec toute fon armée ,
fur les Francs qui l'attendirent de pied
fermé. Il n'avoit plus affaire à ces Sy-
riens accoutumés à fuir : il trouva de-
vant lui des Croifés animés parfegloi-
re & par la religion , qui fbutinrent
cet effort avec un courage intrépide,
Plufieurs fois ils furent repoufles par
eux. Le carnage fut horrible de part
& d'autre , & la vi&oire demeura in-
décife jufqtfà la nuit qui fépara les
combattans.
Le Sulthan fçavoit que l'endroit le
plus foible étoit celui dont la cavale-
lie ennemie s'étoit emparé la veille
©i Sàlàdin. Liv. IX. 17^
du côté de la mer ,& où elle n'avoit
£û fe retrancher. Il choifit les plus J^J'JJ*
raves & les plus déterminés parmi " *
fes Mameluks &c parmi les autres Ca-
valiers, met à leur tête Teki-eddin-
Omar Ton neveu , jeune homme plein
de feu & propre pour les expéditions
hardies, & lui recommande de char-
ger la gauche des Croifés , tandis qu'il
les occuperait lui-même vers la droite.
Le Samedi à la pointe du jour , les
Mufulmans marchent au combat en
pouffant de grands cris félon leur cou*
tnme. Teki-eddin defcend le fleuve
Bélus avec fa troupe d'élire : arrivé fur
le bord de la mer , il tourne tout à
coup à droite , Ôc tombe fur la cava-
lerie des Francs. Ceux-ci réfîftérent
pendant quelque tems ; mais obligés
enfin de céder , ils fe replièrent à l'Eft >
vers le gros de l'armée» Ce fuccès ani-
ma les Sarrazins, & ralentit l'ardeur
des Croifés. Au milieu du combat , Sa-
ladin entré à cheval dans la ville par
le Nord,ceurt à la partie Orientale*
monte fur la tour la plus élevée > exa-
mine la (îtuation des ennemis y fait
ouvrir les portes, & (brtant avec la
garpilbn , il vient prendre en queue
tyt H î s t or i m
les Chrétiens furprisde cette attaque,
Hég. 385' Alors ct% derniers pouffes de coures
' t# " 9" parts & pôurfuivîs , abandonnent le
champ de bataille ,& vont fe renfer-
mer dans lecrr camp?.
Après avoir donné qurfqûe repos à
fon armée , le Sulrhan fe prépara à le»
forcer dans leû#s ferrancfcemens. Plu»
f entreprife étoït difficile , plus elle flat.
toit fon courage; il introdtiifit dan»
Ptolémais un corps de cavalerie qui
dévoie déboucher de ce côté , dans le
rems qu'on chargeront les Francs par
Fendroit oppofë. Cette attaque com-
menta le Lundi ( quatrième jottr de
Schaban) & dura jufqu'au Vendredi :
Saladïn environna aabord rout le
camp des ennemis , 8c les fit accabler
de traits- En divifaftt fes. forces, il; le»
affaiblit. Jamais il ne montra tant
de fermeté & de confiance : il ne* fe
livra prefqoe point au fommeil, & ne
prit que très-peu de nourriture pen-
dant placeurs Jours, Semblable , dit
Boha-eddin , à une Lionne qui a per-
du fes petits & qui tourne fans cefïè
en rugiffant autour de fon antre, fe
Sulthan étoit préfent à tour , il fe por-
toit dans tons les rangs , parcourait
de Saladin, Liv. IX, iyy
plufieurs fois avec rapidité tout l'ef- ■
pace occupé par les lignes des Chré* ***** **'•
tiens, animant fes Soldats par Ces ex. J* C* ,l1*
bortations encore moins que par (on
exemple: mais quoiqu'il fut bien fé-
condé par eux , tant de bravoure fur
inutile : il ne put faire fortir les enne-
mis de leur pofte , & fut obligé le cin#
quiéme jour de fe retirer à quelque
diftance , pour laifler refpirer fes trou-
pes épuifées de fatigues.
Alors les Chrétiens s'étendirent eux-
mêmes dans ta plaine : ils formèrent
une colomne impénétrable , plaçant
l'Infanterie dans le centre & au flanc 9
& la cavalerie fur les aSles. Ils s'avan-
cèrent lentement 8c à pasmefurés,fi
ferrés entr'eux & en fi bon ordre, qu'ils
paroiflbient ne former qu'une mafle
énorme à laquelle on avoir imprimé
un mouvement. On croyoit voir mar-
cher une muraille , dit THiftorien Ara-
be, Ils Tenverferent tout ce qui étoit
devant eux en s*approchant des Mi*~ .
fulmans , chaflerent tes gardes avan-
cées qui portèrent l'allarme ({ans le
camp des Sarrazins. Le Sulthan cou-
rut dans tous tes quartiers en criant
de toutes fes forces Iaï-aMffam (tar
l8o HlSfOÎRE
dd/Jlamifmum) à l'Iflami, à l'I/fatit*
Hég. 58 y. f0^ crj je guerrc ordinaire. Les Offi-
J.C H85. . & , . . , ,
ciers montes précipitamment a che-
val , répétoient les mêmes mots» Les
Soldats réveillés par te motif de la Re-
ligion , oublient leur laflttude , & pren-
nent les armes en tumulte. On fe raC-
femble , on s anime les uns les autres ,
en pouffant de grands cris ; & l'on vient
à la rencontre des ennemis. On fon-
dit fur eux de tous côtés , & à plufieurs
reprifes j fans pouvoir les rompre : or*
leur tua beaucoup de monde -, mais ils
en tuèrent davantage. À la fin, ris re-
culèrent infenfiblement dans le mê-
^ me ordre > 8c rentrèrent dans leurs li-
gnes. Saladin, dont l'armée avoit be-
soin de repos, fit entrer des vivres
dans la ville, rafraîchit la garnifon ,
laifla quelques troupes pour garder les
paffages, & abandonna le lieu qu'il
occupoit , pour aller s'emparer plus
avant dans les terres d'une -hauteur
dont les Francs auroient pu fe rendre
maîtres.
Il ne (èpaffà rien de remarquable
jufques au vingt-unième de la Lune
de Schaban. Il y eut feulement des es-
carmouches, de petits combats >onfe
©e Sàladin. Liv«IX. i8i
tendoit des embûches , on fe harceloit Hé 8
à coups de flèches ; on faifbit des cour- j- c?'i îs*."
fez dans les terres ; on pilloit , on ra-
vageoit. Semblables aux Héros d'Ho-
mère , les Francs & les Sarrasins ac-
coutumés à fe voir 9 s'approchoient
fans crainte , s'entcetenoient les uns
les autres , fe difoient fouvent des in-
jures , & les vengeoient par les armes, ^
Les Tournois qu'on croit inventés par
les Arabes , étoient alors en ufoge.
Les Chrétiens s'exerçoient avec les Inr tbîà*
fidelles dans ces fortes de combats,
fous les muf ailles de ftolémaïs. Les
deux champions entrés en lice , n'en
venoient aux mains , qu'après s'être
harangués hm & l'autre : le vaincu
étoit tait priibnnier de guerre ou ra-
cheté. On fit même quelquefois bat-
tre des enfant : enfin la familiarité
étoit telle entre les deux Peuples en-
nemis , que les Francs danfbient fou»
vent au fon des inftrumens Arabes ,
& chantoient enfuite, poucf^ired^n-
ferles Sarrazins. Ces détails qu'on
peut regarder comme minutieux , fer-
vent à l'hiftoire des moeurs.
Cependant les Chrétiens ayant en-
core reçu des fecours confidérables ,
Boha».cd4.
iSz Histoire
' furent honteux de refter dans l'inac-
i.cé.5il8^tîon' ,Les nouveaux Croifés dont le
\ zélé n'étoit point ralenti par les dé-
bauches de la Syrie , demandèrent à
combattre les Infidelles. Bientôt tour-
tes les troupes furent animées de la
même ardeur. LuGgnan profita de
cette heureufe difpourion. Jamais il
n'avoit eu une armée auffi nombreufe ,
& fi bien compofée. Nos Hiftoriens
qui exagèrent rarement les forces des
Croifés , difent qu'elle étoit compofée
de quatre mille chevaux & de cent
mille Fantaffins. Les ennemis avoienc
plus de cavalerie & moins d'infanterie.
Ce fut le Mercredi vingt-unième
de Schaban , quatrième jour d'Oâo-
bre , que les Francs fortirent de leurs
lignes. Ils s'étendirent dans la plaine,
depuis le fleuve Bélus jufqtfà la mer.
Le Roi , devant lequel on portoit le
Livre des Evangiles couvert d'une
étoffe de foye , & foutenu dans les an-
gles par quatre Officiers , occupoit la
droite vers le fleuve, avec les Fran-
Hift Hier, çois & les Hofpitaliers. Le Marquis
Boha-cddin. de Montrerrat commandoit la gau-
. che du côté de la mer , ayant fous lui
les Vénitiens & les Lombards. Le
Landgrave de Thuringe , les Anglois,
de Saladïn." Liv« IX. 18}
les Pifans > étoient au centre. Gérard
de Bidesford, grand Maîcre des Tem- ,/£Vx$£
Elîers , le Duc de Gueldres , les Cata-
ms forraoienr le corps de réferve ;
&. Ton avoic laiffé pour la garde du
camp , Geoftroi de Lufignan , frère du
Roi , & Jacques d'Avefne. Les Ar-
chers & la Gendarmerie étoient en
avant , & la Cavalerie fut placée en-
tre les lignes. Nous devons remarquer
que parmi les Prélats qui fe fignalé-
rent dans cette journée , on voyoit à
la tête de leurs troupes , les Archevê-
ques de Ravenne 9 de Pife , de Can*
torberi , de Bezançon , de Nazareth ,
de Mont-réal ; & les Evêques de Beau-
vais , de Salifburi , de Cambrai , de
Ptolémaïs , de Bethléhem* armés d'un
cafque & d'une cuirafle. Les Chrétiens
pour ne perdre ^ucun des avantages
qui pouvoient leur aflTurer le fuccès ,
s'emparèrent de toutes les hauteurs»
& s avancèrent en cet ordre contre
l'ennemi , fiers de leur nombre & de
leur fîtuation. On a dit qu'un des
Chef admirant la force & la réfolu-
tion de cette grande armée , s'écria
dans fon enihoufiafme : » quelle puit-
»fance pourroit nous rélîfter? Dieu,
» foyez neutre & la vi&oire eft à nous.
184 Histoire
Saladin , de Ton côté fut bientôt pré-
j?c.' iI*£ paré au combat : il n eut pas de peine
a ranger Ton armée ; car les Arabes
difent , que , pour n'être jamais fur-
pris , il marchoit & campoit toujours
en ordre de bataille , ce qui paroic
avoir été difficile dans un pays lï iné-
gal & coupé partout de montagnes»
On peut croire feulement que chaque
Officier , chaque corps de troupes
avoient leur pofte marqué , &c que
dans une aâion , tous fe mettoient au
rang qui leur avoit été affigné. Les
Sarrazins occupoient également tout
le ter rein , depuis le fleuve jufqu a la
mer , ayant leur aile gauche oppofëe
à la droite des Chrétiens s & la droite
à la gauche de ces derniers. Le Sulthati
fe plaça dans le centre avec Tes Mame-
luks. Cependant on animoit de part &
d'autre le courage des troupes par les
mêmes motifs. Cette guerre étoitap-
pellée par les deux Peuples une guerre
fainte, une guerre entreprife pour la
caufe de Dieu, Les Evêques & les
Imams promettaient aux Soldats la
remiffion des péchés & la palme du
martyre. Les Francs & les Sarrazins
fe traitoient réciproquement dlnfi-
délies :
ï>e Saladim. Liv.IX. iÏj
délies : les Mufulmans prenoient le •HSS»
nom & Unit air es , par oppofition jfo iîg£
aux Chrétiens , qu'ils appélloient Tri-
maires, à caufe du Myftére de la Tri
i*iré.
Les deux armées furent en préfence
pendant quatre heures ; mais vers les
dix heures du matin > les Archers des
Francs courent en avant & accablent
de traits la droite des ennemis. Ceux-
ci détachent d'abord leurs Archers f
& s'avancent pour les foutenir. Teki-
eddin Omar , qui commmandoit de ce
côté , joignant la rufe au courage , or-
donne à Tes troupes de plier , pour
féparer du corps de bataille ceux qu'il
avoit en tête : mais Saladin ignorant
le deflèin de Ton neveu , attribue à
foiblefle fa retraite , & lui envoie un
renfort de fes meilleurs Soldats. Ce
mouvement exécuté avec précipitation
jette l'allarme dans toute l'aîle droite
qui s'ébranle , incertaine fi elle doit
fuir ou combattre* Les Chrétiens fai-
llirent cet inftant , pour attaquer les
Infidelles qui déjà vaincus par leur
propre frayeur , prennent la fuite #
. fans. faire aucune réfiftance. L'épou-
vante étoit telle que les uns fe fauve-:
Tmtth Q.
i8£ Histoire
rent jufqu'au de -là. de Tibériade 5
£^t\*l\ d'autres allèrent jufquà Damas» Le»
Francs les pourfuivirent long-tems w
en tuèrent un très -grand nombre,
forcèrent la garde du camp ennemi^
& au lieu de profiter de leur vi&oire*
ils s amuférenr à piller ce camp, & à
fe charger cfun riche butin qu'ils dé-
voient bientôt abandonner. Le Comte
de Bar monta fur la colline deTel-el-
Aia^iiat , ( de la Mofquée , ) oit ètoit
le Pavillon de Saladin & maflacra,
fur le Sopha même du Suhhan , plu*
fîeurs Officiers de fa maifon.
Cependant Saladin , la rage dans le
cœur , couroit à cheval de toutes
parts, pour arrêter fes Soldats, pro-
mettant aux uns des récompenfes &
menaçant les autres de la mort qu'ils
vouloienr éviter. Il ne lui ètoit reftè
que cinq Mameluks avec îefquels il
pafla pluueurs fois au travers des entier
mis difperfés dans la plaine : mais (a
5>erite troupe groflïr infenfiblement t
es fuyards fe rallient autour de lui , &
demandent à laver leur honte dans le
fangdes Chrétiens. Ces derniers, après
avoir ravagé le camp , retournoient
Vers leurs armées. Ceux qui étoieût
de S al ad in. Lrv.IX. 187
montés fur TeUAïadhiat , voyant de
cette hauteur la gauche des Infidel- j^J',^
les , immobile & en bon ordre, ju-
gent qu'ils noue remporté qu'une vic-
toire imparfaite * Oc le hâtent de cher-
che^ leur fureté par la retraite. Sala-
din arrive au pied de la colline , place
en embufeade (a troupe animée par le
défefpoir , & tombe avec fureur fur les
Francs defeendus de la montagne»
Dans le même tems , Téki-eddin
Omar débouche d'un autre côté avec
les Soldats qu'il avoit raffemblés,&
augmente la déroute des Chrétiens,
qui jettent leurs armes & leur butin,
& courent vers leur droite qui n'avoir
pas combattu.
Les Croifës les voyant revenir en \
cet étatè& en fi petit nombre croyent
que tous les autres ont été tués. La
même terreur qui avoit agité les Sarra-
zins les faifït, comme eux , ils font
fburds à la voix des Officiers & quit-
tent leurs rangs. Au milieu de cette
agitation générale, un cheval Arabe
pris fur les ennemis s'échappe : on'le
S ourfuit pour l'arrêter. Quelques Sol-
ats furpris de ce mouvement f s'é-
crient que ceux de Ptolémaïs ont fait
i8S Histoire
une fdrtîe & qu'ils pillent le camp^
r.ci iîl£ Cette fauflEe^ nouvelle redouble le ra-
j^ multe & la crainte. Dans ces circonC
tances , Saladin ayant rejoint la gau-
che de fon Armée anime fes troupes ,
femet à leur tête , fond fur tes Chré-
tiens & en fait un horrible carnage.
Les Chevaliers Templiers furent les
feuls qui eurent honte de fuir fans
combattre r mais cette fermeté leur
devint funefte , il en périt un très- ,
grand nombre , entr'autres leur grand-
Maître Gérard de BidesforcT % qui par»
tageoitleur périt & leur gloire. André
deBrienne, (de Brenno ,) célèbre par
fbn courage , fut tué en voulant ral-
lier les fuyards. Jacques, Seigneur
d'Avefne , auroît (ubi ïe même fort y
fans un Cavalier qui lui donna foi*
cheval avec lequel il fe fauva. Erard
de Brienne paffa en fuyant fur le corps
de fon frère expirant qui lui demanda
du fecours,. maisla peur l'emporta fur
la pitié. Le Roi plus généreux , ou-
bliant fon reffentiment , dégagea le
Marquis deTyr prêt a périr. Les Mu*
fulmans poprfuivirent les Chrétiens
Jufquà leurs retrànchemens qu'ils au-
raient forcés , fi #n n avoit eu là jcé-
tTB SàLADIN, LlV. IX# 1^9
caution d y laifler des troupes , pour (
les garder. *% ***«
Ainfi , dans cette Journée , ht for- * * " *"
tune couronna fucceffivement les
Francs & les Sarrazins : La même
caufe produifît le même effet de part
& d'autre. Une terreur panique caufa*
la défaite des deux armées. Laîle
droite fut mffe en déroute de Pun Se
de l'autre côtés & la gauche remporta
la vi&oire, > La* perte fut confidérable
dans les deux partis ; mais le nombre
des morts fut beaucoup plus grand par-
mi les Chrétiens , que parmi les Infi-
delles.
#Le Sulthan fit jetter dans le fleuve
les cadavres qui infe&oient Fais. Ren-
tré dans (on camp , il fut obligé de
détacher de la cavalerie pour arrêter
les valets & les efeFaves , qui , croyantr
les Sarrazins vaincue fans reflburce^
avoient eux - mêmespillé le camp & -
pris la fuite. Tous les effets furent rap-
portés Se rendus à ceux qui les récla-
moient avec ferment. Saladin ne dé*
cFaïgna pas de préfider à cette diïlriba-
lion pendant plufiëurs jours.
Après ce combat , les Chrétiens ne
furent pas tentés de hazarder une fe-
J.C. i
IbiA
ï3S Histoire
une fortie Se qu'ils pillent le camp*
Cette faufle nouvelle redouble /e tu*
multe & la crainte. Dans ces chconù
tances, Saladïn ayant rejoint la gau-
che de fon Armée anime fes troupes,
femec à leur tete a fond fur les Chré-
tiens & en fait un horrible carnage*
Les Chevaliers Templiers furent les
feuis qui eurent honte de fuir uns
combattre : mais cette fermeté leuf
devint funefte , il en périr un tres-
grand nombre , eut r'autres leur grand-
Maître Gératd de Bidesford \ qui pjr*
tageoit leur périt fk leur gloire, André
de Brienne, {de Brtnm ,) célèbre pat
fon courage» Fut tué en voulant ral-
lier les fuyards- Jacques, Seigneur
d'Avefne, auroït lubi te mêi
fans un Cavalier qui lui do
cheval avec lequel il fe fauva. Er,
deBrienne paffaen ruyan^sH
de fon frère expirant qui
du fecouts; matsJapeur
la pitié. Le Roi pli
bliant fon reflem "
Marquis dcTyr
fui m ans po^in
jufqu'à leurs
roient foci "
iça Histoire
condef a&ioiï ? mais Saladin ayant
SSilir donné quelque relâche à fes croupes,
appella dans fon Divan, cous les Emirs
& les dïfférens Princes fes vaflaux
venus à fonfe cours & ieu* parla dans
ces termes*
Au nom de Dieu , k qtri louanges
Joient rendues; [dut (a) fur fin Prophète
Mahomet*
Sachet, <me Fennemî de Dieu &le notre
eft entre dans nos États* & qu'il a ofi
fouler aux pieds la ferre de Vlfiamifine*
Mais par la grâce & la volonté de Dieu*
nous avons vu briller fier nous F étendard
de la vi&oirc : il nous refit encore peit a
faire. Uordre du Ciel eft que nousfaffions
tous nos efforts pour chaffèr loin dïci cette
Nation Infidelle , & pour en détruire
jufqu'â la moindre trace. Fous n'ignorez,
pas que nous n avons de renfort k atten-
dre que de Matel^Adel , qui ne tardera
pas d'arriver * au lieu que tout délai fera
favorable a nos ennemis* Ils recevront de%
fecours immtnfes de ï Europe , lorfque la
(a\ C'eft une formule Mufuimane. On dit :
la prière foit fur Mahomet, le falut foit fut
Mahomet , &c,
»« Sàiadim. Lit. IX. foi
navigation interrompue par l'hiver fers 'BS-fiss*
devenue libre, ,'e fais dote dherminê d$ tftJfit
*«* Inrer bataille. Cependant,™ cha, *
***** veut dife l&remtnt G>n avis fur
cette réjoltaùm. J
Les Emirs reptéfemérem au Suf-
than, que les troupes étoient fous le*
armes , depuis quarante jours, fans-
avoir eu le teins do Kfpirerj quelle»
paroiflôient epuifées de tant de tra-
vaux , que dans cet état il étoit dan-
gereux de les mener au combat , que
ce qui étoit arrivé dans la dernière ac-
tion , devoir faire craindre fa même là*
cheréfqu'il falloir ranimer leur cou-
lage abbatu; que ces troupes autre-
fois Çt fiéres de feurs fuccès , man-
quoient de zéïe Se de réfolution j qu'à
tant de bravoure àvoit fuccédé une
foiblefTe& une langueur funeftés^qœ
le premier foin -du Sultfran devoir être
de rétablir fa tenté aftérée par tant de
fatigues ; que s'il tomboit férieufemenr
malade, les Soldats n'étant phis fou-
tenus par les exemptesdu Chef, aban-
donneraient leurs drapeaux ou n'ob-
ferveroient aucune difeipline ; que
l'air qu'on refpiroit à Tel-aiadniat , J
I5>* Histoire
corrompu pair l'odeur des cadavres*
^"c^ll^- occafïonnoic des maladies dansl'as-
mée -f qu'on devait fe retirer plus avant
dans les terres versKhourouba , oit
l'on trouverait une bonne fortereflfe
6c les rafraîchiflemens néceflaires ^
qu'on attendroit dans ce Heu Malek-
adel , (a) dont la préfence , les con-
feils & les lumières feroîent fort uti-
les dans des ci r confiances auflî criti-
ques; que Ces troupes pleines d'ardeur
pourraient réveiller- la confiance de»
autres Mufulmans; que dans l'inter-
valle , on rappetleroit tous ceux qui
avoient pris la fuite ; qu'on fbmmeroit
tous les Princes d'Orient de venir pren-
dre part à la guerre fainte j qu avec
leurs fecours , on ferait en état de ré-
fiffer aux Francs , quand même ils au-
roient reçu les renforts qu'on pTépa-
roit en Europe.
Saladin fe rendît à ces raifons : iï
étoit alors malade, & avoir plus be~
foin lui-même de repos , qu'aucun de
fes Soldats. Onïaiffaun gros détache-
ment dans l'ancien camp ; on plaça
partout des gardes avancées ; oa in-
(m) Frère de Saladin*
troduific
•i Saiadin. Liv. IX. i>$
troduifit dans la ville des vivres , &
quelques troupes -, & on recula jufqtfà j"g# f J*f •
Khourouba, montagne munie d'une
citadelle, & fituée à peu de diftance de
Ptolémaïs , pour y paiTer une partie
4e l'hyver*
Fi» du Livre neuvième
Tmcll.
SOMMAIRE
: DU LIVRE DIXIEME.
Départ de Frédéric Barberouffe
pour la Palejiine if on arrivée
à Conjlantinople. Lettre d'I-
faac à Saladin. Etat dujiége
de Ptolémaïs. Voyage de Fré-
déric , fes malheurs , fa mort.
Kaghic Prince d'Arménie écrit
au Sulthan. Evénemens du
fiége de Ptolémaïs. Humanité
de Saladin. Troubles dans J on
armée. Mort de la Reine Sy-
bilîe. Nouvelles diffenjions
parmi les Chrétiens.
HISTOIRE
DE
SALADIN
Sulthan d'Egypte & de Syrie.
rfw ■ i ■ i il
LIVRE DIXIEME.
CEPENDANT, Frédéric Bar-
beroufle, qui sctoic croifé le
dernier de tons les Princes d'Oc-
« cidenc , fut le premier à fe fignaler. Il
aflembla aux environs de Ratisbonne,
une armée de près de deux cens mil-
les hommes , fat les loix les plus fages
& les plus févéres, pour établir Tor-
dre & la difcipline parmi Tes troupes»
défigna Henri Ton fils aîné pour fon
Rij
Hég. 5»f.
J. C, ni?.
rvtfr*
IJ>6 HlSTOIEE
Succeflèur , & partit vers la fin d*À-
îHcg \\V' vn'# ^é'a Roi de Hongrie vint le re-
' 1! 9' cevoir fur les frontières de fon Royau-
Hift.CHÎcr. rae > & lu* fournit les vivres & les
Godcf. mon, provifions néceflaires. Mais, lorfqu'ori
Bo^d!' h* arrivé dans. la Bulgarie,, il fallut
ta. combattre les Hnns , les Alains^ Peu-
ples barbares,qui occupoient cettePro-
vince & qui diïputérent le paflage aux
Allemands. Ceux-ci , après deux mois
de peines & de travaux , parvinrent
enfin fur les terres dTfaac l'Ange.
Depuis le fchifme fatal qui divifo
Rome & Conftanrinople , les Grecs ne
déteftoient pas moins les Latins , qu'ils
redoutoient les Mahométans. Il eft
vrai que la conduite des Croifés étoit
bien capable de fomenter cette haine.
Ces hommes fiers de fe voir armés
pour la défenfe de la Religion, &
croyant pouvoir maflacrer fans feru-
Î>ule, tout ce qu'on appelloit Infidèl-
es , s'imaginoient auflï que tout ce
qui portoit le nom de Chrétien ,de-
voit les refpeéfcer , leur être fournis ,
fatisfaire leur cupidité , & favoriier
leurs débauches & leurs brigandages*
Ils enlevoient avec violence tout ce
qu'on étoit en droit de leur refufer,
i*e Salahin. Lit.X. 197
âc trairoient comme ennemis , ceux
qui ne les craitoient pas comme leurs j"2'iïî£
maîtres.
Les Grecs auraient voulu oppofer
des digues à ces torrens qui inondoient
l'A fie , & qui dévoient un joue englou-
tir leur empire : mais trop foibles pour
leur réfifter ouvertement , ils étoient
réduits àlarufe, reflburce rarement
utile & prefque toujours funefte à ceux
qui l'employent. Ifaac l'Ange fut le
{premier qui ofa faire une alliance fo-
emnelle avec les Sarrazins. La hai-
ne contre les Francs , & la crainte de
la puifTance de Safadin furent les liens
qui formèrent cette union. Ëntr au-
tres articles , l'Empereur d'Orient
promit par ce traité , de traverfer les
entreprifes des Croifés , de détruire s'il
pouvoir leurs armées , ou de les affai-
blir en leur coupant les vivres , en
troublant leur marche , & en leur li-
vrant de petits combats , fous diffé-
rens prétextes.
Le Prince des Grecs fidelle à fes in-
térêts autant qu a fa parole, ufà de di£-
fimulation auprès de Frédéric : il ac-
corda le paiïàge qu'on lui demandoit
à force ouverte , & envoya des trou-
Riij '
ij?3 HiSTftmt
pes dans les Provinces avec ordre dé
^c'iî!*". narce^erles Croifés dans leur route.
' Les Allemands n'ignoroient pas le»
difpofitions d'Ifaac & ne ménagèrent
pas Tes Etats: ils entrèrent dans la
Thrace comme des Vainqueurs irri-
tés , ravagèrent tout le pays , pillèrent
les villes 5 payèrent une partie des Ha-
bitans au fil de l'épée, fe rendirent
maîtres de toutes les Places fkuéesen-
tre la mer Egée Se le pont Euxin , &
parurent aux portes de Conftantino-
pie , après avoir perdu cependant beau-
coup de monde par les maladies &
par les embûches des Grecs,
Ifaacqui bravoitde loin Frédéric,
lui fit alors des fournirions. Il lui de~
mandoit auparavant des otages pour
ia fureté de fon Empire; il en offrit
pour la fureté de fa parole: il ne la-
voit appelle jufques-là que le Roi des
Allemands, prétendant avoir fèul le
titre d'Empereur ; il le reconnut en
cette qualité , renvoya fes Ambaffà-
deurs qu'il tenoit en prifon , lui pro-
mit des guides , des vivres » des muni-
tions» des vaiffeaux de tranfporr, &
pour fe défaire d'un hôte fi dangereux ,.
il le prefla de paffer promptement e»
dé Saladin. LlV.X. Ip9.
Afie. Mais Frédéric ufa des droits de
la fupériorité : il impofa lui-rpême des "*?• t |*r-
Loix à l'Empereur des Grecs ; répon-
dit que la faifon écoit rrop avancée
pour continuer (a marche* qu'il vou-
loir attendre le Printems dans la Thra-
ce,exigea de grofles contributions,choi«
fit Andrinople pour fon féjour , afïïgna
des quartiers d nyver à fon armée, & fe
fit donner huit cens vingt-quatre ôca-
ges,& toutes lesprovifions néceflaircs.
Ifaac heureux encore qu'on ne renrer-
fàt pas fon trône ébranlé déjà par plu*
fieurs fecouffes , foufcrivit à ces condi-
tions humiliantes,fit même des préfens
à Frédéric , & foufFrit fans murmure
les rapines & les vexations que les AI- ^^^^
lemands exercèrent dans la Province. *—-—■»
Cependant Saladin apprit par fon jf^,***'
Ambaflàdeur réfident à (Jonftantino-
pie , l'arrivée des Croifés. On lui écri-
voit qu'ils n étoient pas moinsde deux
cens (oixante mille hommes , nombre
exagéré par la terreur qu'ils a voient
imprimée aux Grecs. Cette nouvelle
lui caufa beaucoup d'inquiétude : il
pouvoit à peine fe défendre alors con-
tre les Francs qui afliégeoieht Ptolé-
maïs, & défefpéroit de réfifter à tant
R mj
toc Histoire
d'ennemis à la fois : il envoya PHîP-
h%. iU. corien Boha-eddia au delà de l'Eu»
j.c. ii 9o. phrate & ju Tigre, pour fommer les
Princes fes Tributaires , fes Vaflaux ou
fes Alliés >de joindre leurs forces pour
là caufe commune : il lui donna or-
dre d aller auffi auprès de Nafler
Khalife de Bagdad , pour l'engager à
fecourir la Religion dont il étoit le
Chef & le Souverain Pontife.
On eut dit que la même politique
préfidoitaux Confeils de Bagdad & de
Rome. Le Khalife fe conduifit à peu
près comme les Papes dans les mê-
mes circonftances. II fit prêcher par
Ces Imams ce qu'on nommer oit fort
improprement une Croi fade, promit
des récompenfes éternelles , & n ac-
corda ni troupes ni argent ; tandis que
les autres Princes Mufulmans éptff-
foienc leurs tréfors & leurs Etats pour
là gloire de l'Iflamifme ? feulement
il permit au Sulthan , par une Patente
expreffe d'emprunter vingt mille écus
d*or des Marchands Syriens.droit dont
Saladin ne voulut point u(èr , pour ne
pas molefter fes Peuples : mais il y
avoir cette différence entre les Kha~
Bfes & les Pontifes Romains , que le*
dje Saladtn. Liv.X. ïoi
premiers perdoient tous les jours de
leur autorité , & ne dévoient retirer /i^'1ïj£
des victoires du Mahométifme fur la
Chrétienté , que le frivole honneur de
faire prier en leur nom dans plus de
Mofquées,au lieu que les derniers
augmentaient leur puitfance par l'af-
foibliflement même des Princes qu'ils
envoyoient en Orient, & partageoienr
réellement les conquêtes des Croifés ,
fans en partager les périls. Nous re-
marquerons ici, que les Arabes ap-
pelaient la Cour du Khatife, h f acre
Divan , & qu'ils donnaient à celle des
autres Souverains h nom de Pmt,
fa) comme nous difons encore de no»
{a) Bah 9 poste. Dans l'Orient, ce mot
dgnifîe la CourdTun Prince. On ajoûtoit or-
dinairement à ce mot une épithéte honora-
ble , comme forte fubtime , &c. Les Khalifes
de Bagdad , pour infpirer plus de refpeâ aux
Peuples , avoientfok enchafler iur le feuil de
la porte de leur Palais, un morceau de la
Ç'erre noire révérée à la Mecque dans le
emple de la Caabah , tous les Mufulmans %
fans diftin&ion en entrant dans ce Palais ; fe
profternoient fur cette pierre & y appliquoient
kur front. Cauroit été Une profanation hor-
rible de la fouler aux pieds v & comme ce
lOt HlSTOIR I
Jours, h Porte Ottomane. LesHiftotien*
Hég. 58*. Orientaux défignent ordinairement la
J.«. 1 1^0. Cour deSaladin par le titre de Port*
Sultkdm<jne.
Ifaac fçavoit bien que Saladïn fe-
roit inftruit de toutes fes démarches v
il craignoit qu'on ne donnât à ce Prin-
ce de mauvaifes imprefiïons de fa con^
duite envers les Allemands. Pour fejuf-
tifier auprès de lui , & détruire les
ibupçons que le Suit ha n au roit pu for-
mer , il fit partir un Àmbaffadeur char-
§é de fes inftrtf&ions. L'alliance de
aladin lui étoit néce(Taire , moins
pour le foucenir contre les entrepri-
ses des Croifés , que potrr arrêter le»
incurfions des Turkomans 6c des Sel-
joucides du Roum , voifins dangereux
qui feifoient tous les jours des progrès
dans l'Afie mineure. L'Ambaflàdeur
qu'il avoir envoyé précédemment >
{>our conclure le Traité d'union entre
es deux Couronnes ,^étoit mort dans la
Syrie. Le nouveau Miniftre arriva au
camp de Khourouba , & outre les
ordres fecrers Se relatifs à l'objet de
feuil étoit allez élevé , il falloit enjamber ou
fauter par-deflus, uns y toucher»
J.C uj».
»e Salabin. Liv»X. 203
fe million , fur lefquels il ne dévoie
Couvrir qu'avec le Sulthân , il lui re- •/***•. Jff*
mit publiquement une Lettre que
Boha-eddin nous a confervée: elle
étoit écrite fur un grand papier plié
dans fa largeur & divifé'en deux co-
lomnes , dont ftine contenoit le texte
original , l'autre l'interprétation Ara-
be. Dans l'intervalle des colomnes
étoit le Sceau dlfaac imprimé, non
fur de ta cire , mats fur une efpéce de
médaille d'or repréfemant l'Empe-
reur, du poids de quinze écus dor»
Cette Lettre (s) étoit conçue en ces
termes.
Le Roi Ifaac l'Ange , croyant au
Meffie qui eft Dieu , couronné de
Dieu> vifl-orieux ,. toujours augufte»
très-puiflànt & très-invincible Empe-
reur des Grecs» au très-noble Sulthan
d'Egypte > Saladin , Salut & amitié.
J'ai reçu la Lettre adrejfce par vo-
tre Hautejfe i ma Majefte , par laquelle
f ai appris la mort de mon Ambajfadem.
(a) Pai retranché de cette Lettre les mots
dé Héutejfe & de Majefte', qui font répétés
à chaque phrafe*
io4 Histoire
— — ■ m Je fuis afflue qu'il ait fini fis jours âanf
J^cl'll'Ô! Unô Terre etrmi€Tt 9 & <}*% "** ?**
termine U négociation dont je Pavois
Soha<ddin. chargé auprès de vous. Il efl maintenant
n:cejfaire que vous me renvoyiez, far un
Amba/Jadeurfin cadavre & fis effets , afin
que je puijfe les remettre if fa famille. Au
refie , les mauvais bruits qu'on a répan-
dus touchant les Allemands qui ont pajje
. par mon Empire .doivent être parvenus ju fi
qu'à vous. Je n'en fuis point fur pris ,car
mes Ennemis fi plaifent à publier de*
menfonges utiles à leurs dejfeins : mais fi
votre Hautejfi veutfçavoit lavérité yellc
apprendra que ces Peuples ont fiujfere
eux mêmes plus de dommages qu'ils rien
cm caiifes a mes Sujets : ils ont perdu de
l'argent, des chevaux & des hommes
dont les uns font morts de maladie & de
miftres , les autres ont été tués par mes
Soldats- A peine ont ils pu ichaperk mes
troupes difperfees dans les Provinces. Ils
font fi afjoiblis > qu'il leur efi impojfibli do
pénétrer dans vm Etats. S'ils j arrivent *
ils feront tellement epnifes> qn ils ne pour-
ront ni fecourir leur nation , ni nuire k
votre Hautejfi* Mais pomqnoiparoiffimt
oublier notre alliance % ri informez,- vous-
pas ma Majefie de vos projets & de vos
CE Sàlàdîn. LlV.X. IOJ
mrtfrifhs ? Je vois bien que je ne dois
Atttndre d% autre fruit de votre amitié , /^P,****
que de nfttre attiré Ja haine de tous lei * '*
Francs.
Les aflurances d*Ifaac ne calmèrent
pas les craintes du Sulthan. Il travailla
fens relâché à augmenter fes forces,
fit faire des recrues dans toutes fes
Provinces , prefla les Princes Mufbl-
mans de hâter leur marche ,& ne né-
gligea aucun moyen pour fe mettre
en état de s'oppofer aux nouvelles
inondations des Croifes : il avoir lailfë
quelques troupes pour bloquer Scho?
kaïf Arnoun : il leur ordonna défer-
rer de plus près cette Place t & de n'y
laifler entrer aucune provifion : en
même rems , il fit garder plus étroite-
ment dans la forterefle de Damas,
Raynaud Seigneur de Schokaïf qui
l'avoir trompé fi indignement : c'étoit
cependant ce même Prince de Sidon
qu'on difoit avoir trahi les Chrétiens
à la bataille de Tibériade , de concept
avçc Raymond de Tripoli, , Saladin
lui ôta tout ce qui pouvoir adoucir
l'ennui de fa captivité, afin de l'obli-
ger par ces rigueurs à rendre la Cita-
xod Histoire.
délia. En effet >* Raynaud écrivit aux
I1 c! *8o officiers qui cominandoient dans
j. / 1^°* Schokaïf- Acnoun , de fe foumettre
& d'obtenir fa liberté par la capitula-
tion. La garnifon réduite à l'extrémi-
té , exécuta (es ordres , & fortit avec
tous les Habitans, mais fans rien em-
porter. Les Mahométans qui les
avoient inveftis , vinrent renforcer
l'armée du Sultharw
Dans le même tems plufieurs barques
équipées enEgypte , & chargées de vi-
vres & de toutes lottes démunirions de
guerre,abordérent fans obftacle à la fa-
veur d'une nuit obfcure,& apportèrent
l'abondance à Ptolémaïsqui commen-
cent à fouffrir de la difette. Les Chré-
1 tiens profitant de l'abfence des Sarra-
zins , en avoient prefle le fiége. La
ville environnée de toutes parts , ne
recevoh plus aucune fubfiftance que
par la mer que Thyver rendoit dan-
gereufe Se libre : mais le Printems ap-
^prochoit f & les ports de l'Europe
étoient couverts de vaiffeaux frétés
pour la Paleftine. Saladin quitta le
camp de Khourouba, &% s'approcha
de Ptolémaïs pour chafler les Francs
des portes dont ils s'étoient emparés f
&
»e Sa lad in. Liv.X. 207
-& pour ouvrir la communication avec
la ville. Il ne fut pas long-.tems àat- .Hé? *u*
tendre les fecours'des Princes Muful- ' u lv°'
mans. Son frère Malek-Adel (a) Se
fon fils El-Dhaher, (b) Prince d'Ha-
lep , les Princes d' Arbelles , (0 de Sina*
giar, (d) deJMéfopotamie , (e) le fils
du Sulthan de MoufToul , (f) arrivant s
les uns après les ^utres, ranimèrent
le courage de fes Soldats. Il étoit dans
Pufage de faire défiler en préfence
des ennemis , les nouvelles troupes en-
feignes déployées , au fon des trom-
pettes 8c des cymbales , tandis qu'on
l ■
(a) Al-Malek Adel Séiff-eddin Abou-
hêkr.
(b) Malek el-Dhaher Gaïath-eddin Ghazi.
(c) Zéin-eddin Youfouf," ( Jofeph) ben
Zéin-eddin, Prince d'Arbelles. Son frère
Modhaflfer-eddin ben Zéin-eddin , vint auffi
avec des troupes.
(d) L'Atabek Emad-eddin Zenghiben Mau-
doud.
lé) L'Atabek Moëzz-eddin Slndgiarfchah ,
fils de Séiff-eddin Gfiafi, & neveu du précé-
dent. Il regnoit dans le Dgéfiret ben Omar ,
rifle du fils d'Oma^Sc étoit appelle Prince de
Méfopotatnje.
(f) L'Atabek Aladin fils d'Ezz-eddinM*
zoudL
loi Histoire
pouffait par intervalle de tous les
Hég. i s*, rangs des cris de Allahacbar (Dieu
j.aifo. ^ gran<|Bj Après cette cérémonie
propre à infpirer de la terreur aux
Chrétiens & de l'ardeur aux Maho-
jflécans , il marquoit le porte que cha-
que corps devoir occuper, & donnoic
un feftin à tous les Officiers.
Avec ce renfort, le Sulthan des-
cendit dans la plaine pour fecourir
Ptolémaïs vivement attaquée par les
Chrétiens. Ceux-ci avoient fait de
grands progrès pendant l'hyver. Ils
i occupoient tout le terrein du Nord
au midi , depuis ce qu'on appelloit la
garde des Templiers jufqu'à la tour du
Koij-c'eft- à-dire, d'un rivage àl'au-
tre. Ils s'étoient fortifiés dans leur
camp,& necraignoient pas d'y être
forcés. Ils battoient fans relâche la
ville qui fe défendoit avec une conf-
iance & une fermeté admirable. Ce-
pendant on commençoit à craindre.
La partie Orientale depuis la tour
maudite jufqu'à la mer , étoit celle où
les Francs avoient dirigé principale*
ment leurs attaques^
Ils avoient fabriqué de et coté trois
tours dune grolfeur énorme , beau-
coup
Dt Sa lad in. Liv.X. 209
coup plus élevées que les murailles , &
capables de contenir chacune cinq cens j.*^',^
hpmmes: elles avoienc trois étages:
dans l'un étoient des béliers pour ren-
verfer les murs > dans l'autre des balif-
tes», des catapulte», (a) pour landr. Hift. Hier.
des dards & des pierres 5 dans le troi- Boh#
fiéme,des Archers & des Frondeurs qui
dévoient accabler de traits ceuxqui ofev
roient paroître , & dévoient descendre
dans la ville par le moyen d'un pont-
Ievis qu'on auroit appuyé fur les mu-
railles. Ces terribles machines portées
fur des roues , étoient couvertes de
cuirs durcis dans du vinaigre ,& ten-
dus impénétrables à laâion du feu.
Après avoir uni le ter rein, & comblé
même une partie du foflfc , on les fit
avancer à force de leviers. Déjà elle»
(a) On fe fervoit dans ce tems , pour affié-
Srr les Pkces, des mêmes mftramens qur
oient en ufage parmi les Anciens. Les Ca-
tapultes étoient des machines propres à lan-
cer des dards» Leur portée étoit d une ftade »
c*eft-à-dire , de cent vingt-cinq pas. Les Ba^
liftes jettoient des pierres du poids de trois à
quatre cens livres. Ces pierres erevoient les- ,
toits des maisons , démontaient les machines*
de rennemipôc fracaflbient les murailles*.
Tm* II. S
r/-'
2 Î 0 HlSTOÏltl
commençoient à agir , & rnenaçoienr
Hé^. s%* Prolémaïs cTone ruine totale. Plufieur*
' x,*° fois on avoir tenté d'y mettre le fea.
Les Artificiers épuHèrent leur indus-
trie. On fit des efforts inutiles pour
le# renverfer à coups cte pierres, (-*}
Saiadin promît tes plus grandes ré-
compenfes à ceux qui les détruiroient_
Enfin un jeune homme de Damas fe
flatta de les réduire en cendres- far lé
moyen d'une' matière inflammable
dont ilavok le feçrct, & différente
du feu grégeois ordinaire. Ea effet*
après avoir mêlé pi ufieurs d rogues avec
de la naphte, Cefpéce de bitume^
dans des vafes d airain; il FaHça:ces:
vafes & cette mixtion embrafée contre
ces redoutables machines qui furent
conûmées en un inftant. Les Chré-
tiens au défefpofc s'efforcèrent eu-
vain déteindre l'incendie. Ils pôuf-
foient des cris horribles qui furent
'i i ' m m i i ■■..!■).■■■ , i ii, ■ i m t
(^L'Atitttjrmconnuclel'HiftoiredeJéru^
61em «fit, au*on avoit formé avec des ca-
Blés , des efpéces de filets attachés au haut de
ces Tours & arrêtés par des pieux , au bas r
à quelque diffance en avant Ces fiJets tendus-
lâchement fe prêtaient à llmpnlfion des pfet*-
ns % & ejiaiiKMtiàbientte* coups*
J. C. u;o.
de Saladin. Liv. X. lit
entendus du camp ennemi. Au milieu
de cette confufion ; le Sulthan fit mon- *$'t {**•
ter tout le monde à cheval, & alla
préfenter le combat aux Francs qui
n'oférent fortir cfc leurs retranche*
mens. Leur consternation fut fi gran*
de, que le Landgrave de Thuringe,
qui commandoit une de /es tours , re-
pafla peu après la mer , alléguant ce
mauvais fuccès pour excufer fon dé-
part. Sans doute il fe fer vit de ce pré-
texte , pour abandonner un fiége long
& laborieux, & retourner dans Tes
Etats.
Cet avantage fut bientôt fuivi d* un
autre non moins important. Le retour
duPrtntems rendoit la navigation li-
bre. Conrad alla chercher des vivres
àrTyr : il en revint accompagné d'au-
tres bâtimens arrivés de l'Europe.
Apres avoir débarqué les provifïons»
il fit croifer fa flotte devant Ptolémaïs
& devint maître de la mer. Ces flottes
fi renommées reflèmbloient peu à ces
roachines énormes, qui voot porter ».
d'une extrémité du monde à l'autre r
fiotre luxe , nos vices r„ ijotre ihdtuffrie
& trop fouvent nos fureurs» Cétoienr
desefpécesdegros batteaux,altaittàl*
V
XMl' HlSTOIRI
^— ■— ^ voile & à la rame , qu'on mettoit â fc&1
Hèg. çs«f. pendant l'hiver, comme les vaifleaux
j. c. u^o. àesAnciens. Les plus petits connus foité
le nom* de Galions , (Galiones} fer-
voient à tranfporter des troupes , des"
provifions & à jetter Ai feu grégeois*
pendant le combat y les autres appel-
lés Galées ou Gaféafles / femblablcs;
à nos Galères ,étoienr longs & peu éle-
vés : la proue étoît armée d'un éperon-
garni de fer & terminé en pointe ^
qui perçoit les barques ennemies fur
lefquels on fondoit à force de rames»,
tandis que tes Archers décochoienr
leurs traits de toutes parts. L'Auteur
de THiftoire de Jérufalem itffinue que
ces Galées avofcht demr rangs de ra«-
mes , placées les uns fur les autres; Ce
témoignage bien apprécié, pourroir
éclaircir la queftion fi fouvent agitée
fur les vaîffeaux des Anciens, {a)
Pour enlever aux Francs l'Empire
de la mer, Saladin avoir fait équiper
dans le Poit d'Alexandrie une flotte
compofée de cinquante; voiles. Dès
(tf) Voyez à la fin de cette Hiftoire, le
oaflàge en queftion. Pièces juMcatives >
se Saladin. Lïv.X. 21 J
Qu'elle parut à la hauteur de Ptolé-
maïs, il fit mettre fe* troupes fous le» héj. i**.
armes, & envoya urr gros détache- * * "^
ment fur le rivage, tant pour recevoir
les Soldats de fes navires , s'ils étoienr
vaincus, que pour les animer par des
fignaux d intelligence : car les bâti-
mens de ce fiécle étant prefque plats»
& prenant po* d'eau, navigeoient tou-
jours teire a. terre, & venôient échouer
fur les- côtes , forfqu ils étoient e»
danger par la tempête , ou lorfqu ils
pouvoient s'échapper d'un combat iné-
gal. Les Chrétien* ignorant fi ces.
vaifleaux étoient montés par des Groi-
fcs oupar des Mahométans r les firent
reconnortre par une barque légère
qui alla tomber au milieu de l'efcadre t
die fut prife, & les matelots s étant
jettes danfrla. mer forent ou noyés»
ou tués à coups de flèches» Alors les
Francs armèrent à la hâte leurs Galè-
res & vinrent à la rencontre des Sar-
razins. On fe battit de part & d'autre
avec un fureur égale k la vue des deux
armées dont les Soldats frappoient
leurs boucliers & crioient de toutes
leurs forces, les uns Diex emolt , Dieu*
le veut > les autres , Àllah^ackaryDb&M
%\^ Hi stoir g .
eft grand : mais honteux d'être (mrpfe*
j?c."m^! tf>e&ateurs du combat , les Chrétiens»
' défiés par les Iofidelles , fortent des
retranchement & les -attaquant. La
viûoire fut long-tems indécife entre
les deux Partis •> enfin elle fe déclara.
Eur les Mafulmans , tant fur terre que
: mer. Leur flotte entra triomphan-
te, dans Ptolémaïs , traînant après
die deux gros vaiffeaux ennemis & en
ayant coulé d'autres à fond ; & 1 ar-
mée de terre retourna dans fon camp*
après avoir forcé les Chrétiens de le
renfermer dans leurs lignes.
La joie que Saladin refleurit de ce
fuccès fut troublée par la nouvelle qu'il
reçut en même teins du départ des
Allemandsr
Frédéric ayant palTé l'hiver dans la
Thrttce en partit vers Pâques de cette
année, avec toutes fes troupes char-
gées des dépouilles des Grecs , & gtef-
fiés par l'arrivée de plufieurs Croifés :
il trouva fur fHellefpont plus de vaik
féaux de tranfport qu'il n'en avoit de-
mandés ; tant Ifaae était preffé de fe
débawafTer de ces Latins ennemis na-
turels de fon trône. Frédéric fe mé-
fiant tpufotirade la bonne foi de L'Em>
de Sababim. LlV.X. XJf
vereur , emmçna dans PAfic le fite Se
le frère de ce Prince > & quarante des Hé* f •*
principaux Officiers dte fa Cour de ,iC-,,>*
Conftantinople t pour lui fervir d ota-
Îjes. Il ne les renvoia que lorfqu il fur
urles terres de Kilidge-Arflan»
L'Afie mineure connue de nos four»
fous le nom de Natolieou Anatolic,.
& par les Historiens Arabes, fous ce-
lui de Roum ou de Provinces Rumées T
(*)diviféeautrefoisentantde Royau-
mes & célèbre par les guerres donc elle
fat le théâtre- et oit alors occupée &
F Occident par les Grecs, au centre
par les Seljojicides > & dans la partie
méridionale qui confine à la Syriepar
un Prince Grec Schifmatique : l'Etat
de ce dernier éteit appelle la petite
Arménie. Outre les Turcs fournis aux
Sulthaos dlconium* Turcs eux-mê-
mes, d'autres Mahoraétans s'étoient
établi; dans piqfieur? Contrées de
PAfie-mineure ± c'étaient les TurfcK
mans ou Touroomans , Çt) Nation
^i i ■ ri .. i .i ■ ■— ■ —
(a) Voyez les notes de Schultens fur ces.
Provinces,
[b) Turkmans, Turkomans ou Turco—
mans ; ce mot fignifie femblablesaux Turcs».
Cette Nation habitait au-delà de la Transo? **
tiS^ Hisront*
barbare qui habitoîc (bus des tenre$V
J. a'i '£» comme te» Arabes Bédouins , & vivoi*
comme eu* , de rapines Se du produit
» de fe» Troupeaux* Il paroit que cette
colonie étoit répandue indifférem-
ment dans tes campagne» de» Chré-
tiens & des Seljourides.
Kilidge-Àrflan imita <Cans ùt politr-
que Ifaac, & fin puni comme loi ; màiV
avec desforc^ inférieures^! roina l'ar-
mée des Allemands , ce quTfaac n'a*
voit pâ faire. Il leur promit des
partages y Se difperlâ de» troupe» fur
la route pour fe difputcr j il promit1
des vivres & dévafta lui-même fou
ptfopre pays pour les affamer» 11 com-
mença par fufeiter contre éàx tes Tur~
. koman» qui vinrent en foule , fous
prétexte de leur vendre des- provi-
fions , & pour les obferver & faifir
ukTnitoC ^occa^on <*e "Bar nuire. Ges Peuples?
codefrkU ° * avides de butin , ne furent pas toflg-
Tagenoa. -
^J* fiane : elle a produit piuficurs personnage*
célèbres , & deux fameufes DynafKes. Celle .
de K*r* Cohunlou, du mouton- noir, &
celle de AkrCoiomnlom , du mouton blanc
Voyez, four cet P captes y d'Hërèelot & PHif*
trier* des Hum : il y * des Auteurs qui croient
f** Us StljûHâdn ément T*rk?m*nu
tem&>
di Sàxàdin. Liv.X. 117
tfems , fans exercer leurs brigandages : '
ils- fondirent fur les Croifës de routes " *,î*£
parts, les harcelèrent pendant trente
jours, & leur enlevèrent les richefles
prifèsfur les Grecs, Ils les fetiguoienc
par des efcarmouches continuelles:
fêmblables aux Scythes donc on les
croît defcendus , ils dçcochoieat leurs .
flèches , prenaient la fuite & revew
noient 3 h charge un inftant après*
Ces fortes de combats épuHbieut d'au*
tant plus les Chrétiens , que ne pou-
vant jeuir d'aucun repos, ni le jour,
ni la nuit, ils avoient encore à fup*
porter les horreurs de la difette , & les
tangues d'une marche pénible d^ns
des chôfnin$impratiçafc>les & couverts
de troupes.
Le Sulthan d'Iconium , pour mien*
tromper Frédéric , lui avoir envoyé
des Ambaflideurs qui iui ferraient dç
guide? fc 4'&9ges. L'Empereur s'étanç
fijûnr à ces derniers de ces hqftilités,
Us excuférent leur maître , en difant ,
que les Turkomans , Nation indépen*
danté& ennemie de toute domination,
ne refpeâoient pas pi us dans leur rava-
ge, les M?hpmétan? que les Chrétiens.
Cependant, après bien des travaux , on
Tmc II. T
n9 Hi stoirb
arriva auprès de Laodicée fur le borcf
' "c 1190. ^U Méandre , où commençoient les
# Etats de Kilidge-Arflan. On trouva
de l'autre coté du fleuve , une armée
de ces Turkomans rangés en ordre
de bataille. Comme ils étoient fans
Chef, ils furent défaits après un rude
combat. Cette vi&oire ne rendit pas
Je fart des Croifés moins déplorable.
Leur valeur pouvoir les défendre coii*
tre les incurfiorts de ces barbares ;
mais elle ne put les garantir de la fa-
mine 8t des maladies, fuite néceflaire
de ce fléau. Les provifions étoient épui-
fées, le pays défère, les campagnes
flrériles. On fut réduit à fe nourrir des
chevaux & des autres bêtes de fomme.
Il périt autant de Soldats par la difètte»
iju'il en étoit mort par les armes.
Frédéric ne douta plus de la perfidie
de Kilidge-Arflan , malgré les dîflfê-»
•eus prétextés allégués par les AmbaP
fedeurs de ce Prihce, «jufr difparureift
enfin , crainte d'être punis de la trahi*
fbn de leur maître. L'Empereur mar-
cha droit à Iconium , pour fe venger
du Sulthan. Celui-ci ©la mettre enfin
une armée en campagne , & en donna
le commandement à fon fils Matek
de Sàlàdîn. Liv.X. 119
Cothb-eddin Mazoud, le même qu'on "*
difoit avoir époufé la fille de Saladin. 2H$\\Hlm
On a écrit , que fes troupes écoient ' ' xx>°*
compoféesdeplusde trois cens mille
hommes , comme fi le petit Etat de
Kilidge Arflan avoit pâ nourrir un lï
grand nombre de Soldats. Il n'fft pas
étonnant , que dans ce fiécle barbare ,
des Hiftoriens ignorans ayent débité
de pareilles ab&rdkés 5 mais que dans
des tems où la raifon & la faine criti-
que ont fait tant de progrès, des Ecri-
vains ne rougiflent pas de renouveller
ces menfonges , c eft le combla de
l'ineptie & de l'impudence. Nous
croirons encore exagérer , fi nous ré-
duilbns cette armée à foixante mille
•combattans. Quoiqu'il en foit, les
Allemands mirent en fuite les Turcs &
les pour fui virent. Nous devons remar-
quer , qu'on attribua le fuccès de cette
a<5tion, à la protection miraculeuse
de Saint Vidor & de Saint Georges ,
qui combattirent, dit-on, armés de
toutes pièces à cheval & vêtus de blanc
& à la tête des Croifés. Il eft certain
queplufieurs Chevaliers, entr'autres
Louis de Helfeftein, ^tteftérent par
ferment fur l'Evangile, U vérité du
120 Histoire
fait. On feroit grâces aujourd'hui à de
n*g. f^^. tels hommes, fi on ne les regardoic
j.c. «'^-que co nme des vifiannaires ; ils fa-
re ut alors regardes comme des Saints
fayorifés des dons du Ciel.
Kilidge-Arflan prefle dans fa Capî- -
taie , fit des fournirons , proteftaque
fon fils avoit agi contre fes ordres, Se
promit des vivres, des guides & des
orages. Frédéric irrité rejetta fes pâFres
& les exeufes , & vint affiéger Ico~
nium, nommée aufliÇogni. (a) Il
prit cette ville daffaut, la mit au pil-
lage & pa(Ta les Habitans au fil de Vé^
pée. On a dit , qu'il trouva dans le Pa»
tais de CQthb-eddin plus de cent mille
marcs d?Qr que Saladin avoit donnés
pour la dot de fa fille. Le Sulthan s'ér
toit renfermé dans la Citadelle aiïez
forte pour foutenir un fiége. Son fils
tenoit la campagne avec une armée
nombrçufe : il falloir les attaquer Tua
& l'autre : on aima mieux pour ne pas
m ' n i»* . i •■ y 'p..'^!,. ' . ■ j»
(4) Iconiuin » Gouni , Çoni 9 aujourd'hui
Çcgni , Capital^ de la, Lyçapnie : elle étoit
riche & environnée de bonnes murailles. Les
dehors en étaient fort agréables. Les Arabes,
difent qu'on y voit encorç lç 'tomfeçgu cfe
Platon. \
he^Saladin* Liv. X. lit
s*expofer, à de nouveaux périls , capi- TJT" a6
tuler aux conditions que Kiîidge-Arf- j, c.' ,1^*
lan donnerait des vivres > Se pour ffr-
retë de fa parole,vingt otages an choix
de lfEmpereur4
Les Etats du Sukhan d'ïconium s*é-
tendoient à l'Orient jufques à la Sy-
rie. On pouvoh prendre ce chemiit
pour aller dans la Paleftine : mais le
Prince Seljoucide a voit intérêt devoir
fortir au plutôt les Allemand* de fou
Royaume pillé & ravagé par eux. Il ibid.
leur perfuada de traverfer la petite
Arménie qui touchoit par Je mfdi à
la Lycaonie, dont Iconium étoit la
Capitale. Le fils de Léon ou Livon »
frère de Rupin de la montagne dont
il eft fouvent parlé dans les Croi fa-
des , avoit envoyé de fon côté à Fré-
déric, des Ambaffadeurs auxquels il
recommanda de l'engager à continuer
fa, route par la Cappadoce , fbumife en
partie à Kilidge-Arflan , pour n'être
pas obligé de recevoir & de nourrir
ces Latins non moins odieux aux
Grecs Schifinatiques qu'aux tyuful-*
snans-, mais torique ces Députés ar-
rivèrent , l'Empereur étoit déjà fur les
terres du Prince d'Arménie. I
Tuj
lil .HlSIOIll
Il avoit paflë le mont Taurus au*
h%. f8*. «rès de Larenda,&ferepofoit de. fes
J.C, iijo r , » t , ,
fatigues dans une campagne agréable »
arrofé#par le fleuve Salef , qui paroît
être le même que le Cydnus, Invité
par la fraîcheur des eaux , Frédéric
voulut s'y baigner tout en fueur com-
me autrefois Alexandre ; mais moins
heureux que ce Conquérant , il mou.
rut de la même maladie qui avoit mis
Alexandre à deux doigts du tombeau.
D'autres Ecrivains afïurent, qu'ayant
eflayc de pafler la rivière à cheval , il
s'y noya. .Les Hiftoriens Arabes di-
fent qu'on fit cuire fon corps dans du
vinaigre , & qu'on enferma les os dans
un coffre pour les enterrer à Jérufa-
Jem. Telle fut la fin tragique de ce
grand Empereur , qui avoit fixé fi long-
tems l'attention de l'Europe.
Son fils Frédéric de Souabe , qui le
fuivit dans cette expédition funefte ,
prit le commandement des troupes. Il
en embarqua une partie dans les ports
delà Cilicie, & partit avec l'autre
pôur«Antioche. La famine, la perte,
& les armes des Sarrazîns , détruifi-
tent les misérables reftes de cette ar-
mée autrefois fi flo ri (Tante , réduite
de Sàladim. Liv.X. aa$
alors à fix tm fept cens chevaux » & à
fepç ou huic mille Fan ta (fin s dont la "c.'u^oJ
plupart n'avoient ni armes ni habits.
Enfan , après avoir efluyé des périls
fans nombre, & perdu encore la moi-
tié de fes Soldats , dans le trajet d'An-
tiocheà Tyr , Frédéric arriva dans cet-
te ville ou Conrad vint le recevoir
avec fes vaiffeaux , & le conduisit au
camp de Ptolémaïs où ce Prince in-
fortuné devoit terminer fes jours.
Les premières nouvelles que Sala-»
din reçut des Allemands , durent aU
larmer fbn courage. Oh lui mandoit
que malgré tous les malheurs qu'il*
avoient foufFerts & les pertes qu'ils -
avoient faites, Frédéric de Souab.ç Boha,,cddin,i
fuccédant au commandement de l'ar«
mée, après la mort de l'Empereur*
avoir encore fous fes drapeaux plus dé
quarante mille chevaux 8c une Infan-
terie innombrable. Les Gouverneurs
des Places frontières mefurant les ex*
prefïïons fur leur crainte , ne ceflofent
de dépeindre dans les termes les plus
forts les dangers de la Syrie , la dis-
cipline des Latins, leurs forces , leur
nombre, leurs progrès, Se deman^
doient un prompt fecours. Tous 1 les
Jiiij
1*4 Histoire
' jours de nouveaux Couriers caufoient
Hég. <** de nouvelles frayeurs. Celui qui écri-
. n*«. v^ avec pju$ j^ détail fur la marche
& la foliation des Croifés,ïut le Kag hic-
bar Grégoire fils de Batte , (*) qui
commandoit dans la Citadelle d*Er-
roam , (k) fituée auprès de l'Euphrate ,
entre Bira 8c Samofar. Boha-eddin
nomme ce Prince Chef des Armé-
(tf)Ilétok de la famille des Princes de la
petite Arménie. Bar fignifie^/s, commet;
ainfi ilétoit fis de Grégoire fils de Bafile,
c'cft-&-dire f petit fils de Kaghic Bafde , ce-»
kn qu'on donne pour premier Roi de la petite
Arménie; il paroit qu'il y a voit dans ce canton,
«ne perite P rindpaùté compofée d'Arméniens
dépendante de la petite Arménie & tribu-
taire de Saladuv Remarquons que dans les
notes Géographiques d'Aboul-tëdha fur la
fcrtereûe d'Erroum , ce Prince eu nommé
t+trics des Arméniens. C'eft la fignification
qu'on donne du mot Kaghic , écrit dans la
Lettre en quefhon de trois manières , Tay-
fcons, Kaykous, Kakhieous.
{b) Erroum, place mile au nombre des
fbrtereilês imprenables : elle avoit des faux-
bourgs, des jardins , & un fleuve qui fe jet*
ft>it dans l'Euphrate. Malek al-Afchraph fils
de Manfour Kélaoun Roi d'Egypte & de
Syrie , la prit fur les Arméniens : elle eft au
Sud-Oucft de 1'Euphrat*
x>b SàlàDin. Liv. X. «5
Jiiens, 8c interprète le titre de Kaflhjc
par celui de Viceroi ou de Lieutenant,
La Lettre de cet Arménien , mono»
ment remarquable de la haine que les
Grecs portoiem aux Latins f & de la
terreur que les Allemands avoientim*»
primée dans tous les efprits , riiétits
detre rapportée eh entier.
t» Lettre deKaghie à notre Seigneur
s* & Roi Saladin , Sulthan augufte \
nquî a levé l'étendard de la juftice &
*>de la bienfaifance ,défenfeur de la
*Foi , Salut du monde & de la RelU
ngion, Prince de l'Iflamifme & des
»»Mufuhnans, dont Dieu perpétue le
» bonheur , augmente la Majefté , con-
» ferve la vie , & comble enfin les e£
apérances par la gloire cèle (le : Salut
»& foumiffion.
»> Du Roi des Allemands (4) depuis
» qu'il s'eft montré fur la fcêne.
» Etant parti de fon Royaume, il
» eft d'abord entré violemment dans
» la Hongrie , 6c a forcé le Roi à une
(* î Les Grecs ne donnoient à l'Emperarf
d'Occident , que le nom de Roi des Alle-
mands ; & tes Sarrazins appelloîent les deux .
Empereurs , l'un Roi des Allemands , l'auirç
Roi des Grecs,
îî6 HistoUï
Hcgirc58tf. wobéiflfance prompte : îl loi a enlevé
j.c. iijp. „&e l'argent & des hommes , & il eft
Bobard. fienfuite venu dans les Etats du Prin-
tfce Grec, dont il a pris & ruiné lefr
» fortereffes , Se mis le pays à contri-
bution. Il n*a pas voulu en fortir \
ttqu'I&ac n'ait fubi la Loi qu'on lui
I» impofoit , & donné pour otages foi!
>» (ils , Ton frère & quarante des P"n-
»> cipaux Officiers de faCour.Il s'eft fait
» livrer aufli par ce Prince cinquante
») talens d'or , autant d'argent & des
» vaifTeaux pour débarquer en Afie.Oq.
» n'a renvoyé les orages que lorfque
» »iTon eft arrivé fur les terres de Ki-r
» lidge Arflan. Dans les trois premiers
-tï jours , les Tarkomans (à) ont fourni
» des chevaux > des bœufs , des mour
» tons & d'autres provifions ; mais Va^
u mour du butin les a fait accourir de
(a ) Le texte dit : Les Turkomans d'Aufch ,
Turcomani JlHfchenfes : c'eft une ville de la
Tranxofiane , ou félon les Arabes, du
Maouarennahar , c'eft-à-dire, Pays au-3elà
de la rivière. Les Turcomans s'étoient établis
dans cette1 Province ; & la colonie dont il eft
queftion,occupoit apparemment avant qu'elle
ne vint dans l'Atie-mineure , les environs d*
fe ville d'Aufch.
*
de Saladin. Ljv. X. ai?
i» toutes parts ; la guerre s'eft allumée
jtentr'eux, & le»Roi des Allemands Hég. 5g*.
>> qu'ils ont harcelé dans la route pen- JCm n*°'
* dam trente- trois jours*
» Dans le tems qu'il sfapprochott
m d'Iconium , Cothb-eddin , fils de Ki-
ttlidge-Arflan , ayant raflemblé des
» troupes, lui a livré bataille ; mais il
»a été vaincu & mis en déroute par
«l'Allemand quieft venu camper de-
» vant Icoqium , menaçant d'attaquer
»Ia ville* Les Mufulmans ont tenté
»une féconde fois le fort des armes ,
» avec le même malheur. Le Roi en
»a fait un horrible carnage , eft entré
» dans Iconium lepce à la main , & a
»»frapéde fon glaive tous les Habi-
»tans; (a) il eft demeuré cinq jours
ndans cette Place , pendant lefquels
»> Kilidge-Arflan a demandé & obtenu
» pour capitulation la vie& la liber-
» té. Vingt de fes Emirs ont été cmrae-
» nés pour otages. Le Sultharia perfua-
pdéau Roi de prendre fon chemin
*i par Tharfe & Marife. (b) Avant que
p» 1— — — ■ un ii ■ i. m ■ m
(a) Le texte dit : les Mufulmans & les Per-
fans. Les Orientaux appelloient ainfi les
Turcs venus de la Perfe.
(b) Villes de la Ciiicie où régnoit le Prince
^Arménie,
tlS HlSTOIRI
» l'Allemand ne parvint dans la petite*
'jTc'i^o. » Arménie, le fils de Léon seft déret-
» miné degré ou de force d'envoyer
» vers lui Te Mameluk Harem , avec
* d'autres Officiers , leur ordonnant
» dans Tes inftru&ions fecrettes, dern-
»eager , s'il étoir poflible , ce Prince
t»a continuer fa marche parles Etais
» deKilidge- Àrflan j(4 'mais lorfque ces
»» Députés vinrent s'acquitter de leur
j»commifIion, ils trouvèrent les cho*
» (es autrement décidées : car le Roi
>i des Allemands s'étoir avancé à la tête
» de Tes troupes dans la Cilicie, & fy
arepofoit fur le bord d'un certain
»> fleuve. Là ayant pris de la nourri*
Mtiire, & s'étant endormi , il voulut à
*fon réveil , fe baigner dans cette
t» eau ; mais à peine en fut-il forti , que
»> le froid lui caufa , par la volonté de
h Dieu , une maladie dont il mourut
*pcu de jours après.
» Le fils de Léon s'étoit mis en route
» pour aller au-devant de l'Allemand}
» mais après cet accident , fes Amba£>
: (a) Il y a ici une très-grande obfcurké dans
le texte. Je tne fuis attaché à rendre le fen*}
^enefçaisfijeraifàUl
DE SALA0IH. LïV.X. %tp
»* fadeurs s'enfuirent de J armée, &
9» vinrent apprendre la mort du Roi *%• **'•
» au Prince d'Arménie. Alors celui-ci h ^ "**
»fè renferma dans une Citadelle, ré-
solu de s'y défendre. Cependant le
» fils du Roi fit revenir au camp les
»» Députés par douceur, & en leur
» donnant des efpérances flatreufes , Se
» leur tiit : que fon père n avoir entre*
»pris cette expédition, que pour faire
» foi* pèlerinage à la ville fainte ; que
t> chargé du commandement , il n>
avoit pas lui-même d'autre deflein ;
» qu'après avoir fupporté tant de maux
»il ne pardonneroit pas au fils de
w Léon , Se $?empareroit de fes Etats*
I» fi ce Prince lui refpfoit un libre pa£»
»? fage & des vivres ; mais qu'il le trai-
»» teroit avec amitié, fi on lui accor-
n doit l'un & Vautre. Ces menaces ont
ît réduit le fils de Léon à la trifte né-
f>ce(fité de faire alliance avec l'AUç-
»mand,
» Enfin ce dernier conduit une ac-
» mée très-nombreufe 5 & faifant deç-
» niérement la revue de fes troupes , il
» a trouvé encore quarante-deux-mille
» Cavaliers armés de toutes pièces , &
tiqpe Infanterie fi prodigieufe , qu'il
J»C. ujo.
2)0 HlSTOIRÏ
>feroit impoiïîble d'en fixer le nom-
*H£\!Îf* »bre. Ce font différentes efpéces
»» d'hommes contenus par une difci-
»pline fiexaéte & fi rigide , qu'elle
orient de la cruauté. Pour la moindre
» faute , on les tue comme dçs vi&i-
» mes , fans que rien puifle les garantir
t) de la punition. On avoit accufé un
9» des principaux Officiers > d'avoir
t»pa(Téles bornes de la modération,
•» en châtiant un dç Tes domeftiques,
»& de s être rendu coupable par cette
m févérité-: les Prêtres affemblés 1 ont
9» condamné à la mort , & cette Sen~
» tence a été exécutée malgré les inC
» tances & les prières de piufieurs qui
»demandoient (a grâce au Roi. Ils
»s'abftiennent de toutes vokiptés. Si
» quelqu'un d'entr'eux s'y livre , les au-
titres l'évitent comme* un criminel,
», & lui impofent une pénitence, ifs
t# en agtflent ainfi par la douleur d'à*
91 voir perdu la mai Ton fainte. Il eft
9i certain que plusieurs ont fait vœu de
99 ne porter pendant long-tems d'autre
» vêtement que leurs armes, quoique
99 les Chefs désapprouvent cet excès de
9i zélé. Leur patience dans les fatigues 9
9» dans les peinçs, dans les travaux 9
9» parte tout ce qu'on peut imaginer.
DE SàLÀDIN. LlV. X. 2JI
- w Voilà ce que votre Mameluk ,vo.
» tre Efclave , vous écrit touchant l'é-
9» tat aétuel des Allemands : il vous in-
formera dans la fuite, par la volonté
«►de Dieu , de ce qu il apprendra de
•i nouveau.
En effet, ce Khagic mieux inftruit,
écrivit quelque rems après une Lettre
plus conforme à la vérité.
^ Cependant fur ces nouvelles, Sala-
din aflembla. un Confeil de guerre pour
délibérer fur le parti qu'on avoit à
J «rendre. Tous les avis fe réunirent à
aire garder les paflages par où les AK-
lemands dévoient entrer dans la Syrie.
On fit donc partir la moitié de l'ar-
mée, Ces troupes formèrent un cor-
don depuis l'Euphrate jufqu'à la mer t
Ôcôtérent aux débris des Croiféstout
çfpoir de pénétrer dans la Paleftine,
Ces derniers furent en effet prefque
tous tués ou faits prifonniers en allant
d'Antioche à Tyr.
, Mais en fortinant ainfi les f rontié-p
res,on affbiblit l'armée. La droite fut
prefqu'entiérement vqide, Le Sulthan
y fit paflTer (on frère Adel avec les
Egyptiens. Les Chrétiens que la peftç
Çc la, difette rendoient tous les jours
iji Histoire
^Ïé^sI plus malheureux , crurent devoir pro-^
j.ç-n^o. gter <|e labfence d'une partie des en*
nemis : ils fortirent de leurs rerranche-
mens , s'étendirent vers la droite des
Sarrazins,& les attaquèrent fans leur
donner le rems de le mettre en dé*
fçnfe. Adel ne put foutenir ce choc
impétueux : il recul» & alla fe retran-
cher à quelque diftance 9 où de nou-
veaux renforts détachés par fon frère %
vinrent le fecourir. Il faut que la di£
cipline des Francs fut bien mauvaife t
puifque nous voyons qu'ils ont pres-
que toujours perdu leurs avantages » ;
E)ur n'avoir pas fçû ufer de la viâoire*
ans cette occafion, au lieu de pour-
fuivre les Mahométans épouvantés ,
ils entrèrent dans te quartier des ra»
fraichiflèmeni \ & comme ils fouf-
froient de la famine f ils fe jettérent
fur les vjvres qu'il; trouvèrent dan$
les tentes, Se qu'ils s'arraçhoient les
uns aux autres pour les dévorer, Dan?
le tejns qu'ils pitloient le camp enne-
mi 9 leur c?mp étoit pillé par ceuxldç
1? ville, qui tarent une fortie , & en»
levèrent furrout beaucoup de femmes»
Adel après avoir placé une partie de
fis Soldats e*i eoibufçade , fondit , le
Ûbrç
J.C4iiJ«*
r>ï Sàlàimn. Liv.X. tjf
labre a la main , & en pondant de
grands cris > félon la coutume des Hég *»*.
-Sarrazins , fur les Francs qui ne pen-
foient qu'à faire du butin. Ils voulu-
rent en vain prendre la fuite. Les uns
furent égorges dans les tentes mêmes;
les autres en tâchant de fe fauver»
tombèrent xians l'embufcade qu'on
leur avoir drefTée. On ne fit point de
Erifonniers , parce que les Soldats dans
»ur foreur , n accordèrent la vie à au-
cun Chrétien » Ils refpe&érent cepen-
dant au milieu du carnage , deux
femmes qui avoient vaillamment
combattu, & les préfentérent à Sala-
din: deux autres avoient péri dans la
mêlée ; exemple remarquable de ce
que peut l'entbouGafme fur des cer-
veaux échauffes. Si l'on en croit les
Arabes , les Francs perdirent huit mille
hommes dans cette journée , nombre
qu'on peut réduire aux deux tiers.
L'Hiftorien Boha-eddin , qui décric
cette aâion avec chaleur , dit dans fan
ftyle oriental plein de figures outrées ,
& de comparatfons quelquefois fubli-
nies >• mais plus fouvent abfurdes : Les
Ennemis de Dieu livrés ah pQHvair des
JOifenfturs dt fon Unité, ewrent tin]**
Ttm II. V
1)4 H* s*° ÎILB
lence d'entrer dans le camp des tiens de
Hég. -m [ ifiamifme ; mais ils éprouvèrent les effets
' ,l*°* terribles de fa colère. Le glaive de Dieu
ayant arraché les efprits de leurs corps >
moiffonna leurs âmes & leurs têtes , abafr*
donnant fier là pouffiére leurs troncs &
Jeurs cadavres : dans un moment la cam-
1 Ta£n* en f** couverte ; comme des feuil-
les qui tombent dans F Automne: ils for-
mulent une ligne non - interrompue de-
puis notre droite jufqu*à leur camp ,
amoncelés les uns fur les autres , fem-
blablcs à des branches abbatuesqui rem-
plirent les vallées & les collines dans une
foret quon a coupée. Nos glaives s'abreu-
vèrent de leur fang jufqu'à Vjvreffe , &
Us lions des combats s en raffolèrent avec
les dents de la vtâoire. Je rn élevai fur
mon cheval , pour paffer ce fleuve de
fang, Sec.
Il eft certain que les Chrétiens
étoient réduits à l'extrémité, puif-
3 d'immédiatement après ce combat >
s demandèrent à capituler. On leur
envoya un Emk, pour régler les arti-
cles de la paix ; mais tandis qu'on né-
' gocioit , de nouveaux fecours leur <toft-
nérent de nouvelles efpéranees. Une
flotte Européenne débarqua des pro-
de Salàdih. Lit. X. *j$
*vifïons de toiïte efpéce , & un grand J
nombre de François, d'Anglois&d'L-- Hég. 58*.
taliens conduits par Henri Comte de
Champagne. Alors tout changea de
face : les Francs reprirent h fupério*-
sité qu'ils avoient perdue : ils remi-
rent en mer les vaiffeaux qu'ils avaient
tirés à terre , & qui joints à ceux des
Ooifés, fe rendirent maîtres de la
croifiére que l'Efcadte des Sarrasins
■éccupoit auparavant. Saladin , donc t ,% '
l'armée dé périflbit par les maladies *
<:ontagieufes , averti par les Défer-
teurs, qu'on avoit deifein de le fur-
prendre pendant la nuit , fe retira plus
avant dans les terres, fur la colline de
Khoarouba ,-n ayant ktiffé dans l'an-
cien camp , qu'une garde compofée
•ordinairement de miite hommes. \
Mais moins il fatiguoit-les Chré-
tiens , plus ceux-ci fatigupient Pcolé-
maïs. Toute leur attention fe portent
«vers le fiëge , lorfqu il leur permettait
«derefpfre^ Rteu ne pouvoir- appraj-
kiher de la Placée fans être 'intercepté
*j*ar eux. Leur armée couvrant ta cam-
pagne d*tm rivage à l'autre, -fermok
toute communication ; & leur flotte .
Moquant Je port $ empêchoîtqu^tivun
Vij
*|tf Histoire
vaifleau n'y entrât. Le *Su)than ne tte?
Hég. 58< cevoicdes nouvelles de la ville que par
?,c# lt*° des nageurs affez vigoureux pour Étire
un grand trajet à Ta nage , & affez
hardis poui braver la tempête & lef
traits (tes ennemis y mais plus commu-
nément les avis lui venoient par ces
.pigeons , (bus les ailes defquels on at-
tachoit des billets ; efpéce de meflage-
rie volante , comme difent les Arabes *
-établie par Nour-eddin , & dont nous
P* avons parlé plus haut. Les Habita»
-qui fuppottoient avec une confiance
héroïque les horreurs d'un fiége auffi
long , étoient Ibutenus parla prudence
«le deux Emirs dont les noms, tout
barbares qu'ils raroiflent à nos oreil-
les , méritent d être tranfinis à la po£
térité.C'étoient Huflam-cddin Aboul-
Haideia, (s) Se Boha-eddin Kara-
coufeh , (b) le premier commandant
M les troupes , le fécond Gouverneur de
la Ville. Ces deux Généraux célèbres
i>ar des aâions de bravoure, & qu'une
longue expérience dans le métier dp
la guerre , avoit éclairés (pr les opéra^
{a)Vépèedehfo*, père dt fe guerra.
pi Sàladin. Lxv. X. 1)7
.lions de cet Art, endurcis aux travaux > '
agitant toujours de concert , vigilans , "^ , J*£
préfens à tout , calmoient les murmu-
res du peuple , rendoient vaines les at-
taques des Francs , ptévenoient leuis
deffcins , & mettant en ufage rufes &
ftratagêmes, ils ne laifToient échaper
aucune occafion de lesfurprendre. Si
on élevoit des machines pour battre le
mur , d autres machines dreflées à la
hâte les renverfoient > ou bien ils (ai*
foient des (orties , écartoient les Affié-
geans,& portoient la flamme à ces ter-
ribles inurumens.Souventlorfqu on fe
préparent à donner un aflaut , ces deux
. Emirs attendoient dans Hnaâion que
les Chrétiens fuffent defeendus dans
les foS&s y pour fapper les murailles ,
éc appliquer les échelles : alors ils les
écrafoient à coups de pierres , tandis
que le refte dès Habitans fortant tout
à coup de deux portes différentes, at?>
faquoit à Mmprovifte les travailleurs*
ntettoit en fuite les Archers , & s'emr
paroic de leurs aunes. Toutes les fois
que les ennemis quittoient leurs li-
gnes pour aller livrer bataille , Kara-
coufeh & Aboul-haidgia les harce-
loient par derrière 9 pilloient leur
IjS HlSTOUt
' camp ; & faifant obfervef leur mouvez
j. cfxîpo. menc du haut des tours , ils tomboient
fur la partie la plus foible. -'
Cétoit par ce zélé infatigable, que
ces deux Officiers déconcertoient les
mefures des Francs , & faifoient trafc-
ner le fiége en longueur; mais ils ne
pouvoient remédier aux miféres publi-
ques. Les vivres manquoient , & les
Habirans qui ne craignoient pas le fer
ennemi , craignoient la difette. Les
maladies jointes aux fléaux de la guer-
re & de la famine défoloient ces bra-
ves Citoyens. Des barques légères
trompant la vigilance de la flotte ,
leur apportoient quelquefois des pro-
visions , foibles fecours pour leurs be-
soins toujours renaiffans. Saladin vint
cependant à bout de-foulager leurfc
maux pour quelque' tefns, en intro-
duifànt dans la ville un convoi confï-
dérable. Il fit partir de Bérout plufieurs
vaiflTeaux chargés de vivres & aux mlts
ifefquels on avoir arboré de grands pa-
villons blancs coupés par une croik
rouge , à la manière des Croîfës. L*é-
quipage vêtu à la franque & Gins bar-
i>e , étoit compôfé en partie de ces
. 'Chrétiens apoftats, qui, aptes avoir
DE Sàlàdin. LlV.X. 2jp*
abjuré lâchement leur Religion en de-
▼enoient les ennemis les plus cruels. ";* j8*-
A la faveur de ce déguifement, on ' ll*0tl
paffa au milieu des Francs avec lesquels
tm s'entretint des nouvelles du fiége*
Ceux-ci croyant parler à des Croifés ,
indiquèrent aux Sarrazins le mouillage
le plus commode, pour débarquer fur
la côte les provifions ; mais ces bâti-
mens étant arrivés à la hauteur de
Ptolémaïs , virèrent de bord tout à
coup , & entrèrent dans le Port à force
de voiles & de rames , laiffant les
Chrétiens dans la furprife & la con-
fufion.
Cet événement les rendit plus cir-
confpeâs : ils s'emparèrent de plufieurs
barques qui portoient du renfort à la
"ville : enfin pour ôter aux affiégés tout,
efppir d'être fecourus par mer , ils en-
treprirent de fe loger dans la Tour des
mouches , forterefle bâtie fur un ro-
cher à l'entrée du Port : ils élevèrent
* donc fur un gros batteau, une Tour
^de bois à plufieurs étages & remplie
de Soldats ; c'était une Citadelle am-
bulante , femblable à THélépole (*)
{a} Au fiége de Rhodes.
« *4* H i s t o x a t
de Démétrius Poliorcetes» Unfecoij<f
xf^f i^ol barreau plein d'artifices devoir erre
poufle tout embrafé dans le Port , pour
y brûler les vaifleaux des Sarrazins :
h ce projet eût réuiïi , c'en éroir fait de
Prolémaïs \ mais il ne devint funefte
qu'à fes Auteurs : car > dans le rems
qu'on attaquoit la forterede , le brûlot
qu'on avoir dirigé dans le Porr & au-
quel on avoir mis le feu , fur jerré par
le venr contre la rour de bois. Dans le
moment , la flamme fe communique à
cerre machine & la réduiren cendres ,
malgré les efforts qu'on fit pour érein-
dre l'incendie. Les matelots & les fol-
dars s'élancent dans la mer , pour ga-
gner une barque deftinée à les rece-
voir après l'enrreprife : ils y enrrenr en
fi grand nombre avec tant de confu-
fion , & fonr un mouvemenr fi vio-
lent , qu'elle coule à fond : on l'avoic
couverte en forme de tortue , pour
garantir les Chrétiens des traits enne-
mis , précaution qui ne fervit qu k
rendre cer accident plus funefte : car,
ceux qui étoienc venus chercher leur fu-
reté dans ce barreau , étant retenus par
cet obftaclç > forenr engloutis dans les
ondes. Peu feTauvérenr à la nage. De
ce
de Sàlàdin. Liv. X. 241
ce nombre fut Léopold Duc d'Autri-
che qui commandoit cette attaque. j^S'ii**
Les Hiftoriens dilènt , qu'il fauta le ' •
premier dans la Tour des mouches ; &
qu'après y avoir vaillamment eom«-
battu & reçu plufieurs bleffures , il fe
jettadans la mer tout couvert de fang,
excepté dans l'endroit où il porroic une
écharpe blanche dont il étoit ceint. Ils
ajoutent , que pour conferver la mé-
moire de cette a&ion , l'Augufte Mai-
ion d'Autriche a porté depuis pour
armes, un écu de gueule à la face
d'argent, (a) Quoiqu'il en (bit de l'o-
rigine de ces armoiries , que d'autres
rapportent à d'autres rems & à d'au*
très circonftances qui font peut-être
toutes également fabuleufes , il eft cer-
(a) II ne faut cependant pas confondre lès
Ducs. d'Autriche d'alors avec la mahon
d'Habsbourg , qui fuccéda peu après à l'an-
cienne maifon d'Autriche. Ce n eft que vers
la fin du treizième, fiécle , que les Comtes
d'Habsbourg devenus Duc d'Autriche, joi-
gnirent à leurs armes celles d'Autriche ; &
au commencement du quatorzième , ils ne
portèrent plus que ces dernières. Lesancien-
"nes armes d'Autriche étoiônt d'Azur à cinq
Alouettes d'or.
Têm* IL X
142 Hl S TOI Kl
tain que Léopold s'acquit dans cette
jfc.'i/jo.'occafion une gloire immortelle, 6c
• qu'il, fe feroit rendu maître de la Tour
des mouches, fans ce malheur que
les Mufulmans ne manquèrent pas de
regarder comme un miracle opéré en
,leur faveur.
Cependant Frédéric de Souabe vou-
lut fe fignaler par quelque exploit , &
vint attaquer avec le peu de Soldats qui
lui reftoient , la garde que Saladin
avoit laiflce àTel-Aïadhiat. Ce jour là >
fes Mameluks défendoient ce pofte :
quoiqu'inférieurs en nombre , ils at-
tendirent les Allemands de pied fer-
me & foutinrent leurs efforts, 11 y eut
beaucoup de morts & encore plus de
biefles de part & d'autre > mais fur la
nouvelle que le Sulthan envoyoir du
fecours , Frédéric fe retira.
On ne s'occupa pendant deux mois ,
. qu'à prefler le fiége, fans faire de
grands progrès. On cônftruifit de non-
Telles machines qui furent brûlées -, on
donna plufîeurs aflauts dans lefquels
on fut repoufTé i il veut tous les jours
. des forties , des escarmouches , de
petits ^combats , des avions de bra-
voure auflïglorieufes qu'inutiles : mais
de Sàlàdim. Liv. X. 245
f hiver approchoit Se rendoic la met
impraticable. Les Francs avoient tiré Hés- **'•
leurs vaifTeaux à terre, félon l'ufage T'c-,l5°#
du tems , Se ne pouvoient plus rafraî-
chir leurs provifîoas. Les Soldats man-
quant de nourriture, fortoient par
bandes , pour piller ou pour acheter
au camp des Sarrazins des vivres , au
{>rix de leur foi qu'ils renioient , ou de
eur liberté , lorfqu'ils avoient la force
de refter fidelles à leur Dieu , en deve-
nant infidelles à leurs Chefs. Les Offi-
ciers, pour arrêter ces déferrions fré-
quentes, prirent la réfoluriou d'aller
attaquer les Mufulmans , pour tâcher
de s ouvrir un paflagedans les terres,
& de fe procurer de la fubfiftance.
L'occafion étoit favorable. Saladin
languiflbit d'une maladie cruelle. Ses
troupes n'étoient point encore reve-
nues de la Syrie. Il campoitau pied
des montagnes fituéesà l'extrémité de
la plaine de Ptolémaïs. Les Chrétiens
formèrent une efpéce de bataillon
quarré , & s'avancerait dans cet ordre
en côtoyant le fleuve. La Cavaletie
étoit au centre Se l'Infanterie fur les
' ailes. On voyoit au milieu de 1 ar-
- mée, un char fort élevé fur lequel
Xi}
144 Histoire
flottoit leur grand étendard ; c'étoit
Hég, $8tf. un paviHon blanc avec une croix rouge
J. Ç. i J>o. r • x 1 r ri
qui le partageoit également. Le Sul-
than ne pouvant monter à cheval/e fit
porter fur la colline de Khourouba, la
plus haute de toutes pour obferver le
mouvement des Francs & donner de-
là Tes ordres à fes troupes. Il les dis-
tribua & les fit retrancher dans les
défilés des montagnes , recommanda
aux frondeurs , aux archers , & au
refte de la Cavalerie de voltiger dans
la plaine , de harceler continuellement
les Chrétiens & d'éviter cependant le
combat. Par cette manœuvre , il fit
avorter le projet des ennemis , & les
tint en haleine pendant trois jours.
En effet , ils préfentérent. inutilement
la bataille, attaquèrent tous les portes
fank pouvoir percer nulle part , & er-
rèrent dans la campagne preflés & fati-
gués jour & nuit. Des que les Soldats
s'écartoient du corps d'armée > pour
repoufler les Sarrazins qui- les acca-
bloient de traits, ils tomboient dans
les embufcades qu'on leur avoit dref-
fées. Saladin qui ne pouvoir fe tenir
de bout à caufe de fa foible(Te,porté fur
un brancard , dirigeok toutes les opé-
Ht Sàladin. Lrv. X. 145
étions du haut deKhourouba. Ses en*
Êms étoient autour de lui verfant des ^c.\IIq.
larmes fur fon état : il les renvoya .en
leur difant , d aller montrer aux Mu-
fùlmans. l'exemple qu'il ne pouvoir
leur donner , & de fe fou venir furtouc
que leur porte dévoie toujours être dans
les endroits les plus expofés aux dan-
gers. Boha-eddin ajoute, qu'il le vit
pleurer de douleur de ne pouvoir par-
tager les périls. Cependant les Chré-
tiens rentrèrent ennn dans leur camp
où ils avoient laide Frédéric, qui de
fbn côté eut à fe défendre , pendant
tout ce tems-là , contre les amégés*
: Quelques jours après , on préfenta
au Sulthan plusieurs prifonniers de dif-
tin&ion parmi lefquels étoit un hom-
me accablé fous le poids des années ,
Se pouvant à peine fe foucenir. Sala;- n©ha*ddin.
din fut attendri en le voyant ; & après
avoir ranimé fes forces en lui faifant
apporter à manger & à boire > Se dif-
fipé fa frayeur par des témoignages de
bonté , il lui demanda par fes inter-
prêtes , quel étoit fon pays : » ma Pa-
w trie , répondit-il , eft fi éloignée qu'il
» faudroit plufieurs mois pour y arri-
» ver.Et pourquoi à votre âge, répliqua
X iij
i^6 Histoire
»Saladin, venez «vous me (aire Es
fë*l*£ »guerre de fi loin* Je n'ai entrepris
» ce voyage , dit le vieillard , que pour
» avoir le bonheur de vifiter la Terre
t> Sainte avant que de mourir. Faites
» donc votre pèlerinage , ajoura le Sut-
»than; foyez libre, allez finir vos
», jours dans le fein de votre famille»
» & portez à vos enfans ces marques de
>» ma bienveillance. <« En même tems»
il loi fit donner de riches préfens „
& un cheval fur lequel on le conduifit
au camp des Chrétiens. Il ne traita
pas avec moins d'égard les autres
captifs, patmi lefqueïs les Arabes di-
fent qu'il y avoït le Commandant des-
Troupes Françoifes & le Tréforier dix
Roi de France. 11 s'entretint long-
tems avec eux , les logea dans une
tente voifine de la tienne, lés admit
fouvent à fa table , leur permit d'en-
voyer chercher au camp tous leurs ef-
fets , & les fit partir pour Damas*
Outre les enfans dé Saîadin, que
îjous avons vus décorés du titre de Sul-
thans & créés'Gouverneurs des princi-
pales Provinces de fes Royaumes, if
en avôit d'autres encore fort jeunes
qu'on élevoit fous fes yeux* Ces Pria-
de Sàlàdin. Liv. X. 147
ces firent demander à leur père la per-
miffion de trancher la tête à quelques H^ f ?*£
prifonniers Chrétiens, croyant faire
une a&ion fainte en donnant la mort
aux ennemis de leur Religion. » A
»Dieu ne plaife , répondit Saladin,
ttque je con fente à une cruauté fi
» horrible. Je ne veux point que
t*mes enfans s'accoutument à fe
» faire un Jeu de répandre le fang
»9 humain , dont ils ne connoiffent pas
» le prix» ««
Les Arabes accoutumés à là petite
Suerre pénétraient fouvent jufques
ans les tentes des Chrétiens & em-
portoient tout ce qu'ils y trou voient. Ils
enlevèrent un four d'entre tes bras de
fa mère , Un enfant de trois mois : cette
femme s'arrachant les cheveux de dé-»
fefpoir, coutut dans tout le camp Se
le remplît de fa défolation. Allez vers
le Sulthan, lui dirent les Princes Chré-
tiens. Touché fans doute de votre dou-
leur > il en tarira la fource. Elle fuivit Boha-ed.
ce confeil , & s'avança vers les Mu-
fulmans en pouffant de grands cris.
Dès qu'elle parut devant Saladin , elle
fe profterna , fe frappa la poitrine,
couvrit fàtête depoumére & demanda
Xmj
148 Histoire
Ton fils. LeSulthan, fur qui la nature
Hég 5 s*. avojt tant je pouvoir, fit chercher &c
Jm C. I 1*0. * /• • . ... . «
rapporter cet enfant qui avoit déjà été
vendu ; il le racheta & le tendit à
cette mère défoiée. Elle le prit, le
bai fa mille fois, le prefla contre fon
feiii, & lui prcfenta fes mammelles;.
tandis que Saladin & fes Emirs atten-
dris par ce fpeâade * verfoient tous
des larmes de compaflion.
L'Hiftoire qui neft malheureute^
ment qu'un récit continuel d'injuftices-
Se d'horrturs , femble confoler l'huma-
nité, lorfqu'au milieu de tant de cri-
mes , elle s'arrête à raconter quelques
a&ions de clémence & de modéra^
don. Pourquoi faut-il que dans cet
ouvrage , nous foyons obligés de n'em-
prunter ces trait» <Jue des moeurs* d'un
homme que le fanatifme de nos Hifto~
riens appelle barbare > barbares eux-
mêmes de Ravoir fi peu connoître la
Vçrrif.
Cependant les troupes qui gardôient
la Syrie revinrent à l'armée i mais cette
armée fi floriflante auparavant dépé^
riflbit tous les jours. L'air mal-fain de
Ptoiémaïs csruîa des maladies que la
rigueur de l'hiver rendait encore plu»
tit Sàladin. L.iv.X. I49
fimeftes. On perdoir plus de Soldats
pat la contagion que par le fer enne* j"£f ,«£
mi. JLe Sulthari lui-même croit aux
portes cte la mort. Une fièvre rebelle
à tous Tes remèdes , le mettoit à to\ite
extrémité. Au zélé entrcpide des Mu~
fulmans , refroidi alors pat (on ab-
fence , avoir fuecédé un dégoût gêné,
rai. Une guerre aaflï longue lartoir leur
Confiance, Douze groffesoarques char- ïM
gèes de pçpvifions pour Piolémaîs fu-
rent priies par les Francs. Cet événe-
ment aggrava les malheurs publics.
D'un autre côté, on apprenoît que Bo-
hémond MinBdelle aux Traités» atta«
2uoit les frontières. Les murmures
u Peuple croient foutenus par l'exem-
ple des Chefs. Parmi ce» derniers , il
Îr avoit plufieurs Atabeks, autrefois
es Maïtres,alors les vaflaux de Saladin,
Sandgiarfchah (&) Prince de Méfopo4-
tamie ou plutôt du Dgéziret - ben«*
r - - - - 1 r • .-. ■ ■ ■— 1 • . ■ —" ^- *■»
(i)Bohémond, Printïe de Tnpoli , petit-
es de Raymond Prince d'Antîoche.
(b) Moëzz-eddin , Sandgiarfchah fils de
Séiff-eddin Ghafi fils de Maudoud fils de
Zenghi ; il régnoit dans le Dgéziret-fee»
Omar , & on Tappelloit le Prince 4e M&b-
pôtaoue»
%fO Mis to î k ê
Omar, H'Ifle du fils d'Omar,} &
H:g. &6. Emad-eddin Zenghi Çt) (on Oncle
}. Ci 150. prjnce je Sindgiar , fomentaient
entr*aatres ces divifians. Nous avons
dit comment ils follieitérent autre-
fois les fecours du Sulthan auquel ils
prêtèrent foi & hommage. Ces Prin-
ces d'un cara&ére inquiet & remuant
demandoient avec importunhé la per-
midîon de retourner dans leurs Etats.
. Saladin qui n'étojt accefltble , à caufe
de fa grande foiblefle , qu'à fes Méde-
cins, à fes enfans & à fes Miniftres , fit '
dire aux Âtabeks , qu'on violeroir les
régies de la prudence en féparant les
troupes , dans le tems que les Chré-
tiens faifoient des proportions pour
la paix 5 que l'affbibliflement de l'ar-
mée les rendroit plus difficiles pour Içs
conditions , & leur donneroit des es-
pérances qu'ils avoient perdues ; qu'on
devoit attendre Tiffue de cette négo-
ciation ; que d'ailleurs , il comptait
bientôt congédier l'armée pour la lait
fer repofer pendant l'hiver , Se qui!
(a) Emad-eddin Zenghi, fils de Maudoud,
fils de Zenghi Prince de Sindgiar , il étoit frère
du père de Sindgiarfchah.
db Saladin. Liv. X. aji
les prioit de différer leur départ jufc
ques à ce tems.là. Peo docile à ces re- nég. <**.
préfentations > Eraad-eddio fie remet- * u *****
tre au Sulchan un mémoire dans le-
quel , à des expreflïons fort refpec-
tueufes , H mêloit des reproches durs
& offenfans. Saladin prit la plume ,
écrivit feulement au bas du mémoire
ces mots : Je veudrois bien fawir quel
jruit prétendent retirer de leur dejfeiny
ceux qui veulent fe fiufiraire à ma pttif-
fance & perdre un Prote8atr tel qm moip
& renvoia ce papier au Prince de Sind-
giar qui garda depuis le filence.
Mais km neveu Siadgiarfchah plus
impétueux que lui , fit éclater fon mé- N
contentement : il adrefla au Sulthaa
plufieurs placets remplis d amertume „
& ne recevant point une réponfe con-
forme à fes défirs , il prit la réfolutioîi
<f aller lui-même demander fon con-
gé. Le Sutthan pour éviter cette con-
férence , loi fit dire qu'il étoit ce jour»
là trop accablé par & maladie , pour
lui parler. L'Acabek prenant cette ex-
eufe pour un nouvel affront , entra
brufquement dans la tente , malgré les
Gardes qui refufoîent de l'introduire.
Saladin fe plaignît de cette violence »
lyi tiistùiki
& voulut lui faire des repréfentatioftë
j."e.' *\*99. fur 1 objet de fa vifire-, mais Sindgiar~
fchah fans lui répondre , s approche étx
Ht» fe baifte, prend la main du Sul-
than , la baife comme pour faire fes
adieux , & fort : il dit à 4 es gens de le
fuivre, monte à cheval ,& part pouf
la Méfopotamie , fans attendre fes
équipages ni fes troupes* Dans d'au-'
très circonftances ; cette efpéce de ré-
volte, n'eut pas été impunie, mais
il étoit dangereux d'irriter par trop de
févérité , les Atabeks & les Seljouci-'
des qui n'auroi«nt pas manqué d'en**
brader la querelle de Sindgiarfchah ,
pour avoir tfn prcrette de fecôuer le
joug d'un Prince mourant dont ils ne
fefpe&oient plus le pouvoir. Saladinfe
contenta d'écrire au Prince de Mé-
fopotamie la Lettre fûivante.
» Je n'ai point recherché votre amî-
tt dé : c'eft vous qui avez imploré ma
^prbte&ion, ïorfque vous craigniez
*> pour vos Etats , & même pour votre
» vie. Je vous ai fefouru de toutes mes
9> forces contre vos ennemis, & contre
n vos Sujets rebelle*. Depuis ce tem$,
wvôus n'avez ceflé de tyrannifer vo$
h Peuples en exerçant fur eux toutes
de Sacadin. Liv. X. ZJJ
#3 fortes de vexations , de cruautés Se
•>de brigandages. Inutilement vous j^S**]
•9 ai- je averti pïufieurs fois de changer
» de conduite. Enfin je vous ai Comme
» de venir prendre part à la guerre
» fainte , Se Ton fçait quelles troupes
» vous avez amenées. A peine êtes-
»* vous arrivé , que vous avez paru in>
««patient de partir. Vous avez étéauffi
» inutile à l'Iflamifinè , que peu redou-
ta table aux ennemis. Vous ne vous
» êtes difting^ que par votre tiédeur ,
ti& vos murmures. Cherchez donc
»à préfent un autre Souverain qui
» vous défende contre ceux qui enva- '.
ohiront vos Etats: car je vous déclare
» que déformais je reiioftce à toute air
» liance avec vous , & que je vous livre
» entièrement à votre fort.
Sindgiarfchah reçut cette Lettre à
Tibériade f Se continua (à route plein
d'agitation & d'inquiétude. A quelque
dî fiance de cette ville § il rencontra
Téki-eddin Omar qui revenoit à Pto-
lémaïs , & lui expliqua les motifs de
fa retraite» Téki-eddin lui confeilla
de retourner fur fes pas , & de fe ré-
concilier avec le Sulthan ; mais l'Ata-
bek perfiftant dans ie deffein d'aller
en Méfopotajpie fe préparer à tout
2)4 Histoire
événement : vous me fuhnrtz, > lui dit le
yc'il]*. neveu de -Saladin , d'un ton à lui faire
fentir qu'il fçauroit bien l'y contrain-
dre. Sindgiarfchah Cachant à quel
homme il avoit affaire, obéit & vint
fe jetter aux pieds du Sulthan qui le
reçut avec bonté , & diffipa fa frayeur
en le comblant de bienfaits. Cepen-
dant comme l'hyver devenoirtous les
jours plus rude , Saladin licencia fon
armée , & ne retint auprès de lui que
le peu de troupes qui compofoit (a
garde.
Les Chrétiens auroient profité de
ces circonftances favorables , s'ils
n'euflent pas été eux-mêmes dans un
-état non moins déplorable. Comme
«ï* «. r ies Sarrazins . ils étoient défolés par
jacq. vit. la pelle t & avoient encore à fuppor-
GodîfMc«,ter toutes 'es ho^eurs de la famine
&c. ' °D" dont les Sarrazins étoient exempts.
11$ furent obligés de fe nourrir de
leurs chevaux ; & lorfque cette ref-
fource leur manqua , ils dévorèrent
les harnois \ les cuirs , lés vieilles
peaux qu'on vendoit à un prix ex-
ceffîf. Frédéric Duc de Souabe fut
enlevé par la contagion. Lorfqu'on a
dit qu'il refufade fe guérir parl'ufage
des femmes , on a dit une abfurdité.
!)£ Salàdin. Liv.X. %$$
Après fa mort , prefque tous les AU
lemands quittèrent laPaleftine, 8c wp.jif'
retournèrent en Europe. Croira- 1- on
2ue dans ces teins de calamité » les
Ihrftiens s'occupaiTent encore de leurs
divisons iateftines ? Les factions op-
pofées du Marquis de Tyr & du Roi
de Jérufalem parrageoiem l'armée.
Tous les jours de nouvelles querelles
étoient fiifcitées par l'ambition du
premier qui avoit fçu s'attacher les
principaux Chefs. Mais un événement
inattendu penfa plonger les Francs
dans les malheurs d'une guerre civile.
La Reine Sybille & fes filles étant
mortes de la perte , on fourint que Lu-
fignan étoit déchu de Ton droit à la
couronne. Conrad digne en effet de
régner > fi à de grandes vertus il na-
voit joint des vices encore plus grands,
afpira au trône. On fera étonné d ap-
prendre qu'Honfroi du Thoron mari
d'Ifabelle fœur de Sybille, lui qui avoit
reftifé le Royaume de Jérufalem s ior£
' que les conquêtes de Saladin n en
a voient démembré que quelques vil-
les , voulut être Roi , lorique ce
. Royaume fut détruit-. Peu s'en fallut
que Baléan d'Ibelin qu! avoit époufé
la Reine Marie nièce de l'Empereur
2 5 6 ii I S T O I R B
T . . 0 Manuel , & veuve d'Amaury , ne pré*
*. cTji$x>. tendit également a la Royauté , &
qu'on ne vît à la fois quatre Rois
d'une MonaTchie qui n'èxiftoit plus.
Mais le Rival le plus redoutable de
Xufignan , étoit le Marquis de Tyr ,
le feul qui poflcdât au moins une fou*
veraineré dans la Paleftine, Il n avoit
de droit que fon ambition , & rouhit
s'en faire un plus réel en s'unitfant avec
Ifabelle dont 51 étoit aimé. Il fallôit
• pour réufïïr dans ce projet , Faire cad
fer le mariage de cette Princefle avec
Honfroi 5 mais l'impatience de Coii-
rad [ne lui permit pas d attendre la dé-
cifion des Prélats ; & cet homme qui
avoit abandonné à Conftantinople fà
femme O) qui , vivoit encore , 'enleva
publiquement la femme d'autrui , èc
alla Tépoûfer à Tyr. Le Patriarche
HéracliusSc les autres Evêqpes ne
manquèrent pas de confacrér cette
, violence en déclarant nul Iç Sacre-
• ment.quj Hoir Hàbelle avec Hqnfroi ,
& en cprifirmant l'union de cette Prin-
cefle avec Conrad. Après cet Arrêt
inique, celui-ci fe porta pour Roi de
{a : Bile étoit filled'Andronic , Sefeeur dî-
,<aacr Ange Empereur, Jérufalem,
de Sàlàdîn. Liv.X. 157
Jérufalem , & revint à l'armée pour
en prendre le commandetneut en cette THrV»!o
qualité. Luiignan le recria contre cette
ufurpation. Ses malheurs & U juftice
de la caufe lui firent des Partifans qui
fe préparèrent à défendre fa dignité.
Alors tout fut en mouvement dans le
camp- Les diflenfionspaflànt des Chefs
aux (impies Soldats , on saccabloit
d'injures ; des injures on en venoit
aux coups. On prit les armes de part
& d'autre. Les Chrétiens , comme s'ils
n'eullent point été aflez malheureux
par les ravages de la pefte, & les ri.
tueurs de la difette , forent fur le point
e s'égorger de leurs propres mahis ,
pour décider auquel des deux concur-
rens devoit appartenir un vain titrée &
un Sceptre brifé; Enfin des perfonhes
fages fufpendirent ces fureurs, enpto-
polantuneefpéce d'accommodement;
ce fut de remettre cette grande affaire
au Jugement de Richard Se dç Phi-
lippe Augufte , partis de l'Europe pour
la Terre fainte.
Tel étoit l'état du fiége de Ptolé-
maïs ,lorfqueces deux Rois arrivèrent
dans la Paleftine. v
Fin dU Livre dixième
TêmJI. Y
SOMMAIRE
DU LIVRE ONZIEME.
Croifade de Richard & de Phi~
lippe-Augufte* Leurs aventu-
res , leur arrivée à MeJJine 9
leurs querelles. Départ du Roi
de France pour Ptolémais.
Ses premiers exploits. Le Roi,
d'Angleterre s9 empare de l'IJlc
de Chypre. Il arrive en Palef-
tine. Les deux Rois & tous
les Francs Je livrent aux fu-
reurs de la difeorde : ils fe
réconcilient > fe rendent enfin
maîtres de Ptolémais. Phi-
lippe s' embarque pour l'Euro*
pe. Cruauté horrible de Ri-
chard.
111 ^ 4ix>ck'mxi<kx:»<:hxi<.i<>< ^
HISTOIRE
D E
SALÀDIN
Sulthan d'Egypte & de Syrie*
LIVRE ONZIEME.
LE S guerres du jeune Philippe- Hég. s8*.
Augufte & du vieux Henri II. J"c* lx>0'
avoienc fufpendu l'effet de la
troifiéme Croifade, Après là mort de ££*■ G"iU*
ce dernier , Richard Ion fils appelle ja£°vit. °8 *
Cœur de ZAn* fiirnom qu'il méritoi t en *romP<°n-
4~r r * . , . , Mar. San.
effet par ion courage intrépide at* au* *. font,
tant mie par fa férocité, monta furj^t^
le trône d Angleterre , qu on raccu- &c
(bit d'avoir obtenu par un parricide.
te commencement' de fon régne
léd Histoire
mm^mm fat fignalè par une fureur qui gagn*
j!c? u'»'. bientôt la France & l'Allemagne. Oi* :
fit main-J>a(Ie rfans'la Grande- Breta-.
gne, fur tous tes Juifs enrichis par le
commerce & par l'trfure : leurs fem-
mes & leurs filles furent violées par les
Soldats & livrées aux flammes, leurs
mai Ton s pillées , leurs biens enlevés*'
par les Croifés Se employés à la déli-
vrance du tombeau du Chrift dont
cette Narion eft repurée l'ennemie. IL
faut voir dais les Hiltoriens du temâ +
& principal*™ *nr dans Guillaume der
Neuhrîge ou de Newbourg , les dé-
tails hurnilians de cette perteeution Se
la mpi t héroïque des Juifs de fa ville*
d'Yorck.
* Richard ayant fait la paix avec Phi-*
lippe, & renouvelle le vceudela-Croi--
fade , fe prépai a pour le voyage de la
Terre (aime. Lcsfommes qu'on avoir
Jevéespar la dixmc: Saladiirc, avoient
été diffipées dans Tes guerres précé-
dentes. 11 fçut amafler de nouveaux
tréfors , fans charger fes peuples d'im»
pots onéreux. Il vendit des charges »
des Jignités,& même des Domaines
de la Couronne , Se répondit à ceux
qui lui repréfemoient l'abus & le dan-
J*C« i\ya?
»e SalAdin. Ljv.XI. i6t
Îjer de cette conduite , qu'il vendroit
a ville de Londres , s'il trouvoit un HHj*\&*
Marchand alTex riche pour l'acheter,
11 profita furtout de 1 orgueil des Pré*
lats de fon Royaume , qui s'empreffé-*
rent d'acquérir à prix d'argent des ti-
tres, des honneurs» de; droits Seigneu-
riaux. L'Eveque de Durham , ea-
tr'autres , vieillard avare & ambitieux^
employa tout ce qu'il avoit épargné
dans fon Dioccfe , pendant une lon-
gue adminiftrarïon , ceft-à-dïre , la
lubftance des pauvres, à joindre à fon
Evêché le Comté de la Province de
Northumberïan y ce qui fit dire à Ri-
chard dans cette occafion , qu'il ve-
noir 3'opérer une efpécç de miracle*,'
en faifant un jeune Comte d*im vieux
Evêque.
Ce n'eft pas au refte qu'il prétendir
aliéner tous ces biens : il les réunît à la
Couronne après fon retour de la Pa-
leftine. Ce ji'étoitalors qu'un emprunt
fait fur la vanité d'une partie de laNa-
tion. Outre ce moyen quf \u\ procura
beaucoup d'argent, Heur encore une
reflource dans le refroidiflement des
Croifës dont la plupart fe repenroienc
4'a voir fait un vœu indifcret» Il ob~
l€% HlSTOfKB
tint du Pape la permiflion de les
h%. 5 s*, exempter de la Croifade , & fit ache-
rfer cette difoenfe a tous ceux dont le
zélé étoït ralenti. Avec ces tréfbrs , il
équipa une flotte d'environ deux cens
voiles» en donna le commandement
à Gérard Archevêque <TAufch , & à
Bernard Evêque de Bayanne, Iaiflk
la Régence du Royaume à la Reine
Etéonore fa mère , & à Guillaume de
Longchamp fon Chancelier, Evêque
d'Eli , & vfnt en France pour confé-
rer avec Philippe Augufte fur les opé-
rations de cette grande entreprise.
Pour connoître les mœurs de ce fîè-
cle & celles de Richard , il fat# fça-
voir qu'ayant reçu le bourdon de pè-
lerin à Tours, & ce bâton s'érant rom-
pu (bus lui , les Affiftans frémirent de
ce funefle préfage & que pour en dé-
tourner l'effet , il prit un nouveau
bourdon béni à Vezélai ; que quoiqu'il
fût d'un, cara&ére dur , féroce , cruel ,
implacable , qu'il fe fouillât fans feru-
pule de tous les crimes, qu'il violât
dans fes débauches , les4 régies de la
pudeur la moins auftére , qu'il mépri-
lat la Religion & fes Miniftres , il fe
livroit aux pratiques les plus fuperfti-
ÔE SAtADINr LlV*XI. 16%
tieufes, s'irapofoit des pénitences ri-
goureufesr& ailoit fouvent dans Tes H*s- '"•
accès de dévotion, (è jetter en chemi- * c* uy9%
fe aux pieds des Prêtres , avouoit pu-
bliquement fes fautes . & fe feiioie
donner la difcipline par eux ; que
Foulques Curé de Neuilly lui ayant
reproché dans. un Sermon fes vices &
fes défauts , te lui ayant dit en tr'auge*
choies , m'il avoir trois Aturs trefc
dangereuses qui le conduffbient en
Enfer , & dont il devoir fe dé&ire ,
fçavoir l'orgueil , l'avarice & la luxu-
re ; Richard répondit en fe levant ;
yhEh bien > je donne mon orgueil aux
t» Templiers, mon avarice aux Moi-
*nes~; & ma luxure aux Prélats de mon
» Royaume.
Philippe plus modéré & peut-être
moins politique que le Roi d Angle-
terre , le contenta des fonds qui re£-
toient dans fes coffres ,& négligea d'en
acquérir de nouveaux. Il comproit fur
l'ardeur des Nobles & des Barons de
fon Royaume , qui faifoient la guerre
à leurs propres dépens , & condui-
foient fous leurs bannières un grand
nombre de Serfs mal difeiplinés Se
toujours braves : mais il ne comprit
t&f. Histoire
pas affez que l'argent eft le nerf Je \i
j"c! iîîl puiffance» aue des troapes mal payée»
te laiftent facilement corrompre par
l'appas d'une meilleure folde ; &
qu'entré deux Princes rivaux , & pa~
roiflant agir de concert pour la même
encreprife , le plus riche devient iàr-
fenfiblement le maure. Philippe Se
Richard eurent une entrevue à Ve-
zelai où ils fe jurèrent une amitié in-
violable , tomme fi elle avoir pu fub-
fifter entre deux Monarques di vif es par
tant d'intérêts. Le Roi de France re-
çut dans i'Eglife de S. Denis le bour-
don & l'oriflamme , (a) confia le gou-
vernement de Tes Etats à fa mère
Adèle ou Alix , fille de Thibault Com-
te de Champagne & à Ton oncle ma-*
ternel Guillaume Archevêque de
■ ■ ■ ■ ■ i ■ i n
(a) L'oriflamme étoit une bannière de (oie
couleur de feu ou rouge , fèmblable à celles
qu'on voit dans les liglifes. Anciennement, .
elle étoit l'enfeigne particulière du Monaftére
de Saint Denis ; elle devint dans la fuite celle
de nos Rois , qui , comme Comtes de Vexih
turent les advoués & les vaffaux de F Abbaye,
& eurent le droit de porter l'oriflamme : il y
avoit auffi la bannière Royale dHHnguée de
celle-ci,
Rheims,
de Salahik'Lïv, XI. i£j
Rheims , & partit avec le Roi d'An-
glererce : ils fe féparérent à Lyon , & J§ cl us*
prirent la route le premier de Gênes ,
le fécond de Marfeille , pour fe re-
joindre à Meflïne , choifie pour leur
rendez- vous général.
À peiné furent*ils arrivés dans cette
ville ,que la bonne intelligence qu'ils
s'étoient promife fe changea en hai-
ne ,& penfa dégénérer en une guerre
ouverte. Guillaume Roi de Sicile, de
la race de ces Avanturiers Normands
qui avoient conquis cette Ifle , étant
mort fans enfans , les Siciliens élevè-
rent fur le trône , le bâtard Tancré-
de , (*) quoique l'Empereur Henri VI.
(t) prétendît à cette couronne. Ri-
chard , dont le nouveau Roi recher-
choit 1 appui avant que de fe déclarer
pour lui, demanda qu'on lui rendît fa :
four Jeanne » veuve de Guillaume ,
^ayec tout ce qu elle avoit reçu en dot ,
putre cent vaifteaux pour l'expédition
■ l ■ i m ■ ii . i é i i ■■ ,'m
(a) Tancréde coufin de Guill. & fils natu-
rel de Roeer Duc de la Pouille : il étoit de la
race des Princes Normands.
(b) Henri VI. avoit- époufé Confiance
tante du Roi GuilL que ce Prince avoit dé-
clarée fon héritière*
. Tarn II. Z
x66 Histoire •
de 1* Terre fainte. Tancréde renvoya
jH^' \*6' *a Pfi»ccffe & ne renvoya point ï'ar-
n^'genfc Alors Richard s empara de deux
citadelles. Chaffé de Meffine par les
Citoyens à canfede cette hoftilité , il
l'affiégea , la prit d'aflaut > paflà une
partie des Habitans au fil de 1 epée 9
faw s refpeder la Majefté de Philippe
Augufte qui faifoit Ton féjour dans cet-
te ville. Tancréde obéit à la force ,
accorda tout ce qu'on voulut ; & pour
fe fortifier contre l'Empereur par la
protç&ion de i'Anglois , il fit une
étroite alliance avec lui , & répandit
des foupçpn* injurieux à la gloire de
Philippe. Les Rois de France {^'An-
gleterre furent fur le point de vuider
leur querelle par les armes ; mais cet
©rage ayant été diffipé , Richard en
fofeita* un nouveau-
Nous avons dit que ce Prince quel-
ques années auparavant , avoit été
fiancé avec Alix , feur de Philippe.
Après la mort de Henri II. loin de
ratifier ce mariage pour lequel il avoit
fait la guerre civile à fon père qui re-
tenoit Alix dans une prifon de Lon-
dres , il voulut en contraâer un non»
▼eau en préfence même du Roi de
de Saiadin. Iïv.XI. %6y
France , avec Berengére ( BtrtngudU )
fille de Garde de Navarre, que fa «** s**\
irierc Eléonore ou Àliénor amenoit î,c* tl**'
en Sicile. Philippe fe plaignit d*une
telle injure faite a fa freur ; mais il fut
obligé dé dévorer cet affront, Se de
céder à la fupériorité que Richard pre-
hoit dans l'armée & aux raifons qu'il
kîiéguoit.Çes raifons étoient queHenri
abufant de h ieunefle d'Alix dont il
éroit amoureux , avoit entretenu avec
elle un commerce criminel , {*) &
?ue les loïx de l'honneur & de la
Leligion défendoient au fils d'époufer
la concubine du père. Ces faits dé-
voient être bien notoires , puifque Phi-
lippe ne fe récria pas contre la calom-
nie : il fit même une efpéce d accord
avec Richard , & confentit à fon
union avec Berengére de Navarre.
Il faut remarquer , pour l'Hiftoire
de TEfprit humain, qu'il y avoit alors
dans les montagnes de laCalabre, un
homme nomme Joachim , Abbé d*un
lUonaftére de Cireaux , regardé par les
uns , comme un Saint favorifé du don
de Prophétie , par les autres comme
(a) On dit qu'il en avoit eu un enfant. '
*63. Histjolili
un impoftcur ,mais réellement viûoiv*
"S"iîSnâlrc- Dim bout de la Chrétienïé à
f autre , on venoit interrogée ce Moi-
jie fur les évçnemens futurs^ I/igno^
rance de ce fiéclç écoic telle , que les
Rois de France & d'Angleterre ne vou-
lurent point fe mettre en mer , fans
confiilter cet Oracle* L'Abbé Joachim
* arriva donc en Sicile , & dit aux Prin-
ces, entr'àutres abfurditéS , en leur
ingloutira V enfant ne de la fci
du Soleil, que la fixiéme de ces têtes
ctok 5aladin , &; la feptiéme l'Ànte-
chrjft,que ce dernier étpk dans l'âge
d'adolefcehce , & qu'il ferpit bientôt
Pape.
Hég. ç8 7. Cependant Philippe pour ne pas être
l.c. x» ji. témoin du triomphe de Bërengére de
Navarre , humiliant pour fon amour
- propre, partit de Meffine où il avoit
paué Thyver , le même jour que cette
Princefle devoit y arriver avecla Reine
Eléonore. Ce fut une grande joie pour
les Chrétiens défunis & accablés de
maux , de voir enfin débarquer (4) le
^— — — — — i^ — — — — — — —
(a) Il arriva le xi Mars, famedi veille <k
di Sàlàdin. Lit. XL 1^9
Roi de France qui leur amenoic des
«vaiffeaux x desprovifions & de bonnes J# ^'1?î#
troupes. Ils lui déférèrent d*un com- * '
muA accord le commandement gêné- uoha-cd.
rai de l'armée. Philippe après avoir
vifiré la Place & les travaux des À£-
.fiégeans , prit; fon pofte à l'Eft , vis-à-
vis la tour Maudite, contre laquelle il
dirigea principalement fes machines.
Les François qui de tout tehft bnréti^
terribles dâtls leurprémïer choc, don-
nèrent plufieursaflautsconfécut Ifs avec
tant de furie , qu'ils auroient emporté
la Place , (i la garnifon ne leur eût op-
pofé un courage égal, &c fi Saladin
n'eût fait tout à coup diverfiôn,en
attaquant leurs lignes. Ils avoient reiir
. verfé les murs de Barbacanes , & s'é-
toient avancés jufques à un foffe large
& profond qui empêchoit d approcher
des murailles & d'y appliquer les
échelles. •■ i 'r *
L'humanité frémit d'apprendre que
pour le combler, les (Shréciens y j es-
tèrent non- feulement leurs chevaux ^
mais encore les Soldats morts de leurs
Piques ,23. Rabi-el- Apual , troifiétge mp»
ie tannée Mufdmanei \
Ziij
17* ' HtsietRi
bleffures oude la contagion » & mentit
a!c iî*u ceux quî Soient bleffes on malades
fans elpoir de guérir. De leur côté t
les Sarrazins defcendus dans le foflc
Êror le vuider , coupoient à coups de
bre ces cadavres , & en donnoienr
les membres fanglans ou à demi-pour-
ris à d'autres qui alloienr les jetter dans
la mer- Pendant cette affreule opérai
lion > les Afiïégés & (es Afliégeansj
les uns fur les murailles ou aux por-
tes , les autres fur le bord du foflc , t*
lançoient des flèches & des traits i Se
pour augmenter les horreurs de ce
ipeftacle , ils bruloient dans leur ca-
ge à la vue les uns des autres les prj*
fonniers qu'ils avoienc faits précédem-
ment.
Mais il ne faut pas croire que cette
. barbarie fut approuvée par les Chers
des deux Nations , & furtout par Sa^
ladin qui envoyok dans ce tems-là >
des ratrakhiffemens à Philippe Au-
gufte. Le Sulthtn > dont la fanté étok
un peu rétablie par le repos & la belle
faiion , avoir rappelle les troupes de
leurs quartiers d'hyver, & s*étoit ap-
proche de Ptolémaïs pour. la fecourfo
Jl Vint à bout d y faire entrer quelques
J. O n?i.
deSa&adïn. Liv. XI. 171
Solcfats & un peu de vivres , foulage-
ment bien foible pour les malheureux Hég. 587.
Citoyens: tous les matins (1 montoic
achevai, &s#xpofa ne à tous les traits
des ennemis > ilalbit obferver leurs
amouvemens, leur fittiarfcm , la direc-
tion de leurs machines, & revenoit
donner fes ordres pour les opérations
de la journée. Les Francs affiégés
eux-mêmes dans leur camp , en avoient
fait une efpéce de ville , en l'environ-
nant de murailles & d'un double fo£
fé. Plusieurs fois Saladin franchit ces
retranchemens & vint infulter les
Chrétiens jufques dans leurs tentes.
Lof fou ils battoient la Place , il fon-
doit fur eux de toutes pans & détour-
noit ailleurs leur attention. Ceux-ci
fortoient fbuvent de leurs lignes pour
tenter le fort des armes. Ces combats
auffi meurtriers qu'opiniâtres , du.
roient ordinairement depuis le rpatin
jtifqu'au foir , & recommençoient aveé
l'Aurore. Après avoir perdu bien du
monde, chacun fe retiroit , fe flattant
d'avoir remporté la vi&oire qui n a-
voit couronné , ni l'un , ni l'autre par-
ti. Enfin, la nuit & le jour, on ne
ceflbir de fe harceler & de fe tendre det
embûches. Z iiij
27* Histoire <
Philippe fie d'abord une faute rrré-
Hég. ^7* parable. Au lieu de calmer les efptte
j c. n^i- ajgrjs par jes jeux fa(5tions f & je ter-
miner ou de fufpendre les querelles du
Marquis de Tyr & du Roi de Jcrufa-
lem , il ralluma ces troubles funeftes»
en fe déclarant ouvertement pour Con-
rad contre Lufignan. Ce dernier per-
dant alors toute çonfidération dans
l'armée , alla chercher de l'appui au-
près de Richard , qui devenoit Ton
Prote&eur,dès que Philippe l'abandon-
noit. Il partit avec fon rrere Géoffroi*
Raynaud Prince de Sidon , Honfroi
Seigneur du Thoron & d'autres Ba-
rons fes créatures. Les travaux du fiége
fouffrirent de cette défertion , & des
nouvelles diviûons qui s'életérent dans
le camp. Ceux qui tenoient pour te
Roi de Jérufalem refuférent d'obéir
à Philippe. Ce mécontentement fit
craindre à ce Prince d'efliiyer de plus
grands dégoûts après l'arrivée de fon
rival ; mais ne voulant point quitter
. fans gloire une entreprise qu'il n au*
roit pas dû commencer , il tenta d'ob-
tenir Ptolémaïs par capitulation , afin
de pouvoir enfiaite retourner dans fe$
Etats, fans qu'on pût lui reprocher de
deSàlàdin. Liv.XL 175
n'avoir rien fait pour la Paleftine.il
fit dire à Saladin de lai envoyer ira jvc?n/il
de fes Emirs, pouc écourer les condi-
tions auxquelles il confencoit d'accor-
der la paix. *
* Depuis le commencement du fiége *
on avoit entamé jtfufièurs négociations
toujours infru&ueufés. Le Sulthan-
croyant qu'on érherchoit à l'amufer
par tant de projets inutiles 9 8c choqué
d'ailleurs qu'on prétendît lui faire la
loi , répondit aux Députés : » dites à
*> votre maître ,que s'il a befoin de
»moi, il peut envoyer lui-même un
» de fes Officiers ; & que pour moi ,
» je ne lui demande rien & n ai aucune
npropofitîon à Iflf faire. «* Philippe
comprit par Ifrfierté de cette réponfe >
qu'il ne hiiferoît'pas auffi facile qu'il
- lavoit imaginé de déduire le Sulthan.
Il refufa de fe fbumettre à la démar-
che humiliante de follicirer lui-même
auprès d'un Mohdmétan la paix qu'il
défiroit : il crut fon honneur intéreffé
à faire -plier à fes volontés la Nation
infidelle qui le bravoic. Il gagna par
la douceur , une partie des Francs &
pouffa le fiége avec plus de vigueur ,
ieconjc furcout par fes braves Fraft-
tj( Histoire
~ g de Chypre & fe foutenoit dans Cota
, j.c ji^i.'ufurpation , fous le régne d'Ifaac
l'Ange. Cétoit un Tyran non moins
haï de Tes propres fujets opprimés par
• Tes vexations , que cruel envers les
étrangers. Le Roi d'Angleterre lai
demanda fatisfa&ion pour l'infulte
faite aux Princeffès , & la reftitution
de Tes Soldats , de fes matelots qui
avoient fait naufrage & de tous leurs
effets. Sur le refus d'Ifàac , il prit ter te
& pourfuivit pendant plufieurs jours ,
le Prince Grec qui fuyoit devant lui.
Celui-ci forcé dans fa dernière retrai-
te , & abandonné de fes propres fu-
jets, vint avec fa fille fe jetter aux
pieds du vainqueur % & demanda pour
toute grâce de n'être point misauxTers*
Richard le fit lier arec des chaînes
d'argent ; mais en donnant des chaînes
-au père , on dir qu'il en reçut d'une
autre efpéce de la fille avec laquellç
il vécut depuis enSyrie dans une grande
familiarité. Les habitans lui prêtèrent
ferment de fidélité comme à leur Sou-
verain , & lui apportèrent la valeur de
la moitié de leurs biens qu'il avoit éxf.
*ée : il joignit à fes titres celui de
" loi de Chypre , époufa dans cette Ifle,
t
de Saladin, L iv. XL 277
Berengére de Navarre , & la fit cou- '
tonner en préfence de Gui Roi de Je- ^\%\
rufalem, de Gcoffroi de Lufignan»
de Raymond Prince d'Antioche , de
Boëmond Prince de Tripoli fils de ce
dernier, de Raynaud de Sidon, d'Hon-
froi du Thoron , de Léon Prince d'Ar.
xnénie,frere de Rupin de la montagne
& d'autres Barons & Princes Syriens
qui venoient implorer fà prote&ioa,
Enfin 9 après avoir laiffe quelques trou»
pes dans (a uouvelle conquête & des
Officiers pour les commander , il par-
tit du Port de Limiflb, emmenant fbç
prifonnier qu'il fit conduire à Tripoli
& dont ilgarda la fille, ; .•
Sa navigation fut heureufe : car il
déoruifit dans fa route, le plus gros
vaiffeau des Sarrazins, qqi portoit à
Ptolémais des fecours de toute efpéce \
cetoit ce qu'on appelloit alors unç
galée ou galéafle de la plus grande
Forme que Saladin avoir &it équipe?
à Berc>ut : elle renfermok des vivres »
des munitions de guerre, du feu gré-
geois, environ fept cens Soldats d'élite
outre les matelots : elle tomba au mi.
lieu de l'efcadre Angloife & arbora lé
pavillon François , pour échapper dpi
tyS Histoire
danger par ce ftratagême. Richari
*ct'ii%7t' l'ayant fait reconnoître la fit attaquer.
îbid %lfU **es Mufulmans fe battirent en défeC
i»hMi pérés : ils coulèrent à fond un des vaif-
feaux Anglois; mais les Chrétiens Ayant
écé à l'abordage, gagnèrent le ttllac
à la faveur du nombre , après un com-
bat meurtrier. Alors le Patron nommé
Jacob , s'adreflànt à Ces camarades :
w il ne faut pas , dit-il , que les Infi-
ndelles profitent de notre malheur ,
fcfuivez-moi. ««Après avoir prononcé
ces mots , il defcend dans le fond de
cale , ouvre à coups de hache les flancs
de fon vaiffeau qui engloutit dans les
onde* , les armes , les provifions , les
vaincus & les vainqueurs.
Le lendemain (*) Richard mouilla
devant Ptblèmaïs. Les Francs célébré- .
rent fon arrivée par des feux de joie
allumés dans tout le camp. Leur ar-
imée par ce nouveau fecouts ,f fe trouva
forte de trois cens mille hommes ar-
rêtés devant une feule ville que l'Occi-
(j) Les Chrétiens difent le 8 Juin , les Ara-
bes le 13 Dgiounadi el-Aoual. Mais ces
deux époques , ainfi que bien d'autres
que nous avons rapportées , ne s accordent
^>oint.
in Salaain. Lit. XL 17$
dent difputoit à l'Orient, Les deux
Rois parurent d'abord agir de bonne H£ IJ8[;
foi, & avoir oublié leur ancienne mé- * ll'1
finteiligence : ils concertèrent enfem-
Me les opérations du fiége , & firent
les loix les plus fages pour la difciplini
des troupes : mais l'orage fuccéda bien-
tôt à ce calme apparent; & Ton eût dit,
qu'ils nétoient venus dans la Paleftine
que pour la déchirer par leurs propres
divisons. Philippe alléguant le Traité
fait à Vézelai , prétendoit avoir la
moitié du Royaume de Chypre qu*
Richard n'étôit pas difpofé à partager*
Cette première concertation Fut l'étin-
celle qui caufa un incendie rgénéfal :
elle reveilla la haine des deux Nations
qui de tous les tems ont été rivales &
ennemies. Lorfque les François don*»
noient un aflàut , les Anglois jaloux
de leur gloire, reftoient dans Wnaârion
au lieu de les féconder; & les Fran-
çois fe vengeoient par la même con-
duite.
Ce qui choquoit le plus Philippe,
étoit Tafcendant que ptenoh dans l'ar-
mée un vaff'al plus puiflànt que lui. C»
dernier irritait par Ton farte & fa ma-
gnificence , l'orgueil du Monarqott
xSq Histoire.
François : il en vint jufqu'à lui débatt-
Hég. 587. chcr par fes pxofufions , la plupart des
" tlfU Officiers & une partie des ibidats aux»
quels il offroic une plus groiïe paye.
Philippe réduit dans l'état humiliant
cPun ^Prince fubalterne attaché à la
fortune d unautre Souverain , fouffroit
impatiemment tant d'outrages % & ne
pouvant les réprimer , il excitoit par.
les 'murmures , les plaintes des Barons
qui lui reftoient fidelles.
Les deux Contendans au trône de
Judée, joignirent leurs querelles aux
difputes des Rois de France & d'An-
gleterre. Lufignan vit enfin Ton parti
dominer : il avofcpour lui Richard,
jes Pifans , les Flamans , le Comte de
Champagne & les Hospitaliers. Les
Templiers > les Génois , le- Duc de
Bourgogne & Philippe (butenoientles
droits de Conrad : mais celui-ci crai*
gnant d être écrafé par la fupériorité
des Anglois , Te réfugia dans la ville
de Tyr avec (es créatures. On députa
desEvêques pour l'adoucir; leurs ex-
hortations & leurs prières ne purent
rien gagner fur une ame auffi fiére.
Dans ces fâcheufes circonftances , les
deux Rois tombèrent dangereusement
malades.
. 1
j
de Sala*in. Liv. XI. l8t
malades. Ce fiécle accoutumé aux cri-
mes autorifa les foulons injuftes qui Hég. t«7-
^élevèrent de par^ d'autre : Phi- ^^ll^
lippe accula Richard de lavoir fait
empoifonner , tandis que Richard
fbrmoit la même accusation contre
Philippe* Saladin qui fa'foit la guerre
avec cette grandeur fc cette généra-
lité que l'Europe n'a connue que plu*
fleurs fiécles après ,-envoyoit rrès-fou-
vent aux deux Princes des raitakhiffe-
Miens, & tout ce dont ils pouvoient
avoir befoin pour leur guérifon ou
£>ur leur fubfiftance. Il n'en fallut pas .
vantage pour faire dire aux uns , que
Richard trahiflant la caufe commune
ètoit d'intelligence avec lesinfidelles ,
ans autres que, Philippe étoit payé par f
eux pour fomenter la difeorde parmi •
tes Chrétiens. Enfin, après bien des
débars , On fit une efpéce d'arrange-
ment qui patut aflbupir les différentes
factions.
On décida que Lufigrtan garderait
le' titre de Roi pendant fa vie, fans
pouvoir le tranfmettre à fes héritiers ,
&que cette qualité pafferoit à Conrad
Se aux enrans qtfH atfroit de la Pr«v-t
ceffe Ifabelle^ que les Rbisde France
TtmtlL A a
ttt Histoire
& et Angleterre rcnouvelleroient Iemr
Hég. ï«7 Traité d'union £t partageraient de
j.c. H» i. bonne foi les c^P&etes qu'on ferait
fur les Sarrazins; Se que fucceffive*
ment , lorfWmite des .deux Nations
attaquerait la Place *■ rentre défen-
droit tes lignes contre Salaiin. Après
cet accord , le Marquis de Tyr étant
revenu à l'armée, on recommença les
opérations du fiége.
. Le Sukhaiî ne masqua pas de pro-
fiter de tous ces troubles : tient le terns
de faire venir de nouvelles recrues» de
fc pofter avantageufemenc , & trouva
le moyen de foulage* Ptolémaïs. Les
Emirs quiconunandoienidan^ta vill^
mirent leurs foins à creufcr les fofles
comUcs par les ennemi* & à élever
de nouveaux murs à la place de ceux
qui avoient été reaverfé*. Le Peuple
preflé par les Chrétiens & par la fam>*>
ne» ce(pirà mi peudaiw cet intervalle
& reprit un courage que la mifère
avoir ahbatrur ; de ibrte que les Francs
éprouvèrent une réûftance à laquelle
ilsnesattendoient pas : leurs machi-
nes furent encore plufieurs fois bràléet
par le feu grégeois du détruites dans
des forties. Ce* machines étaient à
z>e Saladik. Lit. XL îSj
peu près les mêmes que celles des Grecs
& des Romains. La manière de faire j^?',^
la guerre ne reffembloir en rien à cet
arrfi perfectionné de nos jours. La va-
leur confîftoit alors dans l'intrépidité ,
dans 1 adrefle & dans la force du corps;
Un ruftré n'avoit pas le pouvoir de pré-
cipiter de loin un Héros dans le crêpas*
Lès flèches , Jes pierres , les traits n'é-
toient dangereux que peur rfrifanterfe
& alloient fe brifer contre le fef dont
la gendarmerie étoit couverte. C'étoit
dans la mêlée, qu'on pouvoit défarçon-
ner un Cavalier & lui plonger Tépée au
défaut du cafque ou de la cuirafle. L'in-
vention de la pondre à tout changé
dans Patraque & la défenfe. Refteà
fçavoir, fi ce fecret meurtrier a été
plus ou moins funefte à l'humanité
que l'ancienne manière de s'entredé-
traîre.
Après l'accord dont nous venons de'
parler, les Chrétiens mirent leur ij-
Valhé à fe fignaler. C'était à qui mon-,
tteroît plus de zélé , & fe dîftingueroit,
par de plus grandes aftions. On dreflà
ces inftrumens deftru&eurs qui renver-
fdient les maifons 8c les murailles. En
peu de Jours , on fe dé nouvelles bré-'
Aa ij
1S4 . H i sto m e
ches. Une partie de la Tour maudire au
jîcfiî**". P*e<* ^e ^^.k campoienr les Fran-
çois, fut abbatue par l'effort de leurs
béliers. Les Afliégés réparoienr les
dommages , & fouteuoienc ce malheur
avec une a&ivité & une confiance in-
croyables, Saladin de Ton côté , ne
cefloiç d'inquiéter les Francs. Lorfque»
ceux-ci alloient à laflaut , les Habitans
l'avertidoient du danger au bruit de
leurs cymbales: celles duSuithan ré-
pondoient à ce fignal. Alors il raoa-
toit à cheval > animoit les troupes , Se
tomboit fur les Chrétiens avec d'au-
tant plus d'acharnement , que les en*
nemis en montroient à battre la Pla-
ce : il entroit dans leur camp , pilloic
les tentes , enlevoit les meubles & for-
çoit les Francs à venir défendre leur»
retranchemens & leurs femmes qu'on
menoit en captivité. Les Chrétiens-
qui depuis l'arrivée des deux Rois 9
n'a voient point donné de combat gé-
néral > fortirent enfin en ordre de ba-
taille, & s'étendirent depuis la mon*
tagne du Thoron jufqu au fleuve Bé-
lus. Saladin les reçut à la tête de foa
armée ; & après une aâion vive &
meurtrier e > il les repoufli. De tout le
xje Saladîn. Liv. XL 2R5
Jour , il ne prit aucune nourriture, &
paffa la nuic fous les armes. Au lever "c.\î^«
de l'aurore, il alla lui-même provo-
quer les Chrétiens ; mais Tes troupes
reculèrent au choc des François qui
donnèrent les premiers: les Mufut-
mans ne reprirent leur avantage que
le foir.
Le lendemain on vit arrfver un
Ambaïïadeur de Richard qui fut in-
troduit dans la tente du Sulthan : il
demanda de la part de (on Maître , un
entretien avec cePrince^ « Les Rots, &&*&£*
» répondit Saladin > ne doivent fe trou-
*ver enfemble qu'après une paix jurée.'
9 »Ii feroit indécent de les voir fe livrer
«bataille au (or tir d'an repas Se d'une
^conférence. Il faut auparavant ré- N
»gler les- articles de la paix. Nous
» marquerons enfuite le tems & le
«lieu de l'entretien; & nous pourrons
nconverfer enfemble par le moyen
» d'un Interprète. •« Pour l'intelligence
de cette répotife %on doit fçavoir que
les Arabes rigides obfervateurs de
I'hofpitalité , préfentoient à manger 6t
à boire aux Etrangers qti venoienr
chez eux pour. témoigner qu'ils leur
accordoient touœ ittfecérSaiaditt pour»
\%6 Histoire
qui cet ofage éroit facré , avoic coo-
»%• î*7 tume d'admettre à fa table les Princes
ltfu Mufulmans & les Emirs qui lai ren-
doient vifite ,& même les prisonniers
aux jours deiquels on ne pouvoit plus
attenter après cette marque de bonté.
Il auroit crû manquer à fa dignité &
aux loix refpeâables de rhofpitalité,
silavoit reçu Richard dans fon camp
fans lui donner un feftin.
Malgré cette «ccufe, le Roi d'An-»
gleterre perfifta à folliciter la permiP
Son de venir lui-même négocier avec
le Sulthan. Celui-ci connoiflTant les
divifions qui régnoient parmi let
Francs, çfpéra tirer avantage de ces
troubles , en traitant en particulier
avec Richard!. Malek-Adel fon frère
fut chargé d écouter les1 proportions
de ce Prince, & d'en faire part à Sa-
fedin.. On drefla une cerne magnifi-
que pour recevoir le Monarque An-
glois qui > ayant pris jour, manqua au
i?adez~vous. Le tirait courut que les
Chrétiens lui avoient défendu de ve-
nir » en lui représentant que cette dé-
marche humiliante compromettroit
l'honneur de la Religion & k majefté
4u trône; maisia&ercé de Richard fut
de Saiadih* Liv. XL itj
Méfiée de ce difcours qu'il rcgardoic
comme injurieux à la gloire. »»Ne /^'Jîî*
» croyez pas , fit-il dire au Solthan f
t9 que les raifons qu'on publie m ayent
» empêché d'aller auprès de tous. Ap*
» prenez que je ne dépens ici que de
m moi même , que Je (ois le maître de
«ma conduite, de que perfonne n'a
» droit de s'oppofer à mes Uolonrés,
oUne maladie dont j'ai été attaqtté ne
» m'a pas permis de fortir de ma ten*
»r te : dès que ma famé fera un peu ré*
>aablie, je ne manquerai pas de me
» rendre au lieu de la conférence , fans
m demander lavis, encore moins les
» ordres de tous ces Princes Chré-
» tiens dont aucun n'a * autorité fur
»fIK>L<*
Dans le tems que le Roi d'Angle-
terre s'adreffbh aux Mufulmans pour
réglée les conditions de la paix, les
Habitant de Ptolémaïs saorefToient
an Roi de France > pour obtenir une
capitulation. Les veines, les maladies »
les fatigues y Ta difette les avoïent ré-
duits dans un état déplorable. Ils dé-
putèrent à Philippe un de leurs Corn-
mandàns qui lui parla en ces termes*
» Tomes lcfcfoisqpe nousawas *ffiét
jl$8 Histoire.
»gé une de vos villes , nous voie»
jvc i if il " avons accordé la fureté que vous de-
tt mandiez , lors même que nous étions
v déjà. maîtres de la Place; & nous
» vous avons fait conduire avec hon-
» neur aux lieux que vous choififlîer
»pour retraite* Aujourd'hui nous con-
. » (entons de vous rendre Ptolémarô
» avec tout ce qu'elle renferme , à
i> condition feulement que vous nous
» donner ei ce que nous ne vous avons
» jamais refufë, la liberté de nous re-
«9 tirer avec nos femmes & nos en-
» fans. « Philippe rejetta ces offres ,
efpéranc en obtenir de plus avança-*
geufes. »Eh bien , répliqua le Mu fui -
» man , nous nous enfevelirons fous les
» débris de la ville ; mais ce ne fera
» qu'après avoir vendu chèrement no-
9>trevie. «
Cet Emvt étant de ^retour à Ptolé^
maïs y porta la déflation. On n en-*
tendoic que cris & que eèmiffemens^
Le Peuple accablé fbuf le poids de
tant de maux fe déféndoit cependant
encore : il n avoit de relâche qu'autant
que Saladin lui en procuroit , en atti-
rant ailleurs les armes des Chrétiens ;
encore * dans- ce teins- là , on xéparoie
les
b e Saladin. Liv. XL 189
les brèches , les machines , & on fai-
foit des fonies. Les Francs Ce parta- "f* Jf £
gèrent en diftérens corps, qui atta-
<juoient fucceflivement la place jour 6c
-nuit. Aucun (iége n'a peut-être jamais
produit autant da&ions de bravoure.
On ne finirait pas fi on s'attachoit à
décrire les exploits rapportés par les
Hiftoriens Chrétiens & Arabes. Ceux-
ci nous apprennent qu'on vit plus d'u-
ne fois des femmes Chrétiennes fe dit
tinguer dans la mêlée & tuer de leurs
mains plufieurslnfidèlles. On donnoic
iur les brèches un combat continuel»
Les cadavres de ceux qui mouroienc -
dans l'attaque , & dans fadéfenfe fer-
raient de nouveaux remparts aux Affié-
gés.Saladin touché du fort malheureux
desHabitans, né pou voit s'empêcher ,
dit Boha-eddin > de verfer des larmes »
toutes les fois qu'il jettoit les yeux fur
cette ville infortunée qu'il ne pouvoit
délivrer. Car, comment chauertine
armée d'environ trois cens mille hom-
mes retranchés dans un camp forti-
fié, de murailles } Ptolémaïs renfer-
moit à la vérité l'élite des troupes Mu-
sulmanes tant en Officiers qu'en Sol-*
dats : mais leur valeur en retardant de
Tome II. Bb .
2JO HlSTOIRl
quelque rems ta perte de la ville , rea-
j fîç!'i i1^. ^°" enc°re cctte pcrw plus chère.
! " m Si demain vous ne nous ifecou-
-#>rez , nous ferons-foscé^de nous ren-
9» dte , * écrivirent au Sukfaan les Ci-
toyens par un<le ces pigeons dont nous
•avons parlé. Dans la même Lettre ,
ils lui apprirent la dernière tentative
.qu'ils dévoient faire pour écarter les
•ennemis. Il -y avoir dans Prolémaïs
x4in Chrétien déguifë qui eritroit au
<€onfeil ,-■& aVertilToit les Francs 4e
toutes les délibérations qu'on y prç-
noit , de l'état delà Place , fc des en-
droits foibles. Ceux-ci inftrufts par ce
. moyen dés projets ides Sarrazins , les
réndoient inutiles. En effet , le lende-
main, malgré tes efforts de Saladin
& de laigarnifon , ils gardèrent tous
leurs avantages.
Les François gagnèrent le même
four une tour où ils plantèrent leur
•étendard , & d où<i
s» ne. furent délb-
<gés quelefoir: fopeedirent dans cette
occafion Albéric Clément , Maréchal
^de France. Il s'étoit jette dans la ville
avec quelques autres Barons François
-qui n'étant point foutenus tfàteitt écra-
tt$ par le nombre* Cefttci la pre?
oi Sàlàdin. Liv. XI. tfi
mïére fois qu'il eit parlé dans l'Hif-
toire du Maréchal de France, comme j"cfxi*ï*.
d'un Officier confidérable.On fçait que
ion emploi fe bornoit anciennement
aux foins de l'écurie (bus le Connéta-
ble qui en étoit l'Intendant. On ignore
en quel tems ces deux Charges furent
créées* Le Connétable devint dans la
•fuite la première perfonne de l'Etat,
•Se le Maréchal commanda les armées
fous lui* Le premier de ces Officiers
a toujours été unique , & le fécond
l'a été long-tem*.
Nous remarquerons auffi que les
Ecrivains des Croifades racontent que
le Roi de France fut principalement
fécondé dans cette attaque, & pendant
tout le ftége de (es braves Ribauds %
{Ribaldi) qui firent des prodiges de
.valeur , c'étoient pour ainfi dire , le&
Mameluks de Philippe Augufte , une
milice particulière , compofée des jeu-
^nes gens les plus déterminés qu'on
employoit dans toutes les entreprifes
hardies , & qu'on faifoit toujours mon-,
ter les premiers à l'aflàut. Le liberti-
nage outré auquel ils fe livroient,
avilit leur gloire , Se rendit même
dans les tems postérieurs, leur nom
Bi>ij
2J2 HtSTO I R E
infâme, aînfi que leur emploi. Cm )
Hég. 587. Cependant les Habitans qui man-
quoient de nourriture & même ci eau »
les Chrétiens ayant détourné un ruif-
feau qui en conduifoit dans la ville ,
commencèrent à murmurer , & con-
tre Saladin qui ne les fecouroit pas ,
Se contre leurs Commandans qui les
laiftbient périr les uns après les autres.
. L'Emir Séiff-eddin Mefchtoub , le mê-
me qui avoit déjà fait des proportions
à Philippe Augufte , fut forcé par le
Peuple de venir encore négocier avec
ce Prince. Aux offres qu'il avoit déjà
faites , il ajouta la vraie Croix, pro-
mit d'engager le Sulthan à délivrer
r 1 m
ta) On donna le nom de Ribauds au* dé-
bauchés qui fréquentaient les mauvais lieux*'
Ils avoient un Chef qui prenoit le titre de
Roi des Ribauds : ce prétendu Monarque coh«
noiflbit de tous les jeux de dez , de brelan
& antres qu'on jouoit pendant les voyages de
la Cour : il levoit deux fols par femaine fur
tout ce qu'on appelloit alors Logis de lour-
dttulx 0» de femmes heur délier es : chaque
femme adultère lui devoit cinq fols. Le nom
de cet Officier fut fupprimé fous le régne de
Charles VIL Mais l'Office demeura , & ce
qu'on appelloit le Roi des Ribauds fut nom-
mé grandPrévôt de PHôtel-, charge qui fufr-
fifte encore actuellement;
&e Sâiabih. Liv.XI. 29}
plufieurs prifonniers>& à donner me- g
me une grofle fomme d'argent, & ne j. ê'ilfu
demanda pour les Citoyens, que là
vie & la liberté. » Je fuis votre mai* Boha-E^L
9itre, vous êtes mes efclaves, répôn-
» dit -Philippe: je difpofera» de vous
»» comme il me plaira. Si vous voulez
t> que je vous accorde la vie , il faut
»que Saladin me reftitue la croix du
»Chrift , & généralement tous les
» Chrétiens détenus en captivité, &
» toutes les villes prifes après la ba-
» taille de Tibériade. Sans cette con-
» dition , je vous ferai tous pafTer au 61
»i de Tépée. « Indigné de ce difcours,
Mefchtoub fortit en menaçant le Roi 9
Se alla infpirer aux Citoyens la rage
dont il étoit animé*
Le défefpoir fuppléaà leur foiblefle ,
& fit de ces Habitans autant de Héros :
ils oublièrent leurs maux , reprirent
une nouvelle ardeur, s'aflemblérent
dans la Place, promirent fur l'Alcoran,
de ne jamais fe rendre à des conditions
auffi dures, & écrivirent à Saladin la
Lettre fui vante: Nous avons tons juré ]
de ménrir & de ne quitter les armes que
far la mort. Aucun de nous ne verra
t ennemi dans la ville : elle ne fera prifi ,
Bbiij
ftoha-eddii*
2£4 Histoire
qm lorppte nom ferons tous extermines r
j.ftïjî; tille 4 notre dernière réfotmtien. T*chez>9
fi vous pouvez, , à écarter les InfideUes^
mais 4 Dku ne plaife que vous vous*
éfcdffut» à lettr faire des jommiffions pour'
nous conferver la vie: car notre fott e$
décidé; c'en cftfak.
Les effets répondirent à ces? promet
fes. Ces Habitans Te défendirent avec
tant de courage & de fucecs , que 1er
Chrétiens furpris , crurent que la viUe
avoit reçu du renfort , & envoyèrent
on efpion pour fçavok de combien de
Soldats ce fccouts étoit eompdfé. Sa-
ladin fit humainement tour ce qu'il
put pour fauver ces intrépides Muful*
ntans : il tomba même dans & pre-
mière maladie par fes fatigues & fes1
veilles. Pendant? plufieurs jours , ce ne
. fut quW coftftbat continuel : les ténè-
bres de la Huit ne purent fufpetfdre
cette fureur. On n'entendoit que les
cris de jal-aLiJlam & dé Diex es volt 9
{>ar4efquels les deux Partis exciroient
eur valeur. Le Sulchan confervant fort
cara&ére au milieu de ce carnage, vit
venir trois Chrétiens , députés par les
Rois de France & d'Angleterre , pour
demander de la neige , des fruits > des
be Sàiàdin. Liy. XI, 2j«{
poulets & d autres provifions : il en-
voya ces rafrakbiflemens aux deux j"**î*£
Princes, & alla les combattre*
CependantJes Francs fe repentirent
d'avoir rejette avec ttanede hauteur les-
propofitions des Affiégés , & Jeur fi-
rent fignifier qu'ils ctotent difpofés à
leur accorder une capitulation. Sciff-
eddin Mefchroub & Ëohareddfti Ka-
ra-cou(ch , les dera Emirs qui avoient
la principale autorité dans la Place »
ne pouvant contenir la populace • qui
tantôt montrait de l'opiniâtreté à fe
défendre, & tantôt tomboit dans l'ab-
batement ou fe répandait en murmu-
res féditieux , defcendirew dans le
camp des Chrétiens > invités par eux.'
Ils revinrent , (ans avoir ricivconclli.
Le lendemain ils allèrent continuer la
négociation entamée , & communi-
quèrent à SabuBn les articles dont on
paroiflbit convenir. Xfh homme par-
courut à la nage l'e^pac* oppofè à ce-
lui que les Francs occupoientr fur la
côte , arriva par un grand détour à
l'armée des Sarrazins , & parla ainfi :
au Sulthan : » Mefchtoub 8c Kara-
9» coufch m'ont chargé de vous dire,
> que méprifant la vie , mais craignant
Bbiiij
i$<> Histoihi
» d'offenfer le Dieu grand > en laifïânr
ï"c* iî*ï*. »» périr P^f le fer tant de Mufuiman*
» renfermés dans Ptoiémaïs , impor-
»tunés d'ailleurs par les plaintes du
91 Peuple» des femmes & des enfansV
» ils tout forcés de traiter avec les
i> Chrétiens , aux conditions que ces
» derniers accorderont aux habitons la
» liberté de forcir avec leurs meubles 6c
» leurs effets ; qu'on rendra la ville Se
» tout ce quelle contient -, que vous
» reftituerez la Croix d'Ida ( Jefus) ;
»»que vousdélivreiez quinze cens pri-
»(onniers de tous états & cent des
»plus conûdérables au choix des
» Francs , que vous leur payerez deux
» cens mille bezans , ( environ deux
» millions) dix mille en particulier au
» Marquis de Tyr , & quatre mille à
»» fes troupes , « c eft-à-dire , en tout
deux millions cent quarante mille
livres de notre monnoye.
Saladin trouvant ces proportions
eutrées, ordonna au même homme
d'aller annoncer aux Citoyens qu'il
ne ratifièrent jamais un pareil Traité.
£n même teins , il affembla tous fes
Emirs , pour prendre leurs avis dans
le$ circonftances préfentes. Tandis
\
1>E Sàlàdin. Ltv. XI. l$f
qu'on délibérait, on vit tout à coup,
les croix, les bannières des Francs ar- jî^jf',^
borées fa r les murailles & fur les Mof-
quées,& fuccédçr aux drapeaux noirs
& jaunes (a) qui ftottoient auparavant
LJHiftorien Arabe dépeint avec cha-
leur le défefpoir dont les Mufulmafis
furent agités à ce fpe&acle. Le Sul-
than décampa peu après 9 & alla Ce
pofter plus avant dans les terres , fur
la montagne de Khourouba qu'il avoir
déjà occupée.
Les Francs avoïent approuvé les ar-
ticles dont nous venons de parler : ils
ajoutèrent feulement que fi Satadin
ne confirmok pas cette capitulation ,
tous les habîtans demeurer/oient efcla-
▼es. Ayant enfermé ces derniers dans
un quartier féparé de la ville , ils en-
trèrent 3 Ptolemaïs le vendredi , dix-
feptiéme jourde Dgioumadiwel-Akher^
(ixiéme moisde Tannée Arabique, le
douze ou treize Juillet félon nos Hif-
11 ■ ' ■ ' ' m ■
(a) Le Drapeau noir étoit celui du Khalife
Abbaffide à qui les Suhhans demandoient
toujours l'inveûitûre de leurs Etats, fans les
reconnoîtrepour leur Souverain. Le drapeau
jaune étoit le drapeau particulier de Saladinr
ttute fa raaifon étoit vêtue de cette couleur.
*9$ Histoire
toriens , après un fiége d'environ trôt^
ans.
On aiïurequeSaladinaaroicconfenct.'
de rendre aux Chrétiens Jérufalem, Se
toutes les villes maritimes, s'ils euffenr
voulu joindre leurs armes aux fiennes ,
pour foumettre les fils de Nour-eddm,
révoltés contre lui , & que les Franc»;
ayant refufé par déifcateQe de contrac-
ter alliance avec leslnfidelles , ilétoir
parti pour la Méfopotàmie, long-
tems avant la prife de Ptolcmaïs-
Mais, i °. la poftérité de Nour-eddïti
ne fubfiftoit plus ; elle avok été éteinte-
par là mort de Saleh. 20.. Les Atabeks:
devenus vafkux & tributaires cte Sala>-
din vivoienten paix avec fui : il avoit
même alors dans ion armée , le fils &-
les troupes du Sulthan de Mouffoul.Les
mécontentemens particuliers d'Emack
eddin & de Sindgiarfchah , ne caufé-
rent aucun trouble dansées Provinces.
Son neveu Téki-eddin Omar , auquel
le §ulthan avoit donné les Etats d'un
Prince de Méfopotamie mort dans fon
camp , alla, prendre pofleflïon de ces
villes & ne trouva aucune oppofition.
30. Il neftpas vraifemblable que les
Croifcs euflenc fàcrifié , par un vain
*i Sàlàdin. Liv.XI. %pp
fcropule, l'objet de tous leurs vœux ,
lacquifition des lieux Saints & des H*s» ***•
ailles de la Paleftine, eux qu'on ac- hC'll'u
cufa fi fouvent de vendre aux Ihfidel- .
les les intérêts de la Religion. Enfin:
les Auteurs Arabes mieux inftruits ra-
content tous ces événemens, comme
nous les avons décrits.
Les Chrétiens purifièrent les Mos-
quées & les changèrent en Eglifes,
deftinée qu'elles avoient éprouvée plu-
fieurs fois : ils partagèrent entr'euxles
Jjrifonniers , les armes , les provisions,
'argent , les vaifleaux , les Temples Ôc
même les maifons. Les Anglois , les
François, les Templiers, les Hofpi-.
taliers , les Génois, les Pifans, les Vér ;
nitiens , les,Flama«6 , les Allemands ,
roue ce qui avoir eu parc à la conquê-
te, en eut au burin. Ptolémaïs eut
autant de maîtres qu'elle avoir eu d'en-
nemis. N ctoit-ce pas fournir pour
la fuite un alimçnt aux guerres civiles ?
Il paroit que dans cette diftribution,
on oublia les droits du feui Prince à
qui cette ville devoit appartenir , de
Lufignan Roi malheureux du Royau-
me de Judée.
Le même jour qu'on s'empara de
900 Histoire
Hc g Ptolémaïs, Richard fit à LéopoWDa^
3.C.* >\/i. ou Comte d'Autriche un affront qoi
lui devint bien funefte quelque tem£
après. Ce Léopold s'étoh rendu maî-
tre dune Tour , & y avojt élevé fa
bannière qui parut après la reddition
de la Place : le Roi d* Angleterre la fit
arracher & jetter dans un cloaque.
Les Allemands prirent les armes, pour
foutenir l'honneur de leur drapeau ;
mais le Duc d'Autriche calma leur fo-
reur, fans perdre le retient! ment de
cet outrage dont il fe vengea bien
cruellement dans la fuite.
Telle fut la fin de ce fiége à jamais
mémorable. Nos Lefteurs doivent
avoir remarqué , que fi on vouloir le
comparer au fiége de Trêve, lecmel a
* été rendu fi célèbre par la lubiimeima-
gftiation du père delà Poë'fie , on trou-
veroic des objets de éomparaifon dans
fa durée , dans les combats particu-
liers que les Héros fe liyroient les uns
aux autres, dans les difeours qu'ils
prononçoienr avant que de s'égorger f
dans ce grand nombre de Princes &
de Rois , dans ce mélange de Peuples
de tous les Pays , dans cette muraille
dont les Francs environnèrent letir
J.C. ll$U
de Sàlàdiw. Liv. XI. 301
camp à l'exemple des Grecs , dans la
forme, la manoeuvre des vaiffeaux & «%■ /_**•
l'ufage de les mettre à fec fur le riva,
ge , dans cette conjuration de l'Europe
entière contre une feule ville ; comme
autrefois la Grèce conjura la perte
d'Ilion ; enfin on trouverait un Ajax
dans les Marquis de Tyr , un Achille
implacable Se cruel dans Richard , un
Agamemnon dans Philippe - Augufte
qui étoit ceufé le Chef de tous ces Sou-
verains peu dociles , &c. Ceft ici la
vérité hiftorique qui rend la fable vrai-
femblable.
Ge triomphe coûta cher à l'Occi-
dent : il perdit Ces tréfors , ks forces %
fes défenfeurs. L'Afie étoit un gouffre
où tout alloit s'engloutir. Ce fiége
caufa la mort à un Empereur , à un
Duc de Souabe, à tant d'autres Princes,
£c penfa enlever au monde les Rois de
France Se d'Angleterre. ' Notre No-
blefle qui fe fignala pat mille exploits ,
regrette encore , parmi fes généreux
guerriers , Erard de Brienne , Jean de
Vendofme, les Comtes Thibaud de
Chartres &deBlois , Eftienne dfe San-
cerfe, Rotrou de Perche , Gilbert de
Tilliéres , Raoul Comte de Clermont,
302 Histoire
le Comte de Ponthieu , le Vicomte de
"et ùî i! Turenne , Adam grand Chambellan ,
* Albéric Clément Maréchal de France»
le Vicomte de Câftellane , Florent de
Hangeft , Gui de Châtillon , Jolcelin
de Montmorenci , Enguerrand de
Fiennes, Raoul de Hauterive, Hugues
de Noifi , Bernard de Saint Vaieri ,
Géoffroi de Brîére, Vaukierou Gaul-
tier de Moy ou de Mouy , Gui de
Dane , Anfelme de Montréal , Eudes
de Goneffè , Raoul de Fougères ,
Raynaud de Magny , Philippe Comte
de Flandre, Henri Comte de Bar,
GéofFroi Comte d'Eu , Raoul de Mar-
Je , Erard de Chacenai , Robert de
•Boves, le Vicomte de Châtelleraud ,
Ermengard d' Aps Grand-Maître des
Hofpitaliers , & tant d'autres donc
THiftoire n'a pas daigné conferver les
noms.
A peine les Chrétiens joui (ïbient-ils
de leurs conqu&es , qu'ils furent divi-
fés de nouveau. Richard s'arrogeant
une autorité fupréme fur tous ces Prin-
ces indépendans , s'attira la haine de
tous , & principalement dtr jeune Phi-
lippe-Augufte , dont l'argent, les bri-
ngues , les profilions du Roi d'Angle-
de Sàlàdin. Liv. XL 505
terre avoîenc anéanti le pouvoir. Le '
Monarque François réfolut enfin de ,Hlg* s8f'
quitter un pays où fa dignité etoit avi-
lie, 8c daller fe venger en Europe
des humiliations que fon Rival lui fai-
foit effuyer en Syrie. 11 étdît retombé
dans une maladie de langueur qui
'inettoit fa vie*%n danger , & qu'on
attqbuoit au tjpoifbn : Richard éroit
publiquement acculé de ce crime ,
peut-être avec auflt peu de raifon , que
d'entretenir . unç intelligence fecrette
avec les Sarrazins.Philippeabandonna
-donc 1 'aimée» 8c vint à Tyr fe difpofet
à .fon retour. Ce fut dans cette ville
TjueSaladin lui envoya une Amba(îàde
folemnelle , pour le complimenter &
«lui offrir des préfens dignes d'un grand
^Roi, félon lufagé de ce Mufulman,
'de donner même à fes ennemis, des
témoignages de fa magnificence.
" Le Prince François , avant que de
•partir , déclara Général de fe* troupes
qui t tfftëient eh Paleftine , c'eft-^dire, ..
: d'environ cinq cens Gendarmes &
: mille Fantaflïns , Eudes ou Hugues III
Duc de Bourgogne, céda au Marquis
de Tyr les prifonniers & la portion
de Pcolémaïs qui lui étoicnt échus en
J04 H 1 1 1 x.o i k i
parcage , laiflà à Raymond Prince
j?c.'iî*î* d'Antioche quelques Soldais. entrete-
nus à Tes dépens , & s'embarqua pour
l'Italie , fur quinze Galères avec le
refte de Tes François. 1J reçue félon la
la coutume de ce tems , les palmes de
fon pèlerinage, des mains du Pape
Céleftin III. Se Ce randit en France,
. cù il fe mit bientôt en état par fes foins
& parunefageadmini(tration,de pou-
voir attaquer avec avantage les Pro-
vinces de Richatd , malgré le ferment
qu'il avoir fait » de les refpe&er , de
les garantir de toute invafion , &
de fufpendre les aétes d'hofttlité, juf-
ques à l'arrivée du Roi d'Angle^
terre.
Dès que Philippe eut mis à la voile i
Richard devenu maître de l'armée, fie
ufage defapuiflànce, en forçant Con-
rad de lui renvoyer les prifonniers du
Roi de France* Le Marquis avoit re»
fufe d'obéir à des ordres auffi injuftes.
I/Anglois confifqua tout ce que.ee der-
nier pofledoie à Ptplémaïs , & alloit
lui enlever la ville de Tyr , fi le Duc
\ de Bourgogne n'eût interppfé fa mé-
diation , & perfuadé à Conrad de ren-
dre ces prifonniers , pour éviter de plus
grands maux. Cependant»
de Salàpin. Liv.XI. $05
Cependant , quoique Saladin n'ap-
prouvât pas la capitulation , il étoit wég. 587.
bien éloigné de iailler dans Tefclavaee, Jc "*•
tant de Mufulmans qui avoient dé-
fendu fi généreufement la gloire de
leur Nation. Il fît demander aux
Francs , quel tems ils avoient fixé pour
l'exécution du Traité. Ceux-ci répon-
dirent , que les conditions dévoient en
être remplies dans l'intervalle de trois
mois y que chaque mois , on payerait
une partie de la fomme convenue , Se
on délivrerait un certain nombre de
Chrétiens. Le Sulthan confentit à.
cette proportion. Le prerrçier terme
étant fur le point d'expirer , Richard
envoya trois Officiers pour recevoir
l'argent, les prifonniers & la Croix
qui devoit être livrée la première , &
que les Sarrazins traînoient avec eux,
comme un trophée de leur vi&oire.
A la vue de ce bois refpeâable, les
Députés fe profternérent & l'adorè-
rent en fe couvrant la tête de pouiliére*
Saladin fit dire à Richard que tout
étoit prêt ; mais , qu'en tenant fa pro-
mette , il falloir en même tems , 011
qu'on relâchât les Citoyens de Ptolér
mais , offrant de donner des otages
Tomt //• Ce
$c6 Histoire
ftour le refte de la fournie , ou qu'or»
ni garantît à lui-même par des ôta~
X l*U ges Chrétiens , la fureté des prifon-
niers Mahométans. Le Roi d'Angle-
terre paroiffam bleffé d'une précaution
d'autant plus fage, goe les exemples
Î>récédens & des avis lecrets rendoienc
ufpe&e la foi des Croifés > voulut
qu'on s'en rapportât à fa parole. Le
Sulthan perfifta dans fa prétention*
On s'opiniâtra de part & d'autre. Pen-
dant cette difpute , le premier terme
expira, fans qu'on eût rien conclu»
Alors Richard fit une a&ion que ce
fiécle tout pervers quilétoit, n'ofa
juftifier y aâion infâme dont le cou-
rage intrépide & lés grands exploits de
ce Prince n'ont pu effacer la honte.
Il fit fortir de la ville lesprifonniers
nuds , hommes & femmes , a» nom-
bre de cinq mille , les mains attachées
derrière le dos , n'ayant réfervé que le»
principaux Emirs dont il efpéroit avoir
une grotte raftçon , 8c conduiût dans
la plaine, ces innocentes vi&imes. Là
fes troupes fe jettérent fur elles , com-
*ne des animaux féroces, & les maC
facrérent à coups de fabre : on leur
ouvrit eafuitele ventre , pour en re-
de Sàlàdin. Liv. XI. 307
tirer le fiel qu'on dèftinoit àdes usages
de Médecine. Richard préfidbicà cette TH*s , \*7'
exécution barbare , & ne rougifloit pas
d'çxcïter la rage de fcs Anglflfo . +
Sa lad in campé à quelque diftan-
ce, avoit apperçule mouvement de*
Francs, &crut qu'ils venofeut lui li-
vrer bataille. II s'approchoit en bon
ordre, lorfque ceux-ci rentrèrent dans
Pcolémaïs. Son indignation fut égale
à fa furprife , lorfqu ri vit étendus fur
la poufltére tant de braves Mutfubx&us ,
lui qui en attaquant les. Places des
Chrétiens» avoir (buvetit récpmpenft
la valeur de ceux qui lui réfiftoient.
Il pouffa des cris de défefpoîr à cec
affreux fpeôade , maudit une Nation
impie & dénaturée , capable de telles
horreur?, fît trancher la tête dans fa
fureur f à plufieurs prifonniftrs Chré-
tiens , par le mafheureu* droit de re-
{ défailles , & alla cacher dans fa tente,
a douleur profonde & la colère dont /
il étoit animé*
tin fa Livre enziïmt*
Ccxj
SOMMAIRE
DU LIVRE DOUZIEME/
Bataille gagnée par Richard, fui-
tes de cette vicbire. Conrad
Marquis de Tyr veut fe liguer
avec Saladin contre le Roi
d'Angleterre , qui de fon coté
demande la paix au Sulthan.
Conïadeft aff affiné. Richard
fe met en marche pour aller af-
fliger Jérufalem. Il fe rend
maître d'une riche caravanne
& revient fur fes pas. Murmu-
res des Francs contre lui.Diffè-
rehs événcmens* Qn négocie ;
wfaitkpqiXf
'•"-LjEnrarf
HISTOIRE
DE
SALADIN
Sulthan d 'Egypte & de Syrie.
LIVRE DOUZIEME.
RICHARD y qui fçavoït fe
venger avec tant de cruauté/,
ne fçut pas profiter de la victoi-
re. Au lieu daller droit à Jérufalem,
tandis que les Mufulmans confternés
n'avoient pris aucune précaution pour
fauver cette ville, & que les Croifés
enhardis par lé fuccès brûloicnt d'im-
patience de délivrer le faint Sépulchre;
il pafla plus, d'un mois à relever les
ruines de Ptolémaïs , laifla refroidir le
Hég. %%7.
J. C, u>?i«
JfÔ HtSTOlRC
zélé des Chrétiens , & donna le tems
jH<£ii'i! aux Sarrazins de revenir de lenr ab-
bactement , & dappeller de nouveaux
*¥**'*« fecours : enfin il aflêmbla le confeil
B" de guerre , pour fçavoir où l'on por-
tetoît les premiers coups. Le Confeil
décida , qu'on iroit s'emparer des vil-
les maritimes , de Cxfarée , de Joppé ,
d'Afcalon, dont à la vérité; l'acqui-
fitionétbit non moins importante que
celle de Jérufâlem.
Les Francs partirent vers la fin
d'Août , le dix-nuit Redgeb , (a) paf-
férent le fleuve Bélus , & prirent leur
chemin au Midi : ils s'avançoient à pe-
tites journées , pour attendre la flotte
qui côtoyoit le rivage chargée des pro-
visions pour l'armée, Lufîgnan com-
mandoit à l'avant-garde > Richard au
centre^ & le Duc de Bourgagne à l'ar-
riére-garde. L'Infanterie placée aux
flancs , a archoit fi ferrée & avec tant
d'ordre , qu'elle formoit tout autour
une efpécede mur impénétrable. Cha*
]ue Fantaflîn avoit une cotte d'arme
île mailles , & une bonne cuira Te de
z
(a) Redgeb fepûéme jnois de Fanaée Arar
«e.
0E Saxadw. Liv. XII. Jlf
cuir qui amortHïoit les coups. On eu
vit qui «avoient jufqu à dix flèches at- "é£ **£m
tachées au dos , (ans perdre leurs rangs
ni interrompre leurs mouvemens. Un
trait 9 dit Boha-eddin , qui auroir perce
un Cavalier Sarrazin 8c Ton cheval ,
devenoitfanseffetcpntrecettearmure*
La cavalerie étoit entre les lignes Se
n'en fortoic que dans les combats. Aa
milieu de toute farmée , s'élevoit une
Jurande tour fi* un chariot , au haut de
aquelle flottoft l'étendard des Croi-
fés. Chaque Prince , chaque Seigneur
particulier avoit auflî fa bannière dé-
ployée. L'Auteur Arabe fèrable infi- Cont# 6v$,
nuer que les Chrétiens ne faifoietït Aib. j*fbœ>
point ufage , commîtes Mahométans, ^XS^di*.
de tambours , dje tymballes , ni decuiii. NeuU.
trompettes •, nuis qu'ils donnoient les8011**
ordres à la voix & par des ôgnaux,
en allumant des feux. Un autre corps
d'Infanterie deftiné à remplacer les
Fantaflins tués ou trop fatigués , mar-
choit à l'Occident fur le bord de la
mer , hors de la portée des traits.
Saladin croit occupé à diftribuer des
chevaux à la place de ceux qu'on avoir
perdus pendant lefiége , & àrécom-
penfer les Officiers & les Soldats qui
$11 HlSTOIJLÉ
s'croicnt principalement diftirtgnés »
J^V'Morfqail apprit la réfolution &Tedé-
pan des Francs. Il ordonna dans 1 mi-
tant à fet troupes de décamper. Elle»
obéirent avec tant de précipitation ,
quelles abandonnèrent une partie des
bagages Scdesprovifions > ce qui caufa
peu après une grande famine. On fui*
vit les Chrétiens, & on les harcela
pendant toute la route, (ans avoir pu
ni les rompre, ni les attirer au com-
bat. Six jours après ils arrivèrent à
Céfarée , qu'ils trouvèrent déferre. Là
Richard eut avec Malek Adel une
conférence inutile > parce qu'il ne de*
mandoit rien moins que Jérufalem Se
toute la Paleftine. Enfin on s'avança
dans la plaine d'Arfbph , (*) où Sa-
ladin ayant devancé les Francs & fer-
mé tous les paflages , engagea une ba-
taille générale avec plus d'ardeur que
de prudence. Ses troupes éroient fati-
guées Se affaiblies par la difette : celles
(*) Arfbph , Orfouf , on Bt auffi Àrfouf ,
Orfouf, Arfiif , Arzur, Affur, petite vâte à
douze nulles de Ramla , à fut de Joppé :
elle eft détruite & il n'y a plus aucun habi-
V*y$***fi liv. 7. f*%e 36.
des
}• C ujv
m Saladïk. Lir.X!lI. ji j
<b$ ennemis foumifes à une /evere '
clHcipline & ayant pris du repos , sîé- H*g- 5*7 •
toient polices avancageufernent Gît des .
hauteurs.
Richard ne pouvant éviter le com-
bat , met à la droite Jacques d'Ave£
ne, le Duc de Bourgogne à la gau-
che, & fe place au centre. D'abord les
Archers lancent leurs flèches de part
& d'autre , cette efpécé d'efcarmouclie
dure plufiéurs heures. Pendant cet in-
tervalle , le Sulthan court entre les
deux armées expofé à tous les traits ,
& fuivi feulement de deux jeunes.
Ecuyers qui conduifenç chacun un
cheval.de felle : il exhorte , il anime»
itpreffe Tes troupes: les Soldats lui ré-
pondent par les. cris de Allah-acbar.
1 Cependant l'Infanterie Chrétienne
fjùi jufques là avoit fourenu l'effort *
des Infidelles , s'ouvre tout à coup. La
Cavalerie fort avec impétuofité, là
lance en arrêt ; les deux armées Ce
choquent , fe ferrent ; les Mufuhnans .
ibut vainqueurs aux deux ailes : Jac-
ques d'Avefne , ce guerrier célèbre ,
tombe dès les premiers coups : ù. mort
fait reculer fes Soldats privés de leur
Chef. Richard combat dans le cen-
têmll. .Dd .
.4-
H*.
ItCi
514 Histoire
tre , met les ennemis en déroute* Se
f*7> vient ranimer Tes ailes chancelâmes.
'*'' Saladin yole au feçours de la droite :
la gauche affbiblie par Ton abfence ,
plie. Tous les efforts fe réunifient con-
tre la droite , qui accablée par le nom-
bre , prend la fuite , & abandonne la
viâoire aux Chrétiens. Le Sulthan
défefpéré refte feul avec fept Mame-
luks , veut en vain arrêter les foyards ,
paffe fur les corps expirans de fes Sol-
dats bieflés , rallie quelques troupes ,
revient à la charge, & fe voit de nou-
veau abandonné. On dit que dans
cette journée , Richard & Saladin s'é- .
tant rencontrés dans la mêlée, s'at-
taquèrent l'un & l'autre , & que le
Roi d'Angleterre eut l'honneur de ren-
verfer le Sulthan de cheval.
Quoi qu'il en foit de ce fait , il eft
certain que ces deux Princes firent
dans cette occasion des prodiges de va-
leur ; que Saladin fut entièrement dé-
fait , & perdit près de vingt mille hom- v !
mes. Après cette a&ion glorieufe , Ri- !
chard s approcha de Joppé où il entra I
fans réfiftance , & fit repofer fes trou- j
pes de leurs fatigues , tandis que le
Sulthan raflèmbloit les débris épars de- I
fon armée» |
de Sàlàbin. Liv. XII. 3 r 5
Le Roi d'Angleterre réfolut d'ajou-
ter de nouvelles fortifications à celles H*g. f*7-
de Joppé , d'aller enfuite s'emparer J^11*1'
d'Afcalon , une des clefs de la Pales-
tine du côté de l'Egypte, & de faire
de ces deux villes deux boulevards pour
les Chrétiens de Syrie 5 mais le Sulthan
le prévint : il l'avoit fuivi , & campoit
aux environs de Ramla : il apprit par
des transfuges le deflêin de Richard ,
& craignit en effet, que les Francs
maîtres d'Afcalon, ne luifermaflent la
communication de l'Egypte. Il vou-
lut jétter de bonnes troupes dans cette
place pour la défendre > mais les Emirs
lui repréfentérent qu'après tous les
maux qu'on avoit foufferts à ProJé-
maïs, & le maffacre de tant de Mu-
fulmans , les Soldats auraient de la
peine à fe renfermer dans une autre
ville , qu'il valoit mieux tenir fa cam-
pagne , obferver l'ennemi , & réunir
toutes les forces de l'Iflamifme , pour .
le traverfer dans fes en treprifei , & le ;
détruire peu à peu par dé petits com- *
bats ; que la feule ville qu'on devoir
fortifier & garnir d'une nombreufe
tarnifon étoit Jérufalem qui feroit
jeatôc aflîégée $ que > fi on affbihlif-
Ddij
jitf. Histoire
foie l'armée en ladivifant, on côurolt
jVl; i i •?'. ri^clue ^ ne pouvoir jamais réparer
••« • les pertes qu'on avoir faites ; que pour
Afcalon & les autres Places voifines,
au lieu d'y mettre de nouvelles trou-
pes, il falLoit en faire fortir les Sol-
dats & les Habitans,& les démolir
pour ôrer aux Chrétiens l'efpérance de
s'y retrancher , & qu'on pourroit d'ail-
leurs en relever les murailles & les
maifons, après le- départ des Croi-
fés.
SalacHn entraîné à ce dernier avis»
ordonna à fon frère Adel d'amufer
Rjchard par de feintes négociations 9
afin de lui cacher la réfolution qu'on
avoir prife , & de donner aux Tur-
komansdont on avoit follîcité les fe~
cours, le tems d'arriver, & prit la
route d' Afcalon avec un gros détache-
ment de cavalerie. Dès qu'il fut acri- [
vç à la vue de cette Place, il frémit
flbtoueda. du deflein qu'il alloit exécuter, Afca-
lon que* les Ara&es appelloient l'é-
paufe de la Syrie , étoit grande , ri-
che , peuplée, bien bâtie & aflez fortç.
x Le Sulthan campa dans le voifinage.
U fut agité pendant toute la nuit , &
ne prit aucun repos. Le lendemain
bt S^LADIH. L IV. XII. J17
étant monté à cheval, il continuoit (à
marche , lorfque jettant les yeux fur £*£ f**
cette ville , il s'arrêta , gémit & garda
quelque rems un morne filence: il die
énfuite aux Officiers; qui l'envirort.
noient: uMes enfans me font très-»
*> chers , cependant j'aimerois mieux
s» les perdre que d oter une feule pierre
*de cette ville ; mais, fî le bien de la
n Religion Se de mes Peuples exige ce
ufacrifice , je le fais fans regret. * v
Après avoir proféré ces paroles > il in-
terrogea les Imams & les Cadhis , fi la
ruine d'Âfcalon étoit abfolument né-
«ffâire. Les Prêtres Se les Doâeurs de
la Loi répondirent affirmativement^
»I1 faut donc obéir aux ordres du
jfCiel , dit Saladin: «il fit fîgnifiet
dans l'inftant aux Citoyens devuidet
la place. Ces malheureux vinrent fe
jetter a fes pie<!s , & demander grâce
pour leur Patrie. Le Sulthan fut atten-
dri de leur fort , & ne put l'adoucir :
il leur fitdre(Ter des tentes où ils fe
rendirent avec leur famille défolée Se
une partie de leurs effets.
. Enfuke cm travailla fans relâche
pendant plufieurs jours à renverfer fes
murailles; mais comme on perdoit
Ddiij
$iS • HrsToitK
beaucoup de tems fans avancer cet
Hég. 58> ouvrage on mit le feu partout ,&
j. c: 11^1. ja ^njn^ con fuma cette ville aupara-
vant fi floriflante. Saladid donnoh
l'exemple & portoit comme un (impie
Soldat , des matières combpftibles.
Une tour très élevée & placée fur la
mer ne put être ni brûlée entière-
«ment , ni démolie, à caufe de (à for-
ce. Le Suhhan alla vifiter Ramla Se
jLidda. Chacune de ces villes avoit une
forterefle dent les Chrétiens pou voient
fe rendre maures ; il les fit détruire
également, ainfique la Citadelle de
Nitroun , rejoignit Ton armée , la quit-
ta pour aller examiner la firuation de
Jérufalem , y fit entrer des Soldats ,
des armes , des : provisions , ordonna
quelques ouvrages & revint dans fon
camp/
Dans le tems que les Mufulmans
demoliflbient les villes d'Afcalon , d$
Ranjla, de Lidda , de Nitroun , les
Chrétiens réparoient & fotrifioient
Joppé & Cétarée. Dans cette éfpécê
de repos , Richard par Ton impru*
dence , penfa perdre avec la vie ou la
liberté, le fruit de toutes fes conque*
tes. Uu jour ayant chaffé jufques au*
• e Sàdàbun. L iv. XII. jty
près de Ramla où campoient les enne-
mis, il fe coucha accablé de fatigues j^f^î
au pied d'un arbre , & s'endormit. À *
peine eut-il fermé les yeux , qu'il fut
réveillé par les cris du peu de person-
nes qui l'accompagnaient. En effet, H Bann-
ie vit environné par une* multitude de
Sarrazins. Richard monte à cheval»
& fe défend avec fa petite troupe ;
mais ilalloit, malgré fa bravoure»
fuccomber fous le nombre ; lorfque
Guillaume de Porcellets (4) Gentil-
homme Provençal qui cômbattoit à
fes côtés , effrayé du danger de ce
Prince , s'écrie en Langue Arabe , Ji
fuis le foi > épargne*, m* vie , & court
dans la plaine. Tous les Sarrazins fe
réufiiiîent contre lui , tous veulent
nvoij: part à la .gloire de le faire pri-
fonnier : on le <pourfuit , tandis que
Richard fe fauve à Joppé. Ce 'brave
Officier fat prfc & iamené à Sahidin,
oui lomdele punir, donna de grands
éloges à dette générosité.
"' ' » > ■■ . . •.,..;>»>...... —
{a) Guillêltriusdê Purcell/s ou deforeelliU
Je ne fçais pourquoi Rapin de Thoiras a tra-
duit ce mot par celui de D*ffri*ux. La fa-
mille de Porcellets fubfifte en 'Provence &
n'a point-dégénéré*
• d 111;
3*0 H i s Tcrinrr
Cependant Conrad vivement irriter
J^cVi^. contre ''e &°l d'Angleterre qui lui a voit
ravi Çx part du butin fait à Ptolémaïs*
& qui le menaçoit de lui enlever Tyrr
réfoluc de fe venger de ce* outrages
d'une manière éclatante , en Ralliant
avec les Infidelles r& contre Richard
fon ennemi , & contre les Francs qu'if
accufoh d'ingratitude. It promit au
Sukhaa de faire la guerre a ces der*
niers , & de fur prendre même Proie-
maîsyfi on lui cédoit Bérouc 8c Sf±
don » & qu'on le défendît courre le*
forces des Croifés, Saladm ayant lieir
de fe défier de la bonne foi des Chré-
tiens , après tant d'infra&îons, répon-
dit qu'il acceptait la proposition d<*
Marquis, mais qu'avant que de M ft-
vrer ces deux Places , it exigeait; que-
ce Prince donnât la liberté aux prifon*
*iers Mahométans , & fe déclarât ou-
vertement contre les Francs, La dé-
marche de Conrad ne put être aflëi
fecrette, pour que Richard n'en fût
pas inftnm : il craignit les fuites dV
ne telte alliance , partit la nuit pour
Ptolémaïs oiï il mit une bonne garni-
fon pour la garantir de toute furprife*
& députa quelques Officiers au~Ma&t
JfrB Sx LAD IN. ttv,ÏÏÏ. $tf
^fuis , pour le ramener à l'intérêt com-
mun. Conrad & Richard feignirent **£ ***£
de fe réconcilier te gardèrent toute
leur haine. Le demie* revint a Joppé*
& travailla férieuferHem à conclure la
paix avec les Sarrazins , afi» de pr&-
venir les deffeins funeftes du Marquis*
qu'il étoit bien réfolu de punir de cette
rrahifoti.
Il avoît déjà çxx plufieuitf conféra**
ces avec Adet : il envoya cetee fois art
Sulthan un Ambafladeur a*e* une*
Lettre dans laquelle après avoir d&~
pioré les malheur*de la guerre , il pro~
pofoir trois condition» auxquelles i$
confencoir de foire ter paix. » Vou*
irnous xeftituere* , «Kfote-il,. leseon^
y* trées fowées . en- deçà du Jottf dahr,
*îl ne nous eff pas permis de vous cé~
*der Jérûfalem cette vilfe feinte oiï
* fe font actomplitles myftére&de no-
*tre Religion , Se que tousies* Chrc*
w tiens çmt fait vœu* de délivrer a»
» prix de leur fang- Quant à fa» croix r
» que vous regardez comme un bote
*vil & méprifable » & pour laquelle
w nous avons tant de vénération: , vou* ,
»devez auflî nous l'a rendre. »Le$
»pays que vous revendiquez, cégootr
5 ri • Histoire .
Hég. ■çS7##dit Saladin , ne vous ont jamais ap-
j. cvn<?i .* partenu : Dieu ne vous a voit pas per-
-•> mis d'y placer une feule pierre. Vous
,» les avez envahis par la fbibleffè des
^Mufulmans nos prédécefleurs. J&-
»rufalem n'eft pas moins réputée ville
»(ainte parmi nous que parmi vous.
»Ceft delà que notre Prophète eft
» monté miraculeufement au Ciel ,
» pendant une nuit : (a) c*éft là que les
to Anges ont coutume de saflembler.
*»Nous ne pourrions (ans ctime vous
» abandonner cette ville refpe&able.
» Enfin votre croix eft pour nous un
» objet de fcandale : elle outrage &
«9» déshonore la Divinité, & nous ne
» ta rendrons Jamais à votre culte , s'il
m ne refaite <de ce facrifice un grand
» bien pour Mflamifme. «
Les propositions de Richard ayant
donc' été rejettées , ce Prince en fit de
nouvelles, & fçut mêmfe intéïeflTer à
* la ôondlufion de là paix -dû fi Ton
*eut fçut tromper Malefc£KA<!el dont
AbouUFcd. \\ flattoit l'ambition. En effet, folt
[a) Le Mérage.,< Mirage ou TAfcenfioii
de Mahomet, r oyez la mte du Livre vin.
t*g* **. • * ' •
»e Saladin. L iv. XII. 51J
qu il agît de bonne foi , foit qu'il cher-
chât à gagner du tems,à fe faire un ap- f^'J^
pui du frère de Saladin , & à opppfer * ^
des obftacles à la négociation enta-
mée par le Marquis de Tyr , il offrît
4en mariage au Prince Muiulman , (a
fœur Jeanne , veuve de Guillaume
Roi de Sicile , laquelle par une defti* m
née étrange , après avoir paffè une*
partie de la vie fur le trône, l'autre
dans une prifon , pen(a devenir Sut-
thanedePaléftine. Il demandoit que
Saladin cédât à Malêk-Adel , en fa-
veur de cette union , tout ce* que les
Mahométans poffédoient du Royau-
me de Judée , Se promettait de faire
céder aux Francs rout ce qu'ils en re-
tenoient encore. Les deux époux au-
roient gouverné la Paleftine fous les
titres de Roi & de Reine de Jérufa-
•lem. Les Chrétiens & les Mufulmarrs
auroient partagé entr'eu* toutes les
villes, & vécu en bonne intelligence. ~
El- Aiti trouva ce projet fi avantageux
pouc*fa;fortunie, qu'il vint à bout de
le faire approuver par fon frère , quoi-
que le Srilthan traitât hautement cette
idée de chimère
Mais lorfqu on en vint à Texécu^
£*4 ttîSTÙltt
'tion,on rencontra plus de difficile
Hé* 587. qu'on n'inaftginoit. La Princefle indl-
l4CtlÈ9i gnéeprdtefla cjaelle ne recevrait ja-
mais dans (on lit un Iofidette. Ri-
chard tâchai de Pappaifer , en» lui fai-
sant efpéttr qu'Âdel embraSeroit là
Religiort Chrétienne. Cette ratfon ne
fut calmer les murmures* des Prçtre*
* qui fe récrièrent contre: une telle al-
liance f& déclarèrent qu*avaftt que de
la~conclure , il Falloit confulter le Pa-
pe , fans le confememeitt duquel une
veuve félon l'otage de ce teiris * ne
jtouvoïrfe renafariet. Le Roi d* Angle*
terre fit dire à Saladin , qu il aïloit ert-
toyer a Rome j que {île Pontife ne
blâmoit pas cette urtion , ctt garderok
tes conditions arrêtées* & que fil*
féponfe n'étoït pas favorable, il don*
neroit au* mêmes conditions à Ma*
Jëlc-el-Âdéf oneaatre de fe$ feeurs eo-
core filïe, parce que les Papes qui fe
mêlaient du mariage des veuves s nV
voient aucun droit fur celui des filles.
De fon coté Cortradprelfoit la cor*
clufïon du Traité partîaiïïer qull vout
loit former avec Saladin, Sort deflein
n'étoît plus fi coupable: car s'il unif-
foie Ces armes avec celles des Sacra*
f>c Saladin. Liv.XII. 515
«rns ?cc n'étoit que contre Richard fon J
-ennemi déclaré; & le Duc de Bour- "^j'îî
f;ognè , les Templiers , les Allemands,
es Génois favorisant en fecret cette
négociation , la cendoient moins
odieufè. Le Prince de Sidon exerça
lui-même les fonftions d'Ambaffa-
deur du Marquis de Tyr, auprès du
Siilthan, tandis que le-Prioce Hon- '*
froi du Thoroii rcmpliflbk le niême
emploi au nom du Roi d'Angleterre.
Saladin nourriflok cette divifion , erç
donnant des efpérances flatteufes au*
deux Partis qui Te dctrui&knt l'un
l'autre.
Cependant xm petfdoît inutilement
il» tems précieux. Les Croifés occupés x
Î>ar Richard à rebâtir Joppé & Afca-
ons murmuroient contre ce Prince, \
Ils fe foumettoient avec peine à ce*
travaux , & prétendaient n'être point
venus dans la Paleftiae 9 pour creufer
des foffés & élever des murailles /mais ;
pour combattre les Infidelles , & déli-
vrer les lieux faints. Plufieucs reparte-
rent la mer , d'autres allèrent à Tyr ;
tous demandoient qu'on les menât à
Jérufalem. Richard forcé par leurs cris
le mit enfin en campagne , & vint juf-
ques à Ram la, comrrçe s'il eut eu envie
$i6 Histoire
d afltéger la ville fainte : mais ayant
jSiÎJ: affemblé le Confeil deguerre , les Of-
' ficiers repréfentérent que la faifon
étoit trop avancée pour une celle en-
treprifè -, que Saladin ayant dévaftc
tout le pays , on trouverait difficile-
ment de la fubûftânce ; que Jcrufalera
étoit munie de bonnes troupes & de
•provifions , qu'il éroit téméraire d'aï*
1er l'attaquer pendant l'hyver tà la vue
d'une armé£ nombreufe; qu'il valoit
mieux continuer les ouvrages de Jop-
pé 6c d'Afcalon , pour en faire deux
places fortes , & remettre au printems
prochain le fiége de la fainte Cité.
- Richard parut céder à cet avis , 8c
revint fur fes pas. Alors lés déferrions
furent encore plus fréquentes. Les
Chrétiens fe di (perlèrent. Les uns al-
lèrent avec le Roi à Afcalon, d'autres
à Joppé , d'autres à Ptolémaïs , & plu-
fieurs à Tyr. La difcor'de qui régnoit
parmi eux , ralluma fes fureurs. Les
Génois & lesPifans eurent enfemble
un démêlé très-vif: ils en vinrent aux
mains dans la plaine de Ptolémaïs.
Conrad prit le parti des premiers , les
féconds appellérent à leur fecours le
Roi d'Angleterre qui termina ctf diffé*
rend , en forçant par fon approche les
de Saiaoik. Lîv.XII. 527
Génois&leMarquisdeferéfugietàTyr. "!??B^r
Cependant Saladin n ayant puis j,u,l^
rien à craindre des Chrétiens , aflîgna
des quartiers d'hyver pour fes troupes.
Avant que d'en féparer les Chefs , il
tint un Divan , pour fçavoir avec le-
quel des deux Princes de Conrad ou
de Richard , on feroit alliance. Son :
avis étoit de les amufer l'un & l'autre ,
&xle n'accorder Ja paix à aucun. » Cet- .
» te paix , difoit-il , ne feca point ob-
n fervée par nos Ennemie , & fi je
» viens à mourir, ils envahiront de
» nouveau la Paleftine. Leurs forces
» fe détruisent d'elles-mêmes, bientôt
»i!s ne feront plus en état de nous ré-
» fifter. L'iflamifme pourra déformais
>»a(Tembier difficilement une armée
it auffi puiflante que la nôtre. Profit .
>» tons de l'occafion. Ne quittons point
»Les armes que nous -n'ayons chaffé
» entièrement les Francs de la Syrie. «
Les Emirs opinèrent différemment Boha-si.
Ils bbfervérent que les Soldats fati-
gués d'une guerre aufïï longue , brû-
loîenç d'impatience de retourner dans
leur Patrie , & ne fervoient plus avec •
le même zélé* qu une terreur panique
s'étoit emparée de leur efprit$ qu'il.
Ç2« HliTOI*.*
' falloit leur procurer un repos après le?
iHtt *'* W*^ *'s f°upiro^eilt depuis iongtems,
' Âf"qac les principaux Officiers étoient
morts, que la plupart des villes étoient
défertes, que l'Eut étoit épuifé d'ar-
gent > & qu'on fourniront difficilement
au frais d'une nouvelle Campagne;
.que le Traité propofé par Conrad étoit
impraticable ; que jamais les Muful-
mans &: les Chrétiens n'agiroient de
. concert & de bonne foi, & que dans le
choix , on devoir conclure avec Ri- •
chard $ qu'on pourroh cependant com-
prendre dans les articles , les intérêts
du Marquis de Tyr & même ceux du
Prince d'Antiocne , & parvenir par
ce moyen à une paix générale.
Saladin ayant congédie fon armée ,
fe rendit à Jéruiàlem , emmenantavec
lui les deux Ambafladeurs. Pour fe
conformer à l'opinion de /on Divan #
il eut placeurs conférences avec Hon-
froi du Thoron ; mais ne pouvant rien
terminer, avec lui, parce que le Rot
d'Angleterre n'avoir point encore reçu
la réponfe du Pape , & varioit tous les
jours dans les conditions de la paix ,
le Sutthan menacé d'une guerre étran-
gère , do^it nous parlerons dans le Li-
vre
fit Saladih» Lxv. XII, ji9
*re fcivant , conçlud enfin avec le
Marquis de Tyn » Oaftipula, qu'on jH%Vtj£
» rendroit au Prince de Sidon , fâ
^Principauté, aux Templiers &ç aux
» Hofpitalicrs les fonerefles qu'ils
apofledoient précédemment ; qu'on
m abandonnerait à Conrad les villes
tiqull enleveroit aux Chrétiens % que fi
pies Mufulmans laidoient dans ces
*» conquêtes , ils ne reeten<£r oient pour
» eux que le butin ; enfin , qu'Afcalon
» n'appartiendrait à aucun des deux
» Partis & feroit détruite.
Ce Traité fut confirmé de part &
d'autre par la foi du ferment ; mais
«ne mort violenre prjva Conrad: des
avantages qu'il alloît en retirer» Ce
Prince avoir dîné cher l'Evêque de
Beauvais : il Rit attaqué en fortant par
deux affaffins qui retendirent fur la
Place. Les cris de Pindignation publir
que acculèrent Richard de ce meurtre,
ïur touc,,loffqu*in>médiatemeBt après >
il s'empara de Ty r , & fit époufer à font
neveu le Comte de Champagne , Ifa_
belle veuve du Marquis. (*) En efFet f
(a) Conrad' fut aflaffiné le Mardi ; & le jeu*
dHtichard maria ïfâbelle avec le Comte Se
Cfiampagne.
Tom IL Et
3JO HfSTOTH!
la maiigmté des hommes croit auteur
Hég. ^g do crime, celui à<jai le cri me eft utile.
j-ci^i-L'Hiftorien Arabe dit, que ces deux
fcélerats avouèrent dans les tourmens,
qu'ils avoient été fufcités par le Roi
d'Angleterre. Ce (ait eft contredit pat
les Ecrivains Anglois, qui prérendent
2 ne le Vieux de la Montagne avoit
ikàflàflïner le Marquis, pour. ven-
ger uhe querelle particulière. On Ht
dan&les aâes publics , (a) une Lettre
de ce Chef de barbares dans laquelle
il juftifie Richard; mais cette Lettre,
enrr'autrês cara&éres de fuppofkion f
porte la datte du Pontificat du Pape.
Certainement le Schéik qui fçavoît à
peine , s'il exiftoît un Pape dans te
monde, ne devoit pas fçàvoir le nom
de ce f*ontife,encore nioins Vannée de
ion exaltation. Quoi qu'il en (bit , Rî-
ebard ne put étouffer ces foupçons in ju-
ftemk fa gloirél'Le brilît le répandit
jnême alors qui! âwk acheté à prix
d*argetà , du vieux delà montagne ; la
mort de Philippe Àugufte;8rque dfau*
très aflkffiu* partis de la Pàleftine al-
leient en Europe confommer cet atten-
(a) Totn. i. p. 71.
de Sàiàbin, L iv. XII. 531
tôt horrible. La France fut allarmée à
cette fauffe nouvelle : Philippe porta /^"^ÎJj
toujours en main depuis une grotte
tnafliie, pour* défendre (a perfonne:
On établit une garde de Sergens d'ar-
mes 5 & c êft ici, là première origine
d'une garde pour nos Rois de la troi*
fiémerace.
• La mort de Com? ad changea la face
des affaires. Richard, derenu maître
abfolu des Francs exerça d'abord fon
autorité fans contradiction. La Palefc
due lui obéit en murmurant. Lufi-
gnan dont les droits étoiènfc méprifés ;
le Duc de Bourgogne mécontent du
Roi d'Angleterre , le Due ou le Comte
d'Autriche plufieurS fois outragé par
ce Moiurque, tes Barons Syriens i
les Templiers, les Génois , tes Aile-»
maftds, tout fe fournit. Honfroi du
Thoron mime continuoit à remplir
les fondions d'Aitibafladeur \ quoi-
qu'on lui enlevât tine féconde fois , fa
femme la Princeffe Rabelle dent il
étoït indigne pat fa fbifelefîe , & qui
éroit indigne dé lui par ce? maria-
ges indécens Se fans doute crimi-
nels. Richard pfrôfitaw dé t'étoiine-
lîientoù la Syrifc-étôfe plongée & 4à
33» .* HitToiftf -
h^,,c58i la di fpeifo» des troupes Mufulmatfesy
j.c. u^t. va invertir Daroum Place force for le$
confins de la Palettise du côté de l'E-
gypte % la prend daflaut , (aie pafler une
partie des babitans au fil de Tépée*
jette les autres dans des cachots , fe
rend maître de Magdal voiûne de
Joppé , & de plufieurs autres forteref-
fes ; & ayant râtfemblé tous le Francs ,
il s'avance jufques à Beth-novis oïl
Bethenople , Heu éloigne d'une joug-
née de Jérufalem , feignant, de youloic
afliéger cette ville > & Faifànt jouer de*
xefforts fecrets pour détourner cette
expédition*
Dans le tems qu'A cirapoit à cet en*
droit, des Arabes Bédouias, traîtres à
f Ifl^mifme & fidelfesà leurs fculs in-
térêts, l'avertirent que. la cacavanne
d'Egypte doit arriver le même jour à»
peu de diftanee, & lui indiquent le*
, uïoyensdelafurprendred^osrefpéran-
ce d'avoir part au butin; Richard fedé»
guife en BédafJii^mairche,pendâat le fi-
lence de la nuit avec ce* Arabes ,ac-
compagnéde quelquesOfficiers affidés*
rencontre la caravanne , en parcoure
tous tes rangs , à la faveur de fon tca^
teûiiTeiçieiu & de l'obfourité», rejoint
*s Sàlàdih. Liv.XÏÏ. JJJ
41a hâte Ton armée» fait monter à'
cheval faCavalerie légére*& vient fon* £*?• j£*
, dre à la pointe 4» jour , fur cette muK
titude de marchands qui foyent &£
abandonnent leucs rîcheffes. Cette ac-
tion lui valut autant qu'une conquête s
il prit trois mille chameaux char-'
gés de t refors de toute efpëce , fix cens;
chevaux & fit trois cens prifonniers £ .
il renyra ve*s le midi dans Ton camp
en triomphe,, traînant après lui cette
proye imraenfe-
Sahadin ayant appris 1 aflaiïînar dtë
Marquis de Tyr & les premières in»-
curfions de Richard ^ dépêcha des cour-
tiers dans les Provinces , pour hâter le*
retour de fes troupes , Se mit en cam-*
pagne celles qui lui reftoient. Il1 pré-
voyoit bien que les Francs réuniflanC
leurs forces, viendroient attaquer Jé-
rufalem : il demeura dans cette ville*
pour la préparer à une vigpureufe dé-
fend; if ruina tous les environs, en-r
leva les vivres &-. les habitant de la>
campagne ^corrompit tes • eaux de^
citernes & des puits , les feules qu'on;
trouvât dans ce Pays ftérile , plaça des
corps Âe garde îdans les défilés & fuc
les montagnes , & répara les fortifica^
i
5J4 H'istoih»
rions. Cependant les Généraux aver*
j. cf i\9x\ tis du péril arrivoient fucceflïvemenr
jwa. de leur quartier dityter. Lès Francs
ayant ravagé Pancienne Provinée des
Philiftins s'avancèrent vers Jérusa-
lem.
Dans ce danger preflant le Sulthan
conduisit tous les Emirs dans la grande
•mofquée, où après les prières ordinai-
res , il les fit jurer fur la pierre de Ja-
cob , de ne point abandonner Ut eau*
fe de la Religion , leur citant l'exemple
de Mahomet qui dans une Semblable
circonftance,èxigea le même ferment.
*id. Après cette cérémonie , il les aflem-
bla dans (on Divan. Lorfque tous eu-
rent pris leurs Places, Saladin garda
quelque tems le Silerice , & dk en-
hiice. » Vous êtes aujourd'hui le feul
»i boulevard de riflamifme. Le fort dès
»MufuImanst leurs biens , lettt vie ,•
"leur liberté, leurs femmes, leurs
rt'enfahs, tout eft entre vos mains.
*i*Vous allez décider du falut de TEnr-
9i pire & de la Religion. Si vous mon*'
» trez de la foiblefle , ce qu'à Dieu ne
*ip!aife , notre ennemi engloutira
i» fous fa puiffance , ces Pays que vous
>i vous 0 tes chargé de défendre au prix
#
De Saladik. L iv. XII. 5)5
t* de votre fang. Ce feroit en vain que
tt nous aurions épuifé nos rréfors pour "^ { * J*
t> cette fainte entreprife- Toutes les
*> Provinces de riflamifme mettent en
•wons leur efpoir 8c attendent ' leur
m&aué de vôtre bravoure. «
A peine eut-il pix>noncé*ces mots ,
que Mefchtoub > ce Général célèbre
•qui avoit footenu !e fiége de Ptolé-
maïs, & sétok récemment fauve de
prifon, {4) "feîeva & dit : » Sulthan ,
#> tu es notre maître & nous fofrîmes
ti cous tes efclavcs : nourris , entrete-
•> nus , enrichis par tes bienfaits , tirés
wde la poufliére pour être élevés aux
(*) Il étôit enfermé à Ptolémaïs dans u«
cachot où on lui refijfoit même la fubfiftance :
ilfe fauva la nuit par le trou des latrines : il
attacha fes habits a la corde dont il «toit lié ,
& fe gliflà par ce moyen du haut d'une Tour ;
mais cette corde étant trop courte, il Te laiffa
tomber dansïgroJjfé : il feblefla légèrement
& fe traîna fur Mine montagne voifine , où il
demeura caché tout lé jour. La nuit il conti-
nua Ta route , fit un grand détour pour éviter
d'être pris , alla de montagnes en montagnes ,
s'arrêtant dans des cavernes le jour, & mar-
chant la nuit : il arriva enfin demi nud à Jéru-
faiem , où Saladin le reçut avec la plus
grande joie» , * .
» honneurs, rien ne nous apparti'emr
^a iî$*# "^ IK)5 «&»Mioqi» 1» dévouons i
*too forvice^ Je jure , qu'aucun de
» nous ne ceflera de rëtte fidelle juf*
« 91 a lainort. # Tou* le» Emirs ap-
plaudirent à, ce difcour* & firent la -
même ferment. Rafiiiré par ces témoi-
gnages^de zèle, Saladin ïeur fie fervir
un graàrf feftîtt , après lequel il1 les in»
* terroeea for les mefures qu'on devoit
pendre. Te* furent dfrms da laitier
les meilleures troupes dans la ville >
tandis qtfii irait avec fe refte au-de*
▼ant des ennemis.
Mais le lendemain, les Mameluks
ayant appris la réfolution du Divan-,
firent f epréfenter à, Saladin qu'il? 1»
défapprouvoient v qu'Us craignoient
les mêmes malheurs qu'on avoir fou£
ferts à Ptolémaïs -, qu'on devoit plutôt
Guider te Place y réunir les troupes Se
livrer -bataille 5 qufc fi on remportoit la
vidoirç , on fe renctroit facilement
jnakrectetoHTesks^erres des Francs*
•&que fi on étoic varneu en perdant
-JéVufalem, on (kuveroit 1 armée £•
?u*avant qu'on ne poflTédât cette vilte f
Iflamjïme avoir bien fçu fe foutenir
par Ces propres forces^ & qu'on n'avoir
■ p»
>
de Sâlàdîn, liv.XIL jj?
pas befoin de murailles , quand on
lavoir des Soldats. Enfin ils ajoutoienc H%- ***•
que fi le Sukhan perfiftoit à vouloir " "***
défendre Jérufalem , il devort y refter
lui-même , ou y laitier quelque Prin-
ce de fa famille , parce que les Kurdes
n'étoient pas difpofés à obéir aux
Turcs, ni les Turcs aux Kurdes.
Le Sulchan comprit par ces repré-
Tentations di&ées par la peur plus que
par la prudence , combien peu il de-
voir compter fur des Soldats encore
épouvantes du fort malheureux des
Habitans & delà garnifon de Ptolé-
jnaïs. Il tâcha d appaifer leurs murmu-
res & de diffiper leurs craintes par 1 ap-
pas des récompenses & par l'aflurancô
d'un fecours efficace : il fut tenté d'a-
bord de s'enfermer dans la ville. Dé-
tourné de ce deffein par fes Emirs , il
nomma un Prince de la famille, pour
commander en fa place. Ces précau-
tions ne firent point cefïèr les plain-
tes du peuple qui paroiflbit prêt a s'en-
fuir à Damas , tant on étoit effrayé.On
apprit en même tems la perte de la
caravanne d'Egypte, Cette nouvelle
augmenta le trouble, les allarmes &
les irréfolutions des Mameluks. Jcru»
j 3 8 Histoire
falem au milieu de cette confufion;
jHc5 i\*\'- euc ouvert f*s portes, fi les Chrétiens
le fuflent approchés des murailles ;
mais leurs divifions éternelles leur fi-
rent manquer cette conquête , & la
ville fainte demeura pour jamais au
pouvoir des Infidelles.
Les (accès de Richard ne l'avoient
rendu que plus fier & plus odieux. Le
riche butin fait fur la caravanne ex-
cita Fenvie dans' tous les coeurs. Le
Duc de Bourgogne , le Duc d'Au-
triche > les- François , les Allemands
fe livrèrent à leur reffentiment con-
tre ce Monarque , & fe plaifoient
à le contrarier dans fes deffeihs. Rj-
xhard venoit d'apprendre que Ton frè-
re le Prince Jean fufeité par Philippe
Roi de France tramoit en Angleterre
une confpiration * & que ce dernier fe
préparôit à fondre fur la Normandie*
Il eut fouhaité pafler précipitamment
en Europe , pur fe venger & de fon
frère & de Philippe; mais il vouloit
fauver fa gloire & affurer la fortune
de fon neveu le Comte de Champa-
gne, en faifant auparavant une paix
honorable avec les Sarrazîns. lierai--
gnoit les lenteurs d'un fiége , & détour-
nait l'expédition projettée fur Jérufa-
de Saiadik. Liv. XII. Jj9
lém. Il repréfenta ta difficulté de fub-
fifter dans un pays ruiné , ftérile , & H*&- *8£
manquant d'eau , & de prendre une
*ille à la vue d'une nombreufe ar-
mée : mais moins il paroftïbit porté à
cette entreprife , plus le Duc de Bour-
gogne & les autres Croifés en prêt-
foient l'exécution. Leur ardeur ou plu-
tôt leur haine contre «Richard levoit .
tous les obftâcfes. La délivrance du
Sépulchre étoit le but de leur voyage,
l'objet de leur voeu. Ils demandaient
à grands cris d'êtte conduits (bus les
inurailles , fe 'flattant d'emporter Jé-
rtifalem du premier aflaut. Une fem-
me Cfarétfenne les inftruifoit de la &
tuation dfe la ville, du défordré , de l'a-
gitation qui régnoient partout, des in-
quiétudes de Salàdin , de la terreur pa-
nique des Habitans; mais Richard
faifoit regarder ces avis comme un
piège. Enfin dans cette dîverfité d'o-
pinions, on convint de s'en rapporter
a là décifion de quelques Arbitres.
-Ceux-ci gagnés par les largefles du
Prince A ngïois , ôpïnérent conformé-
ment à fes defirs ; & la retraite fut ré-
folue. On décampa le jour même, AS:
on fe replia fur Âfcalon & fur Gaza,
Ffij
\
94e H 15 toi m
C'étoit le vingt & un de DgioumadiJ
x^ëfiSt ei-akher qui répondoir cette année au
' mois de Juin.
Il feroit difficile de concilier fur cet
événement le récit des Hiftoriens , les
uns faifant tomber tout le blâme fur
le Duc de Bourgogne , les autres fur le
Roi d'Angleterre * mais toutes les fois
que nos Auteurs ne (ont point d'ac-
cord en tr eux, ôc principalement dans
cette oçcafion , nous avons crû devoir
fuivre l'Ecrivain Arabe , qui n 'étant
attaché à aucune des deux fa&ions , ne
pept être taxé de partialité»
Après le retour des Francs, la plur
part indignés s'embarquèrent pour
l'Europe , d'autres fe retirèrent dans la
Principauté d'Antioche , tous criè-
rent contre Richard. On 1 accufoit
d'être d'intelligence avec Saladin , d a-
voir vendu Jérufalem >on lui reprocha
de nouveau la mort du Marquis de
Tyr ,airçft que d'avoir voulu faire a£*
faffiner le Roi de France. Le Monajv
que Anglois méprifant ces clameurs a
ne penfa qu'à l'aggrandinèment de Ton
neveu , & à tout préparer pour Con dé*
part. Il fit reconnoître pour Roi de
Jérafalem Henri Contre 4c CJian^
de Sàiàdïn. LiY. XII 54f
^çnë devenu Prince de Tyr , & céda en
dédommagement à Guy de Lufîgnan 4 **** 1" •
le Royaume de Chypre » (ans rem- * fI'**
bourfer les Templiers auxquels il
avoit déjà vendu cette Ifle. En même
tems le Comte de Champagne fit fi- ,
gnifier à Saladin Tes nouveaux droits,
& lui demanda la paix.Le Sulthan la lui
ofFrit aux conditions : » que les Chré-
tiens garderaient les villes qu'ils pot
»>fedoient fut les cotes , depuis Tyr
» jufqu à Joppé \ & les Mufulmans cel-
» les qui étoient fituées fur les monta-
* gnes y que le plat* pays dans le même
» efpace fcroit partage également en-
»tre les deux Peuples ; mais qu'Afca-
m Ion n appartiendrait à aucun des
»deux,& feroit détruite, u II y eut
plufieurs Ambaflades fncceflîves , tant
de la part de Richard que de Henri f
tantôt pour obtenir le faint Sépulchre ,
le libre exercice de la Religion danss
ce Temple , la permiffion de vifiter
les lieux faims , fans payer de tribut ,
tantôt pour difputer quelqtfe terrein ,
quelque village. On peut remarquer
que dans ces différens articles , il ne
fut point parlé de la Vraie Croix. L'Em» Bofe
pereur de Conftantinople awit eû~
Pf iij
^54* Histoihï
voyé quelquetems auparavant un Àm*
Hg <8K. bafliJeur pour la demander ; mais oi\\
i iji. î^j j^pQj^jn qUe je r0j de Géorgie
avoir offert pour ce précieux dépôt 9
deux cens mille écus <ror , & qu'on le
lui avoit refufé.
Les conférences furent plusieurs fois
renouvellécs, oufaifoic tous les jours
de part & d'autre de nouvelles pro-
portions ; mais lorfque les troupes Mif-
iulmanes forent tocftes arrivées de
leur quartier d'hyver , Saladin rompit
la négociation , parce que les Chré- .
tiens - vouloient conferver Afcalon
qu'ils avoient rebâtie à grands frais.
Le Sulthan fe mit en campagne dans
. le mois de Redgeb, le feptiéme de
l'année Arabique (en Juillet )•& alla
fe présenter devant Béitgébraïl, mag-
nai , Daroum, Afcalon , Jaffe. Richard
qui étoit alors à Tyr , au lieu de ve-
nir au fecours de ces villes , porta fes
armes vers le Nord de la Paleftine,
dans l'efpérance de furprendre Bé-
tout. , Saladin crut que ce Prince Je
méprifoit , & réfolut de lui enlever la
ville de Jaffa ou Joppé. Il raflèmbla
toutes fes troupes en un fèùi corps
d'armée > leur communiqua fon defe
TJB SàLÀDIN. LlVtXII. î4j
lèïtTÎ 5 & deux jouis après , la Place fut
inveftie. iï£?\ï*,ll
Des foffes larges & profonds, de
hautes murailles , une bonne Citadelle,"
nr\G garni/on nombreufe , de nouveaux
ouvrages ajoutésauxançiens,rendoienc
cette ville une des plus fortes de la Sy-
rie : elle auroit pu tenir deux mois j
mais rien ne réufte à la valeur intré-
Eide du Soldat, animé par l'avidité du
utin , par la gloire & par la Religion.
Saladin -fit environner la Place d'un
rivage à l'autre. Les Mineurs fautèrent
dans le foflfé, pour fapper le mur ,
tandis que les Archers iançoient des
flèches contre les Aflïégés qui faifoient
jouer leurs machines du haut des mu-
railles. Ces derniers fe défendirent
avec plus de vigueur qu'on necroyoit:
ils écrafoient les Mineurs, faifoient
des forties , & accabloient les enne-
mis de pierres & de traits. Les Mu-
fulmans perdirent beaucoup de mon-
de & fe ralentirent : ilsdrerferent pen-
dant la nuit quelques machines , & re-
commencèrent l'attaque , dès l'aurore.
Cette journée fot encore meurtriè-
re: on donna plufieurs aflautt Se l'on
fut toujours repoufle. Saladin expofé
F f mj
)44 RisToiiti
u, . «0 à tous les dangers , préfent à tonf }
Hégire fS8. — . r ... .*> . 'r* P„ ' I
j. c. n$i. prefloit, follicitoit les troupes. Elles |
reprennent leur première ardeur , on
api lique des échelles , on efealade , on
fe bar. Dans cette extrémité , les Af-
fiégés députent deux Citoyens , pour
parlementer: le Sulthan leur ordonne
de fe rendre aux conditions impofées
autrefois aux Habitans de Jéruialem.
Les Chrétiens les acceptent & deman*
dent feulement un délai de trois jours ,
efpérant recevoir du fecours dans cet
intervalle. Saladin qui feavoit que tout
retardement pouvoit faire manquer
Tentreprife , leur refufe cette grâce »
& fait continuer le fiége. On avoit
miné une partie des murailles du côté
de l'Orient. Le Sulthan fait mettre le
feu aux étançons , & ce mur s'écroule
dans le foffé ; mais les Chrétiens ayant
prévu cet accident avoient placé der-
rière ce mur , une grande quantité de
bois qu'ils allumèrent. Les Mufulmans
montés à la brèche trouvent une bar-
rière de flamme , & reculent étonnés :
ils refufent de revenir à la charge , à
caufe de leur laflîtude , & Saladin fe
repentit de n'avoir pas accepté la fort*
million des Afîïégés»
feï SAtAfti». Lïv.XIT. i4J
La nuit on conftruifit de nouveaux
inftrumens , les premiers ayant été j*1^',*^
brifés par les ennemis: il fallut aller !^
chercher des pierres fur les monta-
gnes 9 le terrein de Joppé n'en four*
niflant point. Le lendemain on donne
on aflaut général , au bruit des cym-
bales , des trompettes, des cris de al«
lah-acbar, du fracas des machines*
Une tour eft renverfée: les MufulmanS
fûrs de la vi&oire , courent dans cet
endroit; mais la flamme les arrête; dà
Ja paille & du foin embrafés , fervent
de remparts aux Affiégés , & aveiK
oient les Sarrazins. Dès que la fumée
fut diflîpée, ceux-ci découvrent de
l'autre coté un mur de piques , de
lances * d epées non moins impénétra-
ble que le feu : en vain ils s'efforcent
d'avancer; on les repouffe, & ils fe
renverfent les uns fur les autres. L'in-
trépidité des Aiïiégés étoit telle, qu'ils
n avoient pas feulement fermé leurs
portes où ils combattirent pendant cet
trois jours.
Cependant pour éviter une mort
certaine, les mêmes Députés vinrent
fe foumettre au nom des Habitans , ne
demandant que la vie & la liberté*
}4<f HiSToxiifc -
Saladin leur dit que chaque Cavalier
hG. u*i. fc radieteroitpar un Cavalier, un Fan-
taflïn , par un Fanraffîn , un Turco-
pie , Turcopol ou Turcobul , par un
Turcople ; & que le refte du peuple
payerait la même rançon qu'à Jérufa-
lem. Les Députés ayant accepté ces
conditions , prièrent le Sulthan de
faire ceflfèr le combat. »» Mes troupes
*»font trop animées, répondit le Sul-
9) than ; je ne puis arrêter leur foreur ;
»mais enfermez-vous promptement
i» dans la Citadelle avec vos effets les
» plus précieux , & j'aurai foin de votre
nliireté.« En effet les Mufulmans
ignorant cette capitulation , entrent
dans la ville l'épée à la main, & fe
répandent dans tous les quartiers pour
piller. Saladin détache une partie de
fes Mameluks avec leurs Officiers qu'il
introduit dans la Citadelle . moins pour
s'en rendre maître, que pour réprimer
la licence des Soldats : ceux-ci paroi A
fènt à la porte de la forterefle , le
corps de garde leur en défend l'en-
trée, ils le retirent en murmurant.
Lts Emirs courent dans la rente du
Sulthan , ils lui repréfentent qu'on ne
doit aux Habitans aucune capitulation;
*e Sàlàdin. Liv. XII. 347
<jue la ville a été prife de Force \ ïjue^
les troupes fe plaignent de fe voir en- j^îîïï
lever leur butin; que ce premier fuc-
ccs les anime 3 qu'il faut profiter de
leur ardeur pour de nouveaux exploits,
au lieu de refroidir leur zèle en leur
xefufant le pillage des riçhefles renfer-
mées dans la Citadelle.. Saladin fut
inexorable; il avpit donné fa parole ,
& n'avoit garde de la violer : il re*
jiouyella même en préfence de fes
Emirs la promeflè qu'il avoir faite aux
Habitans de leur donner la vie & la
liberté.
Le foir du même jour, un Courier
dépêché par l'Emir qui commandoit
un corps d'obfervation auprès de Pto-
lémaïs, apprend au Sulthan .que Ri-
chard à la première nouvelle du fiége
de Joppé , avoit abandonné. fan en*
treprile fur Bérout , s'étoit embarqué
avec fon armée, & faifoit force de
voiles pour Jaffà. Saladin eut fouhaité
Îiouvoir faire fortir dans Tinftant tous
es Francs de la ville; mais cela étok
impraticable pendant ft>bfcurité de
la nuit. Le lendemain dès la pointe
du jour» il chargea Boha-eddin t
Je jpçme/pi.a écrit fan Hiftoixf
%+î HisToiii*
' d aller recevoir la rançon ; & <fé
Hég. T8g. veiller à la fureté des Chrétiens 1 mais
■*• c# ' l'Xm comme il craignoit que le Soldat mé-
content de la capitulation ne les in-
fultât dans fa colère, il voulut aupara-
vant que tous les Mufulmans vuidaf-
fent la place , & fe rendirent au camp.
Cette précaution de fa clémence lui fît
perdre fa conquête. Les troupes oc-
cupées à piller refitfent d'abord do-
béir ; on leur fignifie les ordres du SuU
than ; elles murmurent; elles fe char*
f;ent de butin. Les Officiers rappellent
es Soldats , les preffent , frappent les
plus lents à marcher j le défordre aug-
mente.
Cependant la flotte de Richard pa-
roit à la hauteur de Joppé. L'efpé-
rance renaît dans le cœur des Chré-
tiens : ils font des fignaux , pouffent des
cris de joie , reprennent les armes , en-
chaînent les Mameluks qui gardoient
leur porte , & tombent fur le refte des
Sarrazins répandus dans la ville, les
pourfuiventjes tuent, entrent dans une
Eglife où plusieurs s'ètoient téfùgiés,en
égorgentle plus grand nombre,font les
autres prifonniers. Saladin averti de
cette émeute » monte à cheval pour 1*
toE Saiadin. Liv.XIL 349
Jfcéprimer , & s'avance vers Joppé. A
peine avoit-il fait quelques pas, que le ***?• fj*4
Patriarche & le Gouverneur viennent * "**
fe jetter à Tes pieds & implorer fa mi-
féricorde , acculent la populace de
cette révolte Jurent de faire exécuter
fur le champ les conditions qu on leur
avoit impolées. Saiadin ,1e plus hu-
fnain de tous les hommes» leur par-
donne, les relevé avec bonté, & les
conduit dans fa tente, pour mettre la
dernière main au traité.
Ce qui lei avoit portés à cette dé- jy^
marche , c'e(f que les vaiffeaux voyant chron. m
flotter partout les étendards des Ma»0*0****
liçjftérans, crurent la ville & la cita-
delle au pouvoir des ennemis , fc re~
•prirent le large, après s'être appro?
chés jufqu'à 1 entrée du port. Dapv-
ces circonftances , les Chrétiens dé-%
fefpérantd être fecourus,réfolurentde
fe foumettre au vainqueur. Mais un
Soldat fe dévouant à la mort pour la
Religion , s'élance du haut de la for-
teretfe dans la mer ; n'étant que lé-
gèrement bleiïé de fa chute , il nage
vers la flotte $ on vient à fa rencon-
tre ? on le conduit dans la galère (4)
T ^t'Autçurdit, quçlaGalér«qu«»wW
$jo Hi sTaiRf ••■>'-
de Richard : il rend compte S. SB
'/c6!!8* P"nce ('e 'a véritable- fituatïon de la,
1 '* '*' Place. Richard vogue veïs la ville >
foivi de toute Pefcadre', faute à terre
le premier, fait main-baflfe fur toté
les Sarrazins , qui prennent I3 fuite
épouvantés. . Boha-eddin témoin de
cette révolution , court à bride abba«*
toe vers le Sulthan: il le trouve affis
te tenant dans ïa main une plume»
pour figner la capitulation. Saladin le
voyant entrer agité, fe levé , demande
ce qu'il y a de nouveau. Boha-eddin
lui dir que Richard eft maître de Jop-
Ê: dans le même moment , arrivent
Soldats chafles par ce Prince , ne
fe croyant point en fureté dans 16
camp , ils veulent fuir encofë : ris com-
muniquent leur frayeur au refte des
troupes: tout s'ébranle ,tout s'émeut ,
tout fuit. Saladin demeuré prefque
fëul , voit paroître fur une éminence
voifine , une troupe d'ennemis : c'eft
le Roi , lui dit-on , c'eft le Roi. » Le
V Roi à pied , répohdle Sulthan : qu'on
«•fit. GuB!. »lu* amène un cheval, « Après cet a&è
* ■ ■ '.ii • «,
ioit Richard étoit peinte en rouge & avok des
voiles <le la même couleur»
de Salabin. Lit. XII# 351
ijè générofité, il alla joindre fes trou-
pes qui étoient déjà loin. iHr8\?!!£
Richard occupa le camp que les
Sarrazins venoienc de quitter. Il y
trouva non-feulement les effets enle-
vés à Joppé , mais encore leurs provi-
fions & quelques bagages : il fit pla-
ceurs prifonniers , entr'autres , les Ma*
meluks qui gardoient la Citadelle &
leurs Officiers : il traita ces derniers
avec bonté & les engagea à lui procu-
rer une paix qui lui devenoit tous les
jours plus néceffaire. » Allez vers le Bo^
vSulthan, leur difoit il , repréfentezr
t> lui de ma part , que cette guerre a
ifduré trop longtems ;que nous avons
» rempli 1 un & l'autre les devoirs de
'» l'honneur & de la Religion ; que nos
» troupes font épuifées-, que nous der
#>vrions enfin épargner le fang de
» nos Sujets. Conjurez-le , ajoutoifr-
» il , par le Dieu qu'il adore , de m'ac-
»» corder des conditions honnêtes , afin
»que je pd.fle retourner dans mpa
» Royaume" menacé dune guerre cir
»vile. « . a
Saladin ne refufa pas dïentrer $1
négociation : il répondit qu'on étoit
déjà d accord fur les principaux. artfc
H*fr J «t. (
jjl Histoire
des, que la contestation ne rouloît
,,,*# pour terminer 1 ouvrage de la paix ,
tl confentoit de partager ces deux vil-
les & leurs territoires , de céder Jafla
aux Chrétiens & de garder Afcalon.
Il faut voir dans l'Auteur Arabe avec
quelle adreffe, avec quelle réferve &
quelles précautions , ces deux Princes
traitoient cette grande affaire. Tantôt
ils Ce menaçoient l'un l'autre ; tantôt
ils chercboient à fe fëduire par des
préfens , des careffes , & par unecon*
«efcendance afFeâée. Ces détails fe-
roient trop longs à décrire. On voie
que de tous les rems les Conquérans
ont été plus difficiles à convaincre par
des raifons que par des fuccès. Ceft
la force , ce font des vi&oires. & non
des congrès qui rraachent les difficul-
tés , 6c impotent aux puiflances belli-
gérantes des conditions plus ou moins
avantageuses. Nous devons cependant
remarquer que Richard appelle en Eu*
rope par de plus grands intérêts , trai-
tait de bonne foi ,foubaitoit avec ar?
4eùr la paix qu'il (olliciroit , & ne re£-
teit en Syrie que pour fauver fa gloi-
le 8c afliver à fou ae veu le Comte de
Campagne
©ï Sàiàdïn. Li^.XII. m
Champagne , les Etats qu il venoit de
lui donner , au lieu que Sàladin défi- Hég. ç88»
roit la guerre & ne fe prêtoît aux J,C,II,H
propofitions des Francs que pour ne
pas irriter le* Princes Tes vaffaux fa^
tigués dune entreprife qui épuifoir
leurs forces & leurs tréfors. Il içavoir
que Rihard feroit obligé d abandonner
la partie : il vouloit ne point congédier
fon armée, avant que d'avoir chaflTé
entièrement les Francs de la Paleftî-
ne , & il efpéroit en venir facilement
à bout, après le départ du Roi d'An-
^leterre & des François, non moins
impatiens de repaflèr la mer. Il com-
jnuniqua fouvent ces fentimens à
Boha-eddin qui nous les a tranfmis#
Ainfi il faifoit traîner en longueur
la négociation^ ferendoit plus difn
«ile , à mefure que Richard cédoit de
; prétentions. Il lui arriva dans ce
rems là de nouvelles recrues d'Egypte
& de Méfopotamie. De fon côté , le
Roi d'Angleterretropfoible pour tenir
la campagne , fit venir de Ptolémaïs les
troupes qu il y avoit laiffées. Le SuW
rfaan rèfolut de les couper & d'aller
même furprendre JafFa foiblement dé*
fendue & dont on naypi| pas réparé
3f4 Histoire
les brèches. Il laifla auprès de Ramfc
ii.b. ,8k où il étoir alors, les bagages &»le gros "
h c. n>i. je j'arm^e 9 envoya un détachement
fur le chemin de Ptolémaïs à Joppé^
& marcha vers cette dernière ville,
avec (a cavalerie légère. Lorfqu'il en
approchoic , il apprit que Richard éroit
à peu de diftance ^avec un petit nom*
bre des (iens , & courue l'envelopper.
chronAngi. Lc Prince Anglois devenant plus
chroa j intrépide par le danger même , au lieu
BohT-cddm. 4e pendre la fuite , fe çrépare à rece-
tte voir 1 s Sarrazins à la tête de (a petite
troupe, compofée d'environ Gx cens
hommes. II fait à la hâte une efpéce
de retranchement avec le peit de bois
qu'il avoit , forme un bataillon quar-
ré, faifant face de tout coté , fait met-
tre un genou en terre au premier rang
armé de longues piques ; dans le f&j
cond les Archers un peu courbés & wfr
nant leurs arcs bandés , laifToient la li-
berté aux Arbalétriers placés debout
dans le troifiéme rang , de lancer leurs
traits. Il exhorte fes Soldats à tenir fer-
me,à demeurer immobiles dans leurs
portes , à foutenir dans cette fituarion j
Je choc de la cavalerie ennemie, leu*
promettant la viâoire, & menaçan*
DÉ S AL AD in, Lïv.XII. $jy
ée donner lui-même la more au pre-
mier qui s'ébranleroit. Tandis qu'il £* ££
faifoit ces difpofitions t Se que les Mu-
fulmans arrivoient par pelotons > un
Officier accourt de la ville > & lui ap-
prend qu'un Parti ennemi étoit prêt à
la (urprendre. » Gardez-vous bien de
*> publier cette nouvelle , lui répond
*> Richard , il y va de votre vie. ci En
mêmetemsil prend avec lui dix Ca-
valiers , les feuls qu'il eut dans cette
occafion , dit à fes Soldats qu'il va leuf
chercher du fecours > & vole à Joppé.
Il fait fortir la garnifbn , tombe fur un
corps d'Arabes envoyés de ce côté par
Saladin , & qui preflbierit la ville , les
met en déroute , fait garder les por-*
tes , revient à fa petite troupe , & J'a-
nime par le récit de la vi&oire qu if
vient de remporter.
Cependant les Sarrazins environ-
nent les Chrétiens de toutes parts , &
fondent fur eux en pouffant de grands
cris: ils font arrêtés par les lances ap-
puyées centre le poitrail des chevaux t
ils reviennent trois fois à la charge y
ma!$ foiblement & fans fuccè*. Les Boha-e*fi*
Francs dociles aux ordres du Roî > gar-
dent leur rang fans faire 1^ moindre
. GS»1
j 5 6 H i s t o i k i
mouvement , & même fans tirer au-
Hfg. j*8. cune flèche. Les Mufulmans qui
J%c# I1,lt croyoienf les rompre à la première
attaque » étonnés de cette fermeté, fe
mêlent en défordre & ne font plus que
caracoler tout autour. En vain le Sul-
than veut les rallier , les excite , les
prefle , les menace > ils font fourds à fa
voix & s'éloignent au lieu d'avancer»
Un Officier Kurde ofa même lui
répondre infolemmcnt : Faites marcher
cette troupe d'Efilaves qui frdptoit le*
Soldais & leur enlevait le butin a Jaff*
conquife par leur bravoure. Saladin f ré-
tamant de colère , pour ne pas com-
promettre davantage fa gloire & fon
autorité , ordonne Ta retraite & part.
Richard enhardi par la lâcheté des
Sarrazîns devient Taggreflear > les fait
accabler de flèches, fort lui-même du
retranchement , & parcourt à cheval ,
la lance en arrêt toutes leurs lignes >
défiant les Chefs à un combat fingu-
lier.
Saladin avoit pris le chemin de
Ramla , fans attendre fes Soldats ré-
belles. Arrivé au camp > il s'enferma
dans fa tente plongé dans Ane noire
»élancoliç>& méditant une vengeai*;
Es Sàlàdin. Liv.XIÏ. 557
Ce éclatante. On ne clouta point que
le lendemain plufieurs des révoltés ne Hé«« *?**•'
fuffent mis en croix. La frayeur étoic h Cm 1 1***
fi grande dans 1 armée , qu'aucun dés
Princes , des Emirs , des enfans même
du Sulthan n*ofa approcher de fa per-
fonne, crainte de relTentir les effets
de fou indignation. Plufieurs jours s'é-
coulérent dans cette cruelle inquiétu-
de. Enfin Saladin livré à lui-même *
écouta les fentimens de fa clémence
qu'on pourrait dans cette occafion ,
aceufer de f oiblefle ; mais peut-être ne
voulut- H pas par politique punir des
coupables» dont la plupart tenoient aux
Erincipaux Emirs , par le fang & par
»s liaifons , car ce détachement étoit
compofé de l'élite des Kurdes , & le
Chef même de la révolte étoit frère
(a) du brave Mefchtoub qui s'étoir
ignalé tant de fois. Quoi qu'H en foit ,
le Sulthan dit à fon fils el-Dhafter
d'appeller les Princes , pour leur faire
goûter des fruits qu'on lui envoyoit
de Damas. Ils vinrent tous en trem-
blant -y mais Saladin s'étant apperçu dé
leur frayeur, la diflipa par des mar-
:p ' -| . ' mu ii ii ii ■ ■«
(a) Il s'appollok Schauaah,
558 Histoiri
ques de bonté , & s'entretint avec eat
***?• ,M* d'un air. tranquille &a(Turé fur plu-
ll'U fieurs Sujets indiflFérens , afFeétant de
ne point leur parler de ce qui venoic
d'arriver.
Mais cet événement ne contribua:
pas peu à fui faire prendre la réfolu-
tion de terminer une gHerre qui la£-
foit également les deux Partis. Les
Sarrazins , Nation inquiète & turbu-
lente , n'étoient propres que pour des
expéditions vives & promptes. Moins
touchés d'acquérir de la gloire que du
butin y leur courage s*afroiblifIoit dès"
qu'ils n'étoient plus animés par TeP-
poir de piller. Dans les commence-
mens , la Religion avoît foutenu leur
zélé ; mais ce zélé cédoit à leur impa-
tience. Jamais ils n avoient été fi long-^
tems 'fous les armes pour la même en-
treprife. Il leur falloit de nouveaux in-
térêts, pour réveiller leur ardeur*
Avant Nour-eddin & Saladin , ils
connoiflbient peu la discipline mili-*
taire. Les francs apprirent 1 art de la
guerre à ces deux Sulthans , qui ten-
tèrent d'y afiujétir leurs Sujets , & qui
ne réuffirent qu'imparfaitement dans
ce projet, La plupart des troupes (ou-
feE Saiàdin. Liv.XII. j5j
tnifes àSaladin fe resardoient comme
troupes auxiliaires, les vices du gou-
vernement féodal leur donnant deux
maîtres à la fois. Les Princes vaflàux
du Sulthan > & obligés de le fuivre ,
obéifîoient avec peine 3 & ne refpi-
roient qu'après le repos. Pour le dé-
terminer à conclure la paix , ils répan-
dirent le bruit que le Pape marcnoft
au fecours de la Palestine à la tête de
deux cens mille hommes, & qu'il étoit
même déjà arrivé à Conftantinople.
Saladin méprifa cette nouvelle , mais
ne semprefla pas moins à écouter les
propositions de Richard.
Ce Monarque étoit tombé dange*
reufement malade , immédiatement
après l'affaire de Joppé. Il envoya un
Ambafladeur pour entamer une notf*
▼elle négociation^ pourdemanderde*
xafraichiflèmens Se des remèdes utiles
pour fa guérifon. Saladin eut l'attend
tion de lui faire porter chaque jour
tout ce qui pouvoit contribuer à réta*
blir fa fanté. Cependant on procéda
à régler les articles de la paix. Afcaloi*
étoit le feul obftacle à lever. On difr
putpit pour fçavoir fielledevoit être
cédée aux Francs ou démolie. Saladin
$<te Histoire
sobftinoit à exiger qu'elle fût Aétrvf^
**%• f «1 te. Richard après avoir fait plufieurs
% J.c iv*. ^jjtajives inUtiies pour la conferver ,
fouhaitoit au moins obtenir des dé—
dommagemens pour les frais em-
ployés à la rebâtir ; mais enfin craï-
fnant d'être obligé de paflèr encore
hyver dans la PaleAine ,il fe défifta
de cette prétention , & fe montra di&
pofé à recevoir les conditions qui lui
leroient impofées. Il eut même avec
* ~* Àbou-bekr Ambaffadeur du Sukhan»
une conférence fécrete dans laquelle
il lui dit. » Que fa fanté & les trou-
11 blés élevés dans fon Royaume, ne
» lui permettoient pas de demeurer
t* plus lpngtems en Syrie 5 qu'il ne cher*
échoit qu'un prétexte pour retourner
n en Europe \ que dans le fond il pre*
»noit peu d'intérêt aux aflfàires de la
» Paleftine ; que les Chrétiens privés
%f de fon fecours ne pourraient le fou-
a» tenir contre la puiflance Mofulraa-
j* ne , qu'avec peu de troupes on leur
*i enlèverait les feules Places qui leur
>»reftoient ,que le Sulthan ne devoit
»> pas fe rendre fi difficile , puifque
» cette paix ne feroit que fimulée > &
t»ne fervkok qu'à écarter lefeul ofc£
ntacle
h dt*i.
Bi Saiabin. Lit. XIV )6t
0 tacle qui s'oppofoic aux conquêtes de
»ce Prince. « Enfin il chargea Abou- ™^t[™xm
bekr de communiquer en particulier
les véritables fentimens à Saladin , &
de l'engager à lui accorder des condi-
tions qui puflènt le juftifier aux yeux
4e l'Europe attentive à fes démar-
ches.
Le Sulthan regardoit comme crimi-
nelle {apolitique que Richard lui fug-
|>éroic : il agiflbit de bonne foi , &
ji'avoit garde de vouloir violer les en-
fagemens qu'il alloit prendre. Il fit
lire le dénombrement des villes qu'il
avoir deflêin de laiffer aux Chrétiens ,
& le fit pré/enter au Roi d'Angleter-
re, en lui fignifiant qu'on ne change*
toit rien aux articles contenus dans ce
Mémoire. Richard confentit à tout.
En conféqnence , on drefla le traité
jlans les deux langues. Tous les Prin-
.ces Chrétiens & Mahométans jurèrent
les uns fur l'Evangile , les autres fur
TAlkoran , d'en obfèrver religieufe-
ment les conditions. Les deux Mo-
narques pour ne pas avilir la majeflé
du trône , refuférenr de prêter /er«-
jnent , fe croyant aflfez liés par leur
parole royale} il* donnèrent feule<-
* T*mïï* ^ Hh
\6x Histoire r
ment la main , pour marquer leur com
j^^fentement.
» On fit donc , non une paix perpé-^
ruelle, mais «ne trêve de trois ans
» & trois mois , à commencer de ce
m jour vingt-deux Schaban ( quelques
m Hiftoriens difent qu'on ajouta trois
99 femaines, trois jours & trois heures.)
» Tyr avec Ces dépendances & toute la
» côre depuis Jaffa jufqu à Prolémaïs »
» reftoient au pouvoir des Chrétiens »
uc'eft-à-dire, JafFa , Céfarée , Ar-
» fouf* Hifa , Ptolémaïs & leurs terri*
»toires. On partageoit Ramla & Lid.
»>da entre les deux Peuples ; les Chrc-
» tiens pouvoient vifiter les lieux fakits,
*> mais en petit nombre , & même
•exercer librement leur Religion , &
» avoir quelques Prêtres dans l'Eglife
» de la RéfurreéHon ou du faint Sé-
t» pulchre qu'on leur cédoit. Les Mo$-
»nes favorifes parla Loi de Mahofc
h met, rentroient en poflèflkmde leurs
» Monaftéres.Le Prince d'Antioche &
ttde Tripoli étoit invité d'accéder au
.* traité ainfi que Sinan Chef des Ifr
» maliens ou AfTaffins ; Afcalon de-i
» voit être détruite conjointement pat
j»ks Mufulmans & par les Francs , .
*l Sàlàdin. L iv. XII. $<fj
#ceux-ci croyant cette précaution né-
» ceflaire , crainte que lçs premiers ne li s 5*8«
wfuffent tentés de garder cette ville, J'C* "^
» fi on la leur rendait toj«e fortifiée; h
Après que ces articles eurent été fi-
gnés de part & d'wttre , un Wéraut oji
Muezzin cria dans les Placçs & les
Carrefours : Au nom de Dieu clément
& miséricordieux , &par ardre du Sul-
thon Saladin, falut du m»nd$ & de la
Religion; m fait $av*ir que la pafa ejf
établie mire les Chrhiws & Us Mnful-
m*ns ; qu'il eft permis aux deux Peuples
de vivre en bonne intelligence , de voya-
ger & de commercer librement fur les ter-
res les uns des autres.
Tel fut le fucce*'de cette célèbre
Croifade , dans laquelle la Chrétienté
ne gagna qu'une feule, ville , & l'Eu-
cope entière perdit une grande partie
de fes Princes , de fes Habitans & de
Tes tréfors engloutis dans la Syrie
Comme dans un gouffre.
Fin du Livre douzième.
«$»
Hhïj
SOMMAIRE
DU LIVRE TREIZIEME. »
Suites de h paix. Départ de
Richard} fes malheurs. Dé-,
mêlés de Saladin avec le Kha^
life, Différens événement. Sa-,
ladin revient à Damas : fa
maladie , fa mort ,fon carac-
tère.
HISTOIRE
DE
SALADIN
Sulthan d'Egypte & de Syrie.
LIVRE TREIZIEME.
DE*S que la Paix eût été publiée, Hég. fSt.
les Franct & les Sarrazins fe hC* tlfU
réunirent & femblérent ne faire
qu un peuple. On célébra cet événe-
ment par des tournois & par des fef»
lins. Les Officiers Chrétiens , &fur«
tout la Nobleffe Françoife s'empreffé-
rent d'aller vifiter à Ramla le Sulthan
qui les recevoit avec fa bonté ordi-
naire y les admettoit à fa familiarité &
£ (a table > & ne les ren voioit qu'avec
Hhiîj
jtftf Histoire
des rpréfens. Us admiraient dans ùft
Hcg 588. Prince qu'ils appelloicat barbare .
des vertus inconnues dans ce tems a
l'Europe. De-là, ils fe rendirent en
foule à Jérufalerri , pour y accomplir
leur voeu. Saladîn faifdit dîftribuer des
provifions même aux fimples Soldats.
Cette générofité , 8c le defir de voir
les Lieux où le Sauveur étoit mort ,
attirèrent bientôt tous les Croifés. Ri-
chard qui étoit encore malade, Ce
trouva tout-à coup prefque abandon*
lié : il craignit pour ce grand nombre
4e Chrétiens qui fe livraient eux-mê-
mes au pouvoir des Infidelles : il crut
* devoir mettre un freina leur zélé , &
leur défendit d aller à Jérùfalem fans
fa permiflïori. Cet ordre fut peu ref-
pe&é. Richard s'adrefla au Sulthan ,
& le pria de ne recevoir fur fes terres ,
que ceux qui auroient un billet (igné
de fa main. Saladin lai répondit quô
les Croifés n étoient venus dans laPa-
leftine que pour faire leurs prières dans
leTempledelaréfurreâion (le Saint
Sépulchre, ) qu'on fe rendroit cruel
& coupable en leur refufant cette con-
folation ', & qu il ne vouloit pas gêner
leur dévotion pour le faint pèlerinage
bb Salàdin. L IV. XIII. %6j
de Jérufalem recommandé par Dieu
même & par fon Prophète Maho- £?/»£
met.
Cependant on envoya de parc &•
d'autre des ouvriers , pour démolir A£
calon à peine rebâtie , ville autrefois
célèbre, & qui détruite une féconde
fois par les malheurs de la guerre , ne
s'eft jamais relevée de fes ruines. Le
Duc de Bourgogne par cette fatalité at-
tachée aux Croifés, fut attaqué peu de
tems après la paix, d'une violente ma-
ladie , & mourut dans la Paleftine ,
devenue le tombeau de tant de mat
heureux Chrétiens. Richard n échap-
?a à la mort que pour tomber dans
efclavage.
Sa fanté étant un peu rétablie , il fit
embarquer les deux Reiïies & fes Of-
ficiers , & fe hâta de retourner dans
fon Royaume qu'il ne devoir pas re-
voir ficôt. La cruelle deftfnée dont il
étoit pourfuivi , le réfervoiç à de plus
rudes épreuves. La tempête écarta fa
galère , & ta pouffa dans le golfe de
Venife où elle fit naufrage auprès d'À-
Sjilée. Le Roi d'Angleterre réfolqt
ors de tfaverfçr une partie de l'Eu-
rotoe , évitant de paflerparlâ Franr
Hhiiij
3<îS Hisîoim.
1 ce , crainte d'y être arrêté par Philippe
?o\iîîl fou Rwal : mais P°ur fà* M dangerv
J.C.IIJI* ,r * -1 • /* °
il courut a la perte : il prit la route par
P Allemagne, & par les Etats du Duc
d'Autriche qu'il avoit fi grièvement
offenfé àPtolémaïs. Celui-ci mitauC»
fitôt des gens en campagne pour dé-
couvrir & prendre fon ennemi. Ri-
chard errant de village en village , dé»
guifé en payfan , après plufieurs avan-
tures , fut enfin reconnu auprès de
Vienne , & amené à Léopold , qui fe
vengea bien cruellement des outrages
reçus dans la Paleftine. Il traita fon
prifonnier avec mépris ; de après l'a-
voir gardé quelque tems , il le mit en-
tre les mains de l'Empereur Henri VI.
non moins irrité contre Richard pour
tout ce que ce Prince avoit fait à Ton
préjudice dans la Sicile. Alors la hai-
ne renouvella d'un côté toutes les ao
eufations de cruauté, de trahifons , de
meurtres ,d'a(Iàffinats , d'emprîfonne*
mens formés en Syrie contre le Roi
d'Angleterre ; de l'autre , la pitié &
l'indignation firent crier les Anglois ,
les Normands , plufieurs Potentats qui
n'avoiâit pris aucune part aux que-
selles des Croifés , Sç le Pape. Les Alt
fit Salabik. L iv. XIII. \6$
Icmands prétendoient juger ce Mo-1
narque fur les crimes qu'on lui attri- j, cfwjtt
buoit 9 comme un (impie particulier
fournis à leur Tribunal» Richard s'hu-
milia dans la Diecte de Spire» & en-
treprit de fe juftifier. Le Pontife Cé-
leftin III. lança des excommunie*»
fions , foibles armes contre des peu-
ples accoutumés depuis long-temsà les
méprifer. Enfin, malgré les foudres
de Rome , malgré les plaintes d'une
. partie de l'Europe , le Roi demeura
prifonnier en Allemagne pendant plus
d'une année , & ne recouvra la li*
berté qu'en payant cent mille marcs
d'argent » & en laifiànt. des otages
pour cinquante mille autres; qu'il,
promit d'acquitter après (on retour
en Angleterre , ce qui faifoit à cin-
quante francs le marc , fept millions
cinq cens mille livres de notre mon-
jioye d aujourd'hui , fomme très-con-
fidérable dans cetems.
, Dès qu'une partie des Croifés eut
p^Té la mer , Saladin congédia foi*
armée , & fe rendit dans le mois de
Ramadhan à Jérufalem , où il s'occu-
pa du foin de l'embellir & de la for-
tifier. Il fit trqjpiller au nouveau Col*
37© Histoiki
lége qu'il y avoir établi & doté : il c»
Hég. 588 donna l'adminiftration au Doâéur
1 ^'^'Boha-eddhnrHiftoriendefavie. Cer
Jjj^J^ édifice étoit auparavant un Temple dé-
dié à fainte Anne ; il fut changé eri
mofquée: le Sulthan ajouta des bâti—
mens extérieurs , où Ton devoit en-
feigner à la jeunette les principes de la
Religion & des fciences , distribuer
des aumônes aux pauvres > àc traiter
les malades.
Saladin ayant procuré une paix gé-
nérale à Ton empire , voulut dans ce
repos dont il n'avoit point encore joui ,
entreprendre le pèlerinage de la Mec-
que , dont Mahomet a fait un pré-
cepte à fes Difciples. Le Sulthan etoic
trop dévot pour s'en difpenfer:il an-
nonça fon deflein à rous fes Sujets , &
les invita par de grands privilèges, à
le fui vre dans ce voyage religieux. On
infcrivit les noms de ceux qui vou-
loientêtrede cette caravanne. Il don-
na ordre aux Gouverneurs des Provin-
ces , & principalement à fon frère Séfr-
eMflam qui commandoit dans l'Ara-
bie heureufe, d'amaflèr des provifions
tant en Syrie que dans TYémen. En
mêmetems, il fit préj^rer des éqtii*
tofcSAtA&iv. Liv.XHI. j7i
>ages& de riches préfens pour laCaa- —
>ah: (4) car lorfque les Sulthans fai- jfçfiî
|>ah: (4) car lorfque les $ulthans fai- j?c*ii*H
fbient eux-mêmes le pèlerinage Je la
Adecque , ils fe piquoient d'étaler la
1>lus grande magnificence. Maris > dans
e tems qu'il fai foie ces difpofitions,
les Emirs affemblés à Jérufalem pour
cet objet , lui repréfentérent que l'ex-
périence avoir appris combien on de-
voit fe défier de la bonne foi des
Chrétiens ; qu'ils garderoient la paix
jurée autant qu'elle feroit favorable à %
leurs intérêts & la violeroient fans
fcrupule , dès qu'ils pourroient com-
mettre impunément des hoftilités > que
fi le Sulthan s'éloignoit de la Syrie ,
ils ne manqueroient pas de profiter de
l'occafion pour ravager le pays , pour
infulter les Places , & pour s'emparer
même de Jérufalem ; que fa préfence
ctoitnéceflaire, pour contenir dans le
refpeâ: routes les puiflances voifines; &
que la Religion d'un Prince confiftoic
moins à faire des pèlerinages , qu'à
veiller au bonheur & à Ta fureté
de Tes peuples. Saladin fe rendit à
(a) La caabah Temple de la Mecque»
Voyez VintrUtiftion , f *j. 4. ($• ailleurs*
J71 H ISTOIJLB
'ces raifons , d'autant plus qae fofl
jîc'i X abfcnce pou voit devenir funefte à i'Ifla?
mifme.
Tandis qu'il paroitfbit fi rigide ob-
fervateur 4e la Loi de Mahomet, il
5'oppofoic aux prétentions du Khalife ,
à peu près comme nos Rois & les Em«
pereurs d'Allemagne ont été fouvent
obligés de réfifter aux entreprifes des
Papes ; mais il eft néceflàire de remon-
ter à l'origine de cette querelle , & de
raconter quelques évenemens que nous
avons annoncés , 6c dont nous avons
différé de parler , pour ne pas inter-
rompre notre récit.
Nous avons eu plufîeurs fois occa*
fion de remarquer , qu'un des vices de
la politique Mahomctane , etoit cette
efpéce de gouvernement féodal que
les Arabes avoient établi dans leur
Empire , & qui caufa tant de révola*
tions. Chaque Province, chaque con-
trée s & fouvent chaque ville avoit des
Seigneurs particuliers exerçant une
~ forte de Souveraineté, fous la dépens
dance du premier Chef; femblables à
cette foule de petits Tyrans qui dans
le même fiécle déchiroient l'Europe ,'
6c principalement la France. C'étaient,
9t Sàlàdin. Liv.XIIL tffr
tantôt d'anciens Monarques dépouillés ' ^
de leurs Etats , & à qui on laiflbit une j^7ïîîî
ombre d autorité; tantôt des Enclaves
dont on récompenlbit la bravoure &
la fidélité; tantôt des Ufurpateurs 9qui
et la tête d une troupe d'avanturiers,
s'emparotent d'une Place , d'une Pro-«
vince, & s'y foutenoient en fe faifant
un appui de leurs voiiïns, & prêtant '
foi & hommage au Souverain le plot
çuiflant. Leurs Etats étoient à la vé-
rité des efpéces de Fiefs de l'Empire t-
revenoient à la Couronne après leur
mort , & ne palToient à leurs enfans
qu'avec la permiflïon du Sulthan au
nom duquel ils gouvernoient , qu'ils
étoient obligés de fuivre à l'armée» Se
auquel ils payoient des tributs.
Zéin-eddin Jofeph , un de ces pe-
tits Princes , mourut au camp de Pto-
lémaïs : ilétoit Seigneur d'Arbelles ou
Irbil , (4) Se d'autres Places dans la
Mésopotamie : il avoit un fils nommé
ModafFer-eddin Koukberi , qui poflew
doit déjà, dans la même Province ,
Scheherezour ,(b) Harran , (c) Edeffè
m ' ' ■ . »
S'a) Voyez Bv. V. pap. 372.
*) Voyez liv. V.pag. 374.
OHarw ou Charnui* Çbam*> &$
574 Histoire
ou Orfe; (s) Samofoth , (b) & Almatï-
jTc. iî^zar- (O Safadin lui donna la Princi-
pauté <TArbeiles , en échange de Har *
ran , d*Edelfe , de Samofatn & d'AI-
mauzar,& inveftit de ces derhiéfes vil-
les le brave Téki-eddin Omar fon ne-
veu. Celui-ci fe trouva maître alors
d'une grande étendue de pays : car il
tenoit des bienfaits de fon oncle ,
Miapharékin , (d) Hama , (e) Maar-
fa , (/) Salamia y (g) Mambedge »
Nous en avons jparié , Uv. V. pag. 350»
(tf)Edeffe ou Orfa, Erroné. ^ oyez. Y.
(à) Samofeth , Sumeizat , fituée fiir PEu-
phrate & à l'Occident de ce fleuve qui la
rend fertile ; elle eft habitée par des Armé-
niens.
(c) Al-Mauzardans la Méfopotamie. Je ne
trouve rien fur. cette Race.
(d) Miapharékin. Voytx UvSV. f. 3 84.
(t)Hama , foye z. liv. IV. p. % j 9.
(f) Maarra. Voyez, Uv .TV. p. z«o.
(g) Salamia 9 Salamîmià , petit village fitué
dans le chemin du défert , de la Préfecture
de Hama , & à deux journées de cette ville*
Les Arabes difent que Salamia, voifine de
Sodome & des quatre autres villes , fut bâtie
par dix habitai» qui fe fauvérent de ces ville*
infortunées : ils^difent que les Anges chargés.
<k les détruire , les élevèrent fi haut , qu^Q
fy)Nefchrum ou Nefchmum (£)Dgto-
bail,(r ) Laodicée, (i) Placanos, (e) & Hés- sg«-
Pagras. (fj Téki-eddin & Koukbéri h ° "*"
partirent l'un & l'autre pour aller pren^
dre po(Te/Ron de ces différentes Pla-
ces. Le Sulthan chargea le premier de
lever des recrues dans la Méfopota*
ihie, & le fécond , de fe rendre maî-
tre par force ou par adrefle , d'un cer-
entendoit du Ciel le chant de leurs Coqs ;
qu'ils les laûTérent enfuite tomber.^*?** leurt
fables fur cet événement* dans V Al-k*r*n <$•
d'Herbelet , article Loth ou Louth <$• dut rcs
auxquels il renvoie.
(a) Mambedge , &c Voyez liv. IV. p. %$o.
' {b) Nefchmum , Nefgen, &ç. Place ou
Citadelle très-forte fur une montagne», à l'O-
rient de l'Euphrate. On l'appelle la fortereflè
de M?obédge : elle s'élève jufq* aux nues ;
c'eft pour cela qu'on lui a donné le nom de
Nefchmum , c'eft-à-dire , étoiles. Le Sulthan
Mahmoud Zenghi la fit bâtir , & y fàifoit fou-
vent fon féjour pouf pouvoir tomber fur le*
Francs , lorfqu'Ùs attaquoient la Syrie ou la
Méfopotamie.
(c) Sembla, Dgjobail , Gibelet, &c*
Voyez, liv. VII. pa*. 40. /. VIII. p. 1 08.
(<0 Voyez liv. VIII. pag. 108.
(«)Platanos ouBlatanos, &c. Voye^livl
VIII. pag. ni.
(/*) Pagras , &c V*y*z. liv. VIIL p . t x-ft :
t<1$ Hï*TÔI*ï
tain Hazen qui ravageoit toute la Prtfs
"âiSIlvince.
CétoitunEmirtrcs-puiflantqui rc-
fidoit ou qui commandoit dans Irixiiat
ou Urmia, (j) ville de Laderbidgia-
ne , grande, agréable , & abondanre 9
que les Arabes difent être la patrie de
Zeidarszé , Prophète des Mages , ceft-
à- dire , de Zoroaftre. Elle etoit fi tuée
à l'Orient de Mouflbui , auprès du Lac
Téla, & avok fur une montagne une
forterefle que l'art & la nature ren-
doient inacceffible aux efforts des en-
nemis. Thogrul Sulthan Seljoucidede
Tlran , obligé de fiiir de fes Etats, vint
chercher un azyle dans cette place,
& pour s attacher l'Emir Hazen , il
époufa fa fœur. Enorgueilli par cette
alliance honorable , celui-ci conçut
alors l'ambition de gouverner tout le
Royaume, au nom de Thogrul. Il
commença par s'emparer d'Urmia d'u#
ne manière bien cruelle : il fit aflaflï-
ner pendant la nuit , tous les Habitans
en état de porter les armes , jetta dans
* [a) Voyez les notes de Schultens fur cette
Ville & dans d'Herbelot, l'opinion des Ma*
pumétaju&rZoroaftre*
l'efclavag*
J.C. !!**•
de Saladtn. Lit. XIII. 577
l'efdavage les femmes & les en fans ,
& donna retraite dans cette ville aux hé* 58$.
Turkaniens , (a) horde de barbares >
qui Vivoient de rapines , & propres à
féconder Tes pernicieux defteins. Il Ce
mit à leur tête , & courut dans tous les
environs, exerçant un horrible bri*
gandage : il enlevoir des caravannes
entières, pilloit , maftacroit, & rom*
pit tout commerce , toute communi-
cation dans le pays. Thogrul qu'il te-
non dans une efpéce de prifon , hon-
teux de paroître autorifer ces excès par
fa préfence , fe fauva & vint fe mettra
au pouvoir de fes Sujets qui le reçu*
rent avec joie , & lui rendirent le Scep-
tre : il envoya quelques troupes pour
réprimer les violences de Hazen ; mais
elles furent repoufTées, Ce Tyran re*
doutable à tous fes voifins , leur eau-
foit une crainte perpétuelle , leur fai-
• foit acheter leur fureté , & mectoit tout
. le pays à contribution,
ModafTer-eddin Koukbéri le flatta,
plus que tout autre , lui fit de magni-
fiques préfens »lui propofaune allian-
ce étroite , promit de joindre fes trou-
(a) On ne trouve rien fur cette Tribu,
Tome II* I i
5?8 Histoire
pes à celles de ce Brigand , de ne faite
&S'im" quun peuple des deux Nations , &
d'attaquer avec leurs forces réunies ,
les places frontières. Hazen trompé
par ces afliirances, accepta une entre-
vue dans laquelle on devoit cimenter
cette union par un traité folemnel : il
vint au rendez-vous, bien accompa-
gné y mais pendant la conférence ,
Koukbéri ayant donné le fignal , des
Soldats placés en embufeade , tombé*»
rentfur les gardes d'Hazen , les diffi-
pérent , l'enchaînèrent lui-même , 8c
le conduifirent prifonnier dans la Ci-
. tadelle d'Àrbelles.
-'• Koukbéri étant mort dans cette
ville , le Sulthan nomma Prince d'Ar-
belles Téki-eddin-Omar , déjà fi pui£
(ant dans la Méfopotamie & dans la
Syrie ; mais ce brave Mufulman ne de-
■voit pas jouir long-tems de ce bien-
fait. 11 vint fe faire reconnoître dans
fes nouveaux Etats. Soit que (on am-
bition voulût encore en accroître l'é-
tendue» foit qu'il crût ne point dé-
plaire à fon oncle , en dépouillant
Buktimer ou Baktimour que nous
avons vû monterfur le trône d'Akh-
J.C. 1191*
de'Saladim* Lùr.XIIÏ. 579
lath ou de Khélath (a) en Arménie ,
& refufer i?alliance de paladin , après «ft t\*Q[\
l'avoir appelle *à fort fecours, (b) fon-
dit à i'iniprovifte fur les terres de ce
Prince , & lui enleva pîufieûrs villes.
Baktimour aflembla des troupes, livra
bataille, fut vaincu, pourfuivi & a£-
fiégé dans, fa Capitale,
i. iÇeftst dan^côscifGonftances que le
Khalife »Nàffer-eddin envoya ^un Am-
bafladeur ânSulthan, pour fe plain-
dre de l'invafion deTéki-eddin Omar,
& pour demander non-fediement ,
qu on reffctuât au Roi de Khélath,
toutes "les villes qu on -lui avoir prî-
tes, mais encore qttfwt livrât le cou-
pable a la juftice/a Divan./ Le Pon-
tife défapprouvoit auffi la conduite de
Kouk-béri , à l'égard d'Hazen , decla-
roit quiLprenort -ce dernier (bus fa
proteftion v.&itexigeoit qu'on l'élar-
gît de prifonA? qu'an lé renvoyât libre
à [rmia. Enfin il ordonrtoit à El-Pha-
del grand Cadhi ou fou ver ai n Juge de
l'Empire, de fe rendre inceflammenc
"ii 1 :: \i •— *— ^ 1 _ ■
(*) Voyez, pour ^cette ville , liv., V.
(h) Voyez , liv. V. f*g. 3 S* & **tr*$.
Iiij
jfo Hïstoui " •
à la fublime Porte pour y régler toui
Hég. î8f. lesdifFérens qui s'étoient élevés entre
*c ,„*. ^ sulchan & le facré Divan. Saladin
connoi(Tant le refpeô dû an Chef de
la Religion & les droits de fa Cou-
ronne indépendans de la puitfance des
Khalifes , combla ce Député d'hon-i
neurs & de prçfèns , & répondit aux
objets de fa Million , que , quoiqu'il
n'eût à rendre compte de fa conduite
à perfonne, il faifoit fçavoir à Naffer;
eddin 5 i°. que Téki-eddin Omar ne
s'étoit approché de l'Arménie que
pour y lever des récrues ; qu'eitfiite il
avoit attaqué Baktimour, pour quel-
ques fujets de mécontentement , mais
que cette guerre uauroit pas d'autres
fuites , puifque fon neveu venoit de-
tre rappelle en Paleftine : i°. qu'il
avoit lui-même donné ordre àjtouk-
béri, d'arrêter l'Emu: Hazén «&dele
feire venir en Syrie, ou ail Heu de
. commettre du brigandage» il pour-.
roit exercer fa valeur contre les enne*- -
mis de l'Iflamifme : jo. que le Sou-
verain Juge Ei-Phadel étoit trop in-
firme, pour entreprendre le voyage
de Bagdad. Ainfi , loin d'obéir aux dé-f
crçtsimpuiflans& injuftes du Pontife *
ht Sàlàdin. LiWXIII. $fï
il ne voulut pas même lui envoyer un
,Àmbafladeur , comme il en étoic fol- Hég. j s*,
licite par ce Député, & prétendit n'ar J' c' f ***
voir rien à démêler dans fon Empire
avec le Khalife.
Cependant Tcki-eddin abandonna
fon entreprife fur Khélath , & tourna
fes efforts contrp Makskurd ville con-
fidérable d'Arménie, prefque aufli
grande & moins forte que Khélath,
Pendant cefiége, il fut attaqué dune
maladie violente qui le mit en peu de
jours au tombeau. Malek el-Manzour
l'aîné de fes fils, qui l'avoit fuivi dans
cette expédition , tint pendapt quel*
que tems cette mort iecrette, pour
difpofer les efprits en fa faveur; Se
s étant affuré de tous les Suffrages , il fe
rendit à la tête des troupes dans la
ville de Hama. Ce jeune ambitieux b*1**:**
vou)ut hériter des Etats de fçtfi père , A *
comme il héritoit de tout fon coura-
ge ; mais il pen/a perdre par trop de
fierté , ce qu'il auroit obtenu par une
foumiffion prompte : car fe voyant à
la tête d'une armée affez paillante ; il
prit pofleflïon de la Principauté de
Hama & des autres Places, (ans at-
tendre le consentement duSultban (oa
f^rand-oncle, & ofamême lai propôw
èr des conditions qui refpiroient la
révolte. A cette nouvelle Saladin ne
put contenir fon indignation : il fit
partir fur le champ fon fils Afdbal
avec de bonnes troupes, pour aller
s'emparer de toutes les Places qui
avoient appartenu à Téki-eddin $ &
ordonna à foh autre fils Addhaher,qui
fardoit les frontières de la haute Syrie
e prêter main forte à fon frère , fr
Manzour faifok de la réfiftance.
. Celui-ci commençant à craindre ,
fe hâta de conjurer l'orage : il implora
la prote&ion de fon grand-oricîe AdeP,
dont il fçûtflatteri^àmbitîohy èàliii
offrant la» moitié de la -fucceffîon; de
ion père. Il ne derttandok plbs tjtle U
tutelle de Tes frères & les villes de
Harran , d'Edefle , de Samefath ou
• celles de Hama, de Màmbedge, dé
Salamia , de Maârïa Se leuft DépetP
dances , & confeilloit à M'alek Adet
de folliciter Hnveftitute'des Places
qu'on lui refoferofc à lui-même. Adel
intéreflé dans la caufe de fon petit ne-»
veu, après beaucoup de prières, obtint
la grâce de Manzour Se lui fit accor-
der les villes de Harran , d'Edeffe , dé
ȣ Saladin. L iv, XIII. 383
Samofath avec leurs territoires : il fit
dreflTer la patente de cette conceflîôn , j"2"rîîii
& voulut engager le Sulthan à la fcel-
1er fur l'heure , & même à s'obliger
par ferment. Saladin indigné que Ion
propre frère exigeât un ferment de lui
qui n en avoit jamais exigé des Emirs
auxquels il avoit confié le Gouverne-
ment des Places Se des Provinces de
fon Royaume > regardant Adel avec
colère , prit la patente, la déchira , &
menaça de fe venger & de fon frère &
de fon neveu.
- Il négocioit dans ce tems avec le
Roi d'Angleterre & le Marquis de
Tyr. Le premier inftruit de ces trou-
bles différoit de conclure, efpérant
obtenir des conditions plus avanta-
geufes : mais Saladin craignant en
€ffet , que Manzour ne fe joignît avec
Baktimour, & ne lui attirât par cette
union une guerre far l*Euphrate , con-
fentit adonner la paix à Conrad. Nous
avons dit que la mort de ce Prince
rompit ce projet & réplongea le Sul-
than dans de nouvelles inquiétudes.
D'un autre côté, Adel ne ceflbit de le
fatiguer par fes follicitations en faveur
de Manzour. Enfin Saladin laiffa la
&4 Hhtoui
décifion de cette affaire à foo Diran
î. ctgu "' où il n affifta point r pour ne pas gê-
ner les fuffrages. Les Emirs opinèrent
qu'on ne pouvoir fe charger de deux
guerres à la fois ; qu'il falloit accor-
der la paix aux Francs ou à Malek el-
Manzour > mais que dans le choix , on
dfivoît plutôt pardonner à ce dernier
qui ne paroilTbit coupable que d'im-
prudence. Saladin porté naturelle-
ment à la clémence fe rendit à cet
avis, & invertit Ton neveu des villes
de Harran , d'Edetiê Se de Samofath.
Adel ne manqua pas de demander
pour lui-même , les autres Places de
Méfopotamie dont Téki-edd;n avoit
joui. Après quelques contestations,
on les lui céda en échange de ce qu'il
pofledoit en deçà de l'Eupbrate exce-
pté Krak, Aflelt Se Beikaa, à con-
dition cependant qu'il enverroit tous
les ans à Jérufalem , de ces dernières
villes, mille facs de froment par for-
me de tribut.
Dans cet intervalle , on avoit fait
. la paix avec les Chrétiens 9 Se Saladin
* étoit revenu à Jérufalem. Le calme
étoit enfirv rétabli dans tout fon Enl-
pire. Adel fe préparoit à partir pour
la
de Salàdin. LiY.XÏII. j8y
-ïa méfopotamie. Manzour étoit venu
fe jetter aux pieds du Sulthan. Les Hég. <8g.
Emirs & les Princes fe rendoient dans J» c* * '>*•
leurs différensdépartemens, LesCroi-
fes repaffoient la mer. Tout étoit tran-
quille. Le Khalife feul murmuroit en-
core & necefïoit de fe plaindre : il fe
crut méprife ; & pour faqyer l'hon-
neur dulChalifat , ilexigeoit qu'on lui
envoyât le grand Cadhi el-Phadel ou
du moins un AmbaiTadeur, Saladin
tout dévot qu'il étoit , réfiftoit à de
telles prétentions qu'il regardoit
comme des entreprifes fur les droits
de fon trône. Il étoit fourd aux cris du
Khalife , faifoit prier pour lui dans les
Mofquées, le révéroit comme le Chef
de l'Iflamifme , & croyok ne devoir
pas lui céder dans des difeuffions in-
dépendantes de la Religion. Nafler-
eddin ne pouvant fléchir le Sulthan ,
4éputaun de fes Imams à Malek Adel
& lui promit la prote&ion du facré
Divan & la rémiflion de fes péchés ,
s'il engageoit fon frère à faire quel-
que fourni (Tion à la*fublime Porte.
Adel, qui dans les deffeins ambitieux
jquil méditoit , vouloit fe ménager
l'appui des Prêtres ôc des Pontifes, û
Tome//. Kk
jStf Histoire
puiflant fur i'efpritdesPeupIes^btîat,
ïHc"ii8î#. aPr^s P^ufieurs iaftances , qu'on nom-
" mât pouf la Cour de Bagdad , un Ain-
batfadeur chargé d écouter les plaintes
du Khalife & de venir en rendre com-
pte à Saladin.
Avant que de partir pour la Méso-
potamie , Adel maria du confente-
ment de fon frère, une de. Tes filles
avec Oefar-fchah Piince Seljoucide
d'Iconium , qui étoh venu implorer la
proteâion du Sulthan. Kilidge-Arflan
dont nous avons fouvent parlé , après
un régne long & célèbre, avoit éprouve
le fort de Louis le Débonnaire , pour
la même caufe. Comme lui , il avoit
partagé fbn Royaume à fes enfans , &
fut chaire comme lui du trône par
l'ambition de fes fils dénaturés, & ré-
tabli par leur divifion : mais il y eue
cette différence entre ces deux Monar-
ques , que le Khalife ne prit aucune
part à la révolte de ces Princes Seljou*
cides. Kilidge-Arflan ayant cédé fes
Etats à fes dix enfans , ne s'étoit ré-
fervé que la villfc d'Iconium, où il efpé*
roit terminer Ces jours dans le repos.
Corhb-eddin Malek-fchah Paîné de
tous , qui regnoit à Siouas ou Sébafte
9-e Salabin. Lit.XIII. 587
{4) ftit lé premier qui leva l'étendard
de la guerre civile : il s avança vers la Hés- i *f •
Capitale à main armée, & s'en rendit J C# llf u
maître , ainfi que de ion père. Il fe
porta pour fon Succeffeur , lui fit révo-
quer toutes les ceflïons faites à Tes frè-
res , & les attaqua tous au nom de
Kilidge-Arflan , qu'il traînoit de Pro-
vince en Province. Moëzz-eddin Ge-
far-fchah dépouillé par cette révolu-
tion de fa Principauté de Malathie,
f£)qui lui étoit échue en partage, vint
demander du fecours à Saladin. Le
Sulthan , aprèsavoîr contrarié alliance
avec lui, lui fit reftituer Malathie & le
fit reconduire avec honneur jufques fur -
les frontières de la Syrie. Mais Ki-
lidge-Arflan s'étant fauve de l'armée
de Cothb-eddin , erra long-tems de
ville en villes pour émouvoir la pitié
(a) Siouas dans la Cappadoce Pontîque 9
tft la même que Sébafte dont parle Pline :
elle eft grande & a de bonnes murailles &
une petite Citadelle : elle eft dans une plaine
environnée de montagnes à foixante milles
de Caefarée , à l'Occident d'Erzér^oum. -
(b) Malathie; c'eft l'ancienne Méliténe;
que les uns placent dans la Cappadoce , les
autres dans la petite Arménie.
Kki)
388 Histoire
de Tes enfans occupés à s'en tredétruîre,
Vfc .îf ?" & <*om aucun ne prit fa défenfe : eu*
J.c. 1191. c ., r .
fin il trouva un vengeur dans Kai-
Khofrou Prince de Bargiloun , (4)
qui leva des troupes , livra ba-
taille à Mélik-fehah, le vainquit ,
' •- & eut la gloire de rendre la Couronne
à fon père. Ce Prince étant mort peu
de tems après , Kai-Khofrou fur élevé
par les vœux & les fuffragesdu Peuple
au Sulthanat d'Iconium quil avoit fi
bien mérité.
Cependant Saladin renvoya dans la
haute Syrie fon fils El-Dhaher qui
étoit revenu à Jérufalem, Eu lui fai»
Tant Tes adieux , il lui dit en préfence
de Boha-eJdin qui recueillit ces pa-
rôles remarquables : » Mon fils , vous
valiez régner dans les Etats que je
nvous ai donnés. Mes infirmités me
» Font craindre de ne plus vous revoir*
/ >»Je vous recommande donc , mon
»> fils , pour dernière volonté , d'aimer ,
i» d'honorer Dieu , qui eft la fource de
f>tout bien , Se d'obferver les précep-
„ tes de fe Loi , car votre falut en dé»
(a) Bargiloun ville & PréfeÔure des Pro-
vinces Humées.
J»b Saladin. Liv. XIII. $89
wpend. Epargnez le fane humain,
»j crainte qu il ne rejailhfle fur votre j. & it^lt
* tête. Le fang répandu ne refte ja- Boh#
«mais fans vengeur. (*) Attachez-
n vous à gagner le cœur & l'eftime dç
tt vos Sujets; rendez-leur la juftice-;
»> ayez foin de leurs intérêts comme
»*des vôtres. Vous aurez à rendre
» compte à Dieu de ce dépôt que je
» vous confie en fon nom. Ayez des
» égards, de la condefcendance pour
>> les Emirs , pour les Imams , pour les
t» Cadhis , & pour toutes les perfonnes
«en place. Cen'eii que par la dou- '
»ceur, la modération , fa clémence
»> que je fuis parvenu au degré d'élé*
ovation où vous me voyez. Nous
tffommes tous mortels, o mon fils ,
itainfi ne confervez aucune rancune ,
» aucune haine contre qui que ce (oit.
» Gardez-vous furtout de ne jamais of-
ufenfer perfonne. Les hommes n'ou-
wblient les injures qu'après en avoir
» tiré vengeance ou obtenu fatisfac-
»tion, tandis que Dieu nous accorde
»le pardon de nos fautes , pour un
— — 1 1 — » — mmammm — — — — — ■ ^— 1 — — — *,
(a) Il y a dans le texte : Car Uf*n% répand»
mt dm Point.
Kkii>
3^© Histoire
»fimple repentir, car il eft bienfaï-
ï*c* **î. * ^ant * miféricordieux. « Après avoir
'* adonné ces fagesinftru&ions à fon fils,
il l'embraflà en verfant des larme»
dTattendriffement , & le laHïa partir.
El-Dhaher pratiqua dans Halep les
yertus que (on père lui avoit recom-
mandées ; mais il fut obligé de faire un
exemple de ftvérité pour apprendre à
cet ordre diftingué de Citoyens qui cul-
tivent les Lettres,à refpe&er dans leurs-
difcours & leurs écrits, le dogme éta-
Boh. bli. Il y avoit dans cette ville un hom-
rrSS AFéà *** c#«>rc par fes connoiflan ces autant
Bcn-schtu. que par fbn impiété : il émit Médecin ,
- ëc prenait le tkre de Philûfophe. Il
avoit compofé plnfieurs ouvrages fur
differens fujets , & joignoît à m or-
gueil infupportable un déchaînement
furieux contre la Loi de Mahomet.
Plus on lui impofoit filence , moins if
gardoit de modération. Enfin il fut ar-
rêté, mis en prifon , jugé par les Cad-
his , qui le déclarèrent chgne de mort-
Avant que de faire exécuter la Sen-
tence , El-Dhaher confuha Saladin ^
(a) Il s'appellokSchéhab-eddin Schéhi-
tcrdL
J.C. »t£l«
de Saladin. L iv. XIII. \$t
qui confirma le jugement des Doc-
teurs. Àinfi cet homme féditieux & _hjs- *«*•
vain , paya de fa tête un crime au on
ne fçauroit réprimer avec trop de ri-
gueur , le crime de cent qui aviliflent;
des talens honorables & précieux , en
les employant à décrier la Religion
reçue , & par conféquent le gourer»
nement qui ne peut iubfiftcr fans elle.
Après avoir donné des ordres pooc
Fembellirtement, la défeaic & la po-
lice de Jérufalem , Saladin partit pour
aller viTiter tes côtes de la Syrie y 8c
fe rendre à Damas, où il comptoit fc-
journer Quelques mois , après lefquels
il avoit defteii* de parère* Egypte*
mais la mort le furprk dans cette vil-
le. Lorfqu'il fut à Bérour, Bohémond
Prince d'Antioche vint le voir, pouc
accéder au traité fait avec les Croi-
f es, Se pour lui demander quelques Pla-
ces voifines de (a Principauté , 6c un
rerrein affezr étendu dans la plaine , &
dont le revenu montoit à quinze mille
écus d'or ,. environ cent cinquante mil-
le livres de notre monnoie. Le Sulthan
qui ne fçut jamais rien refufer ,lui ac-
corda cette grâce , & donna même à
(lutteurs Barons Chrétiens qui avoient
Kkiii)
592 Histoire
accompagné Bohémond , les Châteaux
j!c?iipî '. qa'^s pofledoient avant la guerre.
Enfnite Saladin prit la route deDamas;
Il trouva dans cette Capitale de la Sy-
rie , des Ambafladeurs de tous les Prin.
ces de l'Orient qui l'attendoient pour le
complimenter fur fes vi&oires, au nom
*>ha*d. de leur maître.Les Orateurs & les Poê-
les vinrent auflî lui préfenter des Dif-
cours d'Eloquence & des Poèmes faits
en fon honneur , & que les Arabes lï-
fent encore. Le Sulthan jouiflbit enfin
de fa gloire & de PamourdeTes Su-
jets-quM s'occupoit à rendre heureux:
il fe dclafïbit de fe$ fatigues par des
plaifirs tranquilles, au milieu de fa fa-
mille & des Emirs dont il avoit fait
la fa* tune , & qu'il combloit tous les
jours de nouveaux bienfaits : aullï
étoient-ils plus attachés à fa perfonne
qu'à fon rang. Les Mufulmans accou-
xoient de toutes parts pour le voir 8c
l'admirer. Les Citoyens de Damas cé-
lébroient des fêtes, donnoient des
fcftins ,& térhoignoient de la manière
la plus vive , la joie de le pofleder.
Mais cette joie fut bientôt troublée;
La défolarion la plus profonde fuccé-
da tout à coup aux tranfpotts d'ailée
l
I
di Sàlàdin. Liv.XIII. 39$
grefle. Pour comprendre combien ce UST"??*
Prince étoit cher à Tes Supers, il faut i.c.)i^r
voir dans Boha-eddin , avec quel dé-
tail , avec quel intérêt il décrit les cir-
conftances & les progrès de fa mala-»
die , les allâmes , les inquiétudes , les
mouvemens àcs grands & du peuple ,
ledrs plaintes , leurs fanglots , leurs
ctis , leur douleur impétueufe -> fpedfca-
cle attendrifTant que nous avons vu
renouveller de nos jours , pour un Mo-
narque encore pïus armé, & qui mê-
me rant de l'être.
Saladin alla par dévotion au-devant Boh-
des Pèlerins de h Meome:il oublia Aboul~F**
de prendre une efpéce ae vefte qu'il
portoit o/tUnairernciit. Le froid le fai-
fit dans la route ,&: iï fenrît air retour
une grande laflîtude qui fut fuivie d'u-
ne fièvre violente; Le lendemain il fe
plaignit d'avoir beaucoup fouffert pen»
dant la nuit : 'û fit effort pour fe le-
ver , & retomba dans Ton lit de foi-
blefle. Il demanda un peu d'eau tiè-
de pour calmer la foif qui le bruloit i
on lui en apporta de bouillante; il la
rendit » & on lui en donna un moment
après de la froide. »Eh quoi ! dit-il r
» avec fa douceur ordinaire , ne pouw
j?4 HrsroiKH
**rai-je point avoir de l'eau tiédie ?
h&illu ^Q^e''es moeurs „ quel caraâére ! s'é-
* * cria un des Affiftans j fi cela arrivoir
*>à quelqu'un de nous , nous ne man-
querions pas debrifer le vafe contre
»la tête du Domeftique qui nous fer-
»»viroic fi mal. *L*heure du dîner
étant Tenue , Saladin pria les Emir»
de faite compagnie à (on (ils Afdhal*
Onpa(Tadans Hne autre faIle;on ap*
porta les mets; tour le monde s affit ,,
& Afdhal prk la place que fo* père
avoir contume d'occuper. Cette cir-
confiance attendrit les Emirs : ils gar-
dent un morne filence ; la réflexion
&'oute à teu^rrifte fê -, ils n-ofent lever
les yeux ;leur cœur fe reffene ; la Rou-
teur les éroofl c $ ils s'efforcent de re-
tenir ou dfc cacher des larmes qui cou-
lent malgré eux ; ils fe détournent &
fc l.vent ei*firv les- uns après le» au*.
très , pour al Ici pleurer librement à
Fécarr.
Cependant Fe bruit fe répand dâh*
fa vilfe que le Sultban eft eh danger..
À cette nouvelle, on ferme les bouti-
ques ; on transporte le* marchandise?
rfu marché. Les uns vont fe profter-
met dan* k% Mof^néesr, les autres cou»
»b Sàlàihn. Liv. XIII. }y/
rent au Château : on affiége les por-
tes 5 oh arrête tout ce qui fort ; on in* J* cai*£
terroge les Médecins j on cherche à
lire dans leurs yeux , fi Ton doit e£-
Npérer ou craindre. La consternation
des Emirs palTe dans tous les cœurs r
©n crie , on pouffe des hurlemens 5 01*
fe livre aux accès du défefpoir. La*
ville eft pleine de tumulte & d'effroi r
on ne connaît plus de diftinâion : les
grands & le peuple également défb-
ïes,fè mêlent , s'égarent dans les rues>
confondent leurs fanglocs ; les hom-
mes paffent les fours & les nuits à la
porte du Château , les femmes pleu-
rent dans FiïKétieu* dea> œaifons * les»
Prêtres adreflènt des prières au Giel :
tous refïêntent If^douleur des enfans
qui font prêts à perdre un père tendre-
ment aimé , tous-voudroient donnée
leur vie pour Cuwer celLe dt leur maî-
tre.
Pendant Te peu de fours qui! vécut
erteore , Saladîn s'occupa à donner des
înftruéHous à foa fils Afdhal , qui lu*
foccédoit dans fe Royaume de Damas »,
& à recommander aux Emirs d'aider
de leurs fages confèil? ce Prince & Ce* -
autres en£aitf» Il fie «Uftribuer de&au*-
\$6 HlSTÔfKË
Urgirc g mônesàtous les pauvres, même au*
J.c. fIjj. Chrétiens indigent qui fe trouvoient
dans la Tille-' Comme il avoir tour don-
né pendant fa vie, Se qu'il ne s etoic
jamais * fen réfervé pour lui-même , on
fut obligé de vertdce fes bijoux & Ces
meubles. Une de fe* feurs (^char-
gée de cette ctuvre de Ghariré , ajouta
les propres effets pour rendre cette au*
moue plus abondante* Nos Hiftoriens
contemporains difent que leSulthan
avant que de mourir,, ordonna à TOk
licier qui portoit ordinairement foi*
étendard dans lès armées?, d'attacher
au haut d'une tance le drap dans le-
quel il devoitêtreenféveli , & de crier
dans les mies de Damas , en le mon-
trant au peuple : Pg$a te que Soltâi*
Vainqueur à* V Orient emperte de fes cm-
ijHCtCS.
Enfin , le douzième jour de fit ma*
Iadie , Mercredi vingt- iept Séfer i fé-
cond mois de Tannée Arabique , l'an
cinq cens quatre-vingt neuf de-PHé*
gire , dans le mois de Février , onze
cens quatre-ving-treize de Jéfus-
■ ' » ■ ■ ■ k
(a) Elîe fe nommoit Sittalfchas* ou Siî—
Jab-Alftham»
be Salàdin. Lîv„XIII. 397
Chrift , Saladin termina fa carrière à
l'âge de cinquante-iept ans Lunaires. Hésire ^
Il en avoir régné vingt-deux en Egyp- J*c* ll9ié
te depuis la mort du Khalife, & dix-
neuf en Syrie, depuis celle de Nour*
£ddin. Son nom entier étoit, Snlthan,
Aiderai- Najfer , SaUh-eddirt >cmir eU
Jl4ou menin, Aboul Modhajfer, To^ffouf
btn Ajoub , btn Schadj; celt-à-dire ,
Sukban ou Empereur, le Roi défenfeur
5alah-eddin , ( Salut du monde 8c He
la Religion) Commandant des Fi»
déles , père vainqueur , Jofeph fils dç
Job fils de Sçhady.
On peut mieux imaginer que d'é-
crire la défolation des Habitans , lors-
qu'on leur dit: le Sulthan eft. morts 8c
locfqu ils virent plufieurs enfans de Sa-
ladin qui étoient encore dans un âge
fort tendre , fortir tout à coup du Châ-
teau, les habits déchirés, tendre les
mains vers le Ciel, implorer la pitié
du peuple j 8c parcourir entraînés par
Ja douleur , toute la ville , fuivis des
Citoyens qui ne leur répondoient que
par des fanglots, Boha-eddin, en dé-
crivant ce trille fpe&acle , & l'effet
qu'il produisit fur les efprits , obferve
que lorfqu'il avoit entendu dire que
J9$ H ISTofRt
des hommes fe dévôuroient à la mort
Hég. 589. pour autres hommes , il avoir pris ces
expreffions pour de vains témoignages
de zélé, mais qu'il comprit alors par la
propre fîtuatîon de (00 ame , & par le
défefpoirdetous les Mufulmans , que
tous euflent volontiers facrifié leur
vie pour la rendre au Prince qu'ils* ve-
noient de perdre. Le deuil fur géné-
ral dans tout l'Empire , & même dans
tout l'Orient* On pria pourSaladin
dans les Mofquées de la Mecque Se de
Médine , honneur qu on ne rendoit
qu'aux Khalifes , & à quelques Sou-
verains qui s'étoient le plus diftineués
par leur bravoure , leur juftice , leur
humanité & leur Religion.
Saladin fut d'abord enterré dans le
Château, dans l'appartement même
où il étoit tombé malade; mais quel-
que tems après , Afdh**l ayant fait éle-
ver un tombeau auprès de la Mof-
quée > fon corps y fut transporté avec
pompe; & 1& plupart des Ajoubites af-
filièrent à cette lugubre cérémonie.
Si ce Sultban emporta Teftime &
les regrets de tous les peuples, peu de
Princes méritèrent ces fèntimens par
tant de vgrtus. Les Chrétiens eux*
©eSaxadin. Liv.XIII. 399
mêmes n'ont pu s'empêcher de lui
rendre juftice : ce fonteux qui m'ont J1** *8ï>'
éourm une partie des traits répandus
dans cette Hiftoire : j'ai été obligé
d'en retrancher plufieurs qui paroî-
troient minutieux à nres Lefteurs.
Saladin obfervoit avec tant de fcru-
Î)ule, les préceptes de l'Alcoran , que
es Mufulmans font mis au nombre
de leurs fajnts. Il fit bâtir dans toutes
les villes principales, des Mofquées,
des Collèges , des Hôpitaux ; il prenoit
fous fa proteftion , les Vieillards , les
Orphelins ,& nourriffoittous ceux qui
étoient dans l'indigence. Ceux-là fe Boh
trompent, qui prétendent qu'il mou-*£°"îph#
rut eh philofophe ; il vécut & • iou- Hift. pat.
rut en dévot. Il femble à quelques ^Hc.bf «c
Ecrivains de nos jours , qu'il ne puifle al"-
y avoir de véritablement grands hom-
mes, (ans cette philofophie qui con-
fifte à n'admettre aucune Religion -,
ils fçavent cependant que la Religion
eft encore plus le lien qui attache les
Princes aux Sujets,que celui qui attache
les Sujets aux Princes ; que rompre ce
iien , ç'eft donner toute liberté à des
hommes qui peuvent tout entrepren-
dre impunément ; 5c que s'il n'y avoit
4oo Histoire
point de Religion , il faudrait peut*
j!c? i\9u ?tre> Pour 'e ^xtn ^e l'humanité, en
fabriquer une exprès, pour oppofèr
un frein redoutable aux paflîons des
Souverains.
Saladin , loin de méprifer la loi de
Mahomet , en adoptoit même les pra-
tiques les plus fuperftkieufes. Ce dé-
faut, qui dans le refte des hommes,
annonce de la foiblefle dans l'ame m
étoit joint dans lui , à beaucoup de
courage ; parce que l'idée d'une de£
tinée irrévocable, qui régie tous les
événemens de ce monde , infpire
de l'intrépidité à tout dévot Muful-
man , furtout dans des guerres entre*
prif^s pour la gloire de PlflamiGne. Il
s'expoibit fans crainte à tous les dan-
gers \ avant la bataille , il avoit coutu-
„ jrçe de courir à cheval , entre les deux
armées , fuivi d'un feul Ecuyer : pen-
dant Fadtion il étoit le premier dans la
mêlée. Quelquefois il s'avançoit fort
près des Francs ; & sarrêtant tout-à*
coup , il fe faifoit lire des chapitres de
J'Al-coran , tandis que les Chrétiens
lançoient fur lui des flèches Se des
traits. Ennemi du fafte & de la mo-
lette , il portoit des habits fimples y
vivoit
J C si?**
deSàlàdin. L iv. XIII. 401
vi voit de peu, ne fe nourriffoit que '
de chofes communes ; fa tente étoic la ,H*S; jf*
moins magnifique de toutes : endurci
aux fatigues y il fe levoit avant l'Au~
rore , faifoit tous les jours des courfes
à cheval , travailloit dans les fïéges
comme un fimple Soldat, préfidoit
à toutes les attaques , dirigeoit les ma-
chines, montoit le premier à 1 aflaut ,
& donnoit à fes troupes l'exemple de
la difcipline , de la fobriécé , de la
confiance & du courage qu'il vouloir
leur in foirer.
Ce fut l'envie d'acquérit un noi*-
veau genre de gloire & d'héroïfmc*
qui le détermina à fe fairearmer Che-
valier, ne voulant point céder à ces
braves Paladins ,. qui rempliiïoiehr le
monde du bruit de leurs faits d'armes
& croyoient avoir feuls en partage la
véritable valeur. Je ne prétends poin*
garantir ce fait atteflé par nos an-
ciens Ecrivains , furtout par l'Auteur
.de l'Hiftoire de Jérufalem , & dont
. on trouve les détails dans un manus-
crit (*) qui paroit écrit du teins. On
(a) Voyez à la fin de cet ouvrage pièces
justificatives , n?» t?
Tmc/I. Ll
4oi HrsToiiti
' varie feulement dans les circonstance*
"^•^g9*de cette cérémonie , & dans le non»
du Baron Chrétien qui conféra la Che-
valerie au Sulthan. Les uns difenc
qu'il fut armé C hevalier âbns un reur-
sioi , par Honfroi do Th^ron -, d au-
tres , après une bataille par Hugues-
de Tibcriacte (on prifonnîer. Quoi
qu'il en (oit, voici comment ces der-
niers racontent ce fair»
Sala lin ayant vaincu les Chrétiens^
'on lui amena pluiieucs priionniers de
diitinâion, parmi lefqueifr étoît Hu»
gùes de Tibériade Prince de Galilée*
IlcommHoitcectérmer* dont il adou-
cit Ufervitude par des témoignage»
de bonté. Un four rayant interrogé
fur les lof* & les privilège* de ut
Chevalerie r il le preflà de lukcpix-
lerer a lui-même cette dignité. Hop-
Sues rçfufd d'abord de fe rendre aa
efir du Sulthan , Se céda enfin à de
noir elles rnftances. A^anc préparé:
tour ce qui étoit néœffaire , if arran-
gea les cheveux & ki barbe de Sala-
din, fe mit dans un bain r doà il le
fîr couche* dans-un litrour neuf; il le
rcvèit dîme robe blanche & par-
dellut cTuae sql>c rouge i eufuite U
««**•
»b Sàiàdin, Liv.XirT. 40?
foi donna des chauffes noires , le cei-
gnit d'une ceinrure blanche , attacha H6s 1*'
un éperon d?or à ks pieds & une épée ' c ' **'
à Ton côté ; mats il ne voulut point
par refpeft lui donner l'accolade. A
chaque cérémonie il s'arrêtoiu pour
lui en expliquer le fens
Si l'on révoque en doute la Cheva-
lerie de Saladin fondée fur quelques
preuves & (ur la poflibilité , comment
pourroir-on adopter le fenriment de
ceux qui prétendent que c croit lui-
même , qui eut dans Antioche , \m
commerce criminel avec la Reine
Eléonore ; qu'il étoit né (Tune femme
Chrétienne, qu'il fur baptifé dans for*
enfance , enfin qu'il voyagea en Eu-
rope ou it eut piufieursnavantures l
idées bizarres accréditées par nos an-
ciens Romanciers, & dont le Doéfceur
JLami (4) par un projet non moins
t>izarre> a voulu prouver là vraifem-
«blance de quelques-unes.
Mais un trait d'Hiftoire qu'on rap-
porte avec plus de complaifance , 8C
par malheur avec auffi peu deraifon ».
e'eft ce qjjii concerne une branche ca-
C*ù Voye&fes nouvelles littéraires*.
Uij
404 HlSTOIHÎ
dette de rflluftre maifon d'Ànglute:
3*0" xî*9 ^n^c qu*™ Seigneur de cetfe mai-
fon , fait prifonnier par Saladin , eut
permiflïon de pafler en France pour
y lever (à rançon , promettant de re-
venir , s'il ne réuffiflbit pas à formel
la fomme néeeffàire 5 que , comme
un autre Régulus , il alla fe remettre
en efclavage ; mais que le Sulthan
touché de cette générofité le renvoya
libre avec des préfens fi confie! érables,
que d'Anglure fit bâtir avec cet ar*-
gent, le Château de Jour en Bour-
gogne. (4) On ajoute qu'en mémoire
de ce bienfait, lès aînés de cette fa-
mille ont porté le nom de Saladin , &
fiir leurs armes des grelots d'argent
foutenus de croitfans de gueule, au
lieu d'une croix ancrée de fable qu'ils
avoient auparavant ; mais, iQ. la
branche delà Maifon de Poitiers du
nom d'Anglure n'étok pas encore
'a) Ce Château eftà une petite lieue du
Château du fameux Bufll Rabutin , qu'on
appellt. Xuffi / Grand : on voit furie toit,
deux petites figures armées , qu'on dit être
celles de Saladin & d'Anglure. On raconte &
même Hiftoire pour leCJhâteau même d'An-
glure eu Lorrains
BE S AL A» IN. L IV. XIII. 40}
formée du tems de Saladin : ainfi ce
fait ne pourrait regardée qu'un des "*J^
«deux Saladins , qui régnèrent , • l'un à
Damas l'an fix cens vingt-fix de l'Hé-
gire , douze cens vingt-neuf de Jefus-
Chrift -y. l'autre dans kr Principauté
d'Halep , 1 an fix cens cinquante-hufo
de l'Hegire , douze cens foixante de
Jefus* Chrift. z9. Il ne paroît pas que *
Saladin ,. ni fes Succefleurs euflène
pour armes des CroifTans. Je crois que
c'eft Othman ou Othoman qui mit le
premier un Croiflànt fur fes éten*-
dards dans le quatorzième fiécle , à
l'occafion de je ne fçjds quel Congé;
5.0. Les Auteurs qui font mention de
ce fait,varient dans tant de circonftan-
ces, & violent fi ouvertement les ré-
gies de la Chronologie & de l'Hiftoire , .
qu'ils ne méritent aucune foi. (a)
Si on ne peut attribuer à Saladin;
cette a&ion de générofité , on a vu
dans le cours de cet ouvrage , combien
il en étoit capable. Sa clémence , fa
(a) Voyez Pallibt de la feience dés Armoi-
ries, Moréri, l'Auteur de la Nobleffe dèr
Champagne &c. & un manuferit Latin que
je rapporterai , à la fin de cet ouvrage piétés-
juftificativesjn^iv*
4*6 HlSTOIK*
jutffce , fe modération , fa libéralité r
Jî"i ,ff j.# bien plus que fesconquêtes , ont rend*
ùl mémoire prérieufr à tous les Mu-
Aifmans , & à tous cent qui fçavenr
eftimer h verta; Peu de Princes onc
tant aimé à donner. Maître de l'Egy-
pte , de la Syrie , de l'Arabie heureufe
& de fa Méfopotamie qui lui payoit
tribut t il ne laiflk? dans Tes coffres »
que quarante-fepr dragmès d'argent
te un (eut ecu d'ôr. On rat obligé d*em*
prunter tout ce qui fervit à (es funé-
railles : il n'avoir , ni maifon , ni jar-
din , ni ville, ni terre qui lui appar*
rfïit en* propre. Ceux dé fes entons,
qu'il n'a voit pourvus d'aucun Gouveri
nement, à caufe de leur grande jeu*-
nette , furent réduits à- fe mettre au
fèrvicede leurs fteres ou de leurs on*
e\es, pour avoir la fubtiftance. Sala-
din ne mit fur fes Peuples, aucun nou*
vel impôt; il les diminua tous & eir
abolit plufienrs , malgré les guerres
Îu'il eut à foutenîr pendant fon régne*
l donnoit des villes , des Provinces
entières, ne fe refervant que le do~
snaine dired. Seulement au fiége de'
Ptolémaïs , if fi* prck nt à fes Emirs,,
de plus de douze mille chevaux de
© r S al A d i h» 1 1 v. Xlir. 4pY
prix , fa nsr compter ceux de moindre .
râleur qu?il diftribuoit au* Soldats : ce j?c* ,î*£
n'eft point une; exagération, mais un
fait attefté par les Officiers de fesécui-
ries- Ses profufîom excelffves* le fai-
ioienr manquer fouvent du néceflàire;.
Aufli fou Tréforier av^it coutume de
garder à fenv infçu , quelque argent
pour les beioins predans ; mais Sala-
din rendoit cette précaution inutile »,
en faifam vendre Ces meubles , lorf-
qu'il n'avoir plus rien adonner»,
Sa juftice étoir égale à fa magnifia
cence:il tenoit lui-même fon Divan r,
tous les lundis & les jëudîs , aflifté de
fes Ca<Hiisv foit à la ville- y foit à l'ar-
mée : les autres jours de ràfemalnef.
il5 recevoit les placées r les Mémoires ^
les Requêtes>& jugeoit les affaires prêt
fées. Toutes les perfonnes fans diP*,
tinftion de rangs <Fàge, dé pays , dfe
Religion t trouvoient un accès libre
auprès de lui : les Mufulmans , le»
Chrétiens, le9 fujers, les étrangers,,
les pauvres, les riches, tous étoient
adftiîs à fon Tribunal , & jugés félon*
les loix, ou- plutôt félon l'équité natu-
relle. Son neveu Téki-.edcfin ayant été rbug.
attaqué par m* particulier., il le forç^ r '
4of - Hi.stoi.hï
de coroparoître. Un certain Omar
Hég. 589. marchand d'Akblat, ville indépea->
j. c. >i>3. dante jesaladin , eut même l'a har-
diefle de préfenrer une* Requête con-
tre ce Monarque devant le Cadhi de
Jérufaïem > à 1 occafion d'un efclave
dont il reclamoit la fucceffion que le
Sulthaiï avoit recueillie. Le Juge
étonné avertit Saladin des prétentions
de cet homme ,- & lui demanda ce
qu'on devoit faire* Ce qui ejijujie , ré-
pliqua leSuïtkan* II comparut au jour
nommé , défendit lui- même fa caufe 9
la gagnai & loin de punir la témérité
de ce marchand , il lui fît donner une
groffe fomme d'argent, voulant le
récompenfer d'avoir ea aflez bonne
opinion die (on intégrité , pour ofer
réclamer fa juftice dans (on propre
Tribunal» fans craindre qu'elle y fût
violée.
Mais (es Sujets abufoient (buvent de
cette facilité -, ils l'importunoient à
toutes les heures du jour , de leurs que-
relles & de leurs difcuffions particuliè-
res. Un jour , après avoir travaillé tout
le matin avec fes Emirs & fon M£-
niftre ,, il s écarta de» la foule pour
prendre quelque repos. Un Efclave
▼iht
J.C* l'y*
*e Saxadin. Lir.XHl. 40£
"vint dans cet inftanc lui demander au-
«Jience ; Saladia le pria de revenir le Hég. *$* .
lendernain-j) Mon affaire, répondit Tr*,ttW
^TEfclave , ne foufFre aucun délai **
& lui jet ta Ton mémoire prefque fur le
YÎfage. Le Sulthan ramatïa ce papier
fans s'émouvoir, le lut , trouva la de-
yn$nde jufte , & accorda ce qu'en fol-
licitoit \ enfuite fe tournant vers fes
Officiers qui paroiflbient furpris de
tant de bonté ; <tt homme , leur dit il ,
m m a point pffenféi je lot ai rendu juf-
tiee , & foi fait mon devoir. Une autre
fois , tandis qu'il dclibéroitavecfes Gé-
néraux fur les opérations de la guerre ,
' une femme lui préfenta un plactt. Sa-
ladin lui fit dire d attendre. Et pour-
quoi,sien* t'elle , êtes vous notre Roi9
fi vous ne voulez, pas être notre Juge ? Elle
A raifin , répondit le Sulthan; il quitta
i aflèmblée f s'approcha de cette fem-
me , écouta fes plaintes > & la ren-
voya fatisfaite.
Telle étoit fa clémence , qu'il ne pu-
nit jamais aucune offenfe perfonnelle.
Cette vertu dégénéroit fouvent en
foiblefle , & nuiioit au refpe&qui lui
étoit dû. Nous avons vu dans cette
Hiftoire combien il pardonnait faci-
TomoIL Mm
41 o Histoire
lement. Les injures, les paroles cm- -
j/cfiîju. nageantes , quelquefois unedéfobéîC-
' fance ouverte, rien ne lui faifoit per-
dit l'a modération. Son ame qui' ne
fut ramais troublée par aucune paC
fion violente , ne connut point la co-
lère ni la vengeance qui en eft une
fuite, La Religion feule . & l'inhu-
manité des Chrétiens lérendirent quel-
quefois cruel contre eux-mêmes. Ses
Domeftiques le votaient; Ces tréfbriers
détournoient fes revenus à leur profit,
(ans encourir d'autre peine que celle
d'être privés de leurs emplois. Deux
Mameluks fe difput^nt à quelques pas
de lui , un d'eux jetta (à pantoufle con-
tre l'autre: celui-ci ayant efquivé le
coup, la pantoufle alla frapper le Sul-
than : mais ce Prince feignant de ne
s'en être point apperçu , fe tourna d'un
autre côté, comme pour parler à un dé
lès Généraux , afin de n'être pas forcé
de punir l'Auteur decettea&ion. Dans
le tems qu'il étoit le plus irrite contre
•les Francs , à caufe de la cruauté de
Richard > & qu'il faifoit trancher la
tête à tous ceux qu'on prenoit dans les ,
combats, on traîna dans fa tenre un
Officie: Chrétien faifi dune frayeur
be Sa lad i h. L iv. XIII. 411
mortelle. Saladin lui ayant demande
le motif de fa peur: Je tremblou Jui ££,££
dît l'Officier , e» approchant de votre per-
fonne ; mais foi cejfe de craindre en vous
voyant: un Prince dont F ajpetl ri annonce
que de la bonté & de là clémence , ne
peut avoir la cruauté de me condamne*
à mort. Le Sukhan fourit , & lui don-
na la vie & la liberté.
Nous femmes forcés de paffèr feus
filence plufieurs anecdotes iemblables
rapportées avec foin par les Auteurs
Mahométans , & qui toutes font hon-
neur au Prince dont nous venons d'é-
crire THiftoire. La douceur , l'huma-
nité, la bienfaifance, la Religion, la
Juftice , la libéralité , formoient fot*
caraâére particulier .On nous apprend
que fa figure imprimoit encore plus .
d'amour que de refpeél ;qne fon re-
gard n'avoir point cette fierté qui an-
nonce quelquefois les maîtres du mon-
de ; que lès difeours étoient fimples,
polis , naturellement éloquens ; mais •
que ion imagination ne s'éleva jamais
à Ut poefie , & rarement à ces figures
hardies , à ces métaphores fi familiè-
res aux Orientaux. 11 cultiva un genre
d étude bien frivole & tres-eftimépar
Mm ij
+it Histoire
-^ les dévots Mufulmans , celui .de cqb*
Hig. î*j- noîcte toutes les traditions Mahomé-
J* C' li9i' tanes , les explications de l'Alkoraa,
les fentimens divers des Interprètes,
les opinions différentes des écoles , Se
fc plaifoit à difputer fur ces matières
avec les Prêtres & les Cadhis. Il &-
Torifa peu les Poètes & les Di*le&-
«iens fort communs alors dans 1 O-
yient, combla de bienfaits les Doc-
teurs de la Loi , & ne perfécuta que
les Ecrivains qui ne reipectoient pas
dans leurs ouvrages les mœurs & la
Religion. Il n'avoit aucune de ces
grandes pallions qui font fortir les
hommes de la fphére commune, pat-
fions fi funeftes à l'humanité-, lorl-
ou'elles agitent lame des Souverains,
plus grand par fes vertus tranquilles
& pacifiques , que par fes exploits guer,
tiers , la nature fembloit 1 avoir déto-
né à la vie privée plutôt qu'au Gouver-
nement d'un Grand Etat. Il manquoic
<le cette fermeté fi néceflaireaux Prin-
ces, pour foire refpefter leur puiflan-
(Ce. Il ne put jamais établir unefevere
:difciPline parmi fes troupes ,& con-
tenon fes Emirs plutôt par fa douceur,
par fes vertu* & par fes largefles, que
ûe Saladin. LlV.XItI.4t)
par le frein de Con autorité. La fortune
le plaça d'elle-même fur un trône qu'il j **?*; J * J;
n'ambirionnoit pas j la néeeffitéde s'y
Ibutenir le rendit ingrat envers fes
bienfaiteurs : la Religion plus que la
politique , lui mit les armes àla main,
Se lui fit verfer du fang qu'il avoir
horreur de répandre.
Je ne prétens pas au refte jiiftîfier
fa conduite à l'égard de la famille de
Nour-eddin. Nous ne pouvons le re-
garder que comme un Ufurpateur in-
jufte Se cruel : mais fi l'on remonte K
ces rems de trouble où tout étoit con-
fondu dans l'Orient ; à ces teifis oft
l'Empire des Arabes déchiré par tant
de Nations , n'avoir proprement pour
Souverain légitime , que le Khalife
qui Tétoit à peine de Bagdad ; fi l'on
confidére que les Atabeks, (*) ufurpa*-
teurs eux-mêmes, avoient dépouillé
les Seljoucides ,(£) leurs maîtres & le*
opprefleurs d'autres Dynafties ; fi l'on
bbferve que dans une Religion qui ad-
met urr deftin qui fait tout fans le
concours des hommes , perfonne ,
* (a) Voyez PIntrrodudtion & ailleurs*
(*) Voyez -llattvdq^onr
Mmi^
4I4 Hl JTOlRt
comme die le célèbre Auteur de VEC-
XcVift Pm <*es Loix , n^ft Souverain de
droit , on ne l'eft que de fait : enfin fi
Ton fait attention à 1 état critique où
étoit alors l'Orient , à la puiilance des
Francs prête à envahir toute la Syrie
& la Mcfopotamie , à la néceffiré d op.
poter une digue aux irruptions fré-
quentes des Croifés , à la foibleiTe de
Saleh (a) Se des autres Atabeks , à leurs
dividons , à l'in'uftice de leurs Mi-
nières envers Saladin , à l'impreflïon
que fait fur un dévot l'idée de fe
croire appelle par le Ciel au trône ,
{jour en iourenir les fondemens ébran-
és, pour protéger la Religion oppri-
mée , pour punir les ennemis de Tlfla-
mifme, & à d'aurres confidératrons ;
peut-être trouvera -t on le Sulthan
-oeaucoup moins coupable.
Mais s'il leroît,fes grandes Quali-
tés femblérenr légitimer fa puifîance.
Dans un Etat où Ips droits à ^a Cou-
ronne ne font pas encore établis , ce-
lui la doit la porter qui peur faire le
plus de bien aux hommes. Sans
, , *—
(4) Saleh fils de Nour-eddin. Les autre*
AtabeJb Soient fes pscles ou fes coufr^
9E Salàdin. Liv.XHI. 41;
. es guerres dans lefquelles S&ladin fut
entraîné, Ton peuple eût été peut-être j#Hcggî?*.#
Je peuple le plus heureux de la Terre,
H eft mort , s écrie un Poëte Arabe (s)
dans une Elégie compofce en l'hon-
neur de ce Prince 5 // eft mort ce Mo-
n arque bienfaifant ; & le Convenir défis
bontés ne s'effacera jamais de nos efprify v
Xtt vertus ont été enfevetits dans le me-
tte tombeau. Lagénérofité , la juftice , la
bonne foi , la félicité publique ont cejfé
svec lui , & après lui les haines , Us ra-
pines Jes injujticcs réprimées pendant fin
règne, ont de nouveau défilé le genre hu-
main. Le Ciel a perdu fa lumière , le
monde fin plus bel ornement , la Religion
fin défenjeur , [Empire fin appui, ,
» Mais , difent deux Hifto riens Philo-
sophes, (b) Tes Ews déchirés par des
» guerres civiles , forent envahis par
» (on frère À Jel , & payèrent enfin en
»des mains étrangères , comme ceux
* de tant de Conquérans , dont pref-
t> qu'aucun parmi les Princes Maho-
»métans,na tranfmis fa fucceffion
#à fes héritiers légitimes , exemple qui
■ ■' ■ 1 11 1 1 ii mm
(<x)Omad, el-KatebouElimad.
V>) Ben el-Athir &Makrifi.
M m iiij
4ttf HisToms »e Sal. &c,
rapprend aux ambitieux combien (but
EgI jiÎ j. * fwg^*8 'es grandeurs humaines 5 &
* jjjnfte punition contre tant de Rois ,
*qui pour fonder leur Empire, ont
s» inondé la terre de fang.
fin du treitJeme & dernier Livr$ âf
(HijUire de Sdladi*.
=afc=3
DYNASTIE
DES AYOUBITES.(a)
APRE* S la mort de Saîadfiï, *** *»
(on Empire fe trouva divitè*' 17*K
entre autant de Souverains qu'il nui. Pacp.
7 avoit de Gouverneurs de Places r *5>ou} ^
mais , parmi tous les enfans qu'on dit Hift. de»
avoir été au nombre de quinze ou de hum,***
rfix-fept , (Jr) trois feulement eurent
■ ' ■ <i
(a) Nous avons dît plufieurs fois , que cette
Dynaftie fut ainfi appeilée d'Ayoub père de
Saladïn.
( b ) i. Malek Afdhal Nôur-edcîîn Aiy..
a. Malek el Dhafer Khadar. 3. Malek,
Cothb - eddin Moufa. 4. Malek el Aziz-,
Emad eddin-Othmaiï. 5. Malek el-Aazz
Yacoub. 6. Malek el-Dhaher Gaïath-eddiir
Ghazi. 7. Malek Ezzaber Daoudf. 8. Msv-
lek el-Moëzz- Ishak* 9. Malek el-Mouïad
Mafoud. 10 Maiek el-Afchraf Mohamed,
xi. Malek el-Mohfan Ahmed. 12. Malek
cl Ghaled Malek Schah. 13. Aboubekr eh»
Nofra. 141 Malek ei-Moadham Touraiw
^cbgi.]Ut autr^ a« font pas nompiés. 0ç
-;4i8 Dynastie
un Etat confidcrabte. Afdhal ou Àpft-
dhal, qui étoit l'aîné . de tous , reçue
en partage le Royaume de Damas ,
Aziz celui d'Egypte & Dhaher , celui
«FHalep. Plusieurs de leurs frères ou
de leurs cou fins ou neveux eurent pour
appanage des villes particulières dé-
pendantes de ces trois Royaumes: mait
si s'en forma bientôt un quatrième qui
engloutit tous les autres, Adel qui po£
fedoit Krak 9 vSchoubek & une grande
Ertie des villes de Méfopotamie , dé-
ucha par les careflès & par Ton ar-
gent, prefque tous les Emirs & les Sol-
dats indfgnés de la mollette & de»
débauches des enfans de Sàladin,
La mort du Sulthan fut le fignal qui
fit armer toutes les puïffances voidnes
aux dépens defquelles il avoit fondé
ion vafte Empire.Heureufement la dit
corde qui régnoit parmi ces différent
Princes , non moins que parmi les
Ayoubites , leur fit perdre à tous l'oc-
cafion de fecouer le Joug. Mazoud Roi
fçait le nom d'une de fes filles qui s'appettoî*
Mounifa Khatoun mariée à Malek el-Rame^
neveu de Saladin
(4 Malet el-Adel Séi£«d<fia Aboubetr
'Mohamed '
»E5 AYOUBITES. 4J9
de Moulïoul qui avoir le plus à fe
plaindre , encra le premier en campa-
gne -y mais trop de lenteur rendit fu-
nefte une entreprife qui devoit aug-
menter (a gloire & fes Etats- Au lieu
de marcher fans délai dans la partie
de la Méfopotamie occupée par les
Ayoubites , il voulut faire concourir à
cette expédition les Atabeks établis à
Sindgiar , dans le Dgéziret Ben-Omar
ôc le Prince d*Arbelles. Ceux-ci refi-
rent beaucoup prier de prendre part
à une guerre qui ne les intêteflbit pas
moins que le Roi de Mouffoul. Pen-
dant toures ces négociations , Adel
averti de leur detfetn partit de Krak
avec les troupes d'Egypte & de Syrie m
pafla TEuphrate & vint affréter hii-
même dans Néfibin les Atabeks , dont ,
l'armée n'étoit point encore raflem-
blée.
. Sa* politique non moins freurcufe
ue fes armes , fçut répandre la divi-
ion parmi fes ennemis , tandis que
pour écrafer fes neveux les uns après les
autres , il attifoit le feu de la guerre
civile qui sallumoit entr^ux» Aziz
& Afdhat fe difputant quelques villes»
prirent poui; arbitre de leur querelle >
fi<
4*6 Dynastie
letfr oncle, qui loin de les appaifef *
les irrira encore plus l'un contre l'au-
tre. Enfin il le déclara pduf le Sulthai*
d'Egypte & lui fournit du fecours ,
mais à des conditions qur n'étoient
Hcé ,9i. avantageufes qu'à lui-même. Adel &
j, c. n>*. ^zjz attaqUérent Afdhaï> lai enlevè-
rent toutes fes Place* r & te forcèrent
d'aller fe renfermer à Samofath qu'où
voulut bien lui Iaiffer. Aziz fut recon-
nu Sulthan de Damas ; mais en rece-
vant les honneurs de Souverain , il eifc
céda tous les droit* à fott oncle , qui
fut fait Atabek ort Gouverneur géné^
rai de ce Royaume.
Aprèsavoîr iitrpïoré Vainement Tafl
fiftance de Dhaher Roi d'Halep & des
autres Ayoubites , Afdhal porta fe*
pïainres au Khalife Naferril lui adreffa*
nonunManifefte, mais un Poëme qu'il
avoir comppfé fur Ces malheurs \ car
ce Prince aimoit & culcivoit fa Poe-
fie , ainfi que la plupart des Rois Szr-
razins de ce fîéde & des tems anté-
rieurs : il difbit entr antres chofès au
Pontife :»Aly (le Khalife) fut dé-
» pouitlé de tous fes droirs par Abou-
*bekr , 8c par Orhman. Voyez quelle
»eft la xnalheureufe deffinée de ceux
DES AyOUMTHS, 4t£
•»>qui portent ce nom. Aly vient en-
*core d'être chatte de tes Etats par
s>Aboubekr £c par Othman, u Pour
l'intelligence de ce$ paroles , il faut
fçavoir que Ton oncle s'appelloit Adel
^iboubekr , Ton frère Aziz Othman , &
lui Afdhal /#/;. Nafer lui répondit éga-
lement en vers , lui fit de grau Jes pro-
Uiefles , & n'eu tint aucune ; mais tan-
dis que tout abandonnoit ce Prince»
la fortune le tira tout à coup de fou
^bâillement f où il retomba quelque
tems après.
Aziz que les Arabes louent pour /a h%. * »s.
continence dont ils citent un exem- J,c' tlV*
pie fingulier que nous ne pouvons rap-
porter qu'en Latin , (a) mourut au
Caire , &: ne laifla pour héritier qu'un
. enfant âgé feulement de neuf ans. Les
Emirs perfuadés qu Adel profitant de
< a) Ltudstur (Aziz) * c/mtsnentia , quoi
tntnctfium Turcicum forma fricellenfi dem*
êxfnleru , quamvïs emtttm aureis mille : cum
enim femelfibi adjltret in concUvi , <$• ejus
fttlchritudine caftvs, nudw illum juffiffet ,
fl*tim peenitenti* du&us , a feelete abftinnh %
fed it* tatnen utfimtim in Gyn&etufn entrent ,
tum una ?*** occurrit , concubin* , Vtbidinem
êxçleret. H. Pat.
4** Dynastie
lafbibleflè de ce Prince nommé Man-
zour , uftuperoit l'Egypte , comme il
setoit emparé du Royaume de Da-
mas, déférèrent le Sulthanat à Malek
Afdhal qui vint dans l'inftant au Cai-
re où il fut couronné. Ce bonheur re-*
leva fon courage & fes efpérànces : il
fe ligua avec fon frère Dhaher Roi
tfHafep , & ils marchèrent enfemble
dans la Syrie. Adel qui aflîégeoic alors
Marédin , Iaifla fon (ils Kamel dans la
Méfopotamie, & vint fe renfermer à
Damas pour défendre cette ville conn-
ue fes neveux. Malgré fes efforts 6c
fa bravoure, il alloit être forcé dans
cette Place , lorfque la difcorde di-
vifa les deux frères. Dhaher fe retira
tout à coup dans fes Etats avec la plus
grande partie de l'armée. Afdhal ne
pouvant tenir la campagne avec le peu
de troupes qui lui reftoient , courut en
Egypte où il fut pour&ivi par fon on-
cle qui lui enleva ce Royaume, & le
renvoya dans la ville deSamofath. Adel
gouverna d'abord l'Egypte au nom de
Manzour ; mais laflé bientôt de cette
politique ,ila(Tembla les Prêtres & les
Cadhis, & s'empara du fceptre par un
jugement femblable à celui qui mit
DES AyoUBITÇ S. 41 j
(Mon l'opinion commune, Pépin fuc
le trône de France, (a)
Après s'être afluré de ce Royaume,
ri partit pour la Syrie & la Méfopo-
tamie , oi\ il fit de nouvelles conquêtes
fur les Francs , fur les Ayoubites& fur
les Arabeks. Pendant fon abfence ,
les Chrétiens vinrent aflïéger Damiet-
te i mais (ans fuccès : ils furent plus
heureux l'année fuivante , Se s'en ren-
dirent maîtres. Àdel qui retournoit Hég. ci**
en Egypte pour fecourir cette ville, J. c.m>#
mourut au Caire , laiflant à fès en-
fans les Etats, qu'il avoit ufurpés fur fes
neveux. Ce partage afToîblit encore la
» , ■■
(a) On dit que Pépin fit demander au Pape
Zacharte , lequel devoit être Roi , ou celui
qui en'exerçoit les fondions , où celui qui n'en
avoit que le titre; & que ie Pontife ayant
décidé la queâion en faveur de Pépin, ce
Prince fut déclaré Roi. par les Barons du
Royaume ; mais ce fait attefté par tous les
Hiftoriens anciens eft contredit par quelr
Îies Ecrivains modernes. Adel demanda aux
r êtres & aux Cadhis afièrnblés , fi le plu»
foïble pouvoit commander au plus fort , & fi
le plus vieux devoit obéir au plus jeune. Los
Cadhis & les Prêtres répondirent que non^
& fur cette décifioh, Adel fut proclamé Sul-
than*
414 Dr m asti*
puiflance des A^oubites , attaquée
alors par les Francs , par les Atabeks
& par les Kharifmiens $ mais les Prin-
ces de la famille de Saladin connu-
rent enfin la néceffité de réunir leurs
forces pour réûfter à tant d'ennemis.
ils formèrent une armée nombreufe
avec laquelle ils vainquirent , &le Sul-
than de Kharifme 9 & le Sulthan de
néc. tfi7. Mouflbul , & les Francs qu'ils chaffé-
,c. i»to. ^^ j^ Damiette. Ces fucccs qui au-
roient dû reiTerrer les liens qui les uni£
(oient ne fervirent qu'à les rompre.Ka-
piel Sulthan d'Egypte, fils& fucceffeur
d'Adel , prit fur eux un afcenclantqui
ies irrita : ils fe féparérent en difFérens
partis , Se fe firent la guerre les uns aux
autres en Ralliant k leurs propres en-
nemis » les Atabsks > les Seljoucides du
Roum & les JÉharifmiens.
Cependant Frédéric IL auquel le
"Pape avoit impofé la pénitence de
Faire le pèlerinage de Jeru&lem pour
le punir des troubles que ce Prince
avoit excités dans i'Egliie, arriva dans
la Paleftine avec beaucoup d'autres
Croifés , & avec; des troupes nom-
brëufes. Le Suhhan & l'Empereur eu-
rent la même politique. Au lieu de
chercher
t>t$ àycJubiteS. 4îj
chercher à fe battre , ils s'envoyèrent
«les préfens,& convinrent enlemble
de régler des conditions de paix telles
que Frédéric pût retourner lans honte Hcg. «Si.
en Europe, kamel parut céder enfin ^ "»•
aux Chrétiens» Jérufatem , après en
avoir démoli les murailles & les for-
tifications. Frédéric fe vantant d'avoir
plus fait pour ta Chrétienté par ce
traité , que tous les Princes qui la-
Voient précédé datts ce voyage ,ie rem-
Jbarqua fur fes vaiffeaux,& vint de nou-
veau faire trembler le PonrifeRomain. ^SSSSST
- Kamel éroit alors te plus puiflant de Hég. * *f .
*ôus les Princes Ayoubttes. L'Egypte % h ç* * ***
la Paleftinè Se une grande partie des
villes de Syrie & de Méfbpotamie lui
étoiem fournîtes : mais ion Empire
t enduit vers fa ruine. Adel fort fils Se
fon fucceffeur ne régna que deux ans,
Se laifla le feeptre à Nodgemeddin* «sssS1
Ayoub, fécond fils de Kamel. Céder* Hég $57.
nier fabriqua tes inftrumens de fa h * ****
fervitude * & fut le premier auteur de
la révolution qui reaverfe les Ayoubi-
tes du trône d'Egypte . il acheta un
grand nombre d'Etelaves dtxnt ri con*»
pofa fa halca ou fa garde , & qu'il éle-
fra dans la fuite aux premières chair
42f . Dr M- A JTIS !
ges de l'Etat. Cette milice femWaMe
aux gardes Prétoriennes, brava bien-
tôt (es anciens maîtres, & s'empara
de toute l'autorité Nodgeineddin ref-
fentit le premier les effets de l'infb-
Jence de ces Soldats , & mourut avec
le regret de ne pouvoir la réprimer*
H< #. é Les Mameluks nommèrent Régen-
|. c, in?- te du Royaume SchadgereUfor une
des concubines d'Ayoub, femme non
moins célèbre par la beauté que par
fa prudence , & mirent fur le trône le
jeune Moadham fils du défont Sulthan»
Le règne de Moadham eft remarqua-
ble par ta Croilade & la captivité de
& Louis Roi de France. Ce Moiiar»
que avoit pris Danvette ? & s'éroir
avancé vers Manfoura. Moadham hii
+BSS3S0 livra bataille ,1e vainquît & ie fit pri*
Hcg. «48. fonnier. Cette viftoire enhardir foi*
.*• c * A **• courage. Il crut qu'il lui feroîc ànffi fa*
cile de fe défaire de fes ennemis do-
meftiques que de ceux duttehors: mais
dans ta fbibleflë od itétok % cette en*
treprife ne fut que téméraire , & hâta
ta révoiutîon qiril vouloir prévenir.»
il fit d'abord un coup d'autorité, en
traitant avec le Roi cfe France „ fan*
l'avis & le confcwemen^-des Mamp»
SES ÀYOUBÎTiS. éÇff
!uks qu'il étoit réfolu de réduire danr
leur premier état de fervitude. Ceux*
ci vinrent en armesfe venger de cet
affront : iis attaquèrent le Sulrhan ,
qui fe mit en défenfe , 8c qui étant
bleffé , fe#renferma dans une tour voi-
fine du NiU Les Mameluks y mirent
le feu , & tuèrent à coups de flèches'
Moadharoqui s'étoit jette dans le fleu-
Ils reconnurent pour Reine Sthàd*
«tel-dor , mais lalîis bientôt d obéir'
a une femme, ils l'obligèrent d^épôu-
fer Azzeddin Ibegh un d'entr'eux. Ce
choix caofa de nouveaux troubles. Le
Peuple 8c les Soldats demandèrent un'
Sulrhan de la famille des Ayoubires ;
ic l'on élut A ichraf , arriére petit fils de
Katoet, Ibegh qui gouvernoit lotis te
i»om de ce Prince , fe fit dépofer peu
' tle tems après ; 8c prenant lui-même
le titre Je Sutthan , if commença la
Dynaftiedes Mameluks, appelles Ba-
fearites ou Marins , auxquels fuccédé-
rent tes Mameluks CircalEèns que
Sélim détruifit dans la fuite;
Telle fut la fi» des Ayoubires d'E-
gypte: celle des Princes de cette fa-
illie qui regnoient en Syrie & dans
Nnij
4iS. DfNAsrji
la Méfopotamie, ne fat pas moînt
malbeureule.
Le Roi d'Halep , arriére petit fils do
Saladin ^don: il ponoit le nom > ayant
appris, que les Mameluks tétaient em-
parés de l'Egypte 9 fr tendît maître de
„ Damas r & devint tapés puiûant par
^.e.i&)i.ine qu'il n'entrât triomphant dans le
Caire d od il fut repouffè : mais les
7»artares Mogols , a près avoir renrerfé
coures le* pui ffap ces qu'ils avoknt ren-
contrées, s'avançoient (bus la conduis
te d|Hotagois.r dans la Syrie, & ve-
noient donner de nouveaux Matttfes à
- eerte partie du monde. Le Prince de
Miafarckin j petit rils d'Adel qui pôP
fëdoù Jplu(ku4:& «autres places dans la»
Méfopotamie , '>ia- s'oppofer à ce toc-
cent ,.& paya de fa tête cetre témérités
Holagou qui faifok précéder fa mac*
chepar des Âmba Quleurs chargés de"
recevoir U (ou million des Princes*
voi(ïns , ou-dt leur déclarer la guer-
re y fomma Sa lad in Roi tf Halep., de-
"\._ venir lui prêter hommage : i) lut
adrefToit une Lettre qu'Aboui-pharad-
ge nous a confervée, (#), & q»i mon-
£«) Aboul-Pharadge a peut-être au£ fità*
j*ïs: Are» vb'i Ter i. 43^
tre taure la fierté de ces Conquérant
du monde.
^Apprenez, écrhrôit-flau Roi' <THa*>
» lep , que nous étant préfenté* devant
» Bagdad , & le Khalife ayant refufé
#9 de nous ouvrir Tes porte», & de nous-
m livrer fes tréfors , nous l'avons puni
9>de cette audace. Car , comme dit vo^
» tre Alkôran, Dieu ne change les
» Empires, que lorfque lefprit des Peu-
nples eft changé. Le Khalife a ofé
» comparer l*or ,- Forgent , de vils mé-
»tattx au prix- des âmes, 6c a reçu la
rrmott pour eonferver fcs richeffesi
»»Qu?uh tel exemple vous ferve de le-
» çon. Envoyez-nous vos tréfors , &
r> vends vous fournetere. Nous proté—
ngeorns ceux qui nous obéiflfent, 8è
lileur laiflbfts les Etats ôiYfls règnoientj
jrmais nous ne pardonnons jamais à
» ceux qui ont eu la hardieflè de nous
» réfifter. Dieu qui nous conduit par
» la main , nous ordonne de vous
j»avertif ^vatoque* de vous attaquer.
f% J!ai fait monaevoir ; foires le vôtres
» Parce que nous 11 avons pas ^otre
qné lui-même cette Lettre que nous avoitit
lut peu abrégée*.
4$a Dynastie
»» Religion, vous nous appeliez Infi-
*defles j mais nous avec plus de juf-
»>tice, nous vous regardons -comme
jrune Nation impie & facrilége qui
i> outrage fans rougir par des pallions
»i brutales, & Dieu & Ht Nature. Es
» qui êtes- vous pour avoir tant d'or-
»gueiti Notre Empire s étend de l'O-
$9 rient à l'Occident , <f«ne extrémité
9i du momie à l'autre j nos Soldats font
»aufli nombreux que le fable de 1»
h mer , & vous vous n'êtes qu'une poî-
*gnée d'hommes vils , dont nous-
» avons pitié. Envoyez-moi fur le
» champ votre réponie, & tuivez-1*
» de pics*
Le Sulcharr d'Halep effrayé des me*
naces du Khan , prit U réfolutioi*
d'aller Ce jetw* à fes pieds v mais les
Emirs regardant cette démarche com-
me humiliante & dangereufe s'y op-
pofcrenrr Sabdin crut fléchir Hola-
gou , en députant vers lui fon fils Àzîs
avec de riches pré fens. Ce jeune Prin*
ce implora vainement la clémence du
Khan.* Allez dire à votre père, lui
» répondit durement ce dernier, que
»je lui ai ordonné de venir lui même
»& noa de m'envoyer fon fils. «Sa-
DES AYOVIITI»» ^Jf
?Iadïn aurait obéi & fauve pat fa fou-
million , fa vie & fes Etats, fans l'o-
piniâtreté des Emirs qui lui défendi-
rent même de quitter la Syrie*
Cependant les Mbgols qui cam- Hé 4 t
poîent dans le Kharifme * fe mirent e* j. %*il\$L
Marche , & après avoir fournis toute
la Méfopôtamie , ils entrèrent dans la;
Syrie, & enlevèrent cette Province
aux Ayoutkts* Le Roi d'ïfaîep n'eur
garde de les prendre dans fa: Capi-
tale ^ il prît ^yec loi fes tréfors , fes
femmes & ks enfans , & s'enfuit dan»
les déferts de l'Arabie* Makre d*Ha-
lep & èe Dama» , Bolagon envoyai
desdétacRemensauxenvircms de KxaJc
avec ordre de lui amener Sa4adm mort
.ou vif. Après bien, des recherches ^t0ji
découvrit enfin la retraite de ce Prince
malheuren qui fe tenott caché dans
ies cavernes , ôc auquel le Strithan?
fit trancher la tête., après Jui avoir -' , V
reproché fa defoèéiiïance. Avec lui Hég. *„<
finit la Dynaffie des Ayoubites ; car J,C#M**
on ne doit pas compter parmi lçs
Souverains de cette famille , ceux qui
fubfiftoient encore àHémefle^àHa*
ma , & dans d'autres villes , & qui n\>
loienr que de fimples Gouverneursde
4$z ÛïXÀ'sttt
Place dépendans des Prince* vterib
fins,
La branche de cette Dynaftie qtrf
fégnoic dans l'Yémeft eu FArabie
heutetrfe étôît également éteïnte.Séiffr
el-Iflam,dont nous avons parlé ail-
leurs i eot poùt fucceflèur fon fils l£-
mael, Celuî-d adoptant les Fabtes
Généalogiques <jue de* flatteurs
avoient compofée$ poirt relever l'ori-
gine du Sulthan Saladin ,- prétendît
être de fa fataiille detfOmmiades , prit
la couleur verte affé&ée aux Defcei*-
dans de Mahomet, A non content dir
titre de Scfyérif , (<r) fe fit proclamer
Xhalife i & traîna comme ter au bas
de fa rtfbé , une quefte longue de vingt
«0ddées.t(*) Ses Emirs lafles de fes er-
itavagaitees qui le 'refcdoient en mê-
me-tem s cruel envers (es Sujets , le fi-
lent aflaffinef. Ils mirent fur le trône
fon frère puîné, appelle Nafer, &
donnèrent h Régence à Ôfrimal r
mère de ces deux Princes >qui defeen*-
(a ) On donna ce titre aux defcendaiis de
Mahomet.
(h) Cette longue queue s'appelloit la man-
«he-des Khalifes**
doit
DES AYOUBriTESÏ 4JJ
doit elle-même de la famille de Sa-*
ladin. Nafer ne fut pas plus fage que
fon frère , & eut le même fort. La
Khatoun ou Sulchane leur mère, après
la mort de fes enfans , Ce retira dans
la ville de Zabîd , laiflant le Royaume
dans une efpéce d'Anarchie.
Mais quelque tems après, un E£
clave lui préfenra un homrrçe. qu'on
avoit trouvé à la Mecque , jparnii vme
foule de mendians^ c'étoit Soliman,
petit fils de Téki-eddin-Omar, & par
conféquent parent de Saladin : il avoir
quitté dès fon enfance la maifon pa-
ternelle, &menoic une vie errante ôc
vagabonde, vêtu en Derviche ou; en
Religieux & vivanr d aumônes. Om-
mal 1 epoufa , & le fit reconnoîrre pour
Roi de PYémen ; mais un tel t om me
n'étoit pas propre pour lt Gouverne-
ment d'un Royaume ; il fut dépofé &
réduit dans fon premier état.
L'Hiftoire nomme encore deux
Ayoubites de lYémen , appelles Sala-
din & defeendans d'Adel. On préfb-
.me que cette DynafHe finit Tan fix
cent trente- fept de YHégux* douze
cent trente-neuf de Jefus-Qirift, par-
ce qu'un Turkoman obtint vers ce
T$ms //. O o
454 Dynastie, &c,
tèms-là du Khalife Moftanfer , Tin-
vefthure de ce Royaume : cependant
quelques Voyageurs ont prétendu
3u on trouvoit encore dans* des villes
e cette pattiedu monde , des Princes
Ayoubites.
Nous allcfns terminer notre travail ,
en donnant une Table Généalogique
& Chronologique des différentes bran*
ches de cette ramille,ceft-à-dire,de
celles qui ont régné, fans parler de
tous les petits Princes qui ont été feu-
lement Gouverneurs de quelques Châ-
teaux > ou qui ont vécu ignorés.
D YNASTIE
DES AYOUBITES.
fartrdre Généalogique & Chro-
nologique.
ME ROUAN
Peke de
SCHADY,
Père de
. AYOUB,
Père de
Sa t  d itf,
Sulthan d'Egfypte & de Syrie *
Roi de l'Yemen > & Prince
de Méfopqtamie.
■' ' ■ ■ ii — *■»»
SULTHANS D'EGYPTE.
Année Année
de fHfr. de J. C.
Malek el - Nafer
Selah-èddin Aboui
• Mod'haffer Youfouf,
ils d'Ayoub» 5 $9. 1 1 05.
Ooij
4;6 DtVàstib
Année Année
de.l'Hég. dej. C.
Malek el - Azîz
Emad-eddia Othman
fils de Selah-eddin ,
mort le it.de Mou-
harran, âgé de tj.
ans 5>5* iî£&
Malek el Manzour
Nafer eddinMoham-
med fils d'Aziz , a ré-
cné un an neuf mois ,
dépofé dans le mois
deSchoual. .'..•' }?*• noo#
Malek el-Adel
Séiff-eddin^boubekr
Mohammed, filsd'A-
Îroub & frère de Sa-
adin.NosHiftoriens
le nomment Sapha-
<lin 6l$- "«**
* Malek el-Karnel
Aboul-fath Nafer-
eddin Mohammed ,
fils d'Adel. NosHif-
toriens le nomment
Méledin <f$5> i*}J.
Malek el-Adel
SéifF-eddin AbouT t
DIS ÀYOUBITBS. 4J7
Année Année
. 4e l'Hég. de J. C.
tekr,filsdeKamel. . *Î7* »*4°«
Malek el-Saleh '
Nodgem - eddin A- •
youb,filsdeKame!.i *47* It4?'
Malek ei- Moa-
tlham Gaïàfh- eddin .
Touranfchah , fils' de
Nodgem • eddin À»
youhtué <?4^ "S*
Schadgered - dor
femme d'Ayoub. • . $4** **;*
Malek Afchraf fils
de Nafer Youfouf ,
fils deMafoud Àdhfis,
fils de Kamel , fils
tfAdel.
SULTHANS D'HALEP.
Malek eî-Nazer . .
Selah- eddin Aboul
Modhaffer Youfouf,
fils d'Ayoub. . • . •
Malek ed Dhaber
Gaïach eddin Ghazi,
fils de Saladin. . , . *ij- ***<*■
Malek el-Aziz - ' _ •
Oo u»
438 D Y N A S t I I
Année AaDce
de l'Hèg. dej. C.
Gaïath-eddin Mo-
hammed, fils de Dha-
her . . ^4* *±J*»
Malck en Nafer
Sélah-eddin Youfouf,
fils d'Aziz. ..... 659. i*£o*
SULTHANS DE DAMAS.
Makk el-Nafe
Sélahwedfdm Aboul
Modhaffèr Youfouf ,
fils d'Ayoub. , « . •
Malek d-Aflh*r
Nour-eddin Aly, fib
de Saladin. . . > fc • 5 94* 1 !$&»
Malek el - Adei
Séiff^ddiAAftdLtbekr
fils d'Ayoub & frere
de Saladin.. ...-..». tfi 5* il tft»
Malek el - Moa-
dham Scharf - etfdin
Ifla, fils d' Adei. Np& . .— ■" ;
Hiftoriens le non*-
ment Coradin 011
Conradin. \ ...... C%+* ttij*
Malek el-Nafer .
i" nn
i*
ftlS AïOUflTES. 45^
Année Année. *
de l'Hèg. de J. C.
Selah-eddin Daoud', .:
fils de Moadham , dé#
pofé & fait Roi de
Krak . . . .6%6% z»*&,
Malek el-Afchraf
Aboul-fath modhaf-
fer-eddin, fils cïA-
del *$*• "37'
Malek el-Sâkh
Emad-eddin Ifq&aël,
Èlsd'Àdel.dépoféSc
faicRoideBaalbek-. 655* **J*
Malek el-Dgiapa* ...
had Modhaffer Yon-
, nous , fils de Mau* 1
! doudfilsd'Adel.dé*
I pofé & fait Roi de
j Sindgiar. ...... ^36. njt.
Malek el-Saleb
I Nodgem-eddin Ay- >
oub, fils de Kamel,
' dépofé & dans la fui-
te Sulthan d'Egy-
pte. ,•...*„.... ^57. l*5j.
Malek eï-Saieh
j Emad-eddin Ifmaël,
1 rétabli. . . . ♦ . . £4.$. 124;*
O o iiij
44*> Dynastie
Année Anne»
de l'Hêg. de J. C.
Malefc en-Nafer
Sélah-eddin Youfouf
Sulrhand'Halep, fils
4'A'ziz , fils de Dha-
Aer % fils de Sa* adin. • 6 5 9. 1 i4So~
PRINCES DE HAMA*
Malek el-Modhaf-
ferTéki-eddin Omar, .
fils de Schahan Schah,
filsd'Ayoub, père de 1
Saladin
Malek el Manfour
Nafîr-eddin Moham-
med t fils de Téki-
eddin •. 617. nia
. Malek en-Nafer
Kilidge-Arflan , fils
de Manfour £2.7. n%%
Malek el-Modhaf-
FerTéki-eddin Aboul-
fath Mahmoud , fils
4e Manfour. . ........ 635. n }j*
Malek el-Man(bur
îtafir-eddin A|x>ul-
M&li Mphdauaed *..,.'
. t ;
DBS AyOUBITES. 44I
Année. Année
de l'Hég. àe J. C.
fils de Mahmoud, . , «83. 1184*
Malek el-Modhaf-
fer Téki-eddin Mah-
moud , fils de Man-
four 6$8. 129^-
1 Interrègne. ... 718^ 131^-
Malek el-Mouïad
Àboul-fédha, fils de
Nour - eddin Aly ,
fils de Téki-eddii»
Mahmoud ': il eft Au-
teur d'une Géogra-
phie & dune Hittoi-
re '- . 7Ji. ijjl^
Malek el-Afdhat
Mohammed , fils d' A*
bout-fédha. . • » • »
On ignore fi Afdha!
a eu des SucceiTeurs»
PRINCES D'HEMESSE,
Afad-eddin Schir-
kpuh » fils de Schady
& oncle de Saladin. #
Nafer eddin Mo-
Èamaaed > fils de
44* D*NA*nz
Année Année
& l'Hcg. de J. C-
Schirkôufc. . . « . - 581. 11S5.
Malekel-Moudgia-
hed Schirkoud , fils
de Mohammed. . . 6 $7* ii$£«
Malck el- Mara-
four Ibrahim , fife dé
Moudigahed. . . . 644. 1246*'
Malek el Afchiaf
Modhaffer -eddin
Moufa , fib d'Ibra-
him, • . * tf£*« nef*
ROIS DE KHELATH.
fcfaïek et-Aouh^d
^Jodgem- eddin A-
fyoub, fils d'Adel frère
deSaladin. . , * . « 609. izn.
Malek ei- Afchraf
Moufa y fils d'Adel • 65©. 1 i jz.
ROIS DE MIÂFAREieiN.
* Maick d - Adei
Séiff- eddin Abou-
bekr , fils d'Ayoùb 8c
frère de SaJadùw i . 61$. 121&
tus Ayoïïbit^es, 445
Année» Année*
de l'Hég. de J. C.
Malek el-Modhaf-
Fer Schéhab - eddin
Ghazi , fils d'Adel. • 6+1. 1244»
Malek el-Afchraf,
fils de Schéhab-eddin
Ghazi *j8. 125^,
ROIS DE LYEMEN.
Malek el-Moa-
dham Scham-feddou-
lec Touran-Schah >
fils d'Ayoub & frère
de Saladiii. . . . . S7& 11*0*
Malek el-Moëzz
SéïfFelJflamDhahir-
edclin Tôghréghin \
fils d'Ayoub & frère
deSaladint 5£$. li$$*
Malek el-Moëzz.
SchamfelMouloucIÊ ^
maè'l , fils de S£i#el-
Mam
Malek et - Nàfer *-
Sélah-eddin „ fils de
Séiffel-Iflam & frère
tflfmaëi . ♦
444 Dtoât. dis Ayoub. Sec.
Khatoun Ommal /^j? *»■*?
femme de Séiffel-If- ti£2: ±±S.
lara, & mère de Na*
feî & cTlfmaël. • . ,
Malek Soliman 9 *
fils de Schahanfchah* * ■
filsdeTéki-eddin, fils
de Schahanfchah, fib
d'Ayoub # ,
Malek Mafoud Se-
lah - eddin Adhfi*
Youfouf, fils de Kiu
mel , fifs d'Adel ' , . 6 1 6 . i z 2 &
Malek Mazoud Sé-
lah- eddin Youfouf,
JlsdeMafoud. . • . 6yj. i%$y*
PIECES
JUSTIFICATIVES-
JVj.. Bonamy,fde l'Académie Royale
des Infcriptions & belles Lettres , qui
Joint le goût au fçavoir, m'a communi-
qué & permis de faire împrfmer deux
Manufcrits curieux fur la Chevaleriede
Saladin.Ces deux Pièces avoienrappar.
tenu au célèbre M. Godefroi, & ont
paffe y ainfi que la Bibliothèque de ce
Sçavant , à M. Moriau Procureur du
Roi & de la ville. M, Godefroi avoît
mis au bas de ces deux manufcrits la
note fuivante. : » Extraits de deux an-
» ciens manufcrits , l'un enprofe , qui
»femble être à peu près , finon du
» tems même de S^ladin , qui mourut
>* en i i 93 , parce qu'il eft écrit de-
» puis fa mort , au tooins peu de tems
» après icelle 5 & l'autre en vers qui
446 Pièces
»t femble poflé rieur , & qui eft écrit du
•t tems des guerres des Albigeois* ie£-
» quelles finirent en 1240.
M. de la Curne de fainte Palaye r
qui n'eft pas moins eftimable par Ces
mœurs douces & fà politeflè , que par
fes connoiffances profondes fur l'Hif-
toire de notre Langue & de nos mœurs,
a bien voulu me donner une copie plus
exade & beaucoup plus ample, du
poemç en queftion. Comme ces deux
pièces n'ont jamais été imprimées , Se
u'elles ont pour objet la Chevalerie
u Sùlthan dont je viens d'écrire l'Hit
toire, je ctois que le Le&eur me fçau-
ira gré de les rendre publiques. J'y joins
une interprétation que je ne prétends
pas juftifier dans tous les points : car
il y a des phrafès > furtout dans le fé-
cond morceau qui peuvent avoir un
double Cens. J'ai adopté celui qui m'a
fiaru lé plus raifonnable , (ans exclure
autre»
3;
• Justificatives. 447
L'ORDENE DE CHEVALERIE.
» El tans que Salehadins régna , il
m ot un Prince en Galilée qui fu(apelés
» Meures Hues de Tabarie. Un jour fu
»avoec ôreftiensen unpoignais con-
»tre Turs. Si pleut à Dieu que Cref-
>i tien furent arrière mis. Si fu Méfi-
ai res Hues pris & maint autre Preu-
m dôme avoec lui. Le foir il fut ame-
» nés devant Salehadin qui bien le con-
tinut. S'en fur moult liés & dit : Hues*
» vous êtes prisiSire, dit lePreudome,
t> cepoife moi. Par ma foi , Hues, vous
yavez droit $ car il vous convient
L'ORDRE DE CHEVALERIE.
Dans letems que Saladin régna', il y eut
lui Prince en Galilée , qui s'appelloit Meflire
Hugues de Tabarie , ( de Tibériade , ) un
jour cet Hugues fe trouva avec les Chrétiens
dans une bataille contre les Turcs* Il plut à
Dieu que les Chrétiens fuffent vaincus. Me£-
fire Hugues fut pris & plufieurs autres Pru-
d'hommes avec lui Le foir , il fût amené de-
vant Saladin qui le reconnut; ce Prince en fut
charmé & dit : Hugues , vous êtes pris. Sire,
dit le Prud'homme, j'en fuis, très-faché. Par
ma foi , Hugues , vous avez railon \ car il faut
448 Pièces
t>raienbre & morir. Sire, raenchon
» donrai jou plus volontiers, ke je ne
umuire, fe ge pous donner que vous
»> voelliez prendre.Oil bien diit li rois.
» Sire fait Mefires Hues, que vous don-
» rai jou, abriés mos.Vous rrye donrés,
wdift li rois, C. mille bézans. Sîre
» chou feroit trop grans raenchons à
%»home de me terre. I^ues , dift H
» rois, vous eftes fi boins Chevaliers,
9i & fi preus, que nus n'orra de votre
«> raenchon parler , ne de votre prifon
»qui ne vous doinft & envoir. Sire,
» mit-il, j el vous promet feur chou
» ke vous me dites & feur keîemés
ou vous rachéteVou mourir. Sire, je vous
donnerai une rançon plutôt que dé mou-
rir, û je puis vous en donner une que
vous veuilliez accepter.Oui bien , dit le Roi :
Sire, dit Meffire Hugues. Apprenez-moi
vite ce que vous voulez que je vous donne.
Vous me donnerez , dit le Roi , cent mille
bézans. Sire, cela feroit une trop grande
rançon pour un homme comme mou Hu-
gues , dit le Roi , vous êtes fi bon Chevalier
& fi vaillant que perfonne n'entendra parler
de votre rançon & de votre captivité , qui
ne vous donne ou ne vous envoie de l'argent.
Sire , fur ce que vous me dites , je vous les
promets ( les ceut milles bézans ; ) & fur
querrcE
Justificatives. 449
jrquerrez-vous? Hues, fait li rois, je
»les querraionan (m votre Loi. Si
»dedens l'an le me poés rendre , j es
*> prendtai j& fe fenon revenés, je vous
» reprendrai volontiers. Sire & feur ce
» j'es vous promet. Or me livrés con-
99 duit , que je m en puifle r'aller fau*
•vvement en mon pays corne Che-
»> valiers. Hues, je voel anchois à vous
»» parler. Sire & }ou à vous volontiers
» veu celé tente par delà. H i entre-,
» renr. Si demanda à mons Hues corn-
t> ment on faifoit Chevalier à la Loi
» Crétïene & qu'il li monftrat ... à
j»cui? à moi-même, fait li rois. Sire
■ 1 1 1 1 ' m*,
quoi; ( for guelle aflurance ; 1 les dematrie-
rez-vou* ? -Sur votre loi , » fur votre parole, %
& je vous donnerai un an. Si dans l'an vous
pouvez me les livrer, je les recevrai ; & finoa
revenez, & je vous reprendrai vous-même,
volontiers- Sire fur cela; Je vous les promets*
A préfent , donnez-moi mon congé, afin que
je puifle m'en aller en fâreté dans mon Pays t
comme Chevalier» Hugue9 , je veux encore
vous parler; Sire, volontiers. La tente étoit
par de-là ; ilsy entrèrent. Alors Saladin de»
manda à Memre Hugues , comment on fai-
foit Chevaher dans la Religion Chrétien-
ne , & lui dit de îe lui montrer. Aqui ? À
0ioi-meme , dit le Rgi. Sire , à Dieu ne plaife
l*mt II. Pp
4S° Piicbi
ti à Dieu ne place que jou fois fi fat» ;
» fait Mefires Hues , que jou fi haute
» cofe , & Chaule Seigneurie mete feur
9» cors de û haut homs com eft li voçs.
•»Per quoi , fait li roisî Sire vous elles
w vis , de coi Hues l de crelliewé & de
*bapttfme. Hues, fait- il, ne me blaP-
>tmes mie, vous êtes mes priions. Se
» vous faites chi che ke je vous requier
#& vous venez en terre de votre con<-
*> feil > y à. ne trouvères l}©me qui trop
wvous en blâme > Se jou Tam'miex à
•> avoir de vous que d'autre Chevalier *
» ke de melleurChevalier de vous ne le
•> porrou jou rechoevre.Sire,fair-iI, fur
jfrehouke vous me dites, je vous mon-
■i . ■ ■ > i ■
que je fois fi indigne , dit Mefïire Hugues 4
pour mettre une fi habite chofe & une fi haut?
Seigneurie fur le corps d un fi haut homm»
comme vous êtes. Pourquoi , dit le Rou
Sire , vous êtes vuide. De quoi , Hugues $
de Chrétienté & de baptême. Hugues , dit-
il , ne meraites aucun reproche : vous êtes
jjnon prifonnier : fi vous t'aies ce que je vous
demande & que voua retourniez dans votre
pays , vous ne trouverez perfonne qui trop
vous en blâme ; & j aime mieux avoir da
vous la Chevalerie, que d'aucun autre Che-
valier ; car je ne poûrrois la recevoir d'ui*
aeiUeur» Sire , dk-il, iur ce que vous jty*
JtrsTiïicATî vis. 451
«trerai.Mais fe vous fuffiés Creftiens ,
n moult fut Chevalerie en vous bien
» afife. Hues , fait- il > ce ne puet mie orc
' • # être,
» Mefires Hues apareîler chou qu'a
* » Chevalier a afert; Se li aparella font
Hchief & fa barbe fans rere , mîer
• *» qu'elle n'eftqit ,& fe le mift en un
-»bàing, & li demanda : Sire , favés-
tt vous que chis bains vous donne en
» commencement de vous à entendre.
»» Hues, faifc-il , n'aie» Sire, fait Mefi-
« » res Hvtes , aoffi nés & auffi mondés*
-*Ke li énfes ift de pekié des fons de
»baptefme ydevés vous iffirde cheft
' » baing > de vilenie & dé mauvaife té-
dites, je vais vous montrer cette cérémonie;
mais fi vous étiez Chrétien , la Chevalerie
ferait très-bien placée en vous. Hugues , dit-
il ^ cela nefe peut à préfent. '*
. Meiîire JHugues prépara tout ce qui' eft
.néce(ïairerpour tajre un hevalier : il fui arran-
gea fa, tête & fa barbe- mieux quelle n'étoit
fans le rafer r il le mit dans un bain, & lui
demanda : Sire, f^avez-yous ce que ce bain
vous donne d'abord à entendre £ Hugues.,
dit-il , no» ÀuiTi net & purifié &r péché $
qne l'enfant fort des fonds de baptême , de-
ve*-vous fbrtir de ce bain fl$: & purifié d#
4f* Piicîj
» che. Par ma Loy , Hues , chîsconcp
» mencement eft moulr biau. ...»
» Voirs . . « . de Dieu eft donnés qui de
m preudhome rechoit : il le mena en
t»un lie tout nouvel, (i tecouce ens
»> el li dHLSire, chift lis vous donne es-
»wart au grand \k de Paradis, que
* vous devés canquerre par vos Cheva-
»9 lerie : & quand il or jut , il le leva &
»Ii veftt blanke reubede lue de lin , ce
#defoye:&dift cheft blanche reube
.i»que je vous veft premiers vousdonne à
«i entendre le grand neté que vousdeves
»rà votre cors renre fc garder. Après li
* vefti reubc vermeille d'écarlate ce de
»» 9 ■■ i ■ i
vilenie & de mauvaife tâche. P» ma Lof,
Hugues *ce commencement eô fort beau. . .
même ... de Dieu eft donné ce qu'on reçoit
«Tuiv Prud'homme. I? lemenacBms un lit tout
nouveau, le coucha dedans , & lui dit : Sire ,
« e lit vous donne regard au grand lit de Para-
dis que vous devez conquérir par VotreÇhe-
valerîe ; Se quand le Princeeut refte" quelque
tenu couché, H te mît rarfon fèant & le re-
vêtit d'une roBe bbnefte déliée de Kn: & d*
Ibye r & lui dit : cette robe blancfie dont je
tous revêt, premièrement vous donne àen~
tendre la .grande propreté' que vous devez
tenir & garder à votre corps. Après a te ré-
y$dt dTuae rolte- vermeille •d'écariate fit dp
JtfsTiricATîvisr. $j$;
n fbye , & li dift rSire , eeft reube ver-
yt melle vous donnée à entendre le fang
»» que vous devés efpandre por hii fer-
w vir Se por feinte Eglife warefer & dë-
» fendre. Aptes li tome les gambe$
» hors du lit; fe H caucha unes cauce*
» brunes , pus lui dît 5 Sire ces cauces-
•» vous donnent à entendre îs terre i*
» devés reparier. Car quel avantage
t»que Diex vousconfenfc à avoir ,ra-
•» membrance oit qui vousétes & vous-
» rires. Il le drecha tôt droit, & K
uchainft uneceinrure blance.Si lidîfiv
* Sire,cetre chaïnfture vous donne vir-
*> gfnité des rains j car puifqoe Che-
•> valier* e(ï devenus gramf efwart doit
foye & lui dit : Sire , cette robe rouge
vous donne à entendre le fang que vous
devez répandre pour fèrvîr DTeu , & pour
rrder & défendre la Sainte Eglife. Apre*
lui tourne les jambes hors du Ht , &
lui met des chauffes brunes. Puis il lu?
dit : Sire , ces chauffes vous donnent à
.entendre la terre où vous devez retour-
ner ; car , quelque avantage que Dieu con-
sente de vous donner, fouvenea&-vous de
ce que vous êtes , &de ce que vous rede-
viendrez. Il le met de bout, lui ceint une
ceinture blanche & lui dit : cette ceinture
vous donne la virginité des reins ; car ,. puif-
jpe vous êtes devenu Chevalier , vous devej.
454 Pièces
omettre avant* ain»' cjfulï pefce Se (en
>f eors vilainement. Après 911 ei aporta
» uns efperctas ©ixTor > te clorez, fi li
»cauchfc&dift : Sire,ce{terperon vous
^montrent auflifalans que vous volés
» aue votre ehevaus foir à la femoufle
9i ae vos eiprons, auflî falans devés
jrvous.eiïre as kemaftdemens de Dieiï
iifèmr- & de feinte EgHfe deffendre.
» Après on li aporta une efpée, file
>► demanda: Sire, favés vous que cefte
*efpée vous donranrois cofcs* KelesJ
« droiture t feureté *r loyauté» La
%> Crois qui eft en t'ëfpée vous donne
r>laïeuferé;puifque preudbmes Che-
*r vaKers à l'efpée chaînte , ne pue* , ne
■ > ■ ■ I II < III »■ I Mil ■■ ^— ^— ^^
biert prendre garde de pécher vilainement
de votre corps. Apiès orT lui apporta de*
éperons d'or ou dorés , il les lui chauffe , &
dit : ces- éperons vous apprennent que vous
devez être auflî ardent à garder les comman-
démens qui ordonnent de fervir Dieu & de
détendre la Sainte Eglife , que vous voulez
que vos chevaux le foient aux coups de vos
éperons. Après, on lui apporta une épée,&
il lui demanda : Sire , Sçâvez-vous ce que
cette épée vous donnera ?' Trois chofes. Lef-
quelles ? droiture , fureté & loyauté. La. Croix
2i! efl i( J'épée vous donne fureté; car un
hevalièr qui a Tépée ceinte , ne peut & ne
JirsTificÀTiVEsr., 4j<j
*ne doit Diable douter. Aprc&ySire y
r> li doi trenchaiu qui (ont en L'efpée*
» vous donne le droiture & le loyauté,
99 garder le foible du fort & le povre
» du jrice droitemenc & loiaument. . * w
Le refte manque j mais on verra 1&
fuite de cette cérémonie dans ta pièce
de vers que uous alloijs rapporter.
doit craindre te Diabte. Après , Sire, Tés deux
tranchans qui font en l'épée vous donnent
la droiture & la loyauté, & vous appren-
nent à défendre lefoible du fort & le pauvre
du riche , avec droiture & loyauté. . . . . •
VORDEtfE DE CffE PAIERIE.
Enii ke li quens Hues de Tabarie
Fenfeigna au Soudan Salehadhu
, Bon fait à Preudhomme parler j
. Car on i feut moût eonqutjhr.
L'ORDRE DE CHEVALERIE,
\dinji que h Cornu Hugues de TaBarïe ±
( de Tibiriade , ■) Ccnfàgna au Sul-
than Saladin*
Il fait bon parler à un prudhomme; ( Che-
falie*} car on y peut beaucoup gagner. Ce*
45$ PiÈCti
Qui a fer fais prtndroit gard*
• là de foUon ar oit garde \
Car un te trneve en Salemon ,
Que tout adls fait fages hom
Tontes fes œuvres bonnement ;
Et cil aucun* fois tnefprendj
. Coument que J oit > par non /avoir ,
De îegier doit pardon avoir
Tant corn iî s*én voefte retraire.
Mais de for me convient retrait*
A rimoyer fr atonter *
Vn conte coi oi conter
D'un Roi k' enterre patente
lu jadts do grant Signourie M
Et meul fus Uiaus SarraxÀns *
II ot à non Salèhadins.
Cruens fit fr moult dedefroî
Eift mainte fois à notre Loi,
Et à nogent fift maint damage j
lui qui examirîeroit fes aâtorur, n'y. trouve--
roit aucune folie» Car on trouve nans Salo-
mon,qu'un homme fige fait toutes fes œuvre*
iagement ; & fi quelquefois fl s'égare , quoi-
que ce ne Toit que par ignorance , on doit lui
* pardonner facilement , lorfqull veut s'en cor-
riger : meus û faut que je m'occupe à rimer r
& à raconter un conte que j'ai oui conter d'un
Roi , qui dans le pays des Infidelles , fut ja-
dis d'une grande puiftance , ôefut un très-loyal
Sarrazin. Il eut pour nom Saladin : il fut bien?
ftmef te à notre Religion , & lui fit plufieurs
fois bien du mal , & caufa bien du dommage
far
i
~i
Justificatives* 45^
far fin orgueil & fi» outrage.
Et tant f* unes j ois ovine p
Qu'à la bataille uns Princes vint
Hue foi non de Tabarie
S'avoit, olui grant comfaignie
Des Chevaliers de Galilée*
Car Sire étoit de la centrée» •
AJfex. fifint d armes chel jour ^
Mais il ne flot au beateesr
Con a fêle le Roi de gloire, ;
Que li notre euffent vi&eire : .
Car là fis fris le Prinches Hue*
Si fis menés aval les rues
Droit far devant SaUhadin ^
Si le J alise en /on latin j
<lar il le connoijfiit moult bien;
Unes moult fui liés quant vous tien,
Cbé difi li rets far Jdaheumet ,
.Et une cofe vous f remet
■ ■V . . ■ ~mmm+—mmi+m
4 nos gens par Ton osgueil & fts outrages.
Or U arriva une fois qu'un Prince , dont le
nom étok Hugues de Tabarie , Tint à une ba-
taille : il avoit avec lui un grand nombre de
Chevaliers de Galilée; car il étoit Seigneur
eh la contrée : ils firent ce jour de grands faits
d'armes; mais il ne plut point au Béateur
qu'on appelle le Roi de gloire , que nos gens
auffent la viâoire : car le Prince Hugues fut
Î ris : il fut mené par les rues , droit devant
aladin : celui-ci le fàlue en fon langage ; car
il le connouTok bien. Hugues , lui dit le Roi,
par Mahomet je fuis charmé de vous tenir ,
frextlim <q
45 S Pièces
Que il vous c enverra mourir
Ou » iront raencbon venir ?'
Li Trinches Hues reffondi
- Tuifquï x-ni avis le giu parti %
Je prendrai le rajembre
Jtefai deauei i el puijfe rendre.
OU s che U » dit H reis ,
Cent mille bezans me conter oh. '
Ha y Sire , atteindre n'i p or rote j
Se toute ma terre vendoiem
Si feris bien. Sire j comment»
Vous efies de front har dément ,
JEt plains de grant Chevalerie j
Et preudens nefcondira mie
Se r'ouves i ve raenchon
Que il ne vous doinfi im bel don.
Bnfi vous pois uquiter. '
& je vous annonce une chofe ; c'eft qu'il fau-
dra mourir ou payer une groife rançon. Le
Prince Hugues répondît : puifque vous m'a-
vez laiffé le choix , je choifirai de me rache-
ter; mais je ne fçai ce que je pourrai vous
donner. Ecoutez , lui oit le Roi : vous me
compterez ioo mille bezans. Ha, Sire, je ne
pourrois arriver à cette (brume quand même
je vendrois tous mes biens. Vous pourrez la.
Eyer. Sire , comment? Vous êtes plein de
avoure, &Vous vous êtes distingué par vos.
faits d armes; & aucun prud'homme nerefa-.
fera de vous faire un préfent , fi vous lui de-,
mandez pour votre* rançon ; ainfi vous pou-
vez vous acquitter: mais je veux vous de-
Justificatives. 4^
Or vous voel jou demander
Comment jeu partirai de M. >
Salehadsns li refpondi :
H tus j vous le m'afiérés ,
Sour votre foi que renverés
Et de four le vcftre cre anche ^
Que d'us, en deux ans >fans faillanchê
Avis rendu vo raenchon j
Ou vous revenrés enprifon,
Enfi portés partir de chu
Sire 3 fit-il , votre merchi 3
Et tout ainfi le créant pé
A tant a demandé congié y
Caler s'en veut en fon pais ;
Mais li rois a par le main pris ,
Es en fa cambre V emmena
Et moût douchement ie pria.
Hues yfet il , par ehe le foi
< Que- tu dois an EHu de te Loi ,
mander comment je partirai d'ici. Saladin lui
répondit : vous m'affirmerez fur votre foi,
que d'aujourd'hui en deux ans (ans faute & fur
votre créance , vous aurez payé votre ran-
çon , ou que vous reviendrez vous remettre
en prûon. Àinfi vous pourrez partir d'ici.
Sire, dit-il, grand merci, ainfi vous te
(womets-je.
Cependant il a demandé ion congé ; car
Il veut retourner en fon pays , mais le Roi l'a
pris par la main , l'a emmené dans fa cham-
bre,»: l'a prié avec beaucoup de douceur.Hu»
gués , dit-il , par cette foi que tu dois au Dieu
Qqu .
%ti& P I B C I S
Fai moi ftp j dont foi talent ;
De ff avoir très tout Vertement
ie ffaurois mouh volontiers
Couinons on fait Us Chevaliers.
Beau Siro , fait-il > non ferai.
1? or quoi 3 <$• je le vous dirai. '
Sainte ordre de Chevalerie
Seroit en vous mal emploiie\
Car vous efios viex, en la Loi
De bien , de baptefme & de foi > .
Ht grant folie emreprendroie
De un fumier de dr as de fois
Voloie veftir ($» couvrir
Qu'il ne pueft jamais puir
A nul fuer faire ne port oie
Et tout enfement m'es prendroje
Sefeur vous metoie tel ordre >
Jou ne m'i oferoie amordre s
ide ta Religion , inftruis-moi de ce que j'ai
tant envie de fçavoir. Je voudrais fçavoir tou-
tes les cérémonies avec lefquelles on fait les
Chevaliers. Beau Sire , dit-il , je ne le ferai
point. Pourquoi ? Et je vous le dirai. Le faint
•ordre de Chevalerie feroit très-mal employé
dans vous : car vous êtes vuide en la Loi, de
tien, de Baptême & de foi. J'entreprendrais
tine grande folie , fi je voulois couvrir & vê-
tir d'étoffes de foye un fumier , de nulle fa-
çon je ne pourrois empêcher qu'il n eût plus
fa mauvaife odeur ; je me tromperais tout
de même , fi je mettois fur vous un tel ordre*
Non , je n'oièrois l'entreprendre ; car j'en ftr
\ Justificatives. 464
Car tnùut en feroit blafmit.
Ja Hues , faiuil , non fêtés 3
II n'ia peint de mesprifon;
<2ar vous êtes en tnd f ri f on;
Si vous convient mon vouloir faire ;
Mais qu'il vous doive bien déplaire i
&ire , fui/que faire tejiuet ,
•ff* contredis valoir »V puet 9
Si loferai tout fans dangier.
Lors li eommenche à enfignier
Tout chou que il li convient fairf
Cheveus et barbe & le viaire *
Lifait appareiller moût bel
Cbeft droit à Chevalier nouvel.
Puis ta fait en un bain entrer s
Lors li eommenche à demander
Li Soudons que chou fenefie*
Hues refpont de Tabarie >
rois trés-blâxné. C'a Hugues , dit-il , voutf
ne le ferez point: il n'y a pas de blâme en ce-
la. Vous êtes mon priformier , & vous dev-
rez (aire mes volontés , quoiqu'il vous dé-
plaife. Sire pirifcra'il le faut , fit qu'il ne fer-
viroit à rien de vous contredire , je vais vou#
obéir (ans réfiflance.
Alors il commence à lui enfeigner tout ce
qu'il doit faire : il lui fait bien accommoder
les cheveux , la barbe & le vûage , ainfi qu'il
convient à un nouveau Chevalier. Enfùite il
le fait entrer dans un bain. Alors le Sulthan
•commence à lui demander ce que cela £•*
gnifie. Hugues de Tabarie répond. Ainfi que
d}6% P I E CEâ
Tout enferment corn l'enfichons
Hés de pechsi ifi hors des fons^
Quand de b apte f me efi aportis 9
Sire * tout enfement devis
lffirfans nulle viUnnie
Et efire plains de teurtoifU*
Baigner devis en honefii
Bn court pifie & en bonté ,
Bt faire amer à toutes gens.
. Meut efi hians skis commenebemem*
Cbe dtfi li rois far le grand Dé.
Apresflaaubaiugoftij
Si le coucha en un bel lit ,
Qui iioit fait par grant délit :
Hues ; dites moi fans faUlancbê
J>e ce lit la finifianche.
Sire if ait -41 ; che fenefie
Oon doit par fa Chevaleria
. Coaquerr* lit en Paradis ,
Je petit enfant quand il eft apporté de Baptê»
4»e , fort des font* net de tout péché , -Sire ,
jainfi deve%-vous fortir de ce bain , fans au-
cune vilenie , & être rempli de cburtoî/ie*
Vous devez vous baigner en honnêteté , en
courtoisie & en bonté , & vous taire aimer
4e tout le monde. Par le grand Dieu , dit le
Rjoi , ce commencement eft fort beau» Après
il l'a ôté du bain 6k Fa couché dans un fit
oui étoit fait à plaifif. Hugues, dites-moi ,
Jane me tromper , ce que ce lit figniâe ? Il fi-
gnifie qu'on doit par fa Chevalerie , conque*»
firiin ht dans le Paradis, que Dieu accords
Justificatives- 46*}
Ke Diex oftroie À fis amis 3
Car chou & U lis do repos
Qui la ne fera moult Un fis*
Quand $1 Us et un p$u gen ,
Sus U dreche :Jl U veftm
De blancs drus qui erent de Um.
Lors difi Hues en fin lasim
Sire > ne le tenés a efiar
Chift drap quifunt près de vochar
Tour blanc y vous donne** à entendre 9
Que Chevalier doit a dis tende*
A fa char nettement tenir s
Se U a Dieu veut parvenir m
Après li vefi robe vermeille.
Salebadins moût ses merveille
Pourquoi li Prinches chou lifait f
Hues , fait-il j tout entrefsèg
m .. Cbefie robe quefenefie /
Hues refpent de Tabàrits
à Ces amis : car c'eft-là le lit de repos; & celui
qui n'y fera pas , fera bien fot.
Quand Sakdin eue un peu refté couché
dans le lit, Hugues Je leva & le revêtit d'u-
ne étoffe Manche dé lhï , & lui dit en (on
langage: Sire, nemépriâz pas cette étoffe
blanche qui eft près de vos chairs : elle vous
donne à entendre, qu'un Chevalier doit tou-
jours avoir attention de tenir fes chairs nette-
ment t s'il veut parvenir à Dieu. Enfùhe il le
revêt dTune robe vermeille. Saladin en eft
•furpris f 6c lui dit tout de fuite : Hugues que
Jigpifie cette robe? Hugues de Tatarie ré*
4^4 Pièces
Sire y cette reube vous dçnne
A emendre ch'eu eft la femme?
Que f* n'e foies fans donner
four Dieu fervir & honnourer ,
Et penr f ointe glife défendre ,
Que nus ne puift vers li me/prendre;
4Zar tout chou doit Chevaliers fait '#
S'il veut À Dieu du noient plaire*
Chefi entend» par U vermeil.
Jipres U s couches cauchiés
De faies brunes & de liés p
JEt li dift ; Sire , fans faiii anche ^
Tout chou vous donne remembrançh* '
far ce/le cauchemente noire ,
Caiés tout adès en mémoire
la mort ($• la terre ougirrés*
Dont vent fie s & oh irés»
■ ■ ■■■ »»
pond: Sire, cette robe vous apprend (car
tel en eft le but) que vous ne foyez jamais
fans donner pour fervir & honorer Dieu:,
& pour défendre la-fainte Eglife , afin que pet-
fonne ne puiilè lui manquer : car un Cheva-
lier doit rare tout cela , s'il veut plaire en
rien à Dieu. Cela eft fignifié par la couleur
vermeille» Hugues , dit-il , j'en fuis émeiv
veillé.
Après il lui a chauffé des chauffes brunes
& fines , & lui a dit; Sire , fans vous trom-
per ,toiu cela vous donne le fouvenir , que
par cette chauffure noire, vous n'oubliez ja-
mais la mort & la terre où vous ferez coi*-
ché9 d'où rou&ète* Jbru fie QÙ vous retourne^
JVSTIFICÀTIVIS. 46J
A chou doivent garder votre œl ^
Si n'enkerrés pas en orguel r
Car orgeu ne dois pas régner
En Chevalier ne demeurer
A fimpleche doit adh tendre»
Tout chou efimout bon à entendre ,
Che dift li rois pas ne me grievei.
Après en fin eftant le liéve ,
Si le voui chaint d'une chaintur*
Blanche & petite defaiture.
Sire y par chefie chainturette
Eft entendu que vos car nete ;
Vos rains , vo eors entkremens
"Devis tenir tout fermement ,
lAujfi corne en virginité
Vo cors tenir en neteté
Luxure des pire & blafmer*
Car Chevalier doit moût amer
tei* Vos yeux doivent y prendre garde *
afin que vous ne tombiez point en orgueil ;
car l'orgueil ne doit point régner , ni <h trou-
ver dans un Chevalier» U doit toujours re-
chercherlamodeftie; tout cela eft bon ^-en-
tendre, lui dit le Roi ; je n'en fuis pas fâché.
Enfirke il le met debout , & lui ceint une
ceinturé blanche & petite de façon. Sire , par
cette petite ceinture, il eft (ignifié que vou*
devez tenir vos chairs nettes , vgs rems , vow
tre corps entièrement tout comme en virgi-
nité. Vous devez méprifer & éviter la luxu-
re; car un Chevalier doit aimer à tenir fix%.
jf66 Pièce*
Son cors a netement tenir
QuU ne fepuifi en chou honnir*
Car Diexhet moult ir eh ordure.
Li tors refpend bien efi droiture*
Après dem efperons U mifi
In fes deus pies & fuir lidift .•
Sire y tout autrefi ifniaus* ,
Que vont volée que vo* chevaup
Soir de bien eorte entalentés y
Quant tous des efperons ferés *
Kil voifi par tout s vo talent
Et cbà , & là ifnelement>
Senefient , ekift efperen
fini derifunt tout environ
Que vous Sites bien en corag*
De Dieufervir tout voftre eagff
Car tout li Chevalier le font
Qui Dieu aiment deeoer par font j
■ il ■*>■,■ u i m
corps purement , afin qu'on- ne puhTe lui faire
aucun reproche fur cela ; car Dieu haït beau-
coup une telle ordure. Le Roi répond : cela
fit bien jufte;
Après Hugues a mis à fes deux pieck deux
éperons, ôtlui a dit, ces éperons qui (ont do-
rés tout autour , fignifiest que vous devez
avoir autant d'ardeur pour fervir Dieu toute
votre vie , que vous voulez que vos chevaux
en ayeat pour bieu courir rafin qu'ils aillent
fort vite à votre volonté , & ç'5 & là y & par-
tout , quand! vous les frapez des éperons : car
c'eft ainfi qu'agifTent tous les Chevaliers qui*
aiment Dieu du profond de leur coeur ,&
Justificative* 467
Aies U fervent de cuer fin
Mour plaifoit bien Salèhadin.
Aprh U a chainte tépéê
Salehadins a demandé*
LaSenefionche del bronc?
Sire , f Mit-il , chou efi garant
Contre l'ajfaut del anemi ^
Chou afris fou fa autreffi*
U dot tranchant nous font [avoir y
Codés doit Chevalier avoir
Droiture & loyauté emfanle
Chou efi à dire , cho me fanle ,
Que fins riches kelpuifi laidir >
Et le feble doit fouftenir
Ch'efi œuvre de mifericordo.
Salehadins > bien fi accord*
Qui a bien efcoutéfes dis.
Aprh H a en fan chief mis
qui le fervent toujours de même. Celaplai-
toit beaucoup à Salacfin. Enduite Hugues luï
a ceint l'épée ; & Saladin a demandé Ta figni—
fication de cette épée. Sire , dit-il , elle ga-
flantit contre les attaques de l'ennemi- Ainft
l*aprâ-je mot-même autrefois : les deuxtran**
chans nous apprennent , qu'un Chevalier
doit toujours avoir enfëmble la droiture &
la loyauté. Cela fignifie, cerne femble , qu'il
ne faut pas qu'il fe laiffe méprifer par un plus
EuûTant que lui , & qu'il doit foutenir le foi*
le ; car c'eft une œuvre de miféricorde ; Sa-»
ladiu qui a bien écouté tout cela, ert tombe
d'accord.
Après Hugues amis fur fa tête une coëfle
468 , Pièce r
Vue coeffe qui tout sert blanche i
Puis H difi la fenefianche.
Sire , fait-il j or t [garde s
Tout enfement que vous favis >
Que chefte coife eft fans ordure
Er blanche & bêle , note & pure r
Et eft de feur vo chief ajftfe
En fe ment aujourdou juife
Des grands pecbiés que fais avous ,
Devons rendre l'ame a eftrous j
Et pure cV note des folies
Que li cors a tousjours bafties.
Adieu pour avoir le mérite
De Paradis qui moût de Vite §
Car ange ne porroit conter ,
Oreille oyr > ne cuers penfet
Cheft li beautés de Paradis
Que Diex oftroje nfes amis.
toute blanche ; puis il lui en a donné la figni*
ficauon, Sire , dit-il , or écoutez : tout ainfi
que vous fçavez que cette coëffure eft fans
ordure , & blanche & belle , & nette & pu*-
r e , & qu'elle eft mife fur votre tête ; tout de
même au jour du Jugement devons-nous
rendre Famé nette Vies grands péchés que
nous avons faits , & des folies que le corps a
toujours conrmifes , pour mériter de Dieu le
Paradis, qui fait beaucoup de plaifir; car la
langue ne pourroit raconter , l'oreille ouir Je
cceurfentir les beautés du Paradis, que Dieu
accorde à Tes amis»
JUSTIFICATIVES. 469
Li^Rcis très tou chou efcouta ^
Et en afrh li demanda s
S'il faloit flus nule cofe.
Sire j oïl j mais faire ne Vofe.
Que chou eft dont ? cheft li eolée,
Pourquoi ne le m'avts donnée x
Et dite la fenef anche ?
Sire , chou eftli ramembrancb*
De celui qui Va adoube ,
A Chevalier à» ordonné ;
Mais mie ne le vous donron;
Car je fuis chi en vo frifon j
Si ne dot faire vilonnie
Tour cofe qtfon me fâche ér die 9
Si ne vous voel four chou ferir ,
"Bien vous devis à tant tenir ;
Mais encore vous vœl monftrer
Et enpgnier éf* devifer
Le Roi écouta tout cela , & après il lui de-
manda s'il ne falloir pas autre chofe. Oui, Si-
re, mais je n'ofe le faire. Qu'eft-ce donc?
C'eft l'accolade. Pourquoi ne me Favea-vous
>£s donnée , & ne m'en avezrvous pas dit la
unification ? Sire , c'eft le ibuvenir de celui
qui l'a équipé & ordonné Chevalier; mais je
fie vous la donnerai point ; car je fuis ici vo-
tre prifonnier, & je ne dois faire aucune vi-
lenie pour chofe qu'on mefafle ou qu'on me
dife ; & pour cela je ne veux point vous fra-
per. Vous devez vous fouvenir de tout ce que
je vous ai dit , & l'obfèrver ; mais je veux
47* Pièces
Quatre cofis eftéeiaus
Lavoir doit Chevalier nouviau l
Et tout* fa vit tenir i
Se il veut à honneur venir ;
Chou eft tout au eommenchement 3
Qu'il nejoitkfaus jugement ,
h 'en lieu ou il ait traifon ,
Mais teft s em far te à b abandon #
Se le mal ne fuet deftoumer ,
Tantofi fi doit diluée tourner.
L'autre cofefi eft moût belle*
Dame ne doit 3 ne Ûemoifèile
Tour nule rien four concilier :
liais s'eles ont de lui meftier
Aidierleur doit à' fan pooir ^
Se il veut lot & fris avoir ;
% ■ ■■ ■ — —^1 wm —— — m | „M il
encore vous apprendre quatre chofes eflen-
tielies qu'un Chevalier nouveau- doit obier-
ver toute ùl vie ,; s'il veut acquérir de l'hon-
neur.
Premièrement , il ne faut pas qu'il adule
Jamais à un faux jugement, ni qu'il fe
trouve dans un lieu oh l'on faflè quelque
trahîfon , quelque injuftice : s'il se peut em-
pêcher le mal , il doit fe retirer auffitôt de
ce lieu là.
L'autre chofe eft fort belle; c'eft qu'il ne
doit jamais donner un mauvais confèil &
refufer afliftance aux Dames & aux Demoi-
felles ; mais lorfqu'eiles ont befbin de lui, il
doit les aider de tout fon pouvoir , s'il veut
acquérir de la gloire & de l'eftime ; car o*
JVSTÏFICÀTIVIS. 471
4Car femmes doit* on honnomrer ,
ïtpour l'ordetjj irons fais portât*
L'autre cefèfi efi pour voir j
Que ahfiinenoe doit avoir ,
£t four vérité le vj>us di ,
Qu'il doit juner mu Vendredi ,
Four chele fainte rstmembr anche ê
Que Thejk tris de la lunch*
1er us peur n» rédemption ,
Et que à Lcngîs fifi pardon*
Toute fi vie en chelui jour _
Doit juner fmr npftre Signcur ,
Se il ne laift pour maladie y .
Ou pour ëucune compagnie ,
Et s' il ne pueft pour chou juner
Si fi doit vers Diu accorder ,
D'aumône faire ou d autre eofe s
L'autre fi eft à la par clofi»
doit honorer les femmes., & tout entrepren-
dre pour elles. L'autre choie, c'eft qu'il doit
«£ure ahfHnence ; & je vous dis en vérité qu'il
doit jeûner le Vendredi , en la fainte mé-
moire de J. C. , qui fut frappé de la lance
pour notre Rédemption, & qui pardonnai
Longis. Un Chevalier doit jeûner toute fa
vie en ce jour , pour Notre-Seigneur , s'il
n'en eft difpenfé pour maladie , ou pour
quelque compagnie ; & s'il né peut jeûner
Sur quelque raifon , il doit promettre à
£u de faire une aumône ou une autre œu-
vre méritoire. Enfin * l'autre chofe eft qu'il
47* Pièces
Que çhafcunjour doit mejfe oit 9
S'il Jt dequoi^ fi doit offrir;
Car moût eft bien l'offrande affifi
Qui à U table Dist efi mife j
Car ele forte grant vertu*
Lir ois a moût bien entendu
Chou que Hugues 1$ va contant 9
Sa en a eu joie moût grant.
Afrh chou li rots efi levé ;
Enfi corn il fut atournis s
Droit en fa chambre s'en entra»
Chinauanu Amiraus i trouva +
Qui tout erent de fon pays j
Puis en fa caiere affts ,
Et Huesfefifi à fes pies ,
Mais tofi en fut à mont drecktes.
Li rois ta fait en hautfeoir ,
Et difi U rois 3fachies pour voir >
Four chou que vous eftes preudom
i -m mu .1 m ■—.■.,-■■■■ ■ ■■!■'■ »
doit tous les jours entendre la Méfie ; & sH
a dequoi , il doit donner à l'Offrande ; car
l'Offrande qui eft mile à la fainte Table eft
fort méritoire , & porte une grande vertu—
Le Roi écouta tout ce que Hugues lui dit ,
& il en eut une grande joie. Énfuite le Roi
fe leva ainfi équipe , & alla droit en fon Di-
van , ou il y avoit cinquante Emirs de fa Na-
tion. U s'affit fur fon trône , & Hugues fe
mit à fes pieds ; mais bientôt il fut relevé. Le
Roi le fit affeoir en haut , &lui dit : fçachez
que je veux vous faire un beau préfent , par-
ce que vous êtes un grand Chevalier; car en
Font
Justificatives. 47 5
Vous voel jeu f en un moult bel don$
Car jous vous oBroi banementj
Se nus eft fris de voftre gent
En poignets ne en bataille ,
Tour voftre amour quites son aillé ^
Se vous le volés aller querre»
Mais chevauchié s parmi me terre
Tout fimplement & fans de/roi j
Seur le col de vo parlefroi
Métis vo heaume en eontenanche j
C'on ne vous faiche defiourbancbe 9
Et de vo gent qui or funt pris ^
Vous rendrai jou jufca^dis 9
Se le volés ofter de cbi.
Sire p difi-il j votre merchi 3
Car cbe fait moût a merchi jet\
Mais iou ne voel pas oubijer
Que me defiQes que rouvaijfes »
Quant jou les preudomes trouvaijfes y ,
»". ' u\
Votre confidération , û quelqu'un de vo|
gens eft pris dans un combat ou dans une ba*
taille , je permets qu'il s'en aille libre faut
rançon , fa vous voulez aller le chercher.
Chevauchez librement & fans crainte dan*
mon Royaume , fur le col de votre couî*
fier, & mettez votre Heaulme ( Caftjùe) efl
figne de fauve-garde , afin qu'on ne vqup
trouble en rien ; & à préfent je voua rendrai
jufqu'à dix de vos gens qui font pris , fi vous
voulez les faire partir dlcL Sire , dit— fl , gran$
merci;. car cela vaut bien un remerciaient ^
mais je ne veux pas oublier que vous- m'a»
?ez conseillé dç faBaafcr ôU* Prud'hommes
47* Pièce»
Si Us donne au Conte Huoni
Si les a fris ou voel ou non 9
Car il n'en voloit nul porter u
fins chier euft à racater
Ses gens qui et eut enprifon9
Et erent en caitivifon
Entre les mains as Sarrafins*
Quant chou oi Salehadins,
Si en a Mabournet juré*
Que jamais n erent racatii.
Et quant Hues li oi dire ,
Si en et à fin euer grant irez.
Hais le Roi plus prijer n'o/a-.
tour chou que Makoumet fur* f
Car il n'el ofa cour ec hier $
lors commande a appareillier
tes dix compagnons qu'il et quis*
four remener en fé» faix y
Hais Ut ia puis demouré
m <■ ■ • ■ m
H donnés aU Comte Hugues qui les a pris d*
gré ou de force, car U ne voulait. pas les.
emporter; il auroit mieux aimé racheter fes.
gens qui étoient en prifon & en captivité en»,
fre les mains des Sarrazins. Saladin enten».
dant cela , jura par Mahomet » que jamais il*
41e (èroient rachetés. Quand* Hueies lui en*
tendit dire cela, il en fut très-faché ; mais il
p'ofa plus prier le Roi , parce qu'il avoit jure
j>ar Mahomet , car il n ofa le courroucer.
Alors il fait préparer les dix Compagnons,
qu'il a demandés» pour les ramener en fpn
ytys^mafc il s'eftarrêié .wore^jtai&îotfr*
JuSTIPICÀriTE* 4ff
Huit jours tout plains & Je fourni îy
A iront joie & agrant déduit y
fuis a demandé le conduit
Parmi la terre d'effacé
Salebadins li a livré
Grant compagie de fe genf ?
Cbuinquante funt qui bonnement
Les conduient far patente ^
Sans orguel frfans vilonnie ;
Oncques n'i vrent dtfiourbier x
Ch'il fe funt mis au repair ter +
Si fe muèrent en leur contrée *
Et le Prinebes de Galilée,
Si s'en revint tout enfèment s
Mais moût li pcife de fa gent ^
Que il convient la demeurer >
Et il m'en ofe plus parler ,
Si en efi pus cour Mes ke nuis,
pleins qu'il a palft dans la joie & dans les fê-
tes. Enfohe Û a demandé une efcorte pour
traverfer le pays ennemi. Saladin lui a donné
une grande compagnie de fes gpns : ils font
cinquante qui le conduisent (ans orgueil &
(ans lui Eure aucune vilenie fur les terres des
InfideHes : ils n'eurent aucun trouble dans 1»
route , arrivèrent au terme , & fe remirent ea
chemin. Le Prince de Galilée retourna éga-
lement en ion pays ; mais- il eft très-fèché
de fes gens qui doivent refter dans le pays*
ennemi : il n'en ofe plus parler , & en a plus
M chagrin que perfonne* Il n'arriva donc quf
478 Pièce*
Dont efien fin pas* venu* *
lui onzième fans plots avoir #
Dont départi le grant avoir
K'il avok e lui a forte r
Si on a maint heumeofonuê
Qui en eft riche* devenu*.
Signour y bien doh efire venus ^
Cbis contes entre bone gent $
Caf as autres ne vaut noient ,
j^uiU n entendent plu* ko herbe*
Foi qus desDiu de farads* ,
Chii perderoit hier* Çn joiaus
Qui les jettroit entrer pourchiaus y
iacbiés quilles defiuleroient ,
Ne ia ni* un n'en forteroient ;
Car il nefapoient fat tant >
Si fit oient mes entendant 3
Qnïekeft. contes leur contoroit y
Tout anj$ défoulé* fit oit Xi
Un onzième1 dan* fo* pays : il partagea le*
grandes richefiès qu'il avoit apportées avec
lui; il les àlftribua a pkifieurs» perfonaes qui
en font devenues riches*
Seigneur, ce conte doit être Ine» reçu de»
fconnetes gens ; car il ae vaut rien pour les
autres , parce qu'ils n'entendent pas plus que
des brebis. Par 1» foi de- Dieu, celui-là per~
droit foi joyaux quiles jetteront aux pourceaux*
* Cachez qu'ils les foukroient aux pieds, &
*tru'aucun d'eux n'en ^orteroit^ car ils n'en*
içauroient pas tant. Ces gens fèroient égale-
ment fourds , fi on leur racontoit ce conte; ils
le fbuleroieat également aux pieds » & en fer
J*s t if i ca Tiv r* 473p
It vieux tenus far leur entendrez
Mais fe il i vehiont ofrondre ,
En cheft cent* fut-on trouver
Deux cofes qui font a- loer ;
Vune fi efiau eommenchier y
Coument on fait le Chevalier r
Que tous li mons doit hounorer 9
Car il nous ont tous à garder *
Car ce net oit Chevalerie
Petit vauroit vo Sifriourfe ?
Car il défendent Jointe Glifty
Et fi efi tout noftre jnfticc
Contre chou qui voelent mai faire/
D'ans loer ne vootretraire>
Qui nés aime > moût far efi niche**
On embleroit nos-outices
Devant nous à la toute Dfr
Que ja neferoit defiourné 3.
soient peurde cas dans leur entendement }mai*
s'ils vouloient enprofiter , on pourroit trou—
ter deux choies louables dans ce conte j.ru~
ne eft cP abord 1* manière dont on. fait les-
Chevaliers , que tout le monde doit, hono-
rer, car ce font eux qui nous gardent. Si ce
n'étoit la Chevalerie > votre Seigneurie vau~
droit peu dechofe^car lesChevaliers défendent
k (ainte Egiife & font aoffi toute notre dé-
fraie contre* ceux qui veulent mal faire. Je*
ne veux point ceffer d* les louée Celui qui
ne les aime pas eft u» fot» On enlèverait
ms calices devant nous à la Sainte Table»
4%V P I £ C E tf
liais léser Jufliche bien enpenfî *
Qui de par oses notés fait défenja*
Se les mauvais né congr oient
Ja li bon durer ne fer voient
Se cbe n'eftfors , des Sarratins ^
D'Aubefois ér des Barbarins
If autre pm de mauvaife Loi ,
Qui nous met et oient a besloi;
Mais il eriement les Chevaliers:
Si les doit-on avoir plus obiers
Mtejfauchier é* bounonrer
* Et fe dois-on contre ans lever*
Son lesm voit aller & venir.
Chertés bien devr oit-on hounïr
Çhaus qui les tienent en vittéf,
Car je vous di par vérité j
Queli Chevaliers apooir *
De toutes fes armes avoir,
■ ■ : — *
fans qu'oit pût l'empêcher; mais leur jutHc?
défend de cotmnetrreces crimes. S'ils ne pu-
niffoientles médians, les-bonsnepourroienr
plus durer , excepté les Sarrasins, les Albi-
geois , jes Barbarins , & d'autres gens de
mauvaife Lof, qui nous mettroient en ruine ;
mais ils craignent tes- Chevaliers : ainfi les
doit-on encore plus efthner , exalter , ho-
&orer;& #or* doit (élever par refpeâ de-
vant eux, des qufon< les voit aller & ve-
nir. Certes on devroh bien honnir ceux
qui les tiennent à mépris : car je vous dis en*
vérité , qu'un Chevalier a le pouvoir d'avoir
toute* fes armes, Se de les porter dans ht
&
JUSTIPXCATIV IS. 4<l
Mt en faim* Glife aporter y -
Quant il veut la Mejje efcouter
Que nus mauvais ne contredit
Le ferviebe du fil Marie ,
Et le faint digne Sacrement $
Tar quoi mous avens fauvem eut 3
Et fe nus le voloit défaire >
Ha pûoir de lui ochire ,
, Encor un feu dire m'efiuet 3
Fai que dois aviegne que puet,
Cheft commandé au Chevalier.
Si l'en doit-on avoir plus chier t
S'il bien chefte parole entent
Que je vous dis hardiement 9
Se il faifoit félon fon ordre
A nul fier ne forroit e fi ordre
De droit aler en paradis*
Pour chou ai iou ichou apris
- -- ■ ml-
fàinte Eglife , quand il veut entendre la méf-
ie , afin que perlbnne n'interrompe le fervice
du fils de Marie, & le digne fàint Sacrement
far lequel nous obtenons le falut ; & û quel-
qu'un vouloit refufer (le Sacrement ) ou fi
quelqu'un vouloit refufer d'obéir, un Che-
valier a le pouvoir de le tuer. Il faut encor
dire quelque chofe;/*" ce que tu peux-, arrive
fui pourra. C'eft ce qui eft commandé ;
Chevalier,ainfi on doit le prifer davantage s il
•ntend bien ceprécepte que je vous dis hardi-
ment. S'il agifloit félon fon ordre, pour quel-
que chofe qu^te"(bît, il ne pourroit manquer
d'aller droitf en Paradis; Pour cela ai- je ap-
Ttmclf* Sf
j|8* Pièces
Que faîtes chou que vous devis-
Qui les Chevaliers heunerés
Sur tous hommes entirement . .
fers chaus h font le fortement
J)u cors Diu , je vous dis four nom
for chefi dit le fuet onfauoir '%
Kilavint au Comte Hue»,
Qui meut fis fagfs & preudom
Que Salhadins tant hànnora
leur cfjou que preudom le trouva f
Etfilefifi meut hounourer
peur chou fe fait-il b on fener
Pe faire bien à fon fouir ^
Car en i fuet grantfreu avoir •
Itfi truis lifant en Latin
De bones oçvres bonne fin.
Or f rions au difiniment
Çhe lui qui eft on Vir moment 9
Eus que vous Eûtes votre devoir , vous qui
onore* les Çhefahers aunieffus de tdus
ïe^hommçs , çxcepté ceux qui font le Sacre^
tnent dù'Cprps de Digu, { les Prêtres j Je
yous le dis dbnc;-£ç on peut rapprendre',
Car ce .qui arriva au Comte Hugues qui fût
jjbrt fage & prad'homrae , lequel ?aQbpn ho-
nora tant, & le fit tant honorer , parce qu'il
Je trouva prud'homme. Ainfiif &it oonfe pei*
» «1er de faire le bien de tout fon "pouvoir ;' caf
x>n peut en retirer ujï grand profit , & je
trouve d^ns leXâtîh , de bonnes œuvres * bonne
fin. Or , pjr cohflufion , prions celui qui eft
au firmament ; cjue auan4 houj viendrons $
Justificatives. 4$j
Qu*nt nous vantons fin affiner ,
Que nous fus/eûmes fi finpr
£ts* neuf mons Ujoie fins
fi- fit bon m$e ne de fine,
Amen. .
Ex pUcit U ordres de ChfvaUÙB.
jnourir ,gue nous puions finir , dç forte où*
nous ayons la grande jbïe qui ne inanque ia*
mais aux boijs. *' ■ t^j.
JuiMnf : * \ '
Ici finit rOrdre de Chwaleife.
On trpuvedans h féconda Ubrmé
4el Doniy Pag.j*. à Venife M DLI
uneefoéce de Traduction de ce morl
ç eau fort abrégée, .
Lorfque 5e travaillois à cet ouyra»
« , fadreffai à M. Fréron une Lettre
Jur les galcres'du dop^nre fîécle p
Quoiquelle fpit impripée dans (è«
feuilles , je «crois devoir la joindre ici ,
1 objet m'en parpi&nt digne d atten-
fioa, **
Bayleavoit foin, Menfieur , d'in- -,
fêter dansfon Journal les Lettres que
différentes per/onnes lui adreflbient,
foruju'4 les jpgepij capables de piquer
Sfij
4$4 Pi ECU
la curioûtc des Leéfceurs. Vos feuil-
les n'en deviendraient peut -être
que plus inféreflkntes, fi de rems en
tems , vous y faifiez entrer quelques
difcuffious Littéraires fur des points
curieux ; & vous pourriez inviter tous
ceuit qui travaillent d'après les anciens
Auteurs > à vous faire part des endroits
qui les auroient principalement frap-
pés. Ce feroit le moyen de perfection-
ner nos connoiflânces , & d eclaircir
bien des matières que le voile de l'er-
reur couvre encore. Parmi les gens de
lettres , les uns fe chargent de l'em-
ploi glorieux de nous inftruire , Se de
notis communiquer les tréfors Litté-
raires qu'ils ont acquis par bien des
veilles > d'autres nous refufent par
tnodtAie ou par pareffe , le tribut de
kur travail. Il en eft , qui fe renfer-
mait dans eux - mêmes , femblent
n'enrichir le«u? efprit de connoiflan-
çes unies 6c agréables, que pour fe
vendre le flatteur témoignage de leur
fupériorité fur le relie des hommes*
Ne poutrok^on pas les comparer à ces
avpres* qui a'amaflent des richefles
que pour le plaifi* de les pofféder ,
Uns lés réj*iWfe> &i né cherchent
J tï S T-I f I C A "tt V 15 S. 4*f
«fans leur avidité* qu'à fe convaincre
de leur opulence? Ils ignorent que
nos études doivent tendre au profit de
la fociété. Ces réflexions te ont en-
gagé à vous adreffer une découverte
que je viens de faire. • *
Y<his fçâvez , Monfieur, que j'ai en-
trepris d'écrire THiftoïre d'un fameux
Conquérant qgi vivoit dans Je dduzié-
mcfiécte* J'ai été obligé de confulter
:.fes Hiftoriens contenus dans 1 ample
.Recueil de François Pkhou. .& Paul
Pétau^imprimé à Hanau en 1 6 1 1 . fous
le titre de Gefta Dei per Franco* ; &
toici ce que j'ai trouvé#dans l'Auteur
inconnu du fragment de l'Hiftoire de
. Jérufalem. En parlant d'un combat
naval qui fe donna devant Ptolémaïs ,
. pendant le fiége de cette Place \ if dit
quelles vaifleaux des Anciens, pro-
» près pour la guerre, a voient quatre ,
t»cinq & quelquefois fix rangs de r*-
» mes , poiés par étages les uns fur las
>» autres; & il ajoute : On $ anjom^
%%Jthm déchu de cette magnificence; car
rtnos vdiflèanx d$ l*errc excédent rare*-
n mtxt àeuxrangs de rames. « Il donne
enfuke . la defeription d'une Galéer,
-Galère ou Gdcafo , & d?un Galion. SI
Sfiij
1
4&6 Pièces
infirme c{ue la Galère avoït plufïcurs
rangs de rames, deux au moins, Se
die que le Galion n'en avoit qu un , 8c
que par-là il fe monvoit plus facile*
ment , & qu'il étoit plus propre àlan-
cer des feux. !
11 paroît donc , que même vers ta
fin du douzième (iécfe (en 1 190.) il y
avoit encore des vaifleaux à deux & a
trois rangs de rames ; ce qui n'avoit
point été remarqué» autant que Je
'puis m'en reflbuvenir , par les Au-
teurs qui ont agité la queftion des
Rames.
Vous n'ignorez pas , M. les diflfS-
tens fentimens quils ont adoptes.
Après avoir lu leurs fçavantes ditfet-
tations 9 on eft forcé de convenir
f qu'on n'a rien de bien certain fur cette
' matière. Le partage de notre Auteur
fembleroit appuyer lavis de ceux qui
prétendent que tes rames étoient pla-
cées les unes fur les autres, ainfi que
le marque ta Colomne Trajane. Car ,
après tout, (telles ont 'pu être ainfi an
douzième fiécle, pourquoi n auraient»
elles pas été de même anciennement ?
Tel a toujours été le progrès des
Arcs: on a gardé .quelque chofédas
Justificatives. 4#jr
formes anciennes , en corrigeant , en
perfectionnant. Il feroit ridicule de
dire, que c'eft précifémerft dans le
douzième fiécle , qu'on a imaginé la
manière de mettre les rames y les unes
fur les autres.
. Ne vous effrayez pas * Monfîeut * de
toutes les objections qu'on peut vous op*
pofer. Les Anciens peuvent avoir été
plus habiles que nous dans les méchani*
qucs.Notre lupérioriré fur eux n'eft pas
encore bien prouvée, malgré les efforts
des Perrault*. Il y auroit une forte de
vanité à regarder comme impoffible ,
ce eue nous ne pouvons exécuter*
Quelque exagération qu'il y ait dans.
les effets prodideux qu'on attribue
Aux machines d Archiméde , avons-
nous rien qui en approche ? Jetiez ua
coup d'oeil fur les Cirques, fur les
Amphithéâtres, fur le Temple de Baal-
bek , fur les obélifques , fur les Pyra-
mides d'Egypte ; quelles machines
élevoietft des pierres aufli énormes,
dans une fi grande hauteur ? Conw
bien de pratiques dans les Arts
que nos pères connoidoient , 8c que
nous avons perdues ? Les rames fe
xntouvoient peut - être anciennement
S f nij
4SS Pièce*
par one mécbanique que nous igno-
rons.
L'Auteur du fragment vivoit cm
1 1 90 : il avoît paflé la mer .; il com*
barroit peut-être far ces mêmes vaï£-
feaux dont il donne la defcription ; Se
il procède , dans (à Préface , qtfil ne
parle que de ce dont il a été le témoin*
Vous pouvez rendre certe remarque
publique ; elle réveillera peut-être la
queftion fur les rames des anciens,
qui a été fouvent agitée , & qui n'eft
point encore décidée. Cet Hiftorien
n écrit pas d'une manière auffî barbare
que fes Contemporains , Scjeleioa-
r;onnerois volontiers plus moderne 9
caufede l'élégance de fon ftile , s'il
étoit permis de lui donner un démenti
à lui même. Au refte, il n'eft pas le
feul qui parle de ces vaiffeaux à deux
& à trois rangs de rames ; la plupart
des anciens Ecrivains des Croifades ,
#.U Princefle Anne Comnéae en
font mention ; mais aucun ne mar-
que avec autant de détail, la ma-
nière dont les rames étoîent placées*
Voici Te paffage en queftion :
Et quia ftsvalis belle mntio wcidit,
Justificatives. 489
tvnftqHcns arbitramur ut clajfem belli-
cam ferme fuccinftus deferibat , & quali
utuntur moderni, & qualern inftituert
mmùjui. Apud veteresfiquidem , in hu-
jnftnedi navïbus numerofior exigebatur
9rdo remorum , quibus gradatim per ta-
bulât* âiftintta furgemibus , un a m alti
iongijfimo , alii breviore vexabant im*
pulfu , Ternos autem vel Quaternos ordi*
nés ftpius kabebant , & Quinos înter-
dunt; fid & fenos naves qu&àam'ih
Acciacopralio , cùm advenus Antonium
dimicartt Auguftus , habuijfe legwttur.
Caterùm omnis illa vetnjiatis magnifia
ctntia imminuta dcfiuxit : nam clajjis
bellica > qua Cents olim decurrebat erdi*
nibus , mme bines raro excedit. Qmd
autem anùqui dixere Libumamt moderni
Caleam -, mediaprpdutt* nominam ; que
longa , gr avilis , & parum eminens ,
lignum À prerâ prafixum habet , & vulgp
calcar dicitur , qmo rates hofiium trans-
fiîuntur pereu/ft. G aliène s vero une rc*
morum idineemtenti . brevitate mofc
[ tes, & facilius fleftuntur & leviks dif>
eurrunt , & ignibus jacuUndis options
exiftum. Hift. HicroCp. 1167. Geft*
Dci pcr Francos.
49* P i e é e s
Nf. 5.
Je devois placer ici les Lettres da
Saladin & de Ton frère Adel au Pape
Lucius lll ; mais ce volume n'eft déjà
que trop épai^ Ceut qui feront cu-
rieux de lire ces deui pièces les trou-
veront dan* la Compilation intitulée 2
HîJîorU Anglican* Scriptorcs amupuy
in-foL p. 4xi . imagines Hifioriarmm §
AuEi. Radulf. de die. &c.
N*. 4,
. Par la même raiftift , je ne mettrai
pas fous ce nQ* comme je Pavois in-
diqué , tin Manufcrit fur la branche
de la maifon d'Angldre ,- dont les
aînés portoient le nom de Saladin*
\ Cette maifon eft éteinte. D'ailleurs *
le fait en queftion, quand même il
ne feroit pas fabuleux, ne peutferap»
porter à notre Saladin , & ne pour-
xoit convenir qu a un de fes arriére*
Jetirs fils. Voyez Palliot , de la feience
es Armoiries, Moréri, laNoWeflfe
de Champagne, 8c un Manufcrit la-
tin qui eft dans le Cabinet de M. de
la Cour, Tréforier delà Bibliothé*
2ue du Roi Se Généalogifte de Mo»-
ïigneur le Duc d'Orléans.
TABLE
DES MATIERES
Contenues dans ctt Ouvragé.
Les chiffres Romains I & II marquent le*
tomes , & les chiffres arabes les pages.
ABBASSIDES
(les) abrégé de
leurHiftoire,/*»?* I.
page iZ &fwv*ntes.
Abc (Modgired-
din ) Roi de Damas,
I. 95. Sa mort, 97 ,
Abdolnabt , Roi de
l'Arabie heureufe, dé-
trôné par Saladin, I.
1x0 $• fuiv.
Aboubekk, , fuccef-
(èur de Mahomet , L
M-
Aboul-haidoià
( Hufaai-eddio } IL
*3'-
Abdiah ou ABBAtr-
LAH -BfiN-$ALEM( te
Rabbin ) aide Maho-
met dans la composi-
tion de i'Al-korau , ï.
IX.
Acw , v^fx Ptoll*
maïs.
Adil frère de Sa-
ladin, L ii* , 435 ,
11.40,418.
Adex fiJs de Kamel ,
II. 4.15.
Amn , ville de l'A-
rabie hëureufe^I.n 1 ,
111.
AdHED LfiDIN-IUA*
dernier Khalife ïuh*
49* T
Bàtt, 1.106 , ij4 ,
Af0Hai fils de ba-
ladin ,1. 4^1. Son
combat avec les Che-
valiers Hospitaliers &
Templiers , 455 é*.
/«ru. Devenu Roi de
Damas ,11 41*.
Acne's fille de Jof-
celin de Courtenai , I.
104.
A il a.? h, ttf}*£
ElATH.
AlNTAB, I. 3<*I.
Aischa femme de
Mahomet, la feule qui
fut vierge ,1. 13.
A klath, JPgrjMC
Khélach.
Aiaid ,11. 111/
Alaidon, voyez.
Al Ain.
A l a vf ( Emir )
commence le pre»
«mier le Khothba au
nom des Àbbaffides;,
& 191.
Albéric ( Clément }
>> lî. 190 , 301.
Ai -coiUN, vojei
At-koRAN.
' AlEXANDfclE.Sa
BIS
Description v a/Cégée?
par les Chrétiens , 8Ç
défendue par Saladin,
t U*. &fwt>. a£
fiégée,La4x^.yi#v.
" AtEXIS CttKNEMS,
Empereur, I. 70,^3,
Ai-caU* Province^
L 430.
ALIOTSflesJI,!^
xi , *3-
Al-KOAlttf (L'JIU
-vre qui contient la Lot
de Mahomet , I. 1 r.
AtMAUXAR. ville #
11.374.
Ait (le Khalife;
t. 18.
AtfAiK? , vtjet
Amaury.
Amand (Odon 01/
Eudes de $.) grand
Maître dts Templier»
I. 138, 330. Fuyez,
Eudes.
Amarat Poète fô.
ditteu*. Sa punition1,
I. 113 , 114.
AmaOry Roi de
Jérufalem,!. 7 S. Va:
à Conflantinople de-
mander du fecoursi
l'Empereur , 1. £04.
BBS Ma
Vêtit panir les Tem^
plicrs de l'affaflinat
de PAnibafTadcm du
vieux de la Monta- -
gne. Sa mort, I, 2.3 S ,
Ambassadeur. Hil-
tbire ilnculiére «L'un
Ambafladeur, 1. 10*.
en noies. Ambafladeur
du vieux de la Mon-
tagne affaflmé par lest
Templiers y I. 1.37.
Amila ( le mont )
1J. 101.
Amlrou Général
d'Omar,prendA lexan-
4rie & Brûle la Bi-
bliothèque 3 I. 15.
antarado.s.
. Andromic Comne-
#e Empereur. Abrégé
de fon Hiftoire , IL
. Angxure. On ra-
conte une Hiftoire fur
une branche cadette
de la maifon d'An-
glure ,11,404. 490 ,
Antàb. K«9** Ain-
tab. :
Artaradqs ,. IL
i«4*
ri eu es. 495
Antarsus, Ffj«*
Antarados.*
Antéchrist (1* )
Opjnion des Muful-
rnans fur l'Antechrift,
IL fi;«J» Nftes.
Antiochl Siège &
prife d'Antiofhe, L
ht AjdfiE. ftf&tX. Ha-
MA.
Apkerbaia ville f
L43J.
Aps ( Ermengard à')
IL 30*.
ARABAN.P<7#*AR-
BAN,
Arabes. Leur ori*
gtne > leur religion ;
leurs mœurs , abrégé
de- leur Hiftoire , L 1
frfuiv. Arabes enlè-
vent un enfant que Sa*
ladin fait rendre à &
mère, IL 147.
Arabie hbureuss
conquife par Saladin,
L 347. Rois Ayoubi-
tes de l'Arabie heu*
feufe,H.443.
Aradon ou Ara-
do* (l'Ifle à?) I 13*-
Araeah * Arafath
la fèce d'Artfiu , t»
494 * A
montagne d'Arafat ,
]L 391. II. i*i.
Aubin, 1. 371.
' a&belles, i. 371.
AfcMÉNii,pecUe Ar-
ménie, Etat & Rois
de la petite Arménie ,
1-33* *ywv.
Aristotb traduit
par les Arabes <rui
adoptent fa philofo-
pjïie, I. 189, i^o.
Arran. l^pr** Ha--
*an.
AKSiKN.Voyez. K a-
ra-Arslan , KÉSIL-
Arslan p KIÏ.IOPB-
Akslak.
Arsoph , II. '56.
Arsuf. Voyez. A%-
•OPH.
' ASAD-EDMM. Vif**
icIRkqUH.
ASCALON , IL f 4.
E^truite par Saladin ,
bâtie car Richard , II.
341 èrfuiv. Détruite
par les Chrétiens &
far les Mufulmaas,
IL 3*7.
Aschraf Sulthân
«l'Egypte,!!. 43c. -
BLE
Asie Mineure , IJ.
Assassins , yeufenr
mer Saladin , l. %6% ,
*?i. Il leur fait la
guerre. Hiftoire abré-
gée de ces Peuples f
I. %9* &fu*v.
Aswan ville de la
Thébaide , |.' 12.4.
Af abeks. (Pynaftit
des) I.2>.
Athïr. y§y$z Ben*
bj.-Athir.
avesne qu yvesnb
(belle aftion d») L
A17-
Avesne (Jacquet
d* ) II. 171.
AUTWcttE Léopold
Duc ou Comte d'Au*
triche , attaque la tour
des mouches , IL 14 if
outragé par Richard ,
IL 300.
Ayoub { Nodgera-
eddin ) père de Sala-*
din. Abrégé de foa
Hiftoire,!. S? &fivv.
Il va en Egypte, oâ
il eft chargé de 1 a<f-
miniftration des 'fi*
nànces *, |. 1*3 ,
if4-
jdes Matières. 49 j
Çonfeil qu'il donne à II. 1 9 , 6% , 70 6*/*iV,
Saladin , 1 10 , 1 1 ï .Sa Bambi/ce ? jP\ fcUi*»
«¥>rt , 1 1 tf . Bàwbjx j bedgh. *
AYQUBiTïS,Hi#ôi- Ba$ (Tiibaud;-
»e abrégée de la Dy- Comte de ) JI. 13^ f
naftie des Ayoubitcs , 1 jrf , 1 71 , 1 8rf.
i}.4i%frfûiv. , Bajmn,I. 9X,xZi*
Azaz. fyy&EzAT,. Baj\gilqUn,II,
Aux Roi d'Egyp- 3*8.
te ; fils de Sajadm , IL Ba*timoU£. J^jw*
418 (jrf»iv. JBaictimpuh.
: ; 3ascha*, I. 3*f,
B Ju.TAi44.fi de Ba-
« bain ou de Baben , If
BAaï.bik,I.9i, Sa ix4. |ie Hama , I.
Description , if 17 j t 18^. d'AfcaJta*
f^nd à Salâdro , L 17*. qj» de, ftamla , J. 3 1 f *
&fitiv. * de Paaeas , 318 é*
BAPAÏf* ou, Ba*|n yfr». deTiWriadeou
(bataille dç) L 118. d'Hittin , oui décida
Babylo/« d'Egypte, <JU fort dé la Palefti*
I.1" 30^ Ppyty te Cairr ne j If. 14 ($•./*#*/: de
fe, . ^ Ptolémaft , JJ. 17* \
Bagdad , fieg*#es 178 , i.8ot i|i, fï ^
Abbaflides , J. 18. ., f|x» M3V**4y 3**
Baïra^ /fetç fdu fjpjuw* - , .
£aïram, 1.4*8, BATH||ii^SYffyM5
Bakas ville, JL ni. Assassin»,
Baktimour;,I. 3ja, Baudouin faif If
£ ailleurs , IL 37^ Coçqu^te fifÀefei h
Bal an as, II. 1.07. 'f*/ moyen Unguliejf
Baibek./^** Baax- dpnt il Te fert pour
be*. ' avoir de argent, I»
JPAJ.ÉAN dlBEim , 54, Succède à Gftdô*
49<f Table
froi de Bouillon ,1. ( l'Hiitorien J II. zj+t
Cf. Baudouin du ajr.
Bourg cft fait Comte • Benjamin bsTude-
4'Edenc, devient Roi m ( le 3m£) h 130.
de Jérufalem , I 6j, Berenger«m>e Na-
66. Baudouin III. Roi varre épotrfe Ri-
de Jêrufaiem ,1 , €7. chard , II. 167 , 177.
Baudouin IV. dit le Birite. Vojex.%1-
Lépreux , fuccedc à rout.
Aroaury, I. 1-39.63- .Bernard (Saint )
gne une bataille au- prêche ia Croiràde ,
près d'Afcalon, I 31 ^ I. éj.F.ft accufé d'être
6» yWv. Sa mort,L un feux Prophète, &
444. Baudouin V. Roi fe juftifie , I. 76.
de Jlrufalern , L 443.* BeroUT , I. 41a.
Sa mort ,1. 447. Bau- H. 39.
doin dé Rame ou de Bcrtsab^. Vnytt.
Ramla, L 330, Beith-doebraÏe;
Bedreddin , I. 3 69 - BethùITem , II. r 3.
&fiêiv.' Betw-nous,U.331^
JtelTH-BGÉftRAiL, IL BetHENON^B. Vty
|4« Béton o us.
. Béia Roi de Hon- Beths an ,1.4)0.
grie.ll \ t9s . j^îr.BÉRociT,
" EElWif «ille,l.H4* BerïtJ
âffiégêe 8c prife par Béxan D'euro Frit-
tes Francs > II. 1 4 r . mat ion de cette mon-
Bklihas. Vûj$k Pa- néye ,1.137.
m£as. Bibliothèque d'À^
Bei voir, ffyrc lettndrie brûlée , I.
Mbrkab. If,
Btim fleuve ,11, Bibliothèque du
17©. ' ' Khalife Adhcd , h
Bi»-n Atbir iôifc
Bidifort
BBS M ATI EK ES. 497
Burzu rille , II-
BlDMORD OU BlDSS-
fQRp , grand Maître
des Tcmplicrs,L 45 * •
érjmv. IL 133,1**-'
BlHROUS, .1. &9,9CÙ
Bira , I. 34$.
BLATAMOS. /^>|JC
Plat a nos*
Blois (Pierre de)
écrit contre la disme
Saladine,lL 137.
BoffÉMOND ou
BoÉuond. Expédient
étrange dont il fe fert
pour intimider les Ef-
pions , I. jS« loi"
mond Prince d*Ah-
Ûeche^il. t9.<&/ktos
BOHAHSODm ï l'Hit
tôt ien ) h 570. IL
i#7, 11 î f it^,xoô;
Boves ( Robert de J
Il iox.
Bou*.go*ni (mort
du Duc de) II. i?$;
Bribhni (Erardte
André de)II.i73,tSfi
ErârdiieBrîènne/JI
301. '*
B*tt*B (Geoffroi
de ) IL 501.
Buctimér. J^#*
BakxiwoOr.
7«w If «
m.
C^ABAH (1*) OU
maiioa quarrée;
Temple de la Mec-
que , L 4. >
CUsaksb de Pki-
iippes ,voye^ Pandas»
CjKarêb de Paletti-
se, IL 3*.
Casar-schah Pria*
ceSeljoucide,IL3S*.
Caffitans , Hgmc
veftds <Va*flneur. »
CahbR ( le KfeaK-
fe) demande Pawaô-
ne il. 3^
Caimaz (le Vkfr)
î. $4*, 3><>, 37i.*
< ^CaikJe( le) fa Des-
cription , Sakdiâ
Fetafeelltt, I. jgj &
fiïru.
CARAC.F>7«tKftAltf
Gara**** enteré*
parRich<**,tt. 331
' T« ■ *
4*8 Table
Cardinaux (les) Çhatsixeraud ( re-
donnent l'exemple de- Vicomte de) II. 30*.'
laprèmiére ferveur & . Chatillon ( Gui Se
du premier refroidiC Gaucher de ) II. 173.
liment pour la Cro£» Gui de Chatillon ,
]
Cide^II. 134.
Carmel ( le mont)
différent du Carmel
voifin de Ptolémaïs ,
Carmel (le mont)
auprès de EtoléàlaJLS ,
II. 169>
Cars oq palais du
Khalife Fachimite.ێ\
xémonies pour appro-
cher du Prinçg,1. 1 x 1 ..
Çastellai* .( le Vi-
comte de) IL 301
CAUc»iarII..xpir
116.
Chaiora. Vtytx,
Khabour.
Chacehai .( Erard
4e) IL 302..
Chalat. Ftyfr
KH EtATH.
Chamat, K Hama.
Champagne ( le
Coince de) époufe Ifa-
hclle veuvt de Con-
rad, IL 3*9.
• Charran. F*yi&
Barrai*.
301.
Chevalerie de Sa-
ladin,IL 447c5*/**v«
Chevalier. Saladin
fe fait aimer Gheva.
lier f IL 4b w.
€»TPRs(Plâe.de)
conquife par. Richard ,-.
II. %7S &.fiùv*
Circeskxm î v.Ker-
Circbsu» Jrçisii.
. Clément III.. ( Je
Pape j fait pr&herjâc
Groiude ,;tllv .x**.
. CURMON* Cn Al*.
verdie. On y tient ur*
Concile pour laCroi-
fade, I. 4*.
Clermont ( Raoul
Comte de) II. 301. .
Cocni. yjoytx>lco~
nium.
Combat terribje en-
treAfdhal fil» de Sa-
ladin 8c les Chevaliers
des deux Ordres , I.
4i6&f*h.
COKKBSTABIE (le)
de France ,11. a>i.
des Ma
Conrad Efnpereur,
ft droite , I. 70 &fuiv.
Conrad dbMont-
vbrkat , appelle le
Marquis de Tyr , ar-
rive dans laPaleftine,
Se fe rend maître de
Tyr,IL 44e'/*''»-
II.'* 3 & fuiv. enlevé
à Honfroi du Thoron
ïfabelle focur de Sy-
bille & Pépoufc , II.
%S6& fuiv.dk affaf-
finé ,11. 1x9 et fuiv.
Cotb-edd*n &oi de
Mouflbul, ï.*£.Totb-
eddin fils de Kjlidge -
Arflan , IL ' m é>
CRAC.^ijffX, Krak.
Croisades. Abrégé
de Pfiiûoire des CroU
faites , J. 43 fr fuiv.
Les Croifadçs produi-
fént un bien & uq
mal 1 1. ^3 , tf 4. Croi-
fade /origine de ce
«IqM.4/.
* Croises , portent
une croix rouge fur
l'épaule , I. 47.
Croix ( la vraie )
•rifc à la bataille de
Titëriade,!!. xi. La
T 1 E R e s. 499
vraie Croix, IL 194,
*5>3> 30J, 541.
CUCUPETRUS,,Cu-
cupierrf.^^ Pur»
rei/Hirmitb,
Curde5. V. Kur-
des.
D
DAcotjca,L 373;
Damas affiégée
par Louis VIL Roi de
France, I.7 j.Sulthans
Ayoubites de Damas t
ir.4s«.
Da miette affiégée
par les Francs, I. i6$t
170, affiégée &prife
par lès Chrétiens > IL.
4*3.
Dampierri ( Gui
de) IL 173.
DAH.fojez, Panbas.;
Dandux ( Janus)
Ambaffadeur du Pape
Lucius III, I. 413.
Dani ( Gui de ) IL
30*.
Daroham , Vizir
d'Egypte,!.!!! &f
D^arom. f *j*&Da*
ROUM.
Daroum, L 17*:
U. 33* *
Tt ij •
f o# Table
DeUUAC,IL il f. bjffidcîétoientDOÎfS,
DsusfidesCroUcs, ceuxdeSaladinétoicnc
I.4*
DgESAÏL, tt. 108.
Dgeze* Yacoub ,
t )*<- 33 *•
DCIZUET-BEK-
Oma* , Iflc du fils
d'Omar , I. 343.
Doiobaïl, II. 40.
Dgizb.I. rix.
Dhahe* fils de Sa*
ladtn,II. j8i, 3881$»
/«fv» Deveou Roi
d'Halep.U. 418 &
fmv.
Dhoulnoun Prin-
ce du pays de Roum,
I. *w.
Dietz ( HenriCouti-
tede;eft envoyé eu
Ambaûade àSaladiq,
IL 143.
£i*X £J VOLT,
Dieu le reut , cri de
guerre Jf derife des
O lôifés , I. 4€.
DlOCiSSAILÉE. fijjrx,
SfifHOUlvI.
Dl*STOLIS
Lî&DA
jaunes , 11. X97.
DoTAiu ville , IL
37-
Domkake rille , L
DUNEizm , L 377*
Duhham ( l'Erêque
de ) acheté nn Com-
té, II. 261.
Dynasties , diffi-
reores Dynafties par-
mi les Muiulmans,L
34,*Ȕ*.
44
ECus D'oft. Vaje* -
Bezans.
£desse,I. 3*jt.
•Egypte ( StilthanS
Ayoubites<r^)II.'43Çw"
Eirtab. Voytx. Ain-
tab.
ElABDtJM. ' f%J#&
AtAID.
ElANE. K EtATlI."
Elath ville ,L 4A5;
Pfcjffc' Aflïégée parSaladin,'
_.. I. 181.
DixmbSaiadini^IÏ. Eléônore Reine de
137. Trance, fe croife^L;
Duafka vz des Ab- tfJK Entretien on Côjfe^
nt$ Ma
merle criminel avec
on Tare nommé Sa-
ladin , I. 74. '
EIphadix. grand
Càdhi de l'Empire de
Saladin , II. 37* &
fuiv.
Eu Jugkum 9 II.
III.V
Emad iddin. Vqe*
Zenghi.
Emad-eddin * Zm-
ghi autre que le pré-
cédent p implore le fe-
cours de Nour-eddin,
I- 174, >7î» *7*i
*Stf. Eft fait Prince de
Sindgiar,I. 17 i. Eft
fait Roi <PHalep , L
345. Echange Halep,
pour Sindgrar , I. 3*5
fr fuiv. Emad-eddin
Zenghi ,.11. ijo &
fuiv*
Emed , L 3^0.
EmESSE. Jfyftt HjBr
MESSE,.
Emir, fîgniBcation
de ce mot , I. pi th
notes.
Emir ai Omaha»
ce qt»e c'écoit , t. je r
Emmaus, II. S.
Éndo*,!!.' 37.
T î B R E ST. jd f
E&&OUM, II'
214.
Eschine femme de
Raymond , Comte de
Tripoli , II. 7.
Espagne , parties
méridionales de ]jEf~
pagne, foumifes au*
Mahométans , I. 14.
Etendard des Croi^
fés , IL ^43 , 144.
Eudes ou Odon de
S. Asnand , grand
maître des Templiers,
réfifteauRoi,!. 23 s.
Réponfe & mort glo-
rieufe d'Eudes de S.
Amand,I. 3.30.
EïAZ,I. *£I#
FAsfiiis. Voytté^
Phouia.
FAtHlMITES. (les)
Abrégé de. leur Hit*.
toire,I. loi. Fin -de ;
cette Dynaftie,!. 197^
'' Femmes combattent
au fiege de Ptol^maïs,
II. 18*.
Fxodal (Gouver-,
nement ) établi en.Pa*^
leftine par les Croît
^oi T A
fés,l. £4. Les Arabes
âvoieat une efpéce de
Gouvernement féo-
dal , 1. 371^
Fknni* ( Êngue-
randde)II. 301.
* Flottes du douzié-
stie^ûécle , I. 169. IL
111 , 483. érfuvv.
Forbelbt. Foyez,
Apherbala.
Fostat. f^yez. u
Caire.
Fougères (Raoul
ieJILsox.
Fout&UEs , Comte
4'Anjou , Roi de Jé-
rufàlem , I. 67.
France, les Arabes
font une irruption en
France ,1. 15.
Francs , leur Gou-
vernement , leurs
moeurs , L 399' &*
fwv.
Frédéric. I. dit
larberouffe Empe-
reur, fe Croifc, II. 141
&fiiv. SaCrolfade,
IL IJf &f*iv.TKZ'
» b r 1 c de Souabe
fon fils , prend le
commandement des
Troupes après (a
BLÉ
mort, II. xi 1, &/***•
Sa mort II. ij 4. Fré-
déric II. Empereur t
II. 4H-
Fustx*. yty* 1»'
Cairi.
GAfiAfr*. jKgWCr
DGÉBAÏt.
Galeasse.1 tt #tf
GALE*- (483.
GALION. J4-3"
Garlank (Manaf-
sèsde)II. 173.
Gaultier, dit fan*
*vùr, un Chef des
Croifés , L 49.
GaOR. tf0t% A*-
Gaur.
Gaza ville y 1. 17c ^
179'H- 19*
Cu>iùH Roi d'Ar-
ménie y I. 338.
ÇEtBoi,(ieMont)
1-431-
Gbnim ville , IL 57.
* JBA1L.
Go»ETROI Df Bouil-
lon, Chef des Croi-
DÈS M A tl SUS S. jo$
ltoi Je Jérufalem , I. frfubv. Pririces Ayou-
6i. Sa. mort, L 6x9
Godesckl ( le Prê-
tre ) un des Chefs des
Croifés , I. Su-
bites de Hama, ILf+qr.
HAMTAB. V. AlNTAB.
Hangest ( Florent
de,) IL 50».
HARjnd, I. 311, £r
Gonbsse (Eude* /àîv,
de ) L 304. HaIeuC. ftp. Ha-
Gouvernement*, ta-
bleau du Gouverne-
ment des Francs, I.
399. &fuiv, .
Gregiois (feu) II.
74-
ffUSM.
Havvran,!. 3*©.
Ha*an. (le Khalife)
Elemple de fa modé-
ration, I. 10 , h.
Hauterive,( Raoul
GuéDBjACOB.P*J«C de) II. joi
Dceïer Yacoub. Mazim , ( l'Emir )
Guillaume Arche-
vêque de Tyf'eft en-
voyé en Ambaflade i
ConflantmopJe , I.
144. Son Hiftoire , L
407. (a mon , 1. 409.
Guillaume Roi de
*• 37* &/****
Hébron, II. f 3*
Hégire, Ere dès M*t
nométans , I. 7.
- Hel-Festbin (Louii
de ) allure avoir vu
Saint George» & Saint
Sicile, 1. 140. Goil- Viâor,, II. 119.
laume Marquis de
Montrerait, II, *i.
H
HàïphaII. 3I. .
Halep ville, I.ili,
t«o, 1*4, 34?, 3**-
Sulthans Ayoubites
d'Halep , IL 437*
Hama ville,, Lie? f*iv.
HlLIOfOLIS. Fojtx.
Baaibbc •
Hemesse ville, I. 91,
i*8. Princes Ayou-
bites d'Hémefle, IL
441.
Hfnw H. Roi d'An-
gleterre, IL IJ5 &
5«4
HihacuUs Empe-
reur de ConAantino-
plej. 13*
Heiucuus Patriar-
che de Jlnifalem, Son
Hift- Tes débauches ,
L4**é»/î«ft/. eft dé-
puté en Europe, I.
44 ç . Sa conduite vio-
lente, I. 44*, 447
Herin. fajwfcHa-^
KSM.
HlE*AFOU*?tytft.
Manbedce.
Hipa. Voyit, Haï-
fHA.
Hittin, (bataille à')
Holacou Khan de*
Taztare* Mogol* , U.
41S.
HoNEROl J»U THO~
*on, I. ii*s, **$>,
refufe la Couronne ;de
Jérufalera , If 445 <fc
fitiv.ll. ?.ff.
Hospitaliers (€he*
valiers) leur établifleT
inent , I. 46,
HOUNEIN OU Ho-
nain, U. 101.
Hugues de Tui^
*iade • I. 3^0.
Tab t Ê
Hu*AKt. VêJftX
Harem.
J.
JABNl'H. Ç3,
Jacob , Capitaine
d'une Galère, fait une
belle a&ion, IL s. 7$.
Jaffa. Voyez. Jo*m*
Japha différent de
Jafla, IL 37# „ t
Ibech Roi d'Egy-
pte, IL 417.
Ibex-ul-Asuasci^
(belle a&ionde )U#
16%.
ko»itm, hs+E*
*io.
Jeanne, (la Princef*
fe,), veuve du Roi de
Sicile |c fattr de Ri-
chard , propofée en
mariage à Malek
Adel frère de Saladin 9
JfiKiCHO ville , II.
*7'
Jérusalem pnfc par
les Croiiës, L 61.
Siège & diferiptioade
cette ville prife par Sa*
ladin , H, 67. é»/a#%
JeHJ* , opiûiao des
Mufulouns
* ks Ma
MufolmsnsfurleMef-
HC , IL J I. tfW »w,fé
Imam , fignificanon
de ce mot, I. x«tf. w
. JOACHIM ( l'Abbé )
▼inonnaire célèbre, IL
X67.
Jolnyuib. (Geoffroi
Je) II. i73#
Joppi',IIr4i.afficg<?e
* prifc par Saladin ,
**• 342. é*>#v. repri.
fepar Richard,^ ço.'
. JOSCELIN »E COUH-
«NAi9I.44Sc$»yWt;4
Ib.ak(P) Province
n. m.
LES.
Irm-ia ou Ubjwa.
IL i76.
Isaac l'Ange , Em-
perenr,II.3fo.é»y«iV.
Ifaac Roi de Chypre,
vairicu & fait prifonl
nier par Rickwd, IL
Islam , Islamisme ,
Mufulmans ., fîgnifica-
tiondecesmots,iitf.
en notes.
litldufilSD'OMAJU
Voyez. Dgeziiut.
Tome II. •
t 1 1 r 1 s; ^0j
IftMAEi Roi d'Ara.
bie,IL 43*.
Ismaélien». Ftp*
A*6A$SIHS.
Issa. ( Dhia-eddin )
I* 1 tfo. Issa ben Mi-
wam. Jésus fils de
Mami.^w Jésus,
MaME.
Iruwfe(L) I-*7U
Juifs nwffacrés , IL,
2**0,
Justice. Première
Chambre de Juftice
parmi les Mufulmans.
I. 12.5. 130.
¥L
KAdhi Juge M*. -
ioméian,!. 19.
Kaiariatha,!. di.
Kafaktab. 2 I. y*^
. Kafertab. 3 280.
Kaohic Roi d'Ar-
rûènie,I. 337.
Cachk: (le) Bah
pR!«Oi*a,PrineedJAr-
ménie différent du pré*
cèdent , IL 1*4.
Kai - Khosrou y
Prince, II $*$.
Kamel fils du Vizir
SCMAOUR I. 154.
KAMEJLfil« r/ADJ»-
IL4*x. '
jo* Ta
Kams Tbcghin,
( Saad - eddin , ) Ton
«aradére, fes entre-
prifcs, I. 148 <$•
/««/. S'empare du
Gouvernement d*Ha-
lep , I. M° & fi"v-
Veut faire afTaffiner
-Saladin, I. x^ 3. Vient
trouver Séiff- eddin,
I. 1S3. Sa mort tra-
gique , 1. 3 1 1 &fuhr.
Kaphartab. Voytx.
Kafirtab.
Karabag, I. 387.
Karac^-Krac.
Kara - Covsch ,
( Boha-eddin) IL 13*.
JCARZiNvilJe,I.)6r.
Ken as, fameux ré-
belle, fes progrès , fa
mort ,1. xi+érfuiv.
Kennazerin. Dit
pute (ïnguliére auprès
de cette ville, I. 15.
Kerkisie* ville , I.
35?- *
Kesil Arslan , ( le
Prince) I.375.
Khabour fleuve &
*ille,I 3î».
. Khadidg* femme
de Mahomet v L ç , 6.
Khaub ville, II. 54»
BLS
Khaltfb , fîgnificâ^
tion de ce mot. Abré-
gé de l'Hiftoire des
Khalifes, I. 13 *
fuiv.
KHARISMDSNS.(Dy-
naftiedes)I. 81.
Khatib efpécc de
Curé Mahométan , L
Khelath ville, L
357. Rois Ayoubites
deKhélath, II. 441.
Khotba , prière
publique , I. itfi. éta-
blie en Egypte au nom
dfesAbba(bdes,1. 191,
Kiudge-Arslan ,
Sulthan d'Iconium , I.
50, si, 54, 31*,
333 » 334 &/tùv. II,
KoisuM,(merdc)
1. 181, 414.
Koran ( le ) r*jf*s
At-KoRAN.
Koukberi, ( l'E-
mir) II. 373 &f»iv.
Krak,I. 114,43^
Belle défenfe des ha-
bitans, II. 119.
Kurde , réponfe in*
iblcnte d'un Officier
Kurde, II»*? 3 , 33*j
des Matières.^
Wfgtne, mœurs des
Kurdes, I. 87, 88.
Kus ou Kous ,
qu'on croit être Thé-,
b(s,1. 115.
L.
LA dikie'i. V. AO-
dice'b.
Laodicb'e ,11. io8#
Legium ville , II/
37-
Leitan ou Léontc,
fleuve, IL itfi.
Léon Evêque de
Theffalonique, occa-
fionne une guerre , I.
31. Léon ou le fils de,
Léon Roi d'Arménie ,
I. rt7&f»iv. IL m
<&* /îw'v.
Lbontb , fleuve. V.
Leitan-
Lettm de PEmpe-
rear Frédéric à Sala-
din , IL 144. De Sa-
ladin à Frédéric , II.
146. D'Ifaac l'Ange
à Saladin , IL 2.03.
De Kaghic Bar Gré-
goire a Saladin, IL
izf. Des habitans de
Ptolémaïs à Saladin 9
11.1^3. DHologou au k ûfan',11. 34 1.
Yuij
507.
Roi d'Halcp, II.4i8.
De Saladin & d'Adel
au Pape , IL 490. àM.
Fréron , fur les vaif-
feaux du douzième
fiéclc,II. 483.
Licha. Fty$K Laof
dxce'b.
Liooa ville, II.jo,
318.
Loulou. ( Huûm-
eddin ) L 417 <$»
fuiv.
Louis VIL Rot 4e
France fe croife, U .
69 f &c.
Louis (S.) IL 41*
Lucius III. ( la
Pape } .envoyé une.
Ambaffade à Saladin
&àMalek Adel fon
frère , L 411 , 413»
Lusignan (Gui de )
Epoufe Sybille , L
41*. eft fait Régent ,
L 441. eft couronné
Roi de Jérufalem, J.
449. reprend les arô-
mes malgré fon fer-
ment, II. 16 & fuiv.
On lui donne rifle de
Chypre en échange
du Royaume de Jéru-
5 ©8
T AILI
M.
M£THATil,e'
Maarra ville, I.
• Ma odax ville, I.£&.
II. 41 , 33*-
. Macny. ( Raynaud
de , ) II. 301.
Mahalie* (rifle de)
ou (ê forme le deka,
I. 1 n.
Mahasam fils de
Schaour , L 147.
Mahmoud Orteki-
de, I. 350.
' Mahomet, abrégé
defôn HifloiTe, I. c/
Mahumeria. (la Col-
line de ) H. 171.
Maiile' (Jacque-
linde ) Chevalier du
Temple. Belle a&ton.
Sa. mort glorieufê , I.
460 & fniv.
Maison Quarrée.
Viyez Caabah.
Maison de Dieu ,
II. 61 t 6$. en nâtes.
Makesin, I. 351.
Maiathte,II. 387.
* NIalbek. l^ty**
Baalbeic.
Malas-Kurd , tt*
3** -
Mameluks ,1. i^i,
(5» /«m;. IL 4&tf .
Mamoun (le> Kha-
life ) fait fleurir les
feiences parmi les-
Arabes , 1. 1 9 frfuiih.
Manbedoe , I. 1^0-
Manzour ( Malck
el ) petit neveu de Sa-
ladin , II 381 àHkiv*
Manzoutf Roi dTEgy-
pte, If. 411.
Manuel Comnbnb
Empereur , I. 71. Son
cara&ére , I. 10 y. en-
voie des trompes en
PafefHne, I. 31 y.
Marxkia ville , IL
' 107.
Maréchal de Fran-
ce. La première occa-
sion od il eft parlé de
cet Officier, II. i$o.
MaKôarit. (le Gé- '
nierai) IF. 103.
Makgath. Voyez.
Merka'b.
Marie , nîéce de
l*Empereur de Conf-
tantinople , I. 204
Marte Opfrri on des
Mnfolmans fur Marie-
des Ma
jaicïed«Jeftts,IL ji.
en notes.
Marie. (Raoul de)
II. 303.
JMasiat villcl.303.
Maïoud frère du
Roi de Mou(Toul ,
vient • au iecours de
Saleh,I. 176. Devient
Roi de Moafloul , I.
341 , & Roi d'Halep ,
J. 344-
MECQUE.(la)I.4i5»
Medinat al -Nabi.
y oyez. Medinb.
Medine, I. 7. 415.
Melier, Templier
apoftat , Roi d'Armé-
nie,!, xi 3 , 338.
Memmon: ( leTom»
beau de ) II. 171 .
, Memfhis , I. 30*.
Minbb'. *j
MENBEJE. y V» MAN-
Menbig. J bedge.
Mirage ou Alcen-
fion , Fête des Muful-
mans, IL 81.
Merkab, II. 107.
Mers. V. lb Caire.
Meschtoub ou Me-
getoub t Général , dé-
fend Ptolémaïs , IL
x.%% > *9S* ^it une
TIEilS, 509
belle réponfe à Sala-
din,H. 335-
Mesnil ( Gautier
do ) Templier alfiaf-
une un Ambafiadeur,
I. 138.
MfiSRAIM. VûJêZ. LB "
Caire.
Miafarekin yille ,
I. 384. Rois Ayou-
bites de Miafarékin ,
II. 44*.
MlLON DB FtANCT »
I. 148 , ifi. Laifl*
égorger les babitans ,
I. i79.Sa mortj.239.
Mina. (Vallée de la)
où les pèlerins de la
Mecque font des fa-
crifices, 1.419.
- Minaret , Tour qui
fert de clocher %aux
Mufulmans, I 18 j.
Mirabel.' V. Ma**
BAL..
MlRAN. 1.99'
Mirs. Veytx. xi
Caire.
Moadhah Roi d'E*
gypte, II. 41*.
Moavia (le KluU
life, I. 19 , ii.
Moeurs des Francs/
I. S99&fi*v*
Vuiij
'jr* Tab
Moiz Ledin-Al-
lah, Khalife Fathimi-
te , bâtit le Caire,
belle réponfe , 1, 1 04.
MOHAMMED. yojiZ
Mahomet.
Mohammed neveu
deSaladin, fa mort,
Mokaddem ( ben-el)
Gouverneur de Saleh»
I. i+s frf*iv.
MoNNOYE.Premiére
monnoye Arabe,I.i4.
Mont***.-"}"
AAND. fV. BA-
MONTVER-f KIH.
MAT. 3
MONTMOfUNCV ,
(Jofcelinde)Il. 301.
Mont-Rbal. (An(è-
ricde) IL 173.
Mont-Rem. (An-
felmede ) ÏI. 30U
Mont-Royax..(Fot-
terefle de ) bâtie par
Jtaudoin, I. 6$ t 66.
Mosux.. fiy. Mous-
fOUL.
Mouches , {Tour
des ) IL 163 , 139
Moulins , { Roger
de ) grand -Maure
L 1
des Hofpiralier«;Tr;
Moussoul ville,!,
3X* • 37*-
Mour. {Gaultier
de ) IL 301.
MOSTANDGEIX, ( le
Khalife ) Sa mort*
Exemple de fa juiliee,
L 181 , iyi.
Mosthadi , ( le
Khalife ) I. 181 ,
193.194-
Mosque'e , fignifi-
cation de ce mot , fbn>
origine , L 117. en
notes.
MuraxNyCrieur pu-
blie, qui appelle lia
prière, L 185^
Mutmbn Khelasct.
Chef des Eunuque*,
1. 16$ frfuiv.
N.
NAbolos. Voyez
Napoious.
Naim ville ,1. 431;
II. 3*..
Naplouzb* VeyéK
Napolous.
Napolous, I. 40^
440.
KaxeH, Klalife^
idês Mâtures;
o
5x1:
^40» Nazer Roi d'A-
rabie, IL 431.
Nazareth ville, L
431.II. 3<f.
Neapolis. V. Nà-
FOLOUS.
Neschmum ville ,11
S7Î-
Nesibin, I.451.
Nevilli. (Foulques
CurédeJRéponfede
Richard aux exhorta-
tions de ce Curé , II.
Kice'b , I. 54.
NlNIVE,I. 354.
NlTROUM , IL 54 ,
318.
nodgem eddin. v*
Ayoub.
NODGEM- EDDIN Roi
d'Egypte, II. 415.
Noisi. ( Hugues de)
IL 301.
NOR ADIN. VoyeX.
NoUR-EDDIN.
Nour-eddin, (bel-
le action) de I.7 %,9U
Sa. mort , fon carac-
tère , fes vertus , fes
défauts, I. 2.2.8 &
fuiv.
Nubie (la) conqui-
se par Saladin,!, 1x0.
OBÉlD -ALLAH
(Abou Moham-
med } premier Khalife
Fathimite ,L 101.
Odon de S. A m and.'
Voyez. Eudes. Voyez,
Amand.
Omar, (le Khalife)
I. 14 &fuiv.
Ommal Reine d'A-
rabie , II.43L
OMMlAIJES.(les)
Abrégé de leur Hif-
toire,1. 11 ,18.
Orfa. V* Edesse»
Objplame (1*) ban-
nière, IL 1^4.
OBsOntb, fleuve, I#
158.
Orpha.P'.Edbsse;
ORSoUprillefII.3tf.
Orthosia. Voyez
Antarados.
Ortokides. ( Dy*
naftiede$)L8i.
Othman. ( le Kha*
life)Li7.
P
^ Agras ville, II;
^ xi*.
Paneas ville , L
$jz Table
Pasqub oh Riveki. Platamos ville 9 fc
Voyez. Riveri.
Pass. (Anfel de)
1*77-
P HttVAN,!. 383.
Perche. ( Rotrou II. n î-
XXI.
Pont de Jacob.
Voyez. Dgezebu
Pont de Feu { le )
de) II. 301.
Phaih ville , II.
XII.
Pharamia ville , I.
170.
Phare b*Alexan«.
brie, I. ix$.
Philippe Comte de
Flandres, I. 31* fr
f$Uv.
Philippe- Auguste
Roi de France, II. i$j
&fuiv* Philippe Evo-
que de Beauvais , IL
x7i.
PHoULArville,IL37.
Pigeons pour don-
ner des avis , I. 131,
Pierre l'Heamite ,
L 44,48> 45> , H ,
17-
Pierre noire en
grande vénération > I.
4»
Pierre de Jacob
(la) IL $i. en notes,
Plancy./^^Mi-
IjON.
PoNTHiïU.fleCom.
te de) IL 301.
Porcellets ( Guil-
laume de ) fait une bel*
le aétion, II. 319,
PoRTB,(la)laCour
d'un Prince , IL roi.
Prière publique
parmi les Mufulmans,
I. 1S5 , i9x~t
Pro vençaux. (Deux
Prêtres } fuppofent un
miracle, 1. 19 96o.
Ptolemaïs. Siège
& Defcription de cette
ville , IL 34 e* fuiv:
Puits des TuRkor
mams (le) 1. *8tf.
RAbig villc,I.4iS.
Racca ville , I.
. Rafinb* , Rapha-
nj'e,I. 181.
Rages. V. Edis»,
Rahba,!. 98.
DÉS MàTI£1LBS.
Ramadham» ( le).
Ramala. K Ram*
*A.
Rame. V. Ramla.
Ramjla ville y II.
Raou* Comte de
Clermont , IL I72--
Ras Alain , I. 37^«
Raymond de Tw-
toxiRégem duRoyau-
rne,I. i39i*4°>44*
<£• /*iv. Sa mort, fa
juftification,II. 14 e»
Raynaud de Cha-
TIU.ON. Ses briganda-
ges, I.4 17. Son entre-
prife fur la Mecque 8c
itir Medine , I. 414 ,
43 5 . Il rompt de nou-
veau la trêve,!. 4JI.
Sa mort ,11 ai.
Raynaud de Sidok
trompe Saladin , IL
157 &f»*<v.
Ribauds (les) ce
quec'étoit, IL a?i ,
Richard. Cruauté
horrible de Richard ,
IL 30*.
RivEw(Pafqoede)
515^
appellée Madame la
PatriarchefTe , fes dé-
bauches avec le Pa*
triarchc, I.409.
Robam place , I.
Robert Comte do ;
Dreux, IL 171.
Roche Arnaud ou •
Roche Raynaud. V*
SCHOKAÏF.
Roche Guion( la }
ou la Roche Guillau-
me ,11. 11 S.
Roger Roi de Sici-
le , fait braver l'Em-
pereur des Grecs , I.
140.
Roha. V. Edesse.
RoUM.(paysde)II.
115.
Rubis fort gros, I»
101.
Rupin dé la Mon-
tagne Roi d'Armé-
nie,!. 337*
S
S Ain? Jean d'A-
cre. V. Ptolb-
maïs.
Saint Louis Roi de
France, IL 4 * 7-
Saint VAUK.{to-
}i4 T'A
aard de ) II. 301.
Saladin Roi d'Ha-
lcp , II. 418.
SAUU>iNB,(la)dix-
meimpoféeà l'ocea*
fion de la guerre con*
tre Saladin ? IL 137.
Salamia ville $ IL
•374-
Salef , Écrive od fis
noya Frédéric Barbe*
xoufTe , II. **i.
Saleh Succefleur de
Nour-eddtn.Troubles
dans fon Royaume , I.
»43 ($• /îw'v. * Haran-
gue lesCitoyens d'Ha-
lep qui le défendent ,
I, 3^3 é> yï*iV. Sa
mortlt L 343 6
SALTUS LlBANl,
Samarib ville , I.
440.
Samosath,I. 374.
Sancerre ( Etienne
Comte de) II. 171,
301.
Sandale ( une ) eft
caufe qu'on levé le fié-
gé de Mouffoul , I.
35f."
SANDOIAR - SCHAJf
111
Prince, IL *4*<$»/.
Sanguin. /^. Zut-
•m*
Safhat. /^grec, S*
FHET.
Sarepta. ^". Sajw
FEND.
Sarfend ville, II;
43-
Saruania. V.Sax*
MTN.
Sarmtn, II. m;
III.
Saron. (le mont)
II. 170.
Saroudge ville 9 L
3f-
SarraZins. Leqf
origine , abrégé de
leur Hiftoire , F. *•
Scandeuo. Voytx*
Scanderons
Scanderona, II. 3S;
Schadgereldor Rei-
ne d'Egypte , II. 4itf
&fuiv.
Schady Ayeul de
Saladin, I. S 8.
SchafÉi Do&euf
Mufulman ,1. iff }
1X8,189.
Schah-Arman Ro/
de Khélath, I. 357^
/*w. L 3S2U
DE S M A
ScHAHERZo'UR. V*
ScHFHERZOUR.
Schamseddin-Alt,
f . 147. Sa mort , I.
"a 50.
SCHANIN. ^. $CHE-
MN.
SchaoUR, Vizir
d'Egypte,!. 107 e-
fui v.Trompc lesChré*
tiens, I. 147. Sa mort
I. 155,15*.-
SCHEHERZOUR Ville,
I. 374-
ScHEHERVERDl
( SCHEHABEDDIN ) Phi-
loibpfîe mis à mort
pour Ton impiété , II.
390.
Scheik. V. Vieux
de la m ont aon!. v.
Assassins.
SchemuhoUnin vil-
le,IL 111.
Schenin ville , I.
440.
Shirkouh ( Afad-
eddin ) oncle de Sa*
ladin. Son origine ,
abrégé de fon Hiftoi-
fe, I. 8? & fi***- $*
première expédition
en Egypte , I. 1 1 1 &
fiih.V* à Bagdad fol-
tis'&es; jTj
liciterlcKhaKfeyI.)
11 6. Sa deuxième ex-
pédition en Egypte , I*
118 érfuiv* Sa troi-
sième expédition en
Egypte, I. i4y &f.
Eftfait Vizir d'Egyp-
te yI. i5*é*>«v. Sa
mort. I. 15 g.
Schirkouh petit
neveu de Saladjn, Sa
réponfè ingénieufe,I.
391. épfuiv.
SchokaÏf-Arnouh
I.4i5,4H» M* &
ftêiv.ll. 205 , 106,
SchoubeIc ville , L
x©7 , 2.08.
Scytopolis. Voye*
Bethsan.
Sébaste. Voyez Si*
PHOURI.
Sehjoun on Sihjok
ville, II. 109 érfinv*
Sajde. Voyez. Sidon;
Seifel-Islam frère
de Saladin ,'I. 348.
Seifeeddin Ghaxx
Roi de Mouffoul,I.
96, 175,2.44,2.50,.
îfi, 171, 181,187;
M&fuiv.
SEiJOUCIDES.-fD.f-!
uaftiç des ) h 75+
5i« Ta
Se naà ville, î. xx ï.
Sephet ville , IL
Séphouri ou Se-
phouria ,1.451.
Sergen* d'arme».
première origine d'u-
ne garde pour nos
Rois de la troifïéme
xace, IL 331.
Sjanin. V. Sche-
MIN.
SlCHEM. V. NAPOU-.
IOUS.
Sidon ville , IL 38.
SlIINlN. 1 V. SCHE-
SlININ. $NIN.
Si^giar ville, 3 ytf.
Siouas , Siwas , IL
38* 387.
SlRACON.F. SCHIR-
koUH.
SlTTAL-SCHAM faur
de Saladin ,11. *$*.
Sobal de Syrie. V.
SchoubeJc.
Sodomb ville. Opi-
nion des Mufulmans
fur cette ville, IL 374.
en noiei.
Soliman Roi d'A-
rabie, IL 433.
Sour. Voyez Tyr.
Sugbr AbW de S.
a l 1
Denis , Régent da
Royaume, L 71.
Sulthan. Signifi-
cation de c« mot , L
191- *n notes.
- Sybillb mariée à
Lu(ïgnan,I. 41*. cftr
couronnée Reine , I.
44 S. Sa more occa~
(tonne de nouveaux
troubles , IL x f x.
Syeke. V. Asvtan.
Syrie. Etat de la Sr-
rie,I. 75? &fmv.
TAbarib. A'"" Tx«
BERIADE.
Talai Vizir d*E*
gypte, io<î e*»/*™.
• Tancreoe Général
des Croifés , I. < f £».
>it;: Tandrede Roi de
vSicile, IL 15 ç.
Targues, Targes,
II. 73
Tartares Mogols,
IL 41$ frjuiv. j
Tebnin ville, IL 3$
I £4 $• Aw.
TeIcieddin - Omar
neveu de Saladin. Ré-
ponfe hardie, difTé^
rens Exploits^ mort
.d s s Ma
&& 1.111,1x3, 335
V- **> x77 #1*53»
781.
. Tbkrit. ville, I. 50.
. Tela. île Lac) II.
576. « .
Tell - Aiadhiàt- ^
-Montagne ,. II. 171.
Tell CHALEB,Fortc-
rcflc, I. 3*1.
-iTemplieks ( Cheya*
liens Templiers ) leur
éjablHfetrienr, j. £tf.
Templiers pendus > I.
. Thebbs. V. Kous
ou Kus.
TheodorêRoî d'Ar-
isénie. V. T*ôr<*s.
Thermesdb TiBEKS,
H. 8.
• T^iBAtro Comte de
Chartres , II. T71.
Thogrul ( le §ul-
thanjlï. $76.&fuw.
1 Thomas Roi d'Ar-
ménie, I. 113 33&-
-Thoron. (le Châ-
teau du ) I. 31*.
Thoros ou Théo-
dore Roi d'Arménie,
1.115,338.
TlBERIADE Ville, II.
7>
tiERis: ^jj
. TiiUBRts ( Gilbert
de! II. 301.
ToRtosB. ^.AhTa-
RA»Q$. '
Tour (el) H. 3*.*
ToURANtfCHAH, fre-
iede Saladra, conduit
La Nubie & l\AraÈ>ie
heureufe, I. 118 &
fuvv.
. Tournois au fiég«
de Ptolémaisy Ik-i 8 1.
Tremblement • dfe
terre qui détruit une
partie de la Syrie , Ù
, Trésor des Fathi-
mites , 100. 1. -217. .
- Txxpoli de Barba-
rie, I.113.
.Troyb. Leiiége de
Ptolémais compare
au fiége de troye , II.
300,
Turc o mans. jroy*#
Turkomams»
TURCOPLES ,TURCO*
POLS , II. 4. '
Turbne. (le Vicomte
de) II. i#i.
•TURKANKNf , Nf
377.
Turkomans (les)
I. 15e. II. *if.
)xS Table des
Tukon (montagne
du) IL 171.
Tyr ville, II. 43 <J»
VAjsseaux du
douzième fiéclcj.
X f 9*H. 1 1 x . Lettre fur
les vaiffeaux du dou-
fciémefiéclc,IL 483.
Valence. F» Bala-,
VAS.
Venbosme. ( Jean
de ) 301-
Vestb d'honneur ,
habit royal,Cafretans,
I. Mî.
Veuve. DE Nour-
zddin , on die qu'elle
époufa paladin , I.
Vieux de la Mon-
tagne, (le) y. As-
iASSINS.
VlLLEINES. V. BA-
LANAS,
Vital ,( Olivier )
Aipbafladeur du Pape
Lucius III, I. 411.
ViziR.Significatioa
de ce mot, I, 105, e»
MATrïHE^
nvtes.Mott terrible da
Vizir de Mofthadi , I.
34ï.
Urbain II. (le Pa-
pe ) fait prêcher la
première Cioifade , I«
45 &/«**-
Urmia. y. iRMIAj.
Y
YAtreb. V. Med*-
NE,
. YeMEN. f . ARABH '
HEUREUSE*
Yemen. f Rois Ayoa-
bites de 1* ) IL .443,
2
ZAB,(le) fleuve, t
I. 388. .
Zabid ville de l'A-
rabie, I. 311 , il 2;
ZARik Vizir d'E-,
gypte,Lio7é-/wv.
Zarin ville, 1.434,
Zxineddin Prince ,
I. 145*.
Zenohi. ( Emad ei>
pin ) I. $0 frfuiv. 5a .
mort, 1.^4*
Zenobib Reine de
Palmyre,l.2S9, 160.
Fin de la Table des Matières.
Il1, '
APPROBATION. ^
J'Ai lu par ordre de Monfeigneur le Chancelier un Mu
nufcric qui a pour titre, Hiffoir* à* Sulédtn, &c*
L'Auteur ne pouvoit faire connoitre ce Prince , fansrap.
pellcr , pour ainfi dire » toute l'Hiftoire de nos Croifades*
Les détails où il entre fur cet objet , donnent une idée
peu arantageufe des Mœurs des Croifés. Mais il en parle
comme tous les Hiftoriens du tems en ont parlé > & Ton
Ouvrage m'a para très - digne de rimprcflion. A Paris» -
ce premier Septembre 1777.
DEPASSE.
PRIVILEGE DU ROI.
TT OUIS,fAlLLA GX.A0B DlOl|U)RO!Dt
A^ Franci btpe Naya&e: A nos amés, Se
féaux Gonfeillers , les Gens tenans nos Cours de Parle-
ment , Maîtres des Rccmêres ordinaires de notre Hôtel ,
Grand - Confeil , Prevèt de Paris , Baillifs > Sénéchaux ,
leurs Lieutenans Civils tte autres nos Jufticiers qu'il appar-
tiendra , S a l u t. Nocre amé le Sieur M ahin Nous
a fiait expofer qu'il déiïreroit faire imprimer & donner
au Public un Ouvrage qui a pour titre : Hiftoirc de Sa»
Uiin , Sultan à*E^yfté , s'il nous plaifoit lui accordée
nets tertres de Privilèges pour ce néceflaires. A c 1 s
causes, voulant favorablement traiter l'Expo fane ,
Nous lui avons permis & permettons par ces Prélentes de
faire imprimer ledit Ouvrage autant de fois que bon lui
semblera , 8c de le faire vendre 8c débiter par tout notre
Royaume , pendant le tems de dix années consécutives ,
à compter du jour de la date des Préfentes. Faifonsdé-
fenfes à tous Imprimeurs , Libraires & autres personnes,
de auelque qualité & condition qu'elles foient, d'en in-
troduire d'impreflion étrangère dans aucun lieu de notre
©béi (Tance » comme auflî d'imprimer ou faire impri-
mer , vendre , faire vendre , débiter ni contrefaire ledit
Ouvrage , ni d'en faire aucun Extrait fous quelque j>ré-
texte que ce puiiTe être , fans la permiffion exprefle 8c
Îar écrir dudit Expofant , ou de ceux qui auront droit da
ui > à peine de çonfifeation des Exemplaires contrefaits,
de trois mille livres d'amende contre chacun des con-
txevenans \ dont un tiers à Nous , un tiers à l'Hôtel-Dieil
de Paris , & l'autre tiers audit Expofant ou à celui qui
aura droit de lui 2 & de tous dépens , dommages Se i*.
tirets -, A la charge que ces Présentas feront _
crées tout au long furie Kegutre de la Communauté
des Imprimeurs & Libraues de t'acis, dans trois mois
de la date d'icelles. stue limpreiùoa dudjc- -Ouvra-
ge fera faite dans notre Koyaume & non ailleurs •
en bon papier & beaux caractères, conformément à
la feuille imprimée , attachée pour modèle fous le
contre - fccl des préfentes j que l'Impétrant fe confor-
mera en tout aux Re^lemcns de la Librairie , ôc no-
tamment à celai du 10 Avril 171 f j qu'avant de l'expo-
fer en vente , le manuferit qui aura fervi de copte à Visam
orefiiondudit Ouvrage fera remis dans le même état oà
l'Approbation y aura été donnée es mains de notre très-
cher & féal Chevalier , Chancelier de France , le Sieuc
Dfii*uotCNOW,frgttil en-fer» enfuite remis deux exem-
Slaircs dans notre. Bibliothèque publique» un dans celle
e nacre Caaceaa-duLouvre , te un dans celle de notredit
très-cher ôc féal Chevalier Chancelier de*f rance , le iïeur
(DtLAMotGKOM -, le tout à peine de nullité des Préfentes t
du contenu defquélks vous mandons & enjoignons de fai-
re jouir ledit Expofant ôc lès ayans caufes pleinement Se
toaifiblement, fans foufrrir qu'il leur foit fait aucun trou-
ble ou empêche ment: Voulons que la copie des Préfentes,
qui fera imprimée tout au long au commencement ou &
la fin dudit Ouvrage , foit tenue pour daeraem fignifiée,
& qu'aux Copies collarionées par l'on de nos amés 9&
féaux ConfeilUrs-Séccecaîres , foi foit ajoutée comme à
rOriginaLCommandoos-aupreniiernotre Huimer ou Ser-
gent fut ce requis, défaire pour 1 exécution d'icelles tous
a&es requis Se nécellaires , fans demander autre .permjf-
fion, fie nonobftant clameur de Haro,Ciurte Normande,
& Lettres à ce contraires: C An teleft notre plaiûr.DoNNé
àVcr&illesle vingt-husciéiac jour du mois de Décembre;
Tan de grâce nul fept cent cinquante - fept , & de notre
règne le quarante ti oidéme. Par le Roi en fan ConfeH.
LE BÈGUE.
Regiflré fur It Rogiftrê XI V% dt U Chambre Royale
des Ubr tires & Imprimeurs Je Paris , N". If S, fol. 151,
conformément 4» Règlement de 1713. qui f*i$ dei
ftnfti* Art. 4 , À toutes perfûnnet it quelques optâtes
& conditions q**eil*s fotent , outres qut tes Liontires & Im-
primeurs, de vendre, débiter & faire tffiihtr aucuns Livres,
pour les vendre en leurs nome , fthesuSls s* en difent les
Auteurs , ou autrement -y& aU charge de fournir à U C*f-
dite Chambre neuf exemplaires , prefenti par PArr. 10& du
mime Règlement. A Paris* U % Janvier , 17^8,
Signé, P. G. LE MERCIER, fyxfc
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